Peuples autochtones et communautés locales : au cœur de la biodiversité mondiale
Un nouvel organe de la Convention sur la diversité biologique (CDB) consacré aux peuples autochtones et communautés locales (PACL) se réunira pour la première fois en octobre 2025. Sa création, décidée lors de la 16e Conférence des Parties (COP16) à Cali, en Colombie, marque une étape majeure dans la reconnaissance du rôle que jouent ces peuples dans la préservation de la biodiversité des territoires qu’ils habitent et utilisent.
L’article 8(j) issu du traité de la CDB, dont cet organe assure désormais la mise en œuvre, invite chaque pays signataire à « respecter, préserver et maintenir » les connaissances et pratiques des communautés autochtones et locales qui contribuent à la conservation et à l’utilisation durable de la diversité biologique. Il encourage également le partage équitable des avantages issus de ces savoirs.
Cette disposition consacre juridiquement ce que certaines études et expériences locales suggèrent : les peuples autochtones et les communautés locales seraient d’excellents gardiens de la biodiversité. Leurs savoirs, leurs pratiques agricoles, forestières ou maritimes, ainsi que leur rapport culturel et spirituel à la nature, peuvent participer aux équilibres écologiques et du maintien des écosystèmes, moyennant un évitement de l’intensification de leurs pratiques.
Depuis trois décennies, la reconnaissance des PACL s’étend dans plusieurs instruments juridiques internationaux, du Protocole de Nagoya (2012) à l’Accord des Nations Unies sur la haute mer (2023), en passant par le Traité de la FAO sur les ressources phytogénétiques (2004). Tous soulignent l’importance d’associer les communautés locales aux décisions relatives à la gestion des ressources naturelles.
En France, cette reconnaissance s’incarne dans le droit par la notion de « communautés d’habitants », inscrite dans le Code de l’environnement et le Code du domaine de l’État. Ces communautés, présentes notamment en Guyane et à Wallis-et-Futuna, tirent traditionnellement leurs moyens de subsistance du milieu naturel. Elles bénéficient de mesures spécifiques, comme la création de zones d’usage collectif, la reconnaissance de droits territoriaux ou la participation aux instances de gouvernance locale.
Ainsi, le Parc naturel régional de Guyane inclut dans son conseil d’administration des représentants de l’autorité coutumière et s’appuie sur une charte valorisant les savoirs et expressions culturelles traditionnelles.
Le nouvel organe subsidiaire de la CDB, baptisé SB8j (pour Subsidiary Body on Article 8(j)), aura pour mission d’assurer la pleine participation des peuples autochtones et communautés locales à la mise en œuvre du cadre mondial pour la biodiversité de Kunming-Montréal. Adopté lors de la COP16, ce programme s’étend jusqu’en 2030. Ses travaux porteront sur plusieurs axes : les contributions des PACL à la mise en œuvre des efforts de conservation, de restauration et d’utilisation durable de la biodiversité ; le partage juste et équitable des avantages issus de l’utilisation des ressources génétiques associées aux savoirs traditionnels ; les savoirs et la culture, le renforcement de la mise en œuvre et de son évaluation, ; la participation pleine et effective des PACL ; les approches fondées sur les droits humains ; et enfin l’accès direct au financement.
Ce moment fondateur se concrétisera du 27 au 30 octobre 2025, lors de la première réunion du SB8j, organisée au Panama. Si le SB8j a la charge de mettre en œuvre le programme de travail validé lors de la COP 16, l’enjeu principal de cette première réunion sera d’adopter un mode opératoire garantissant des discussions équitables, inclusives et représentatives tout en reconnaissant la prise en compte de la contribution des territoires autochtones dans la planification spatiale, la restauration et la conservation, et en facilitant l’accès des communautés aux financements internationaux.
La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) participera à cette rencontre, au sein de la délégation française, pour soutenir l’élaboration de ces nouvelles règles de gouvernance destinées à donner toute leur place aux peuples autochtones et communautés locales dans la protection mondiale de la biodiversité.