Biodiversité ! L’Océan, demain.

 

La revue Biodiversité ! poursuit son exploration des liens entre l’humain et l’ensemble du vivant. Après deux premiers volumes, ce troisième opus paraît autour d’un thème essentiel et urgent : l’avenir de l’Océan.

 

Disponible dès aujourd’hui en précommande, ce nouveau numéro propose un regard croisé entre scientifiques, explorateurs, anthropologues et artistes pour repenser notre rapport à l’Océan, non plus comme une ressource, mais comme un partenaire vivant et fragile.

 

 

 

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Dans un monde marin en pleine mutation, où la montée des eaux, l’acidification, l’effondrement des espèces et les pollutions multiples menacent les équilibres planétaires, une chose devient claire : il ne suffit plus d’alerter. Il faut désormais imaginer. Imaginer de nouveaux récits, de nouvelles alliances, de nouvelles manières de coexister. Les voix réunies dans ces pages — scientifiques, artistes, explorateurs, mais aussi celles que nous avons choisies de prêter aux animaux marins eux-mêmes — convergent vers une même intuition :

 

 

Pour préserver l’Océan, nous devons d’abord changer notre manière de le voir. Sortir du prisme de l’utilité, renouer avec l’émerveillement, accepter de ne pas tout comprendre, reconnaître l’altérité du vivant.

 

 

 

 

· S O M M A I R E · 

 

Edito · Partie 1. L’océan pour la Nature – Entretien avec François Sarano, océaonographe – Qui sont les “mal aimés” de l’Océan ? – Réveiller l’empathie pour les océans : un enjeu pour l’avenir de la planète – Réduire les collisions avec les baleines : une urgence environnementale inspirée du ciel · Partie 2. L’océan comme culture – Entretien avec Frédérique Chlous – Rahui : quand une pratique ancestrale polynésienne protège l’océan – Requins et communautés locales : une alliance pour préserver les océans – Les Haenyeo de Jeju : gardiennes de la mer, héritières d’un monde durable · Partie 3. L’océan pour la société – Entretien avec Céline Liret, directrice scientifique et culturelle et conservatrice d’Océanopolis – Changement climatique et pêche : quelles perspectives pour la biodiversité marine ? – Comment rendre les initiatives côtières plus équitables et résilientes face aux défis climatiques – L’observation des cétacés en Méditerranée : une activité sous haute surveillance · Récit : “Le rêve de l’albatros”.
 

 

 

Consulter le dossier de presse 

 

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À travers les paroles de François Sarano, Frédérique Chlous, Céline Liret et Tamatoa Bambridge, nous esquissons une carte sensible de l’Océan du futur, un futur où il ne s’agit plus seulement de préserver, mais de prendre soin. Un futur où la biodiversité n’est pas un stock, mais une relation. Un futur, enfin, où l’Océan redevient ce qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être : un bien commun, une mémoire vivante, une promesse partagée.

 

 

 

 

 

 

· C H E R C H E U S E S  &  C H E R C H E U R S  · 

 

Tamatoa Bambridge, anthropologue et directeur de recherche au Criobe · Céline Liret, docteure en océanologie biologique, directrice scientifique à Océanopolis · François Sarano, docteur en océanographie, plongeur professionnel, ancien conseiller scientifique du Commandant Cousteau et cofondateur de l’association Longitude 181 · Frédérique Chlous, professeure d’anthropologie, directrice générale déléguée à la recherche, l’expertise, la valorisation, l’Enseignement au Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) · Hélène Soubelet, directrice de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB)

 

 

 

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Les îles : joyaux de biodiversité en péril

La théorie de l’évolution a fait ses premiers pas sur une île – et ce n’est pas un hasard. En 1835, lors de son voyage aux Galápagos, Charles Darwin observe des pinsons avec attention. Ce sont les différences dans la forme de leur bec d’une île à l’autre qui le mettront sur la piste des mécanismes évolutifs (lire la clé pour comprendre sur l’évolution darwinienne).

Les îles sont de véritables joyaux de biodiversité. Leur isolement géographique, combiné à des conditions écologiques particulières, favorise l’émergence d’espèces uniques, souvent endémiques. C’est pourquoi, bien qu’elles ne représentent que 7 % des terres émergées, les îles abritent près de 20 % de la biodiversité mondiale. Cette richesse est également d’une très grande vulnérabilité : les trois-quarts des extinctions contemporaines enregistrées ont eu lieu sur des îles.

 

 

Pourcentages clefs de comparaisons entre les îles (bleu) et les continents (vert). Détail des sources dans Fernández-Palacios et al. 2021.

 

 

Ce contraste entre biodiversité exceptionnelle et vulnérabilité extrême est précisément ce qu’explore le groupe FRB-Cesab Rivage, qui propose un cadre spécifique d’évaluation des milieux insulaires (Bellard et al. 2025). Mais avant d’y revenir en détail, prenons le temps de comprendre : Alors, comment ces îles si riches en vie peuvent-elles être si fragiles ?

L’extraordinaire biodiversité des îles s’explique par leur isolement, mais c’est précisément cette particularité qui rend leurs écosystèmes fragiles. On parle ainsi du « syndrome des îles ». De nombreuses espèces insulaires ont évolué dans des environnements dépourvus de certains prédateurs ou compétiteurs, ce qui les a conduites à perdre des défenses devenues inutiles (on peut penser au fameux dodo de l’île Maurice ou encore au cagou de Nouvelle-Calédonie, qui sont des oiseaux ayant perdu la capacité de voler).

Qui dit petits territoires dit également petites populations, ce qui limite fortement la diversité génétique et donc la capacité d’adaptation face aux perturbations. Enfin, un environnement isolé implique une mobilité réduite. En cas de menace, les individus ne peuvent pas fuir vers d’autres territoires plus accueillants.

 

Dodo de l’île Maurice (éteint) et cagou de Nouvelle-Calédonie (statut UICN en danger). © Violette Silve.

 

 

À cette vulnérabilité intrinsèque s’ajoutent des pressions extérieures qui s’intensifient :

  • Le changement climatique, incluant la hausse globale des températures mais aussi la montée du niveau des mers, problématique particulièrement importante pour les îles,
  • Les changements d’usage des terres — qu’il s’agisse d’urbanisation, d’agriculture intensive ou d’exploitation touristique — qui réduisent et fragmentent encore davantage les habitats disponibles,
  • L’activité humaine croissante qui se traduit notamment par la surexploitation des ressources ainsi que par la pollution,
  • Et, enfin, l’introduction volontaire ou accidentelle d’espèces venues d’ailleurs. Prédateurs, herbivores ou concurrents, elles bouleversent les équilibres écologiques en s’attaquant à des espèces qui n’ont pas développé ou ont perdu des capacités pour leur « résister » (ce qui fait écho au syndrome des îles évoqué précédemment). On parle alors d’espèces exotiques envahissantes, ou encore d’invasions biologiques.

 

 

Les invasions biologiques : une menace mondiale pour les vertébrés terrestres

Dans une publication préliminaire à la création du groupe FRB-Cesab Rivage (Marino et al. 2024), des scientifiques ont croisé les données sur 1 600 espèces d’animaux terrestres (oiseaux, mammifères et reptiles) avec celles de 304 espèces exotiques envahissantes connues pour leur nuire. Ils estiment qu’au moins 38 % des terres émergées sont déjà concernées par ces invasions — un chiffre probablement sous-estimé, l’étude ne prenant en compte que 10 % des espèces envahissantes recensées dans le monde.

Mais être exposé ne signifie pas forcément être en danger. Pour mieux cerner la situation, les scientifiques ont aussi considéré la sensibilité des espèces natives à cette menace. Cette approche leur a permis de dresser des cartes mondiales de vulnérabilité aux invasions biologiques. Le constat est clair : les îles apparaissent comme les zones les plus fragiles, particulièrement pour les populations d’oiseaux qui y vivent. Les analyses semblent montrer des zones épargnées par les invasions biologiques, mais cela pourrait être dû aux manques de données et d’informations. Un angle mort dans la collecte de données, préoccupant pour la conservation de la biodiversité à l’échelle mondiale

 

 

 

Pourtant, même si la biodiversité des îles joue un rôle crucial, elle reste largement ignorée dans les évaluations globales, qui se concentrent surtout sur les continents et le climat. Par exemple, dans la Convention sur la diversité biologique (CDB), seule 1 cible sur 23 cite explicitement les îles comme priorité pour la conservation.

Dans ce contexte, il devient urgent de mieux évaluer la vulnérabilité des écosystèmes insulaires. C’est précisément l’objectif du groupe FRB-Cesab Rivage, qui propose dans son premier article un cadre d’évaluation inédit spécifiquement adapté à la biodiversité insulaire (Bellard et al. 2025).

Ce cadre évalue la vulnérabilité selon trois dimensions :

  • L’exposition : à quel point les espèces ou leur environnement sont confrontés aux pressions (par leur intensité, leur ampleur ou leur fréquence),
  • La sensibilité : dans quelle mesure ces espèces réagissent aux pressions en fonction de leurs caractéristiques biologiques et écologiques,
  • La capacité d’adaptation : leur aptitude à s’ajuster aux nouvelles conditions par des changements écologiques rapides. Pour les animaux, la capacité d’adaptation dépend de leur mobilité. Pour les plantes et les organismes fixés, elle se mesure plutôt par leur capacité à se maintenir (avec par exemple une forte fécondité et dispersion des graines). Cette capacité d’adaptation peut aussi dépendre de facteurs extérieurs comme la qualité, la disponibilité, la protection ou le degré d’accessibilité de l’habitat.

La vulnérabilité globale de la biodiversité peut ainsi être définie comme la somme de l’exposition et de la sensibilité, à laquelle on soustrait la capacité d’adaptation des espèces.

 

Contrairement à d’autres approches qui considèrent souvent une seule pression à la fois (le plus souvent le changement climatique, ou plus récemment les invasions biologiques avec l’article de Marino et al. 2024), le cadre proposé par Rivage intègre plusieurs pressions simultanément, en incluant leur intensité et leur ampleur, tout en tenant compte des caractéristiques propres aux espèces et de leur capacité d’adaptation. Cet outil vient ainsi compléter des indicateurs plus globaux, comme le pourcentage d’espèces menacées dans la liste rouge de l’UICN. L’objectif n’est pas de reproduire les mêmes résultats, mais de mettre en évidence les différences entre approches afin d’affiner l’analyse et de guider l’action là où l’urgence est la plus grande. Une comparaison détaillée entre l’indice de Rivage et les indicateurs existants est d’ailleurs présentée dans leur prochain article, accessible dès à présent en preprint (Marino et al. in review).

 

En proposant cet indice adapté aux spécificités des écosystèmes insulaires, les scientifiques du groupe Rivage appellent à agir pour mettre les îles au cœur des priorités.

 

 

 

En savoir plus sur le groupe FRB-Cesab Rivage :

Biodiversité, eau, alimentation, santé, climat : tout est lié !

À l’occasion de ce lancement, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) a choisi de mettre en avant, en s’appuyant sur des articles scientifiques majeurs publiés ces dernières années, la chaîne de causalité qui relie ces différents domaines. Comment la disparition des chauves-souris aux États-Unis a-t-elle entraîné une augmentation de la mortalité infantile ? Pourquoi le gaspillage alimentaire, aujourd’hui troisième plus grand émetteur de gaz à effet de serre après la Chine et les États-Unis, a-t-il un impact environnemental majeur ? Comment la gestion de l’eau à l’échelle mondiale menace-t-elle à la fois la biodiversité aquatique et les écosystèmes terrestres ? Ou encore, pourquoi la menace que fait peser le changement climatique sur les coraux compromet-elle les services cruciaux qu’ils fournissent, notamment la sécurité alimentaire ? 

  

Ces exemples illustrent comment les crises liées au changement climatique, à la biodiversité, à l’eau, à la santé et à l’alimentation sont indissociables. Chacune de ces dimensions est une pièce du puzzle qui façonne notre avenir. Il est devenu essentiel de comprendre que les perturbations dans l’une d’entre elles entraînent des répercussions immédiates sur les autres. 

 

 

Les chauves-souris en déclin : une cascade de conséquences économiques, agricoles et sanitaires 

 

La disparition des chauves-souris au nord des États-Unis provoque des effets en chaîne sur l’agriculture, l’économie et la santé publique. Leur rôle crucial dans la régulation des insectes est irremplaçable : sans elles, les agriculteurs ont intensifié l’utilisation d’insecticides, bien moins efficaces. Résultat : une baisse de la qualité des récoltes, une perte de 28,9 % des revenus agricoles (26,9 milliards de dollars) et des conséquences délétères sur la santé infantile. Les dommages combinés pour l’agriculture et la santé s’élèvent à 39,4 milliards de dollars. Ce lien de causalité illustre l’interdépendance entre biodiversité et bien-être humain. 

 

Article source : 

Eyal G. Franck et al. (2024) The economic impacts of ecosystem disruptions: Costs from substituting biological pest control. Science 

DOI: 10.1126/science.adg0344 

 

 

 

Gaspillage alimentaire et dégradation des ressources : l’impact caché de nos habitudes de consommation 
 

Le gaspillage alimentaire, qui comprend les pertes à différents stades de la chaîne d’approvisionnement — production, manutention post-récolte, transformation, et distribution — a des conséquences écologiques et sociales importantes. Réduire ce gaspillage de moitié permettrait de préserver 12 % des ressources mondiales en eau, diminuer les émissions de gaz à effet de serre de 4 %, et nourrir jusqu’à 1,9 milliard de personnes supplémentaires. Ces chiffres illustrent le lien de causalité entre nos habitudes de consommation, les pertes alimentaires et l’épuisement des ressources planétaires. 

 

Article source : 

Kummu et al. (2012) Lost food, wasted resources: Global food supply chain losses and their impacts on freshwater, cropland, and fertiliser use. Science of the Total Environment  

DOI: 10.1016/j.scitotenv.2012.08.092 

 

 

 

Les interconnexions vitales : l’eau douce, le climat, l’agriculture et la biodiversité et le bien être humain 

 

L’eau douce, la biodiversité, la santé humaine, le changement climatique et la sécurité alimentaire forment un réseau de relations interdépendantes. La surexploitation de l’eau pour l’agriculture entraîne une dégradation des écosystèmes aquatiques, accentuée par la pollution chimique et l’introduction d’espèces invasives. Ces pratiques contribuent au changement climatique, qui, à son tour, exacerbe la perte de biodiversité et fragilise la sécurité alimentaire. En retour, cette fragilité accroît les risques pour la santé humaine, soulignant un cercle vicieux où chaque perturbation alimente les déséquilibres globaux. 

 

Article source : 

Carpenter et al. (2011) State of the World’s Freshwater Ecosystems: Physical, Chemical, and Biological Changes. Annual Review of Environment and Resources

DOI : 10.1146/annurev-environ-021810-094524 

 

 

Du corail à la fourchette : les effets de la dégradation des récifs coraliens par le changement climatique sur la biodiversité et la sécurité alimentaire 

 

Les récifs coralliens, sous la pression croissante du changement climatique, subissent une dégradation alarmante. Ces écosystèmes abritent une biodiversité exceptionnelle et jouent un rôle essentiel dans la sécurité alimentaire, fournissant des ressources à des millions de personnes. Leur déclin entraîne une diminution des services écosystémiques, compromettant les stocks de poissons et les moyens de subsistance des communautés côtières, tout en fragilisant les équilibres environnementaux globaux. 

 

Article source : 

Hughes et al. (2017) Coral reefs in the Anthropocene. Nature 

DOI : 10.1038/nature22901 

 

 

[FRB-Cesab] Fishglob : La biodiversité des poissons dans un contexte de changement global

Le changement global, lié au climat et aux impacts anthropiques directs, entraîne une redistribution des espèces marines à travers le monde, modifiant la composition taxonomique des communautés et de leurs traits. Ces changements peuvent avoir de forts impacts sur la biodiversité des poissons et les services écosystémiques associés. Cependant, notre capacité à évaluer et à suivre les changements à court et à long terme de la distribution des espèces et leur biodiversité au niveau local à global est entravée par la disponibilité et l’hétérogénéité des données.

Cette conférence organisée par le FRB-Cesab a présenté les activités du groupe de travail Fishglob, qui a collecté et combiné un ensemble de données unique provenant de campagnes scientifiques de chalutage effectuées régulièrement au cours des dernières décennies à travers le monde. Les sujets abordés ont inclu le groupe de travail Fishglob et les caractéristiques de leurs données, la méthode d’imputation pour les traits d’espèces manquants, les évaluations de la liste rouge, les effets des vagues de chaleur marine, l’homogénéisation/différenciation des assemblages d’espèces au fil du temps, les conséquences sur les stocks de poissons partagés entre les pays et la gestion des pêcheries

Pour finir, Fishglob visait à fournir une infrastructure renforçant la coopération internationale et le transfert de connaissances entre les fournisseurs de données, les scientifiques et les parties prenantes afin de soutenir l’adaptation de la gestion de la biodiversité et des pêcheries en période de changement global.

 

 

Vous avez raté la conférence ? Vous souhaitez (re-)voir une présentation ? L’intégralité de la conférence est disponible sur la chaîne Youtube de la FRB !

 

[Appel à prestataire] Désignation d’un prestataire pour réaliser une revue de littérature sur les impacts des chaînes de production-consommation de produits de la mer européens sur la biodiversité et la société.

Au service de l’objectif “Connecting R&I programs, results and experts to policy” de Biodiversa+, la sous-tâche 4.1.2 “Desk studies and production of knowledge syntheses” de Biodiversa+, pilotée par la Fondation Française pour la Recherche sur la Biodiversité (FRB), publie un marché pour la réalisation d’une synthèse de connaissances afin de fournir un état de l’art sur les impacts des chaînes de production-consommation de produits de la mer européens sur la biodiversité et la société. La FRB nommera le bénéficiaire – après le processus d’évaluation – le 7 Février 2025.

 

POUR CANDIDATER

 

La date de clôture des candidatures pour ce marché est fixée au 27 janvier 2025 à minuit. 

 

Toutes les réponses à ce marché devront être en anglais et envoyées par email à :

 

Plus d’informations :

> Cahier des charges

> Formulaire de candidature

ATLASea : un atlas de génomes marins

Qu’est-ce que le projet PEPR ATLASea ?

 

Avant de s’intéresser à le définir, il est important de comprendre pourquoi il est important ! Les approches systématiques sont cruciales afin de dresser des inventaires de biodiversité, notamment pour obtenir des génomes. Le génome est comme une pelote de laine compacte dans le noyau des cellules, où chaque fil d’ADN porte des instructions qui codent le vivant. Séquencer un génome, c’est dérouler et enregistrer toutes ces informations.

 

Au niveau international, l’échelle génomique est en pleine activité, avec des nombreux projets globaux tels que :

 

C’est dans ce cadre, en tant que contribution dans ces initiatives plus générales, que la France a choisi de participer à l’effort international en lançant un PEPR (Programme et Équipement Prioritaire de Recherche). Ce dispositif français, dédié au financement de la recherche publique, s’inscrit dans le plan France 2030. Nous avons eu la chance d’être sélectionnés pour le programme ATLASea, dont l’objectif est de séquencer, sur une période de huit ans, le génome de 4 500 espèces marines de métropole et des territoires ultramarins.

 

 

Ce projet AtlaSEA est coordonné par Hugues Roest Crollius, chercheur au CNRS et Patrick Wincker, directeur du Génoscope. Le Génoscope est le centre national de séquençage qui s’est chargé il y a plus d’une vingtaine d’années du génome humain et qui est désormais largement tourné vers le séquençage de la biodiversité. Il y a également de nombreux partenaires qui viennent étayer ce projet, et qui unissent leurs forces afin d’explorer la biodiversité marine que l’on connaît encore mal.

 

 

Comment vous y prenez-vous pour construire cet Atlas ?

 

Le projet ATLASea s’articule en trois chevrons :

  • DIVE-Sea : récolte des données, référence des spécimens. C’est la partie que je coordonne ! Le tout est ensuite transféré au deuxième chevron …
  • SEQ-Sea : s’occupe du séquençage et de l’annotation des génomes, une étape qui est réalisée Génoscope.
  • BYTE-Sea : réalise la mise à disposition et l’analyse des génomes obtenus. Cette étape est coordonnée par le CNRS, l’IFB et d’autres partenaires.

 

 

Nous nous concentrons exclusivement sur la biodiversité française, en échantillonnant tout au long de la Zone Économique Exclusive (ZEE). La carte ci-dessus montre l’étendue des données dont nous disposons actuellement. La majorité de ces données est concentrée le long des côtes, avec quelques radiales correspondant aux campagnes récurrentes de l’Ifremer pour évaluer les stocks halieutiques. En effet, pour le projet ATLASea nous nous appuyons sur des moyens à la mer existants, c’est-à-dire ceux des stations marines ainsi que ceux mobilisés par les campagnes Ifremer. Notre échantillonnage est structuré par l’exploration de divers gradients, tels que les zones de transition terre-mer ou encore les différents niveaux de préservation.

 

En métropole, nous prévoyons de séquencer 3 900 génomes, auxquels s’ajouteront 600 génomes issus des zones ultramarines. L’année dernière, nous avons déjà mené une campagne d’échantillonnage en Nouvelle-Calédonie, et je me prépare à partir pour les îles périphériques de la Guadeloupe. D’autres campagnes sont également prévues, notamment à Saint-Paul et Amsterdam, en Polynésie, à Mayotte… Autant de territoires fascinants que nous avons à cœur d’étudier.

 

 

Vous dites séquencer 4 500 espèces, est-ce que c’est beaucoup, ou en tous cas suffisant pour représenter la biodiversité marine ?

 

Effectivement, la question mérite d’être posée ! Le long des côtes métropolitaines, l’Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN) répertorie 13 600 espèces, dont plus des trois quarts sont des animaux. Le quart restant se compose de plantes (comme la posidonie de Méditerranée ou les algues vertes et rouges), de chromistes, de champignons, et de quelques unicellulaires. Nous souhaitons explorer chacune de ces lignées pour produire des génomes.

 

Le saviez-vous ?

La biodiversité animale recouvre une grande diversité de groupes taxonomiques. Chez les organismes marins, les arthropodes sont le groupe le plus représenté, suivis par les mollusques, les annélides, et enfin les chordés, qui incluent les poissons. Lorsque l’on évoque la “biodiversité marine”, on pense souvent aux poissons, mais en réalité, il faudrait d’abord penser aux crevettes, aux vers et aux mollusques !

 

La vie est apparue dans les océans, et de nombreuses lignées ne se trouvent que dans le milieu marin. D’un point de vue phylogénétique, il est donc extrêmement intéressant pour nous de pouvoir produire des génomes pour chacun de ces grands groupes.

En définitive, nous travaillons, bien sûr, sur les groupes taxonomiques les plus représentés, mais nous veillons également à échantillonner au sein de chaque groupe pour refléter au mieux la diversité du vivant.

 

 

Concrètement, comment se passe la récolte de données sur le terrain ?

 

Nous allons chercher les organismes sous l’eau soit en plongée soit à l’aide d’engins tels que des dragues de 80 cm, puis nous les ramenons à terre où nous avons mis en place une chaîne de tri. Les échantillons ramenés sont fractionnés par classe de taille à l’aide d’une série de tamis. Chaque fraction de taille est triée par grand phylum puis les taxonomistes identifient les spécimens le plus finement possible. Ensuite chaque spécimen vivant est photographié, afin de conserver une information sur ses couleurs avant d’être conservé dans l’alcool qui les fait disparaître. Nous nous attachons donc à documenter toutes ces étapes.

 

 

Pourriez-vous nous donner un exemple de toute cette chaîne de procédés, de la capture sur le terrain jusqu’à la mise en ligne du génome ?

 

Bien sûr ! Je vous invite à me suivre à travers le parcours de la praire Venus verrucosa, un mollusque bivalve, et première espèce intégrée dans le projet ATLASea.

 

Source : Dominique Horst

 

En avril 2022, ce spécimen a été récolté sur le terrain, à la station marine de Roscoff. Après la récolte, une phase d’identification a eu lieu avec le soutien de notre réseau de taxonomistes (pour la praire, cette étape n’était pas trop complexe). Ensuite est venu le séquençage du génome. Comme le séquençage est une initiative internationale, nous devons d’abord vérifier que la praire n’est pas déjà en cours de séquençage dans un autre projet. Il s’est avéré qu’elle faisait partie des espèces d’intérêt pour le projet Darwin Tree of Life, mais comme nous avons été les premiers à la collecter, nous avons pu lancer notre propre séquençage.

 

Les spécimens ont été photographiés, puis le Génoscope a pris le relais. Les tissus ont été prélevés avec soin pour éviter toute contamination, puis l’ADN a été conservé à l’aide de la technique de congélation rapide (“flash freezing”). Cette méthode, qui consiste à plonger le spécimen dans de l’azote liquide et à le conserver à -80°C permet d’éviter la dégradation de l’ADN. Les tissus de cette praire ont ensuite été analysés avec différentes techniques de séquençage en parallèle pour établir son génome de référence. L’objectif est d’obtenir la carte chromosomique complète de chaque séquence, en utilisant la technique HiC, ainsi qu’une grande profondeur de séquençage pour garantir la précision des données. Pour annoter les génomes et comprendre la fonction des gènes, la méthode la plus efficace est d’extraire et séquencer l’ARN. Au total, au moins quatre séquençages différents sont réalisés en parallèle pour chaque spécimen.

 

Et voilà, notre praire est désormais le premier génome entièrement séquencé du projet ATLASea ! Elle est désormais répertoriée sur un tableau de bord public (ici !), où l’on peut retrouver le génome obtenu, ainsi que visualiser une carte de distribution de l’espèce, semblable à celles produites par le GBIF (Global Biodiversity Information Facility, soit le Système mondial d’information sur la biodiversité).

 

 

Ok j’ai compris, séquencez-les tous ! C’est bien beau, mais les séquencer pour quoi faire ?

 

Ce projet nous permet de plonger au cœur de la taxonomie, un enjeu majeur pour la recherche. Aujourd’hui, environ 250 000 espèces ont été découvertes dans le milieu marin, et chaque année, en moyenne, 2 700 nouvelles espèces s’ajoutent à cette liste. On estime que la biodiversité marine encore inconnue est aussi vaste que celle des milieux terrestres. Ainsi, on évalue qu’il reste environ 80 % de la biodiversité marine à découvrir.

 

Au-delà de l’intérêt taxonomique, cette vaste banque de données génomiques que nous construisons peut avoir de multiples applications, comme en phylogénomique ou encore en génomique comparative. Dans le cadre des PEPR, l’ANR va lancer des appels à projets thématiques que nous avons choisi d’articuler autour de deux axes :

  • L’étude des voies métaboliques menant à des molécules d’intérêt, un sujet de recherche fondamentale avec des applications biotechnologiques.
  • L’étude des espèces envahissantes, avec des applications plus orientées vers la conservation de la biodiversité.

Tant de possibilités intéressantes en perspective !

De l’efficacité des aires marines protégées à l’identification des freins à leur mise en place

Face à cette urgence, un constat s’impose : il est impératif de protéger la biodiversité marine. Dans ce contexte, la création d’aires marines protégées (AMP) est devenue une priorité mondiale. Toutefois, leur efficacité à protéger durablement la biodiversité reste une question complexe, soulevant des interrogations sur leur mise en place, leurs statuts et leurs impacts réels. Embarquons ensemble pour un périple au fil de l’eau, à travers des articles scientifiques publiés récemment et issus, pour la plupart, de travaux permis par la FRB à travers son Cesab.

 

 

 

[Océans] Tenir compte des besoins des populations autant que des objectifs de conservation pour un avenir plus durable

2025 s’annonce comme l’année de l’Océan en France avec comme point d’orgue l’organisation à Nice de la troisième conférence des Nations Unies pour l’océan. Un article paru ce vendredi dans la revue OneEarth illustre l’ampleur des défis, les scénarios possibles et les opportunités liées à la coexistence entre populations humaines et poissons récifaux. Le choix de ces poissons en particulier n’est pas un hasard : les récifs tropicaux peu profonds couvrent moins de 1 % des océans mais abritent environ un tiers de la biodiversité marine mondiale et apportent une contribution culturelle et alimentaire essentielle à plus d’un milliard de personnes. Emblématiques, ils sont néanmoins particulièrement affectés par les activités humaines. Le travail mené par un consortium international ouvre des pistes originales et propose une méthodologie qui pourrait aussi être appliquée aux écosystèmes terrestres. Il souligne l’importance des politiques de restauration de la nature dont les bénéfices sont multiples et synergiques : restaurer les populations, les communautés d’espèces, les fonctions écologiques, bénéficie à la fois à la biodiversité et aux humains.

 

 

En savoir plus

[Aires marines protégées] Des rares opportunités cartographiées à l’échelle globale

Les facteurs socio-économiques ayant plus d’influence que les facteurs environnementaux dans la mise en place des aires protégées, identifier les zones favorables et défavorables à l’implémentation de nouvelles aires protégées en tenant compte de ces critères permettra une stratégie de conservation plus réaliste et efficace.  

 

Pour obtenir ces cartes d’opportunités et de contraintes locales en conservation, le groupe de chercheurs comprenant des scientifiques de l’Université de Montpellier, de l’EPHE-PLS, du CNRS et du CEA a divisé la surface du globe en près d’un million de cellules de 10 x 10 km. Pour chacune de ces cellules ils ont obtenu des données relatives à des facteurs environnementaux mais aussi socio-économiques, en se basant sur plus de 18 bases de données mondiales différentes. Ces données ont servi à construire un modèle prédictif qui estime la probabilité qu’une zone du globe soit protégée en fonction des différents facteurs étudiés, qu’ils soient environnementaux (température, altitude, précipitations par exemple) ou socio-économiques (PIB, indice de développement humain, présence d’ONG locales etc.).

 

 

Résultats :

 

Même sans information sur la biodiversité d’une zone, il est possible d’inférer de manière très fiable la probabilité de présence d’une aire protégée en n’utilisant qu’un petit groupe de facteurs socio-environnementaux. Les facteurs socio-économiques montrent même une plus grande importance que les facteurs environnementaux dans ces modèles prédisant la mise en place de futures aires protégées. Par exemple l’indice de développement humain et le nombre d’ONG favorisent la présence d’aires protégées terrestres alors qu’en mer l’accessibilité et la dépendance aux stocks de poissons sont les principaux obstacles de blocage à la mise en place de nouvelles aires marines protégées.   

 

 

Ce modèle a ensuite été utilisé pour cartographier les zones où les besoins en conservation des vertébrés (poissons, mammifères et oiseaux) sont les plus urgents mais aussi celles où les facteurs socio-économiques limiteraient ou favoriseraient la mise en place d’une aire protégée. 

 

 

Retrouvez l'article

 

 

Pour aller + loin

 

Quid du devenir des zones de conservation prioritaires mais qui cumulent également les critères socio-économiques défavorable au statut d’aires protégées ? Bien souvent, les enjeux sociaux-économiques et les besoins des populations locales sont indissociables de la mise en place d’aires protégées. Ainsi, en Afrique et en Asie, certaines zones à haute valeur de conservation restent impossibles à protéger, face aux enjeux liés à l’utilisation des ressources naturelles. Implémenter les facteurs socio-économiques s’avère donc primordial pour optimiser la mise en place des zones de protection, dont les décisions actuelles se concentrent majoritairement sur les facteurs environnementaux qui influencent la biodiversité. Encore une preuve qu’assurer des conditions sociales et économiques minimales est un prérequis pour la mise en place de stratégies de conservation efficaces et durables.  

 

 

Aux acteurs et décideurs politiques maintenant de prendre pleinement la mesure des actions nécessaires pour parvenir à l’objectif de 30% d’aires protégées d’ici à 2030.  

 

Cette étude est le fruit d’un travail collaboratif animé par la FRB et son Cesab (Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité) au sein des groupes Pelagic et Parsec. Ce travail a été permis grâce aux financements de la ZSL, du WWF, de l’Université de Montpellier et aux Cesabbatic de Jessica Meeuwig et Tom Letessier.   

Journée FRB 2024 sur l’Océan du futur – Les actes

La Journée FRB 2024 a rassemblé des experts scientifiques, des décideurs et des acteurs de la société civile pour partager leurs connaissances et proposer des solutions face aux défis de la conservation de l’océan. Organisée en partenariat avec l’Institut océanographique – Fondation Albert Ier, Prince de Monaco, et l’Ifremer, cet événement s’est articulé autour du Nature Futures Framework (NFF), le cadre de scénarios futurs pour la nature, un concept de l’Ipbes. La Journée a été rythmée par les trois perspectives de ce NFF : la nature pour la nature, la nature comme culture et la nature pour la société. L’objectif ? Parvenir collectivement à un avenir plus soutenable pour l’océan. 

 

[FRB-Cesab] Mieux comprendre les communautés marines : le projet Maestro publie de nouveaux résultats

Souvent étudiés au niveau des espèces, les changements induits par les activités humaines et le changement climatique le sont bien plus rarement au niveau des communautés écologiques (ensemble des espèces peuplant un écosystème donné). Dans cet article, les auteurs et autrices ont évalué une grande quantité de données sur une vaste zone d’étude (8 écorégions dans le plateau continental Européen), une période temporelle étendue (1994 à 2019) et une large gamme d’espèces (513). L’accent mis sur les caractéristiques morphologiques, physiologiques, phénologiques ou comportementales des espèces (les traits fonctionnels), plutôt que sur leur identité se révèle plus pertinent pour comprendre comment les communautés sont façonnées par leur environnement. 

 

Les résultats confirment qu’en surface, les facteurs influençant les communautés de poissons sont la température, la salinité et la chlorophylle-a et la structure verticale de la colonne d’eau, tandis qu’au fond, les facteurs influençant les communautés de poissons sont la température et l’oxygène. Par ailleurs, les auteurs démontrent que dans les régions qui se réchauffent plus rapidement (la Méditerranée par exemple) les communautés de poissons contiennent des espèces avec une maturité sexuelle plus précoce, des temps de génération courts et la production de larves petites et pélagiques avec des taux de dispersion élevés. Dans les régions qui se réchauffent moins vite les communautés de poissons accueillent plus d’espèces à maturité sexuelle tardive et de niveau trophique élevé. Ces résultats permettent de mieux comprendre, par exemple, pourquoi des poissons comme la plie augmentent dans l’Atlantique Nord-est, alors que le merlu augmente en Méditerranée. 

 

Les approches générales comme celle-ci sont essentielles afin d’obtenir une vision globale de l’effet des perturbations sur les communautés de poissons : elles montrent qu’il est important de mesurer et de comprendre l’abondance et la composition des assemblages d’espèces locales, en plus de la présence-absence des espèces, pour améliorer la compréhension de la résilience climatique écologique des communautés de poissons et identifier des stratégies de gestion adaptative.

 

> Retrouvez l’article : Receveur, A., Leprieur, F., Ellingsen, K. E., Keith, D., Kleisner, K. M., McLean, M., Mérigot, B., Mills, K. E., Mouillot, D., Rufino, M., Trindade-Santos, I., Hoey, G. V., Albouy, C., & Auber, A. Long-term changes in taxonomic and functional composition of European marine fish communities. Ecography (2024).
https://doi.org/10.1007/s10531-023-02660-5

 

[Journée FRB 2024] L’océan du futur : Des impacts aux réponses pour un océan sain 

Entre pressions directes et facteurs indirects qui les aggravent, les scientifiques ont déjà mis en évidence les points de leviers pour envisager un avenir plus soutenable pour nos océans. Toutefois, mettre en œuvre les changements transformateurs nécessaires n’est pas trivial.

En partenariat avec l’Institut océanographique – Fondation Albert Ier – Prince de Monaco et l’Ifremer, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) propose, à travers sa Journée annuelle, d’explorer comment le cadre des scénarios futurs pour la nature, le Nature Futures Framework (NFF), peut permettre de mieux appréhender tous les enjeux de l’océan, avec une vision intégrative des relations nature-humains sous un angle nouveau, plus systémique.

 

Le Cadre pour l’avenir de la nature est un outil flexible qui vise à promouvoir l’élaboration de scénarios centrés sur la nature, et qui tiennent compte de la diversité des valeurs de la biodiversité, afin d’éclairer les options politiques. 

 

 

+ d'infos sur le NFF (ENG)

 

 

Le NFF se concentre sur trois grandes perspectives en termes de valeurs et de conceptions du monde : 

 

  • Avec la nature pour la nature :

Les usagers de l’océan considèrent la valeur intrinsèque des écosystèmes, leur intégrité, la diversité des espèces, des habitats et des processus associés.

 

  • La perspective nature en tant que culture :

Elle insiste sur les valeurs relationnelles de la nature, imbriquant sociétés, cultures, traditions et croyances et façonnant divers paysages bioculturels. 

 

  • Avec la nature pour la société :

L’accent est mis sur la modernité littorale, insulaire, technologique, les avantages utilitaires et les valeurs instrumentales que la nature et ses ressources fournissent aux acteurs économiques et aux sociétés.

 

Les actes et vidéos de la Journée

La pêche atteint les profondeurs mais la conservation marine reste superficielle

L’océan est un milieu tridimensionnel comportant une importante dimension verticale, la profondeur, qui structure des écosystèmes uniques et des usages humains spécifiques. Cependant, les outils de gestion et de conservation marine sont dominés par une représentation bidimensionnelle de l’océan, qui néglige cette stratification verticale. Si cette représentation réductionniste de l’océan était compatible avec des usages humains principalement côtiers, l’expansion de l’empreinte humaine vers la haute mer et l’océan profond nécessite une nouvelle approche prenant en compte cette complexité verticale. La prise en compte de la profondeur de l’océan est particulièrement importante étant donné les nouveaux objectifs des accords de Montréal-Kunming, notamment celui d’atteindre 30 % de couverture de protection marine d’ici 2030, ainsi que le récent traité international pour la gestion de la biodiversité en haute mer.

 

Dans ce contexte, des chercheurs du Criobe et de l’Université de Washington ont développé une nouvelle approche pour évaluer la distribution des impacts humains et des efforts de conservation à travers les trois dimensions de l’océan : latitude, longitude et profondeur. Pour ce faire, une typologie des principales unités écologiques à travers les profondeurs (Figure 1) est surimposée à une typologie bidimensionnelle des écorégions marines pour définir des écorégions tridimensionnelles.

 

Figure 1 : Profondeur atteinte par les activités de pèche par type d’engins. La profondeur des pictogrammes représentant chaque engin indique la profondeur maximale où ces engins opèrent.

 

À l’aide de cette nouvelle typologie, l’équipe a évalué la distribution tridimensionnelle mondiale des efforts de conservation et des activités de pêche, qui constituent aujourd’hui la principale pression humaine directe sur les écosystèmes marins. Les analyses s’appuient sur des bases de données publiques, telles que le Global Fishing Watch pour les activités de pêche, le World Database on Protected Area pour les efforts de conservation et le GEBCO pour les données bathymétriques.

 

Les résultats ont révélé que les différentes profondeurs de l’océan, qui correspondent à des écosystèmes uniques, bénéficient d’efforts de conservation très disparates. Alors que les écosystèmes les moins profonds (0 à 30 m) sont les mieux protégés, les écosystèmes plus profonds, notamment le mésophotique (30 à 150 m), le rariphotique (150 à 300 m) et les abysses (3500 à 6000 m), n’ont toujours par atteint l’objectif de 10 % de couverture de protection fixé par la Convention sur la diversité biologique (CDB) et qui aurait dû être atteint depuis 2020. Par contraste, l’empreinte 3D des activités de pêche s’étend à travers toutes les profondeurs, avec notamment 37 % des activités mondiales de pêche opérant dans l’océan profond, en-dessous de 300 m.

 

D’autre part, les résultats démontrent que les efforts de conservation sont disproportionnellement dirigés vers les aires où le moins d’activité de pêche ont lieu, un phénomène d’évitement dénommée ” conservation résiduelle “. Autrement dit, les aires les plus impactées par les pressions humaines demeurent le plus souvent sans protection. De plus, les aires marines de protection forte, où les régulations d’extraction sont strictes, et qui fournissent les bénéfices écologiques les plus importants, sont sous-représentées dans toutes les écorégions et à toutes les profondeurs, avec seulement 1,4 % de couverture à l’échelle mondiale.

 

Les faiblesses du réseau mondial d’aires marines protégées soulignées par cette étude appellent à une représentation plus holistique de l’océan, prenant en compte sa structure verticale et les processus complexes de connectivité reliant le pélagique au benthique. Améliorer la représentation écologique à toutes les profondeurs, augmenter la couverture de protection forte, et prioriser les zones les plus impactées par les usages humains doivent constituer la priorité des stratégies de conservation à l’échelle nationale et mondiale.

[Aires marines protégées] Une vaste étude sur la taille des poissons pour mieux comprendre l’impact des activités humaines et la pertinence des AMP

Dans une publication parue jeudi dernier dans le journal Science, Tom B Letessier, chercheur à la Société zoologique de Londres (ZSL), et ses collègues livrent les résultats d’une étude impressionnante sur la taille corporelle des poissons. Des données collectées pendant 14 ans ont été analysées, représentant environ 20 000 heures de vidéos sous-marines filmant près d’un million d’individus de 1460 espèces différentes. Un travail d’analyse complexe et de longue haleine mené en France au de synthèse et d’analyse de données sur la biodiversité, le Cesab, de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB). 

 

Recueillies grâce à des pièges caméras, ces données ont permis de comparer l’efficacité des zones protégées chez les populations de poissons pélagiques (vivant au-dessus du plancher marin comme les thons, sardines ou encore requins soyeux) et chez les populations de poissons benthiques (vivant sur le plancher marin tels que les raies, limandes ou labres). En effet, en mer, la taille des poissons donne de vraies indications sur leur place dans la chaîne alimentaire, et donc sur le fonctionnement de l’écosystème étudié.   

 

 

“Pour les populations pélagiques, l’effet des aires marines protégées (AMP) se conjugue avec leur distance de la côte : plus une AMP est éloignée de la côte, plus elle apparaît efficace pour protéger les poissons pélagiques. Ce résultat contraste avec les populations benthiques, pour lesquelles les AMP les plus efficaces se trouvent proches des côtes, et des activités humaines.” 

Tom B Letessier 

 

 

Cette étude rappelle la nécessité de répartir des aires marines protégées entre zones côtières et haute mer afin de permettre aux populations pélagiques, déjà surexploitées, de se restaurer, loin des activités humaines.  

 

 

Retrouvez l'article

 

 

Aller + loin : Aires marinées protégées et taille des poissons, un sujet scientifique d’actualité 

 

Pourquoi les poissons des zones benthiques et pélagiques ont-elles des réponses différentes aux activités humaines et à leur proximité ? Les raisons écologiques de ce phénomène sont encore mal connues. Une des hypothèses serait l’absence de « refuge » dans les zones pélagiques, alors que les zones benthiques, du fond de l’océan, offrent une protection aux individus les plus petits ou les plus jeunes, qui peuvent se cacher dans les algues.  

 

D’autres travaux soulignent la complexité des phénomènes écologiques impliqués. Une publication de Chen et al. parue dans PNAS en novembre 2023 montre qu’une augmentation de la survie des individus adultes en zone protégée peut avoir de nombreux effets en cascade et qui varient dans le temps : augmentation de leur taux de reproduction, de leurs densités et donc de leur compétition pour la nourriture, ce qui peut les inciter à sortir de ces zones plus tôt dans leur vie, selon la taille des aires protégées.

L’emplacement et la taille des aires marines protégées sont donc des facteurs fondamentaux à prendre en compte pour protéger au mieux la biodiversité marine.

 

[À vos agendas] Le 29 mai prochain, la Journée FRB vous emmène en mer !

La décennie des Nations unies (NU) pour les sciences océaniques et la conférence des NU sur l’océan qui se tiendra à Nice en juin 2025 s’annoncent décisives pour l’avenir de l’océan. Il y a en effet urgence. À lui seul, l’océan recouvre plus de 70 % de la surface de la planète et représente plus de 90 % du volume habitable pour le monde vivant. Des milliards de personnes à travers le monde dépendent de la biodiversité marine et côtière pour subvenir à leurs besoins (ressources alimentaires, culture, etc.). Pourtant, la plupart des activités humaines ont un impact majeur sur l’océan.

 

Entre pressions directes et facteurs indirects qui les aggravent, les scientifiques ont déjà mis en évidence les points de leviers pour envisager un avenir plus soutenable pour nos océans. Toutefois, mettre en œuvre les changements transformateurs nécessaires n’est pas trivial.

 

En partenariat avec l’Institut océanographique – Fondation Albert Ier – Prince de Monaco et l’Ifremer, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) propose, à travers sa Journée annuelle, d’explorer comment le cadre des scénarios futurs pour la nature, le Nature Futures Framework (NFF), peut permettre de mieux appréhender tous les enjeux de l’océan, avec une vision intégrative des relations nature-humains sous un angle nouveau, plus systémique.

 

Rendez-vous le 29 mai prochain, à la Maison de l’Océan (Paris Ve).
Événement sur inscription, accessible en présentiel et en distanciel

 

Inscrivez-vous ! 

De l’invasion au déclin : les mystères de la crépidule dans la rade de Brest

Comment est arrivée la crépidule sur les côtes françaises ?

 

La crépidule est arrivée par différents biais, mais majoritairement avec le commerce de l’huitre creuse. En important ces huitres, on a importé avec elles tout un cortège d’espèces exotiques qui étaient à l’état larvaire ou juvénile, cachées dans leurs coquilles. L’établissement de la crépidule date des années 70. Mais elle devient vraiment envahissante dans les années 80 et 90. On la retrouve sur tout le littoral français, notamment dans la rade de Brest.

 

 

 

Quand la crépidule s’est multipliée quels impacts notables a-t-elle eu sur l’écosystème ?

 

La crépidule est un gastéropode qui a besoin d’un substrat dur et lisse pour se fixer, un rocher plat ou un débris de verre par exemple. Au début de son introduction, elle en a eu besoin mais comme elle s’est mise à proliférer, elle s’est étendue sur des fonds qui étaient meubles et s’est auto-entretenue du fait que les jeunes individus se fixent préférentiellement sur les chaines d’adultes, empilés les uns sur les autres. Elle a ensuite servi de support à des espèces qui aiment les substrats durs comme les ascidies, les éponges et certains bivalves comme le pétoncle noir, lequel est par ailleurs une espèce actuellement en déclin.

 

 

Outre le fait de servir d’habitat à d’autres espèces, la crépidule a-t-elle eu d’autres effets positifs ?

 

Les crépidules sont des organismes filtreurs qui se nourrissent en filtrant l’eau pour capturer des particules de nourriture, notamment des micro-algues. En filtrant activement l’eau, elles peuvent contribuer à réduire la turbidité, limitant ainsi les efflorescences de certaines espèces du phytoplancton, en particulier des dinoflagellés.

 

 

Inversement, en quoi la crépidule a déstabilisé les écosystèmes ?

 

Pour arriver à déstabiliser un écosystème entier, il faut dépasser un certain seuil en termes de densité ou de biomasse. C’est ce qu’il s’est passé dans certaines zones où sur un mètre carré, il a pu y avoir plusieurs milliers d’individus. Or, la crépidule est un animal filtreur qui, pour se nourrir et s’oxygéner, filtre une grande quantité d’eau de mer et produit beaucoup de fèces : dans ces conditions, elle a déstabilisé l’écosystème avec un envasement des fonds, y compris les fonds sableux qui sont devenus des fonds vaseux. Plusieurs espèces de fonds sableux comme la coquille Saint Jacques ou les juvéniles de soles ont donc reculé.

 

 

Il semblerait qu’après avoir prospéré sur nos côtes ses populations diminuent.

 

Depuis le milieu des années 2000, on constate effectivement un recul de la crépidule. En rade de Brest des investigations menées entre 2013 et 2018, des prélèvements sur le terrain et des vidéos sous-marines ont permis de démontrer clairement que le stock avait très significativement diminué en particulier dans tout le bassin sud de la rade. Elle semble néanmoins s’être maintenue dans le secteur nord de la rade. Si on ne sait pas exactement pourquoi elle recule, on a suspecté néanmoins des polluants arrivés du bassin versant du sud de la rade pour expliquer son déclin. Mais souvent, un déclin est multifactoriel et prend du temps.

 

 

Le fait que la crépidule décline en fait-elle une exception parmi les espèces exotiques envahissantes ?

 

Il semblerait que d’autres espèces comme la caulerpe (Caulerpa taxifolia) en méditerranée, considérée elle aussi comme envahissante, décline naturellement. Il y a plusieurs pistes d’investigation pour chercher à comprendre pourquoi. Il y a comme un cycle qui s’observe, où au bout de 20-30 ans, on voit des espèces proliférantes décliner. Sans doute parce que petit à petit d’autres interactions avec d’autres espèces s’opèrent. Elles sont alors contrôlées soit par des parasites soit par des prédateurs qui permettent à ces espèces exotiques envahissantes de trouver une place régulée dans l’écosystème.

 

 

Est-ce une loi ?

 

Non, car en milieu marin ou terrestre, il y a plusieurs exemples d’espèces proliférantes qui ont fait basculer irréversiblement l’écosystème dans un état différent. Par exemple des oursins, qui sont des herbivores, peuvent dévorer intégralement d’immenses champs d’algues qui laissent place à des fonds complètement nus. C’est vrai aussi dans des milieux tropicaux où des étoiles de mer ont décimé des récifs de coraux. Donc parfois, passé ce « point de bascule », on assiste à l’établissement d’un tout autre écosystème.

 

 

Quel est l’état aujourd’hui de la rade de Brest ?

 

La rade n’a pas retrouvé son état écologique d’avant l’arrivée de la crépidule. Il reste toujours des traces à commencer par les amas de coquilles de crépidules mortes dans la partie sud. Certes, elles servent encore de support à certaines espèces, mais la biodiversité y est beaucoup moins luxuriante que lorsque l’on avait des bancs de crépidules vivantes. La rade est par ailleurs impactée par diverses pollutions et par des activités humaines, comme la pêche aux engins trainants qui dégradent les habitats et remettent en suspension des particules. L’écosystème évolue sans cesse, s’adapte parfois, et il reste heureusement des zones dans cette rade où les écosystèmes fonctionnent toujours bien.

[Actualité] Deux nouveaux articles publiés dans des revues à comité de lecture !

  • Les espèces de poissons menacées dans l’Atlantique Nord-Est sont fonctionnellement rares
    dans Global Ecology and Biogeography

 

Les politiques actuelles de conservation et de protection de la nature sont principalement basées sur la démographie des espèces concernées.

   Depuis quelques années, des chercheurs travaillent sur la nécessité d’élargir le spectre des critères pris en compte en s’intéressant également à la rareté fonctionnelle des espèces présentes (cf communiqué Rareté écologique des oiseaux et des mammifères terrestres : la double peine). Cet article apporte une nouvelle pierre à l’édifice en ce sens en démontrant que 38 % des espèces de poissons menacées d’extinction dans les eaux continentales européennes (9 espèces sur 24) ont été identifiées comme étant les plus distinctes sur le plan fonctionnel, les moins abondantes et ayant les plus faibles répartitions géographiques. D’où l’importance de prendre en compte les caractéristiques, notamment fonctionnelles, des espèces dans l’élaboration de plans de gestion et de conservation.

 

Cet article est aussi le fruit d’une belle synergie entre trois groupes FRB-Cesab – Free (1 2), Maestro et FishGlob – qui fédèrent de nombreux partenaires à différents niveaux parmi lesquels : le MNHN, l’Ifremer, EDF, France Filière Pêche (FFP), le Centre de synthèse national du Canada en écologie et en évolution (CIEE), l’ambassade de France à Vancouver, etc.

 

>> Retrouvez l’article : Coulon, N., Lindegren, M., Goberville, E., Toussaint, A., Receveur, A., Auber, A. Threatened fish species in the Northeast Atlantic are functionally rare. Global Ecology and Biogeography (2023).
https://doi.org/10.1111/geb.13731

 

 

  • Analyse de la capacité à initier un changement transformateur : une méthodologie d’évaluation des stratégies en faveur de la biodiversité
    dans Biodiversity and Conservation, numéro spécial sur le changement transformateur

 

Cet article présente une méthode d’évaluation des politiques publiques de biodiversité développée par la FRB. Innovante, cette méthode se base sur deux phases majeures, à savoir : une expertise scientifique indépendante puis une analyse multicritère. Elle a ainsi pour objectif d’identifier, au sein d’une stratégie ou d’un plan d’action, les mesures ayant la plus grande capacité à faire levier, et ainsi conduire à des changements transformateurs dans l’ensemble de la société.

 

Un premier test de cette méthode a été proposé sur le premier volet pré-Cop15 de la SNB3, à retrouver ici.

 

>> Retrouvez l’article : Dupuis, L., Léandre, C., Langridge, J., Delavaud, A., Jactel, H., Soubelet, H. Analyzing the capacity to initiate transformative change: a methodology for assessing biodiversity strategies. Biodivers Conserv (2023).
https://doi.org/10.1007/s10531-023-02660-5

 

Écosystèmes marins des façades maritimes françaises : une revue rapide des “solutions possibles” pour minimiser les impacts environnementaux

L’activité anthropique a considérablement modifié la structure et le fonctionnement de tous les écosystèmes de la planète notamment en mer et sur littoral. Néanmoins, des solutions existent pour faire face à ces impacts. S’appuyant sur les résultats de la recherche, l’Ipbes a identifié cinq pressions directes sur la biodiversité ayant les incidences les plus lourdes à l’échelle mondiale. Il s’agit de la modification de l’utilisation des terres et des mers, de la surexploitation des ressources sur terre comme en mer, des changements climatiques, qui affectent tous les compartiments de l’environnement, des pollutions et des espèces exotiques envahissantes, qui perturbent les équilibres, notamment aux échelles locales.

 

Cette étude se focalise sur la réduction des principales pressions directes exercées sur la biodiversité pour renforcer l’efficacité des mesures proposées dans le cadre des documents stratégiques de façade qui définissent les objectifs de la gestion intégrée de la mer et du littoral. Pour ce faire, la FRB a effectué une extraction des solutions à partir d’articles de recherche récents afin de fournir une perspective récente sur des priorités pour trois principales pressions directes s’exerçant sur la biodiversité.

 

Les trois pressions directes présentées dans ce dossier  sont la modification de l’utilisation des mers, les pollutions et les espèces exotiques envahissantes. Les résultats de cette analyse ont été regroupés par pression et sont disponibles à travers trois fiches thématiques.

 

Réduire les impacts des changements d’usage des mers

On assiste à une augmentation des activités offshore telles que la production d’énergie, l’aquaculture, le tourisme, le développement des biotechnologies et l’exploitation minière (Stuiver et al., 2016) ou encore l’installation de plateformes multi-usages (MUPs). Ces activités font des mers européennes le théâtre d’une croissance massive des infrastructures maritimes et d’une compétition spatiale (Stuiver et al., 2016).

 

Parmi les activités offshores, la pisciculture en cages flottantes pose la question, à l’échelle européenne, des évasions (Arechavala-Lopez et al., 2018) qui recouvrent l’échappée de poissons isolés, de groupes de poissons (de quelques-uns au million), d’œufs viables et fécondés (Arechavala-Lopez et al., 2018). Elles se produisent en raison de défaillances techniques et opérationnelles (Arechavala-Lopez et al., 2018) :

  • morsure de filet par les poissons à l’intérieur ou par attaque de prédateurs à l’extérieur – environ 50 % des causes, particulièrement pour les daurades ;
  • contraintes mécaniques entrainant des trous dans les filets ou la rupture d’amarrage des cages – environ 40 % des causes, notamment lors de tempêtes ou de présence de grands mammifères marins ;
  • échappement lors des manipulations pour la collecte, le calibrage, etc. – environ 10 % des causes.

 

 

Le développement des énergies marines renouvelables (EMR) est également notable. Celles-ci peuvent fournir jusqu’à 7 % de la demande mondiale en électricité : la plupart via l’éolien offshore, l’énergie marémotrice pourrait répondre, quant à elle, à environ 0,75 % de cette demande (Fox et al., 2018). Si extraire l’énergie des courants de marées, prévisibles, est une idée séduisante, peu de sites conviennent pour les installations. Cependant, un grand nombre de dispositifs marémoteurs sont actuellement en cours de développement (Fox et al., 2018). En France, un déploiement expérimental a eu lieu au niveau du raz Blanchard, lieu de passage d’un intense courant de marée. Les principales préoccupations environnementales liées à ces dispositifs ciblent les perturbations physiques, les risques de collision, les modifications hydrographiques et la génération de bruits et de champs électromagnétiques (Fox et al., 2018). En termes de risques de pollution, on dispose de peu d’informations sur les revêtements anti-biofouling, c’est à dire contre l’encrassement biologique, qui devront être utilisés pour protéger les turbines, transformateurs et autres appareils (Fox et al., 2018).

 

 

L’augmentation du trafic maritime en général menace particulièrement les populations de cétacées, dites “espèces parapluie”, qui sont également confrontées à la perte d’habitat et aux pêcheries commerciales (Pennino et al., 2017). Le trafic maritime engendre des perturbations physiques et acoustiques qui peuvent provoquer, à court terme, des changements physiologiques et de comportement et, à long terme, des changements dans la distribution des cétacés. En outre, les collisions avec les navires sont régulièrement signalées. Des preuves de collisions ont été décrites pour 11 espèces de grandes baleines, pour lesquelles le rorqual commun (Balaenoptera physalus), était le plus fréquemment impliqué (Pennino et al., 2017). En particulier, la navigation de plaisance, en développement à travers le monde, est d’autant plus impactante, qu’elle est un des piliers de « l’économie bleue » ou la Blue Economy de l’Union européenne et a donc vocation à se développer : aujourd’hui, 36 millions de citoyens européens participeraient régulièrement à des activités de plaisance, le secteur du tourisme nautique de l’Union européenne créerait jusqu’à 234 000 emplois et génèrerait 28 milliards d’euros de recettes annuelles (Carreño et Lloret, 2021).

 

 

Enfin, du fait de l’augmentation de la population urbaine et du tourisme de masse, les zones côtières sont particulièrement touchées par une urbanisation rapide. À titre d’exemple, en région Provence-Alpes Côte d’Azur (Paca), un quart des zones qui ont été urbanisées au cours de la période 1990-2012 se trouvent dans les 15 premiers kilomètres de la côte (Doxa et at., 2017). Cette urbanisation entraine la perte d’habitats naturels. De plus, les habitats côtiers se distinguent souvent par une diversité végétale unique et une spécialisation élevée au sein de forts gradients écologiques à de petites échelles spatiales telle que l’adaptation à des niveaux stressants de salinité, de sécheresse et de température par exemple (Doxa et at., 2017). De nombreuses plantes sont donc très vulnérables à la diminution de leurs habitats : cela rend la priorisation des actions de conservation au sein des zones côtières particulièrement urgente (Doxa et at., 2017).

 

 

Les réponses des espèces à ces perturbations sont variables : un changement de comportement comme la modification des directions de nage, une augmentation de la durée de nage, une augmentation de la cohésion de groupe, des changements physiologiques telle que la respiration chez les dauphins, voire un évitement saisonnier de certaines zones (Carreño et Lloret, 2021).

 

Réduire les impacts des pollutions

Le transport des macro-déchets est aérien, fluvial ou par déversement direct. Il existe une grande variété de sources de déchets tant terrestres que marines. Les sources identifiées comme étant d’origine terrestre comprennent les décharges municipales et sauvages, les détritus des plages et zones côtières, le tourisme, les rivières et autres émissions industrielles et agricoles, les rejets provenant des égouts pluviaux et municipaux non traités. On estime que les sources terrestres contribuent actuellement à 80 % des déchets marins (Compas et al. 2019 ; Sinopli et al., 2020, Scotti et al. 2021, Madricardo et al. 2020, Grelaud et Zivery, 2020 ; Sharma, 2021). Les sources importantes d’origine maritime incluent le fret, la navigation de plaisance et militaire (notamment les croiseurs), la pêche industrielle et les installations aquacoles, mais aussi l’industrie de l’énergie.

 

Dans l’Atlantique Nord-Est, les principales sources de déchets sont liées aux activités maritimes telles que la navigation, la pêche, l’aquaculture et les installations offshore, ainsi que le tourisme côtier (e.g. bateaux de plaisances, pêche amateur) (Ospar, 2009). Aussi, la perte, l’abandon volontaire ou l’élimination des engins de pêche est la cause principale de la production de déchets par la pêche professionnelle / industrielle (Compas et al. 2019 ; Sinopli et al., 2020, Scotti et al. 2021, Madricardo et al. 2020, Grelaud et Zivery, 2020 ; Sharma, 2021). 

 

Réduire les impacts des espèces exotiques envahissantes

Le trafic maritime et l’aquaculture jouent un rôle clé important et prépondérant dans l’introduction des espèces envahissantes à l’échelle mondiale et régionale. Les différentes infrastructures existantes liées à ces activités tels que les marinas et les ports maritimes forment des réseaux denses le long des côtes et sont capables d’abriter de nombreux taxons d’espèces envahissantes. Ces infrastructures sont susceptibles d’être une source importante de propagules permettant par ailleurs la colonisation des milieux naturels voisins. Les fermes aquacoles sont également une autre source importante d’espèces envahissantes. L’algue comestible Undaria pinnatifida, originaire d’Asie et introduite en Europe dans les années 1970, est un exemple phare d’une EEE qui se développe dans les habitats avoisinants des sites aquacoles (Rotter et al. 2020). Les évènements d’introduction, dits “spillovers”, peuvent se produire à partir des sites d’aquaculture, comme illustré aussi par l’huître creuse Crassostrea gigas, une espèce originaire du nord-ouest de l’océan Pacifique. La propagation de ces espèces dans les sites naturels entraînent des modifications importantes de l’habitat, mais aussi du fonctionnement des écosystèmes. Elles peuvent également participer au développement de nouvelles maladies et de nouveaux parasites entraînant alors des modifications génétiques suite à des phénomènes d’hybridation avec les taxons indigènes (Rotter et al. 2020).

 

En mer Méditerranée, la création et l’ouverture de canaux artificiels, tel que le canal de Suez, est parmi les voies d’introduction les plus significatives, permettant la colonisation progressive des espèces, notamment d’origine indo-pacifique. Une espèce de décapode, Charybdis longicollis, a été introduite passivement, en mer Méditerranée via le canal de Suez par les courants marins, et a depuis largement établi des populations dans le bassin Levantin, la subdivision du bassin oriental de la mer Méditerranée. Une analyse prospective (cf. Tsiamis et al. 2019) a classé la gestion des populations de cette espèce comme “impossible”. Ces espèces introduites ont principalement affecté les parties orientales du bassin.

 

Le trafic maritime est une des sources importantes d’introduction. Sa particularité est qu’il touche des zones généralement plus étendues, en raison du déplacement des navires, que les introductions dues à l’aquaculture, les canaux artificiels ou les courants marins (Katsanevakis et al. 2016). Cette introduction, principalement “accidentelle”, se fait généralement par le biais des navires (navires de charge, navires rouliers, caboteurs, etc.) via les réservoirs d’eau de ballast, ou l’encrassement biologique dit  “biofouling” de la coque des bateaux (Rotter et al. 2020). Dans l‘étude de Tsiamis et al. 2019, 26 espèces sont classées comme étant prioritaires et principalement introduites par les navires (biofouling des coques et eaux de ballast) empruntant le canal de Suez comme accès à la Méditerranée. L’étude de Katsanevakis et al. 2016 recense, de son côté, les espèces introduites par la navigation maritime présentant les scores d’impact les plus élevés. En Méditerranée, les espèces introduites par les voies de navigation maritime sont celles ayant le plus d’impacts dans de nombreux sites du centre et du nord-ouest du bassin méditerranéen, y compris le littoral oriental français, comme en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, et la Corse (Katsanevaki et al. 2016).

S’il participe très largement à l’introduction et l’établissement pérenne des espèces non-indigènes en mer méditerranéenne (Guzinski et al. 2018), le trafic maritime est également une des sources majeures de propagation des EEE dans d’autres régions océaniques à travers le monde.

 

Aujourd’hui, les habitats les plus à risques sont les fonds durs sublittoraux peu profonds, les fonds mous sublittoraux peu profonds et l‘espace intertidal rocheux (Katsanevaki et al. 2016).

 

Justice bleue : un nouveau mouvement en faveur des communautés côtières, exclues des prises de décision en matière de conservation

Les communautés côtières sont en première ligne de deux facteurs importants et croissants du changement global : le changement climatique, le développement économique, qui peuvent interagir avec la possible expansion de la conservation par zone, conduisant à ce que certains auteurs appellent la « triple exposition ». Si les stratégies visant à maximiser les avantages sociaux des politiques d’adaptation à ces trois facteurs diffèrent, des processus externes peuvent parfois converger pour amplifier les vulnérabilités et les inégalités. Les injustices sociales préexistantes peuvent augmenter la sensibilité des populations aux changements sociaux, environnementaux et politiques, et peuvent limiter leur capacité à s’adapter ou à bénéficier des impacts interactifs de ce qui est parfois appelé “la triple exposition”.

 

Dans un article publié dans la revue One Earth le 17 février 2023, le groupe de recherche en socio-écologie Blue Justice, financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) au sein de son Centre de synthèse et d’analyse de la biodiversité (Cesab), soutient, au-delà de la reconnaissance d’une telle “triple exposition”, que les agences de mise en œuvre externes ne peuvent pas atteindre efficacement et équitablement les objectifs d’adaptation climatique, économiques et de conservation sans donner la priorité à la justice sociale et au renforcement de la résilience en générale.

 

Pour faire avancer cette orientation vers la justice et la résilience, Joachim Claudet – chercheur CNRS, David Gill, chercheur à Duke University (États-Unis), Jessica Blythe – chercheuse à Brock University (Canada), porteurs du projet Blue Justice, recommandent que les acteurs du climat, du développement et de la conservation ambitionnent :

  • de s’attaquer aux causes profondes de la vulnérabilité, à savoir les injustices sociales préexistantes ;
  • d’utiliser des approches systémiques participatives pour améliorer la compréhension du contexte local et des conséquences potentielles (non) intentionnelles des initiatives proposées ;
  • et de développer et tirer parti de partenariats inclusifs entre divers acteurs pour faciliter la conception et la mise en œuvre collaboratives des stratégies identifiées.

 

Dans un monde en mutation rapide, ces stratégies, appliquées ensemble et adaptées au contexte local, offrent une opportunité de développer des initiatives côtières qui soutiennent le bien-être, la justice et la résilience des populations côtières.

 

Des mesures qui prennent tout leur sens lors de catastrophes naturelles

 

Pour illustrer leurs recommandations, les auteurs mettent en avant plusieurs exemples, notamment en lien avec les catastrophes naturelles. Ainsi, en 2020, alors que les efforts internationaux étaient mobilisés par la pandémie, une marée noire est survenue à l’île Maurice. C’est un groupe d’ONG locales qui s’est mis en place pour activer son réseau de bénévoles et fournir les ressources nécessaires aux premières actions de nettoyage. Le vide institutionnel initialement ressenti a contribué à la large mobilisation des communautés locales pour la fabrication et le déploiement d’un filtre “anti-marée” dans la mer. Loin d’entraver cet engagement, les institutions gouvernementales ont ensuite fourni du soutien aux groupes bénévoles jusqu’à ce que des services spécialisés de nettoyage soient formellement mobilisés et que les efforts officiels commencent. Ceci illustre donc bien l’importance des partenariats inclusifs dans la lutte face aux pressions environnementales.

 

Le projet Blue Justice réunit un panel international (Amérique du Nord, Angleterre, France, Australie, Fidji, Italie, etc.) de spécialistes en biologie marine, biologie de la conservation, socio-écologie et lois environnementales.

 

Retrouvez l'article

Forcis | Réponse des foraminifères au stress climatique

Les émissions anthropogéniques de CO2 causent un réchauffement de l’océan, mais également une baisse du pH de l’océan de surface. Cette acidification de l’océan affecte les organismes marins calcifiants, qui jouent un rôle clé dans la pompe biologique. Parmi ces organismes, les coquilles fossilisées des foraminifères planctoniques constituent l’archive géologique la plus documentée de la biodiversité passée mais aussi des paléoclimats. Les changements récents des faunes de foraminifères planctoniques n’ont jamais été synthétisés à l’échelle globale, alors que la distribution de ces micro-organismes a déjà été impactée.

Le projet FRB-Cesab Forcis a étudié la réponse des foraminifères planctoniques aux stress climatiques via l’analyse de données mondiales depuis 1910. Il visait à constituer une base de données, identifier les facteurs environnementaux influents et modéliser leurs réponses passées et futures aux changements globaux.

 

Ce document synthétise en quelques pages le contexte et les objectifs du groupe, les méthodes et approches utilisées, les principales conclusions ainsi que l’impact pour la science, la société, la décision publique et privée.

RAATD | Analyse rétrospective des données de tracking de vertébrés supérieurs en Antarctique dans le but d’identifier les aires écologiquement importantes

L’objectif général du projet FRB-Cesab RAATD (“Analyse rétrospective des données de tracking en Antarctique”) est d’évaluer l’utilisation de l’habitat par plusieurs espèces de prédateurs situés au sommet des chaînes trophiques de l’océan Austral à partir des jeux de données existants de suivi spatial de ces animaux. Cette approche permet d’identifier les zones écologiquement importantes pour les prédateurs, c’est-à-dire les régions océaniques qui servent de sites privilégiés pour la prospection de nourriture à plusieurs espèces de prédateurs simultanément, et qui par conséquent présentent une biodiversité importante.

 

Ce document synthétise en quelques pages le contexte et les objectifs du groupe, les méthodes et approches utilisées, les principales conclusions ainsi que l’impact pour la science, la société, la décision publique et privée.

Aurore Receveur, post-doctorante FRB-Cesab sur la pêche durable, récompensée !

Il s’agit de la 16e édition du Prix porté par la Fondation L’Oréal, en partenariat avec l’Académie des sciences et la Commission nationale française pour l’UNESCO, qui vise à accompagner, valoriser et soutenir les recherches des femmes scientifiques.

 

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Aurore Receveur, une carrière internationale en faveur d’une pêche durable

 

C’est en 2021 qu’Aurore Receveur a rejoint la FRB, en tant que post-doctorante au Cesab, à Montpellier. Avant cela, Aurore s’est intéressée au fonctionnement de l’écosystème marin du sud-ouest du Pacifique dans le cadre de sa thèse réalisée en Nouvelle-Calédonie. Elle a notamment étudié les dynamiques spatiotemporelles des proies mésopélagiques (vivant entre 200 et 1 000 mètres de profondeur), leurs liens à l’environnement et aux prédateurs supérieurs. Elle a ensuite réalisé un post-doctorat à l’institut des pêches allemand (Thünen Institute ; Rostock, Allemagne), où elle a étudié l’effet des changements environnementaux et des pressions anthropiques sur deux stocks de poisson de la mer Baltique : le hareng et la morue. 

 

Forte de ces premières expériences, c’est désormais au sein du projet Maestro, co-financé par France Filière Pêche et la FRB, qu’Aurore explore l’impact du changement climatique sur la distribution spatiale et la diversité des stocks de poissons démersaux (vivant près du fond des mers), notamment dans le nord-est Atlantique. Hareng, merlu, merlan, limande, haddock et bien d’autres espèces encore sont ainsi étudiées.

 

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Aurore Receveur a reçu le prix Jeunes Talents France L’Oréal-Unesco,
le 12 octobre 2022 à Paris. @Jean-Charles Caslot – Fondation L’Oréal

 

Exploiter des données existantes pour mieux comprendre et anticiper les impacts du changement climatique sur les communautés marines exploitées

 

Les océans contribuent à beaucoup de services écosystémiques, ce qui traduit une forte dépendance de l’humanité, pour sa sécurité alimentaire et économique, envers les ressources marines telles que les poissons et invertébrés. Or, les effets cumulés de l’exploitation de ces ressources par la pêche et les effets du changement climatique impactent la distribution et l’abondance des espèces à l’échelle mondiale, Ces constats incitent à protéger les ressources marines et à proposer des stratégies de pêche adaptatives. Si de nombreuses projections sur la répartition future des espèces ont été produites, les modifications attendues sur le fonctionnement général des écosystèmes ont quant à elles reçu beaucoup moins d’attention de la part de la communauté scientifique et par la profession. Les enjeux du projet Maestro ? Comprendre comment les populations des espèces démersales ont évoluées par le passé pour en déduire comment elles pourraient s’adapter au changement climatique, et proposer des scénarios de pêche durable minimisant les impacts sur la biodiversité.

 

Accompagnée par 29 chercheurs et chercheuses de 8 pays, Aurore bénéficie également de l’appui de l’équipe du centre de recherche de la FRB, le Cesab, pour exploiter de grandes quantités de données issues de multiples études et de divers domaines (océanographie, pêche, écologie marine et terrestre, etc.). Ce colossal travail de synthèse nécessite rigueur et patience, dont fait preuve Aurore. Il offre de nouvelles perspectives de recherche : ré-utiliser des données existantes pour les combiner, les mettre en perspective et produire de nouvelles connaissances. Rendez-vous dans quelques mois pour les premiers résultats de Maestro !

Pour sauver les baleines, levez les yeux vers le ciel

Les populations de baleines sont menacées par de nombreux facteurs de pression comme le bruit anthropique, la pollution, la chasse dans certaines régions du monde, mais surtout les enchevêtrements accidentels dans les engins de pêche et les collisions avec les navires. On estime à plusieurs milliers par an le nombre d’individus morts par collision dans le monde (sur la seule côte ouest des États-Unis, les collisions tuent environ 80 baleines par an).

Alors que des mesures simples, comme des dispositifs de séparation du trafic maritime, sont connues depuis plusieurs années et pourraient réduire ces dommages, celles-ci ne sont pas encore systématisées. 

 

S’intéresser au ciel pour mieux comprendre ce qui se passe dans les océans, cela peut paraître étonnant, et pourtant. Dans les deux cas, les collisions se produisent dans un espace tridimensionnel. Les actions proactives sont donc cruciales pour prévenir les mortalités résultant de collisions. En effet, bien que oiseaux et baleines pourraient théoriquement éviter les avions ou les bateaux, des études ont montré que les animaux ne détectent pas nécessairement les véhicules venant en sens inverse. De même, les avions ou les bateaux ne détectent pas les animaux en raison de l’environnement tridimensionnel : l’angle de vue des pilotes est limité et la maniabilité des gros bateaux ou avions est faible. 

 

Malgré ces similitudes, les principales motivations pour éviter ces collisions sont différentes. Dans le cas des avions, les collisions peuvent être mortelles à la fois pour les oiseaux, l’équipage et les passagers de l’avion. La priorité est donc ici la sécurité des humains et a conduit l’industrie aéronautique à adopter des solutions standardisées et proactives au cours des dernières décennies. 

 

 

 

 

Réduire l’impact environnemental et valoriser les pêcheurs : la combinaison gagnante pour une pêche durable ?

Quel a été pour vous le point de bascule qui vous a poussé à vouloir faire évoluer le commerce des produits de la pêche ?  

 

Au début de ma carrière d’ingénieur agro-halieute, je me suis retrouvé pendant un an sur les bateaux et j’ai pris conscience de tout ce que j’avais théorisé pendant mes études. C’est-à-dire que les pêcheurs ne savent jamais ce qu’ils vont attraper, ni quand ils vont pouvoir sortir en mer, ni même combien ils vont pouvoir vendre leurs prises : bref, ils sont soumis à une grande instabilité. Le plus souvent, j’ai rencontré des équipages déçus d’avoir trimé dans la tempête pendant plusieurs heures pour finalement très mal vendre leur produit. Certains me disaient : “Moi, je vends en direct. De cette manière, je valorise mieux mon poisson et je peux me permettre de ne pas aller en mer quand le temps est mauvais”.  

 

Qu’avez-vous mis en place pour répondre à cette prise de conscience ?  

 

Au début, pas grand-chose… Je me suis retrouvé à travailler à la direction des pêches du ministère de l’agriculture où je subventionnais des projets de recherche et développement ou d’investissements à bord de navires. Mais petit à petit, je me suis intégré dans les systèmes d’Amap et j’ai découvert ces offres de paniers avec de super produits, bons, provenant directement du producteur, bien payés et issus de pratiques vertueuses. Là, je me suis dit qu’il fallait faire la même chose avec la pêche.  

 

Quelles sont les valeurs que cherchent les consommateurs en se tournant vers vous ? 

 

Récemment, nous avons fait un sondage auprès de nos abonnés. On distingue deux cas. Les plus anciens clients nous disent que c’est la qualité du produit et le goût qui fait la différence. Je pense que l’on n’est pas tombé dans l’écueil de certains produits issus du commerce équitable ou du vin bio qui proposent de bonnes valeurs mais qui n’offrent pas de bons produits. Pour les abonnés plus récents, la différence se fait sur l’engagement de durabilité qui est associé à une certaine valeur de confiance. Aujourd’hui, les gens se méfient des labels. Nous mettons en avant des produits frais, durables et éthiques, avec derrière une véritable transparence et de vrais critères.  

 

Qu’est-ce qui fait que votre activité est durable ? 

 

D’abord, nous travaillons avec certains types de navires de manière exclusive. C’est-à-dire que nous ne mettons dans nos paniers que des produits issus de la petite pêche côtière. Concrètement, cela signifie que nous ne travaillons qu’avec des bateaux de 12 mètres au plus qui sortent à la journée uniquement et qui embarquent trois marins au maximum pour la pêche au filet. Mais nous avons aussi des critères techniques. Nous ne travaillons qu’avec des pêcheurs qui utilisent des techniques douces ou passives. Concrètement, il s’agit d’engins que l’on pose dans l’eau et que l’on revient chercher plus tard comme des hameçons, des lignes, des casiers ou des filets. Nous valorisons aussi la pêche à la main, en plongée ou à pied. Évidemment, nous refusons de travailler avec des pêcheurs qui utilisent des chaluts ou des dragues qui, selon les scientifiques, abîment les fonds marins. Nous faisons aussi attention à la sélectivité : nous achetons ce qui est pêché, même s’il s’agit de poissons peu connus par le consommateur.  

 

Comment rémunérez-vous vos pêcheurs ?  

 

Aujourd’hui, c’est assez hétérogène. Il y a les poissons les plus demandés payés quasiment au prix du marché, comme les bars, les soles ou les turbots. Et pour les espèces moins connues, nous payons beaucoup plus. Globalement, nous nous engageons à payer 20 % de plus que le marché.  

 

Qui sont les pêcheurs qui travaillent avec vous ?  

 

On rencontre des pêcheurs qui sentent que leur filière n’est pas assez valorisée. Il n’y a pas de “bio” pour la pêche, donc pas de possibilité pour les pêcheurs d’afficher clairement leurs pratiques vertueuses. Pour moi, un défaut des certifications “pêche durable”, c’est qu’elles veulent absolument raisonner à l’échelle de la pêcherie et non à celle du pêcheur. Je pense que tout pêcheur ayant des pratiques objectivement vertueuses devrait pouvoir être labellisé. Ce sont ces pêcheurs-là que l’on va chercher, ceux qui n’arrivent pas à travailler à petite échelle parce que la filière ne les met pas en valeur et ne les rémunère pas assez. On travaille aussi avec de nombreux pêcheurs qui s’installent, qui font peu de volume et pour lesquels il est plus facile de vendre aussi les espèces habituellement dénigrées par le marché.  

 

Pour les pêcheurs, ça change quoi concrètement ?  

 

Ce que nous voyons aujourd’hui avec les sondages que l’on fait auprès de nos pêcheurs, c’est que 30 % d’entre eux nous vendent des espèces qu’ils jetaient à la poubelle auparavant. En réduisant ce gaspillage, on réduit considérablement la pression sur les autres espèces habituellement plus exploitées. D’autres nous déclarent pouvoir se permettre de mettre moins d’engins en mer, de passer moins de temps à pêcher, de mettre moins de longueurs de filets, ce qui, encore une fois, réduit la pression de pêche.  

 

Est-ce que ce système peut s’étendre à une plus grande échelle et devenir un vrai changement transformateur ?  

 

C’est le rêve que l’on avait au départ. Nos objectifs premiers sont d’assurer des bons prix toute l’année et de voir, grâce à ce système de paniers qui assure l’écoulement de nos produits, que les stocks de poissons s’améliorent. D’ailleurs, nous avons des scientifiques qui évaluent actuellement notre impact en mesurant l’activité des bateaux, les quantités attrapées et les nombres de jours passés en mer. Vendre du poisson, c’est juste un moyen d’arriver à cette fin, de créer un levier en payant mieux les pêcheurs, au lieu d’attendre que les stocks de poissons soient dégradés à un tel point qu’il faille soumettre les pêcheurs à des mesures coercitives comme l’instauration de quotas parfois inadaptés et en décalage avec la réalité économique.  

 

Quels sont vos prochains challenges ?  

 

La prochaine étape, c’est d’inciter de nouveaux professionnels à se conformer à nos critères de durabilité, pour valoriser le mouvement des nouveaux pêcheurs qui s’installent et qui pratiquent la pêche à la ligne ou au casier. Il faut les aider à transformer plus en profondeur la filière. Aujourd’hui, il y a un vrai risque de rachat des petits bateaux. L’idéal serait de faire l’inverse : sanctuariser de petits bateaux, voire acheter des gros bateaux pour les transformer en petits. Le jour où l’on arrivera à obtenir un volume suffisamment important et où l’on pourra dire à un pêcheur qui fait 50 tonnes de poissons dans l’année qu’on est là pour lui, on deviendra un vrai levier.

#Presidentielle2022 – Agriculture et pêche

Agriculture et pêche, des enjeux biodiversité

 

Mal gérée, trop intensive, l’agriculture peut entrainer pollution, érosion des sols et de la biodiversité sauvage, transformation des habitats et déforestation, réduisant d’autant plus, à terme, le potentiel productif. Et ce, alors que les besoins alimentaires vont croissant. L’évolution de la demande des consommateurs et les incertitudes face au changement climatique nécessitent de remettre les fonctionnements écologiques au cœur de l’agrosystème, afin de rendre notre agriculture plus durable, tout en préservant et valorisant l’ensemble de ses diversités.

Par ailleurs, on observe une chute drastique des populations de poissons, notamment due à une surexploitation de certaines espèces, déclins des points chauds de diversité marine tels que les récifs coralliaires en raison du changement climatique, des pollutions, voire du tourisme, d’où la nécessité de proposer des mesures de protection à l’égard de la biodiversité marine et aquatique.

 

Nous avons ici regroupé l’ensemble des mesures qui ont pour objectifs d’enrayer de manière directe l’érosion de la biodiversité en lien avec l’agriculture et la pêche. Les mesures favorisant une transition écologique s’intégrant à la thématique identifiée et ayant un impact indirect sur l’érosion de la biodiversité ont également été recensées ci-dessous.

 

 

Les mesures des candidat·e·s :

 

N.B. Nous avons autant que possible conservé les mesures dans les termes exacts proposés par les candidat·e·s. Des modifications mineures ont cependant été apportées comme le passage des verbes à l’infinitif et la réduction de certains corpus pour en faciliter la clarté. Par ailleurs, les mesures présentées ici découlent d’un tri réalisé jusqu’au 29 mars 2022 qui peut présenter une certaine subjectivité. Pour retrouver l’intégralité des mesures proposées dans le cadre de cette campagne présidentielle, seuls les programmes officiels des candidats font foi. Ils sont disponibles sur la page principale du dossier.

Les récifs coralliens cernés par les impacts anthropiques et les changements globaux

Du 9 au 11 février s’est tenu à Brest le premier One Ocean Summit, un sommet international qui a permis de concrétiser des engagements en faveur de la protection des mers et des océans. Les écosystèmes marins sont en effet menacés à la fois par des facteurs globaux (tels que le réchauffement de l’eau et l’acidification des océans), mais aussi par des facteurs locaux (tels que la pêche, la pollution lumineuse ou encore la navigation). Les facteurs de pression étant directement associés aux activités humaines, les écosystèmes les plus éloignés des humains devraient intuitivement subir moins d’impacts et constituer des refuges plus sûrs pour la biodiversité. Cette idée est d’ailleurs confortée par plusieurs études scientifiques qui démontrent l’existence d’une corrélation claire entre l’état des écosystèmes et leur distance par rapport aux grandes villes (Figure 1). Pour cette même raison, les zones les plus éloignées sont aussi considérées comme des réservoirs potentiels de biodiversité qui peuvent préserver les écosystèmes en cas d’extinction importante.

 

Fig1_Score_Reef_Strona_2021

Figure 1. L’impact des activités anthropiques, ou leurs conséquences (tels que la pêche, la pollution) sur les communautés des poissons des récifs coralliens diminue avec l’éloignement aux activités humaines. Chaque point correspond à une zone de récifs coralliens à une résolution spatiale de 1 × 1 degré de latitute/longitude. Modifié de Strona et al. 2021b (CC BY 4.0).

 

 

Cependant, des études menées au sein du projet de recherche Score-Reef, co-financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) à travers son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), l’Office français de la biodiversité (OFB) et le Ministère de la transition écologique (MTE), montrent que la réalité est tout autre lorsque l’on prend en compte la dépendance des poissons vis-à-vis des récifs coralliens.

 

L’intelligence artificielle au service de la biodiversité marine : démarrage d’un challenge scientifique international inédit

IA et biodiversité : des synergies à développer pour préserver la planète

 

Souvent considérés comme notre « dernière frontière », les océans couvrent environ 71 % de notre planète et concentrent une part essentielle de la biodiversité. Étudier la biodiversité et son évolution représente donc un enjeu scientifique et sociétal majeur pour répondre aux défis posés par le changement climatique et contribuer aux Objectifs du développement durable (ODD) des Nations Unies.

 

La Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (Ipbes) et le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) estiment que la structuration des données reste l’un des freins majeurs à la connaissance de la biodiversité. Face à la complexité des interactions entre les écosystèmes et à l’hétérogénéité des données, les indicateurs actuels restent limités dans la prédiction des évolutions de la biodiversité, notamment en milieu marin.

 

L’IA a un potentiel significatif pour répondre à ce défi. En proposant de nouvelles solutions pour collecter, structurer et valoriser les données, l’IA peut fournir des ressources inédites afin de dresser une photographie actuelle de l’état de la biodiversité et de prédire son évolution. Appliquées au milieu marin, ces innovations permettent d’avancer vers le quatorzième ODD, qui promeut la conservation et l’exploitation durable des écosystèmes marins et côtiers.

 

Partant de ce constat, un appel à projets « Challenge IA-Biodiv » a été lancé en mars 2021. Cet appel est destiné aux communautés scientifiques de l’IA et de la biodiversité afin de mettre en commun leur expertise. Les projets devront répondre à trois objectifs :

 

  • optimiser des méthodes d’IA pour améliorer la recherche en biodiversité marine,
  • concevoir des modèles et indicateurs de prédiction innovants,
  • élaborer des méthodes d’IA hybrides pour renforcer le développement de notre connaissance des milieux marins.

 

Ce challenge international s’inscrit dans la dynamique du volet « recherche » de la stratégie nationale pour l’intelligence artificielle (SNIA) lancée en 2018 afin de renforcer la position de la France dans ce secteur. Il répond à un véritable enjeu d’innovation partagée en impulsant des logiques de co-construction de nouveaux outils.

 

 

Les trois projets lauréats du Challenge IA-Biodiv

 

À l’issue du processus d’évaluation et de sélection mobilisant un panel de chercheurs internationaux indépendants, trois projets portés par des équipes pluridisciplinaires et internationales de chercheurs spécialisés dans le domaine de l’IA et de la biodiversité ont été retenus :

 

Le projet AIME
Le projet AIME (Intelligence artificielle pour les écosystèmes marins), conventionné avec Expertise France, est porté par un consortium franco-africain : l’Université Cadi Ayyad (Maroc), l’Université de Yaoundé (Cameroun), le Laboratoire d’imagerie médicale et bio-informatique et l’Université Gaston Berger de Saint-Louis (Sénégal), l’UMR Écologie marine tropicale dans les océans Pacifique et Indien (Nouvelle-Calédonie, France), l’Institut de recherche pour le développement et le Marine biodiversity, exploitation and conservation (France).

 

Ce projet a pour objectif de relever trois défis scientifiques : (1) la combinaison ou l’hybridation des techniques en IA afin d’améliorer la justesse et la précision des indicateurs de biodiversité ; (2) le développement d’indicateurs, à plusieurs échelles, capturant les divers aspects de la santé et des pressions pesant sur les écosystèmes marins ; et (3) leur intégration dans un modèle d’IA capable d’expliquer et de prédire la dynamique spatio-temporelle de la biodiversité marine dans des études de cas. Le projet AIME fournira de précieux outils pour accompagner les prises de décision dans les stratégies de gestion des écosystèmes marins côtiers.

Le projet SMART-BIODIV
Le projet SMART-BIODIV (Technologies d’intelligence artificielle pour la recherche en biodiversité) est porté par un consortium français : l’Unité Mixte Internationale Georgia Tech-CNRS de Lorraine, le Central Supelec Loria, le Laboratoire interdisciplinaire des environnements continentaux et le Laboratoire d’océanographie de Villefranche.

 

Il développera de nouvelles méthodes de gestion et d’intégration des données de la biodiversité des espaces marins côtiers à partir d’algorithmes d’apprentissage automatique pour compléter les données manquantes et construire des indicateurs adaptés pour évaluer la biodiversité des espaces observés. Ce projet propose également de mettre à disposition de la communauté scientifique de grands jeux de données constitués de millions d’images d’organismes planctons.

Le projet FISH-PREDICT
Le projet FISH-PREDICT (Prédire la biodiversité des poissons récifaux) est porté par un consortium français : le Marine biodiversity exploitations and conservations, le Laboratoire d’informatique, de robotique et de microélectronique de Montpellier, le Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive, le Laboratoire des sciences techniques de l’information, de la communication et de la connaissance, ainsi que par le Laboratoire d’écologie alpine.

 

Ce projet ambitionne de générer des indicateurs écologiques et des modèles prédictifs de la biodiversité des écosystèmes perturbés en combinant des méthodes d’intelligence artificielle aux approches évaluatives connues. Il permettra ainsi de créer la première base de connaissance de biodiversité marine et, par la suite, de développer des modèles de prédiction et d’interprétation. Il vise également à dévoiler des solutions intelligentes pour la nature afin d’assurer la durabilité des systèmes socio-écologiques côtiers.

 

 

Le challenge, une modalité originale de recherche collaborative

 

À l’heure où les défis planétaires sont de plus en plus nombreux et complexes, il devient essentiel d’innover et d’encourager le partage des savoirs pour trouver des réponses appropriées. Instrument de financement spécifique de l’ANR, le Challenge permet d’y répondre, en explorant simultanément différentes approches scientifiques ou technologiques autour d’une même problématique et en mettant en commun les solutions. Il confronte et partage les approches et travaux des consortiums financés, et favorise l’établissement de références communes entre des communautés scientifiques d’horizons divers.

 

Le Challenge IA-BIODIV sera animé par le consortium opérationnel (COpé), composé du Laboratoire national de métrologie et d’essais (LNE), pilote du COpé, de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) via l’infrastructure du Pôle national de données de biodiversité (PNDB).

 

Ainsi, les trois équipes de recherche retenues vont travailler à l’élaboration et au développement de leur projet de manière collaborative et se rencontrer à l’occasion du démarrage du Challenge le 23 février 2022. Leurs travaux, planifiés par le Copé sur 4 ans, porteront sur le milieu marin côtier en mer Méditerranée lors des deux premières années et se concentreront sur l’océan Pacifique les deux dernières. À partir de jeux de données communs, les équipes répondront chacune à des enjeux spécifiques et complémentaires sur la biodiversité marine.

 

Le COpé jouera un rôle central dans l’organisation et le bon déroulement du challenge : en qualité de tiers de confiance, il assurera l’animation scientifique, l’évaluation des systèmes d’IA, la constitution de jeux de données et leur accès via l’environnement « IA-BiodivNet ». Les trois consortiums de recherche exploiteront et enrichiront de manière collaborative cet environnement numérique pendant toute la durée du Challenge. Ils auront accès aux ressources de calcul intensif de GENCI (Grand équipement national de calcul intensif). La plateforme sera, à terme, accessible à tous scientifiques et chercheurs et contribuera à la diffusion de jeux de données pérennes pour les futurs travaux scientifiques en IA et dans le champ de la biodiversité.

Changement d’usage des terres et des mers

Les modes de production et de consommation pour répondre à cette demande entraînent des changements d’utilisation des terres et des mers, c’est à dire des changements d’occupation et d’utilisation des sols et des ressources, liés aux activités humaines. Le changement d’usage des terres est reconnu comme la cause première d’érosion de la biodiversité sur la planète.

 

 

Séminaire scientifique de restitution du programme Acidification des océans

Les huit projets sélectionnés dans ce cadre couvrent les défis de recherche allant de la compréhension des impacts de l’acidification à leur modélisation, en passant par l’observation et la cartographie du phénomène.

 

Financé par le Ministère de la transition écologique, ce programme a permis le regroupement des expertises scientifiques autour de ce sujet, mais aussi le dialogue recherche et décideurs publics et privés face aux enjeux environnementaux et socio-économiques qui s’annoncent dans les prochaines décennies. Les colloques de Nantes en 2019, et de Brest en 2021, en sont les parfaites illustrations.

 

Ce séminaire de restitution permet avant tout de présenter les résultats de ces projets à la communauté scientifique. Un temps de conclusions et d’échanges sur les perspectives du programme et des projets est ensuite prévu ; ce temps s’adresse plus particulièrement à un public de décideurs et financeurs de la recherche.

[Communiqué] Mieux protéger la mégafaune marine grâce aux réseaux sociaux et à l’intelligence artificielle

Comment utiliser le deep learning pour les espèces rares des milieux marins telles que le dugong, ou furtives comme les requins, pour lesquelles peu d’images sont disponibles ? Des scientifiques de trois unités mixtes de recherche (MARBEC, ENTROPIE et LIRMM) viennent de publier une étude exploitant les dernières avancées technologiques, combinant vidéos sur les réseaux sociaux et suivis vidéos aériens, pour recenser des espèces charismatiques de la mégafaune marine de Nouvelle-Calédonie : dugongs, tortues et requins.

 

Ces travaux, intitulés « Exploiter les réseaux sociaux et l’apprentissage profond pour détecter la mégafaune rare à partir de suivis vidéo » et publiés dans la revue internationale Conservation Biology, sont en partie issus du projet de recherche Pelagic financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) au sein de son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), et s’appuient sur la collecte de vidéos aériennes financée par les Explorations de Monaco.

 

 

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Acidification des océans : Effets sur les écosystèmes et l’économie maritime

L’acidité des océans a augmenté d’environ 26 % depuis l’époque préindustrielle. Ce phénomène causé par l’augmentation des rejets de CO2 liés à la combustion de combustibles fossiles et autres activités humaines est préjudiciable à de nombreuses espèces marines. Parmi elles, on retrouve les coraux ou encore d’autres espèces dont le squelette ou la coquille se composent de carbonate de calcium. Ces impacts, associés à l’augmentation de la température de la haute mer, à la stratification et à la désoxygénation des eaux souterraines risquent d’affecter la structure globale et le fonctionnement des écosystèmes marins entraînant ainsi des conséquences de grande portée et des impacts socio-économiques potentiellement profonds.

 

De nombreuses questions subsistent et les chercheurs s’interrogent notamment sur le potentiel des organismes marins à s’adapter à l’acidification des océans et aux implications plus larges pour les écosystèmes océaniques. Mais quels sont ses effets sur les écosystèmes marins et par conséquent sur l’économie maritime, notamment la pêche et la conchyliculture ? Comment agir et adapter les pratiques pour assurer la pérennité des métiers liés aux produits de la mer ?

 

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Alors que le programme de recherche “Acidification des océans” touche à sa fin, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), le Ministère de la Transition écologique (MTE) et Océanopolis ont proposé des regards croisés en réunissant scientifiques, professionnels, gestionnaires et associations, pour partager expériences de terrain, bonnes pratiques ainsi que les résultats des projets scientifiques financés par le ministère de l’écologie. 

Protéger l’océan pour la préservation de la biodiversité, l’approvisionnement en nourriture et l’atténuation du changement climatique

La 15ème réunion de la Conférence des parties (COP15) de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CDB), qui doit se tenir en 2021, devrait déboucher sur un accord mondial en faveur de la nature, avec un consensus émergent visant à protéger au moins 30% de l’océan global d’ici 2030. 

 

Les résultats de l’étude coordonnée par Enric Sala publiée en mars 2021 dans le journal Nature, donnent du crédit à cet objectif et suggèrent qu’une augmentation de la surface des aires marines protégées et une répartition spatiale cohérente de ces dernières pourraient avoir un triple avantage : non seulement mieux protéger la biodiversité marine par rapport à l’existant, mais aussi stimuler la productivité des pêcheries, en exploitant une moins grande surface mais avec de meilleurs rendements, et amoindrir les émissions de carbone remis en suspension par le chalutage profond. 

 

La synthèse est disponible dans les ressources téléchargeables.

[Communiqué] Les poissons récifaux assurent des rôles écologiques universels à travers les océans

En utilisant la base mondiale des poissons récifaux collectée par le Reef Life Survey, une équipe internationale dont des scientifiques de l’Université de Montpellier, du CNRS et de l’Ifremer, a démontré l’influence prédominante de l’environnement sur la composition en traits et met en avant les rôles écologiques universels assurés par les poissons récifaux à travers les océans. Ces résultats, publiés dans PNAS, le 16 mars 2021, pourraient amener à repenser la stratégie de conservation des espèces.

 

Les résultats de cette étude sont le fruit de travaux réalisés par des chercheurs du projet Reef-futures, financé grâce au programme BiodivScen du réseau européen BiodivERsA, dont la Fondation pour la recherche sur la biodiversité assure la coordination et le secrétariat.

 

 

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Les poissons récifaux assurent des rôles écologiques universels à travers les océans

Qu’est-ce qui détermine le fonctionnement d’un écosystème ? Si l’on a longtemps considéré cette question en tenant compte de la diversité des espèces qui le compose, on sait aujourd’hui que c’est surtout la diversité des traits portés par ces espèces qui détermine le fonctionnement des écosystèmes. Les traits ? « Ce sont leurs caractéristiques morphologiques, physiologiques ou comportementales. La distribution globale de ces traits, qui est influencée par l’environnement et par l’évolution, reste mal connue à travers les océans », explique David Mouillot, chercheur au laboratoire Marbec*. Une connaissance d’autant plus importante que les traits des espèces sont désormais reconnus comme étant les principaux acteurs du fonctionnement des écosystèmes et de la réponse aux changements globaux. Publiée le 16 mars dans la revue PNAS, l’étude impliquant également Fabien Leprieur (UM), Sébastien Villéger (CNRS) et Arnaud Auber (Ifremer), démontre l’influence prédominante de l’environnement sur la composition en traits des écosystèmes récifaux.

 

[Communiqué] Protéger l’océan pour résoudre conjointement les crises du climat, de l’alimentation et de la biodiversité

Une équipe de recherche internationale cartographie pour la première fois les zones océaniques qui, si elles étaient protégées, permettraient d’atténuer les effets du changement climatique, de préserver la biodiversité et de permettre une meilleure productivité des pêcheries. Ces travaux font l’objet d’une publication dans la revue Nature. Ils sont le fruit de la collaboration de 26 scientifiques et impliquent des chercheurs de l’Université de Montpellier et de l’Ifremer, avec la participation du CNRS. Ce travail a été en partie financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), EDF et la fondation Total, au travers des projets de recherche Free et Pelagic du Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab) de la FRB.

 

Cette nouvelle étude, la plus complète à ce jour, est publiée aujourd’hui et propose une solution pour relever les défis les plus urgents de l’humanité. Elle démontre qu’une protection bien ciblée des océans pourrait à la fois contribuer à un meilleur approvisionnement en ressources alimentaires marines, fournir une solution naturelle et peu onéreuse pour lutter contre le changement climatique, et enfin davantage protéger la biodiversité menacée.

 

 

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Protéger l’océan pour résoudre conjointement les crises du climat, de l’alimentation et de la biodiversité

Cette nouvelle étude, la plus complète à ce jour, est publiée aujourd’hui et propose une solution pour relever les défis les plus urgents de l’humanité. Elle démontre qu’une protection bien ciblée des océans pourrait à la fois contribuer à un meilleur approvisionnement en ressources alimentaires marines, fournir une solution naturelle et peu onéreuse pour lutter contre le changement climatique, et enfin davantage protéger la biodiversité menacée.

 

L’équipe scientifique a identifié des zones qui, si elles étaient protégées, permettraient de sauvegarder plus de 80 % des habitats d’espèces marines menacées et d’augmenter les captures annuelles de plus de huit millions de tonnes par rapport aux débarquements mondiaux actuels. L’étude est également la première à quantifier les émissions de dioxyde de carbone dans l’océan par le chalutage, une pratique de pêche très répandue – et elle révèle que le chalutage rejette des centaines de millions de tonnes de dioxyde de carbone dans l’atmosphère chaque année, un volume similaire à celui émis par le trafic aérien mondial.

 

“La vie océanique est en déclin dans le monde entier en raison de la surpêche, de la destruction des habitats et du changement climatique. Pourtant, seulement 7 % de l’océan mondial est actuellement protégé”, déclare le Dr Enric Sala, explorateur au sein de la National Geographic Society et auteur principal de la publication. “Dans cette étude, nous avons mis au point une nouvelle méthode pour identifier les zones qui, si elles sont fortement protégées, engendreraient une meilleure production alimentaire tout en préservant la vie marine et en réduisant les émissions de CO2“, ajoute-t-il. “Il est clair que l’humanité et l’économie bénéficieront d’un océan plus sain. Nous pouvons concrétiser ces avantages rapidement si les pays travaillent ensemble pour protéger au moins 30 % de l’océan mondial d’ici 2030.” 

 

Pour identifier ces zones prioritaires, les scientifiques se sont notamment focalisés sur les aires marines non protégées et y ont évalué le degré d’impact des activités humaines. Puis, ils ont estimé le niveau d’impact positif qui pourrait découler de la protection de ces zones. Ils ont ensuite mis au point un algorithme permettant d’identifier les zones où des mesures de protection seraient les plus avantageuses pour générer des bénéfices multiples : protéger la biodiversité, augmenter la production de ressources alimentaires marines et diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Ces zones sont identifiables sur des cartes globales (cf. figure) qui pourront concrètement servir de guide aux gouvernements afin que ces derniers puissent mettre en pratique leurs engagements de protection de la nature. L’étude offre ainsi un cadre inédit permettant aux pays de décider des zones à protéger en fonction de leurs priorités nationales.

 

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Figure : Répartition des zones pouvant générer des bénéfices multiples (goals) si des mesures de protection strictes y étaient mises en place (bénéfices : protéger la biodiversité, augmenter la production de ressources alimentaires marines et diminuer les émissions de gaz à effet de serre). (Source : Sala et al, 2021)

 

Seul impératif, il faut qu’au moins 30 % des océans soient protégés pour qu’ils puissent offrir de multiples avantages à l’humanité. Cette étude scientifique pourrait servir de référence pour la 15e conférence des Nations Unies sur la convention sur la diversité biologique, qui aura lieu à Kunming (Chine) en fin d’année 2021 et dont une des cibles clé, serait de protéger 30 % des terres et des océans de la planète d’ici 2030 (objectif “30×30”). “Les solutions présentant de multiples avantages sont attrayantes tant pour les citoyens que pour les dirigeants. Notre approche pionnière leur permet d’identifier les zones à protéger afin de faire face aux enjeux majeurs de l’humanité : la sécurité alimentaire, le changement climatique et la perte de biodiversité”, a déclaré le Dr. Sala.

 

[1] Biodiversité marine, exploitation et conservation (MARBEC, CNRS/Ifremer/IRD/Université de Montpellier)

 

 

Pour aller plus loin... les solutions enjeu par enjeu et des citations supplémentaires

 

 

 

La diminution de la pêche en mer du Nord permet un regain des communautés de poissons

Bonne nouvelle pour la biodiversité marine de la mer du Nord ! Alors que la biodiversité mondiale connait une crise majeure [1], une étude publiée la semaine dernière dans Proceedings of the Royal Society B montre que l’abondance de la plupart des espèces présentant des stratégies écologiques originales vivant en mer du Nord augmente à mesure que la pression de la pêche diminue et que les océans se réchauffent.

 

La résistance et la résilience des écosystèmes marins face au changement climatique et aux activités humaines sont des préoccupations majeures, notamment car ces écosystèmes assurent toute une série de services essentiels à l’Homme. La pêche par exemple permet de nourrir plus de 10 % de la population mondiale. Le maintien des stocks halieutiques constitue donc aujourd’hui un défi majeur face à une demande accrue. Optimiser la gestion de la pêche est plus que jamais indispensable et nécessite de mieux connaître la réponse des communautés de poissons face aux diverses variations de leur environnement, qu’elles soient d’origine anthropique ou naturelle.  

 

Coordonnée par des chercheurs français et américains et co-financée par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) dans le cadre de son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab) et par le groupe Électricité de France (EDF), cette étude apporte des éléments de réponse en se basant sur un travail de synthèse conséquent, rassemblant 33 ans d’enquêtes scientifiques sur l’ensemble de la mer du Nord ! L’objectif ? Caractériser et comprendre la dynamique des communautés de poissons de la mer du Nord dans un contexte de réchauffement des eaux et de réduction progressive de l’intensité de pêche [2].

 

 

L’enjeu de l’originalité fonctionnelle (ou de la diversité des fonctions)

 

L’équipe de chercheurs s’est notamment intéressée aux espèces originales de par leurs caractéristiques biologiques et écologiques que sont les espèces « fonctionnellement distinctes ». Pour cela, elle a étudié les données issues de campagnes scientifiques et les caractéristiques écologiques des espèces de poissons vivant en mer du Nord : leur régime alimentaire, leur âge à maturité sexuelle, la taille de leurs œufs, leur positionnement dans la colonne d’eau, etc. – autant d’éléments qui donnent des indications sur le rôle écologique de ces espèces dans leur écosystème. Pour ce travail, les chercheurs sont partis du principe que les espèces fonctionnellement distinctes – c’est-à-dire les espèces ayant des caractéristiques uniques comme, par exemple, une maturité sexuelle très tardive ou un régime alimentaire particulier par rapport aux autres espèces  – peuvent soutenir des rôles écologiques importants et potentiellement irremplaçables, et ainsi contribuer de manière disproportionnée au fonctionnement des écosystèmes.

 

En conséquence, les chercheurs distinguent à la fois des espèces fonctionnellement distinctes – par exemple le requin-hâ (Galeorhinus galeus) ou la grande castalogne (Brama brama) – et des espèces fonctionnellement communes – par exemple le rouget barbet (Mullus surmuletus) ou le grondin gris (Eutrigla gurnardus). Les chercheurs ont aussi montré que les espèces fonctionnellement distinctes se caractérisent par une maturité sexuelle tardive, une progéniture peu nombreuse et des soins parentaux importants, beaucoup étant des requins et des raies qui jouent un rôle essentiel dans la chaîne alimentaire marine.

 

 

Les résultats

 

Durant ces 30 dernières années, l’abondance de la plupart des espèces étudiées a augmenté, et ce, principalement en raison d’une pêche moins intense. Plus précisément, c’est principalement dans le sud de la mer du Nord, là où la pêche était historiquement la plus intense, que l’abondance des espèces fonctionnellement distinctes a le plus augmenté. C’est une bonne nouvelle pour les écosystèmes marins et une démonstration que les efforts de limitation des pressions liées à la pêche finissent par payer, surtout pour les espèces les plus fonctionnellement distinctes qui sont généralement non ciblées par les pêcheries mais malgré cela très sensibles à la pêche suite aux prises auxiliaires (voir figure).

 

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Figure : Les espèces ayant les caractéristiques les plus originales, et étant donc les plus fonctionnellement distinctes, sont les plus vulnérables face à la pêche, certaines d’entre elles étant aussi parmi les plus menacées selon l’UICN. Le statut UICN est représenté par couleur (CR = en danger critique d’extinction, rouge foncée; EN = en danger, rouge; VU = vulnérable, orange; NT = quasi-menacée, jaune; LC = préoccupation mineure, vert; DD = données insuffisantes, gris)

 

Nous devons cependant poursuivre nos efforts vers une gestion durable de ces milieux fragiles, notamment parce que parmi les espèces les plus distinctes, certaines d’entre elles sont considérées comme menacées d’extinction selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) et ont vu leur abondance diminuer au cours des 30 dernières années en mer du Nord, comme le pocheteau gris (Dipturus batis) et l’aiguillat commun (Squalus acanthias).

 

Enfin, l’équipe de chercheurs souligne l’importance de l’inclusion d’une composante fonctionnelle dans les plans de gestion pour permettre d’assurer une conservation plus pertinente des espèces et des écosystèmes.

 

 

[1] Dans son rapport de 2019, la plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (Ipbes) évoque près d’un million d’espèces animales et végétales menacées d’extinction si aucune mesure n’est prise pour freiner cette tendance.

[2] La réduction progressive de l’intensité de la pêche s’est faite suit à la mise en place, dans les années 1990, d’une réglementation basée sur l’application de quotas en vue d’une exploitation durable.

[FRB-Cesab] Une publication du groupe Score-Reef reconstruit le réseau alimentaire des récifs coralliens

Connaître le réseau alimentaire d’un écosystème signifie comprendre son architecture, ses flux de matière et d’énergie, et finalement permet de mieux le protéger. Cependant, pour les systèmes très riches, comme les forêts primaires ou les récifs coralliens, nous ne connaissons pas encore de façon globale l’ensemble des relations alimentaires entre espèces.

 

Sur la base de l’arbre de la vie, qui décrit les relations évolutives entre espèces, une équipe de recherche a montré que de nouveaux algorithmes d’apprentissage automatique permettent de prévoir de façon assez précise l’ensemble des relations alimentaires chez les poissons de récifs.

 

Cette étude, à laquelle des scientifiques du Centre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement (Criobe), de l’IRD, de l’Institut méditerranéen d’océanologie (M.I.O) et du Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab) de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) ont contribué, est parue dans le numéro de Janvier 2021 de PLoS Biology.

 

Découvrez l'article publié par le CNRS

 

 

  • Référence de l’article 

Parravicini V, Casey JM, Schiettekatte NMD, Brandl SJ, Pozas-Schacre C, Carlot J, et al. (2020) Delineating reef fish trophic guilds with global gut content data synthesis and phylogeny. PLoS Biol 18(12): e3000702. https://doi.org/10.1371/journal.pbio.3000702

 

 

  • Le Cesab 

Programme phare de la FRB, le Cesab (Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité) est une structure de recherche au rayonnement international dont l’objectif est de mettre en œuvre des travaux innovants de synthèse et d’analyse des jeux de données déjà existants dans le domaine de la biodiversité. Localisé à Montpellier, il accueille chaque année de nombreux chercheurs, issus de tous les continents.

 

Plus d'informations sur le projet Score-Reef

[Appel à projets FRB-Cesab / France Filière Pêche] Le projet Maestro sélectionné

Dans le cadre de l’appel à projets FRB-Cesab / France Filière Pêche, le projet Maestro a été retenu par le comité de pilotage et de sélection du Cesab.

 

Maestro est un projet porté par Arnaud AUBER et Camille ALBOUY, tous deux affiliés à l’Ifremer, qui s’intéressera aux effets du changement climatique sur les communautés marines exploitées.

 

Le projet sera basé sur l’analyse et la synthèse de données existantes, ainsi que la modélisation des effets des changements climatiques sur la biodiversité des stocks halieutiques européens et les pêcheries associées (Atlantique nord-est et Méditerranée). Il s’agira notamment de contribuer à mieux comprendre la réponse de la biodiversité des ressources halieutiques et des pêcheries dans le contexte des  changements climatiques, pour aider à mettre en place des mesures de gestion des pêches adaptative. 

 

 

En savoir plus sur Maestro

#ScienceDurable – À Toulon, habitats artificiels à la rescousse des poissons

Les ports sont aussi des écosystèmes

 

Contre la paroi du quai, des plongeurs font descendre dans les profondeurs trois murs végétaux de roselières de 150 mètres carrés. Ces herbiers artificiels reproduisent les habitats des espèces marines locales en imitant les caractéristiques des herbiers de posidonie méditerranéens. Ils ont été conçus pour abriter les juvéniles de plusieurs espèces locales de poissons. Au pieds de ces herbiers, des blocs de bétons, réalisés en impression 3D, sont accrochés pour recréer des cavités dans lesquels les poissons devenus un peu plus grands s’abriteront. Marc Bouchoucha, responsable du projet et membre du laboratoire Environnement Ressources Provence-Azur-Corse de l’Ifremer explique : « Les ports ont rarement été perçus comme des écosystèmes, ils ont été très souvent envisagés sous l’angle économique ou culturel, mais peu sous l’angle écologique. Or, ce que nous constatons, c’est qu’ils ont majoritairement été construits sur des petits fonds côtiers abrités, qui ont, pour les poissons, des fonctions écologiques très importantes. »

 

 

Comprendre le cycle de vie des poissons

 

Le cycle de vie des poissons est en effet tel qu’ils pondent au large, voient leurs œufs flotter et être portés par les courants, puis éclore. Au niveau des côtes, les larves trouvent abri dans les herbiers. Les juvéniles s’y développent et, avant d’atteindre le stade adulte, quittent les roselières pour s’abriter, un peu plus bas, dans de petits rochers. Une fois arrivés à maturité, les poissons rejoignent le large pour y accomplir le reste de leur cycle.

 

« Aujourd’hui, ce cycle de vie est particulièrement bousculé par les taux d’artificialisation du pourtour méditerranéen qui ne cesse de croitre depuis les années 1950. Dans certaines zones comme Monaco, on atteint même des taux d’artificialisation à 90 % souligne Marc Bouchoucha. »

 

 

Restaurer les fonctions écologiques des ports

 

Le chercheur et son équipe ont donc pour objectif de limiter l’impact de l’artificialisation sur le cycle de vie des poissons en réparant certaines fonctions écosystémiques dégradées . « Mais avant cela, il a fallu nous assurer que les conditions environnementales étaient satisfaisantes ». Une attention particulière a été portée à la contamination chimique en Méditerranée. « Sur ce point, les réseaux de surveillance et les études mis en œuvre par l’Ifremer sur les masses d’eau côtières au cours des 20 dernières années ont montré que la tendance globale est à l’amélioration. » Les indicateurs sont donc « au vert » : pas de hausse significative des niveaux de contamination ; des niveaux constants en contaminants et inférieurs aux normes de qualité environnementale pour la grande majorité des sites suivis ; certes il reste quelques foyers de contamination historique dans certains secteurs identifiés, mais globalement les efforts d’assainissement des dernières décennies ont porté leurs fruits. « Les conditions étaient donc réunies pour restaurer efficacement le milieu. »

 

 

Un suivi de grande précision

 

En s’inspirant des habitats naturels, la société Seaboost a recréé les habitats des juvéniles. Pour s’assurer de leur efficacité, les scientifiques ont prévu de réaliser des suivis à grande échelle. Ceux-ci sont effectués à différents niveaux. Tout d’abord dans les ports, pour s’assurer que ces habitats ne soient pas colonisés par des espèces envahissantes issues des bateaux provenant du monde entier. Puis sur les espèces elles-mêmes, pour comprendre comment ces populations s’adaptent à ce milieu pollué et sonore. Enfin, dans les zones naturelles, pour voir comment les poissons se développent : «Nous devons pouvoir scientifiquement prouver que de telles installations contribuent à l’amélioration des populations naturelles, souligne Marc Bouchoucha ». Tous les moyens sont mobilisés pour assurer le suivi « On a installé à demeure des caméras sur les récifs pour filmer en continu les poissons, on a couplé cela avec des logiciels de reconnaissance automatique issus de l’intelligence artificielles pour nous permettre d’identifier et de compter les poissons. L’ADN environnemental est aussi utilisé pour étudier la biodiversité difficilement observable à l’œil nu, comme les espèces dites cryptiques qui, sur le plan morphologique, ne présentent aucune différence, mais qui, d’un point de génétique, présentent des différences notables. »

 

Dans les années à venir, d’autres ports devraient mettre en place ces nurseries de poisson. Cette nouvelle est accueillie avec prudence par Marc Bouchoucha : « La restauration est un outil qui ne doit pas servir à justifier la dégradation d’habitats naturels. Il est important de rappeler qu’elle est en général utilisée lorsque l’on n’a plus d’autres solutions. La protection doit toujours primer sur la restauration. »

[Synthèse] Les conditions environnementales extrêmes réduisent la biodiversité et la productivité des poissons des récifs coralliens

L’équipe de recherche a donc étudié les différentes caractéristiques des poissons de récifs cryptobenthiques (vivant cachés sur les fonds marins) vivant dans les récifs coralliens les plus chauds et extrêmes du monde situés dans le sud du golfe Persique et ceux voisins, mais un peu plus cléments, du golfe d’Oman afin d’en savoir plus sur les effets de ces changements environnementaux notamment sur l’assemblage et le fonctionnement des communautés de poissons des récifs coralliens. 

 

 

 

En savoir plus

 

 

 

 

Les conditions environnementales extrêmes réduisent la biodiversité et la productivité des poissons des récifs coralliens

Pourquoi trouve-t-on certaines espèces dans un milieu donné alors que d’autres, qui leur ressemblent, en sont absentes ? Comment l’assemblage des espèces présentes affecte les dynamiques des processus écologiques de ce milieu ?
Ce sont à ces questions cruciales pour la conservation de la biodiversité et des services écosystémiques qu’a souhaité répondre une équipe de chercheurs, dont les résultats ont été publiés dans Nature communications le 31 juillet 2020. Plus précisément, leur étude s’est intéressée aux organismes tropicaux ectothermes1 considérés comme vulnérables aux changements environnementaux. En effet, les effets de ces changements, notamment sur l’assemblage et le fonctionnement des communautés de poissons des récifs coralliens, sont aujourd’hui encore largement méconnus. L’équipe de recherche a donc étudié les différentes caractéristiques des poissons de récifs cryptobenthiques2 vivant dans les récifs coralliens les plus chauds et extrêmes du monde situés dans le sud du golfe Persique3 et ceux voisins, mais un peu plus cléments, du golfe d’Oman.

 

Malgré une composition benthique et une couverture corallienne comparables, cette étude révèle que le nombre d’espèces de poissons du golfe Persique est divisé par deux et le nombre d’individus de ce même golfe par quatre, par rapport à celui d’Oman. Cette importante différence semble être due à des carences énergétiques chez les poissons : la disponibilité des proies est différente dans les environnements extrêmes, les températures y sont plus élevées et affectent par exemple la disponibilité en oxygène dans l’eau, etc. Des conditions environnementales plus difficiles, telles qu’attendues pour la fin du 21e siècle, pourraient donc fortement perturber la structure et la productivité des poissons de récifs coralliens indépendamment du déclin des récifs coralliens.

 

[1] Les animaux ectothermes sont ceux qui ne produisent pas de chaleur interne (insectes, reptiles, poissons, etc.).

[2] Les poissons cryptobenthiques sont ceux vivant cachés sur les fonds marins (du latin crypto : « se cacher » et benthos : fond, profondeur).

[3] L’article réfère au golfe Arabique ou Arabo-Persique mais les auteurs de la synthèse ont choisis d’utiliser le terme choisi par l’ONU, à savoir golfe Persique

 

 

Consulter la synthèse complète dans les ressources téléchargeables ci-dessous.

[Appel à projets] L’appel FRB-Cesab à revues systématiques est prolongé jusqu’au 9 septembre

Au travers de son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), la FRB finance deux post-doctorants jusqu’à 18 mois, pour réaliser un travail de revue systématique, mobilisant cartographie systématique, évaluation critique et synthèse narrative du corpus de textes sélectionnés, en vue de la rédaction d’un article de synthèse destiné à une revue scientifique internationale.

 

 

Le projet pourra aller soit jusqu’à une analyse lexicographique aboutie, soit jusqu’à l’extraction des données statistiques du corpus et leur analyse (méta-analyse). 

  

 

  • Thème 1 État et devenir de la biodiversité marine à l’heure des changements globaux 
  • Thème 2, en partenariat avec la Fondation Agropolis : Des solutions pour la transition agro-écologique qui préservent la biodiversité 

 

Date de clôture des pré-propositions9 septembre 2020, 23:59 CEST

Toutes les informations sont disponibles sur la page de l’appel.

[Appel à projets] Ouverture de l’appel FRB-Cesab / France Filière Pêche

Les changements climatiques vont impacter durablement les océans et les mers à l’échelle globale. Les impacts de ces changements sur les pêches maritimes sont devenus une préoccupation prioritaire.  

 

Dans ce cadre, en partenariat avec France Filière Pêche, la FRB appelle la communauté scientifique à soumettre des projets au Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), basés sur l’analyse et la synthèse de données existantes, ainsi que la modélisation des effets des changements climatiques sur la biodiversité des stocks halieutiques européens et les pêcheries associées (Atlantique nord-est et Méditerranée).

 

Il s’agira notamment de contribuer à mieux comprendre la réponse de la biodiversité des ressources halieutiques et des pêcheries dans le contexte des  changements climatiques, pour aider à mettre en place des mesures de gestion des pêches adaptative. 

 

Date de clôture des pré-propositions : 11 juin 2020, 13:00 (UTC+1)

Toutes les informations sont disponibles sur la page de l’appel.

#ScienceDurable – Les écosystèmes côtiers, puits de carbone bleu

Qu’appelle-t-on le carbone bleu ? 

 

Le carbone bleu correspond au carbone séquestré par les écosystèmes côtiers végétalisés. Les marais salés, les mangroves, ou encore les herbiers, sont autant d’écosystèmes susceptibles de capter le carbone sur le court terme, environ une dizaine d’années, dans leur biomasse et sur des temps encore plus longs, des milliers d’années, dans leurs sédiments. Contrairement aux sols terrestres, ces sédiments côtiers ont tendance à s’étendre avec l’augmentation du niveau de la mer On constate donc que la séquestration de carbone par les sédiments et les végétaux augmentent au cours du temps, en particulier lorsque ces écosystèmes sont sains et en bonne santé.

 

 

 

Ces écosystèmes sont-ils tout aussi efficaces que les forêts dans la séquestration du carbone ?  

 

On sait que les marais salés, les mangroves ou les herbiers stockent le carbone 10 à 20 fois plus que les forêts tempérées ou boréales. Lorsque que les forêts séquestrent moins de 10 g de CO2 par mètre carré et par an, les écosystèmes côtiers en retiennent 100 à 200 g. Néanmoins ces écosystèmes représentent une partie moins importante de la surface du globe que les océans ou les forêts. Si certaines études indiquent qu’on obtient un stockage de carbone équivalent aux forêts, les travaux se poursuivent pour mieux quantifier cette séquestration et la part du carbone relâchée vers l’atmosphère.  

 

 

 

Comment comptabiliser le carbone stocké puis relargué ? 

 

C’est extrêmement complexe. Nous travaillons avec d’autres scientifiques à la meilleure compréhension du rôle des zones côtières dans ce cycle du carbone. La principale difficulté vient du fait que nous avons une très forte hétérogénéité spatiale et temporelle. Les échanges de carbone interviennent au niveau de multiples interfaces terrestre-aquatique. Si on sait par exemple que l’océan côtier représente un puits de carbone incontestable grâce à sa production primaire phytoplanctonique, les estuaires émettent, quant à eux, d’importantes quantités de CO2 vers l’atmosphère du fait de l’intense minéralisation de la matière organique qui existe dans ces eaux turbides, c’est-à-dire troubles, limitant la photosynthèse. Entre ces écosystèmes, se trouvent les marais et les vasières intertidales1. Là, de multiples échanges horizontaux et verticaux de carbone existent au sein et entre les compartiments terrestre, aquatique et atmosphérique aux échelles du jour et de la nuit, de la marée, de la saison et de l’année. Ces échanges particulièrement complexes et dynamiques ne peuvent alors être appréhendés que de façon intégrative et multidisciplinaire en faisant appel à des équipes de géographes, de géologues ou d’écologues pour mieux préciser leurs statuts de puits ou source de carbone. 

 

 

 

Il semblerait néanmoins que la biodiversité marine joue un rôle clé dans la séquestration du carbone.  

 

Incontestablement si les débats portent sur la qualification des processus et la quantification des échanges, ils ne retirent rien aux services écosystémiques que nous retirons de cette biodiversité. Si son érosion se poursuit, la capacité à capturer efficacement le carbone de l’atmosphère pourrait être compromise, ce qui aurait pour conséquence d’augmenter les émissions de gaz à effet de serre et d’intensifier l’acidification des eaux côtières. Malheureusement, ces écosystèmes ne sont pas épargnés par le changement d’usage des terres. D’après les chiffres de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), on sait par exemple que chaque année, près de 2 % des mangroves disparaissent et contribuent au relâchement de 120 millions de tonnes de CO2 dans l’atmosphère. 

 

 

 

Est-il possible de restaurer cette biodiversité ?  

 

Depuis les années 1990, les surfaces des herbiers marins ont diminué de moitié à travers le monde. Ceci est à la fois dû à des pressions anthropiques, mais aussi à une pression de parasitisme. Pour protéger ces zones, un certain nombre d’actions ont été mises en place, comme aux États-Unis sur la côte de Virginie où se trouve le site de South Bay choisi pour faire partie d’un vaste projet de restauration des herbiers initié au début des années 2000. À partir d’un simple vestige découvert dans une baie en bord de mer au large de la côte est, The Nature Conservancy et le Virginia Institute for Marine Science ont diffusé plus de 72 millions de graines pour aider à accélérer la propagation naturelle de la zostère (Zostera marina), qui couvre aujourd’hui 13,5 km2. Une étude publiée dans Plos One a montré que ces prairies sous-marines restaurées devraient accumuler du carbone à un taux comparable à celui mesuré dans les prairies sous-marines naturelles. C’est extrêmement encourageant.

 

 

« Préserver les forêts marines pour contribuer aux équilibres de la biodiversité côtière »

par Thierry Thibaut, Maître de Conférences, Aix-Marseille Université, Mediterranean Institute of Oceanographie (MIO), Marseille. Travaillant sur le projet Marfor de Biodiversa.

 

 

« Si les forêts marines d’algues (kelps) ne jouent pas un rôle direct dans l’atténuation du changement climatique, elles y contribuent largement en permettant à la biodiversité côtière de se maintenir. Comme les forêts terrestres, elles abritent un très grand nombre d’espèces. Les forêts sous-marines de Kelps géants, par exemple en Californie, font plus de 40 mètres de haut et sont considérées comme le plus haut niveau trophique du monde avec ses sept à huit niveaux. Lors de perturbations d’origine naturelle ou antropique , plus la biodiversité est importante, plus l’écosystème a la possibilité de se régénérer. De même, lorsque l’écosystème est peu diversifié, les chances de le voir se reconstituer sont faibles. Ainsi assiste-t-on dans certaines zones abimées à des dénudements presque totaux, à cause d’herbivores comme les oursins qui y prolifèrent. Les forêts marines maintiennent donc de haut niveau de services écosystémiques, dont l’atténuation du changement climatique, en contribuant à préserver les écosystèmes côtiers qui sont pour certains des puits de carbone (herbiers de plantes à fleurs marines). C’est entre autres pour cela qu’il faut les préserver à un moment où on assiste à des déclins dans toutes les mers et tous les océans de ces écosystèmes côtiers, notamment en raison de la destruction irrémédiable des habitats due à la construction de ports, de marinas, parkings, mais aussi au surpâturage des herbivores et à une augmentation des températures. »

 

 

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1 Zone au-dessus du niveau de l’eau à marée basse et sous l’eau à marée haute en d’autres termes, des vasières se situant dans le secteur des marées.

[BiodivScen] Les résultats du projet Reef-Futures publiés dans la revue Science

Des scientifiques de l’Université de Montpellier, de l’IRD, du CNRS (tous trois membres fondateurs de la FRB) et de l’Université de Nouvelle-Calédonie ont étudié 1 800 récifs coralliens à travers le monde dont 106 en aires marines protégés. Ils se sont intéressés à leur capacité à atteindre simultanément des objectifs de biomasse en poissons commerciaux, d’herbivorie et de diversité fonctionnelle1. Les chercheurs ont démontré que seule l’intégration des récifs isolés très rares dans des aires marines protégées intégrales de type « no-take » permettait d’assurer ces trois objectifs à bon niveau.

 

Au cours de cette étude, les chercheurs ont également simulé l’effet de la « mise en aire marine protégée intégrale ou partielle » des sites mondiaux sans aucun niveau de protection.

 

Les résultats montrent que la création ou le renforcement du statut de protection d’aires marines protégées présente des résultats variables en fonction du statut de protection.

D’une part, la création d’aires marines avec une protection intégrale sur les récifs ayant subi des pressions humaines limitées aurait un effet très important sur la biodiversité.

D’autre part, la mise en place d’aires marines protégées partielles pourrait être une étape intermédiaire permettant d’assurer à la fois la poursuite des usages à des fins économiques et de subsistance des populations qui en dépendent et la conservation nécessaires à la protection des écosystèmes.

Enfin, les résultats de ces travaux de recherche soulignent également que la création d’aires marines protégées dans des zones fortement impactées par l’activité humaine est inefficace et ne permet pas d’assurer la restauration de peuplements de poissons ni pour la protection de la biodiversité ni pour la durabilité des activités de pêche.

 

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1 la biomasse en poissons commerciaux est importante pour les activités liées à la pêche, le potentiel d’herbivorie des poissons sur le récif est une fonction essentielle pour le contrôle des algues et le maintien de l’habitat corallien, la diversité fonctionnelle est une facette essentielle de la biodiversité

[#ScienceDurable] En mars, la campagne s’intéresse à la conservation et la gestion durable du milieu marin

Au travers de la campagne « La science pour un monde durable », découvrez ces pistes, nombreuses, sérieuses et passionnantes, sur lesquelles travaillent les chercheurs français en lien avec les recommandations proposées par l’Ipbes afin d’atteindre les objectifs du développement durable (ODD) des Nations Unies et de nourrir les réflexions en vue de la définition du cadre d’action post 2020 de la CDB.

 

Chaque mois, la FRB, ses instituts membres fondateurs et l’alliance AllEnvi mettent en avant les solutions de la recherche pour enrayer le déclin de la biodiversité. Suivez-nous sur nos réseaux sociaux et notre page dédiée. Pour ce premier mois, la thématique abordée est la conservation et la gestion durable du milieu marin.

 

Consulter les articles de la thématique :

 

#ScienceDurable – Océans, des labos géants

De l’échantillon moléculaire au balayage satellite, les spécialistes du milieu marin déploient un arsenal multi-échelles pour observer et caractériser mers et océans. Avec l’aide des populations et usagers de la mer, ils scrutent en permanence ces étendues salées qui couvrent les deux tiers de la planète. Les données qui en résultent bénéficient à la compréhension et la gestion de nombreuses questions : variation du climat, fonctionnement des écosystèmes, préservation de la biodiversité, gestion des ressources vivantes, lutte contre les facteurs de dégradation…

 

 

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#ScienceDurable – L’ADN des poissons récifaux se dévoile

Mieux identifier les espèces de poissons pour optimiser la gestion des ressources et mieux comprendre leur écologie. Tels sont deux des enjeux du barcoding ADN, l’analyse de fragments ADN permettant de déterminer l’espèce à laquelle appartient un individu. A l’aide de cette approche, une équipe de scientifiques menée par l’IRD vient de produire un nouveau jeu de données de barcodes des poissons récifaux de Nouvelle-Calédonie, complétant une base de données commune aux océans Indien et Pacifique. Ils ont identifié 805 espèces sur trois sites différents : Île de La Réunion et Madagascar, Nouvelle-Calédonie, Polynésie française.

 

« Le barcoding est un outil très utile car il permet d’identifier les poissons à n’importe quel stade de développement, explique le généticien Philippe Borsa. Nous avons ainsi pu mettre en lumière la diversité cryptique des espèces de cette région, jusqu’ici sous-estimée. Une espèce autrefois identifiée comme unique peut en fait regrouper plusieurs espèces aux caractéristiques différentes : le barcoding peut aider à les distinguer. »

 

 

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[Communiqué] Localiser les prédateurs pour protéger les écosystèmes de l’océan Austral

Dans un monde en mutation rapide, nous devons identifier les zones qui doivent être protégées contre les menaces actuelles et futures. L’enjeu est important, notamment pour la définition d’aires marines protégées, pourtant cette identification est difficile, particulièrement pour l’océan le plus inaccessible : l’océan Austral, en Antarctique. Les résultats d’une étude publiée cette semaine dans la revue Nature, décrivent une nouvelle solution à ce problème, permise par l’utilisation de données de suivi des oiseaux et des mammifères marins.

 

Le projet qui a permis la réalisation de cette étude a été mené par le Comité scientifique pour les recherches antarctiques (SCAR), avec le soutien de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) dans son centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab) au travers du projet RAATD, et du WWF-RU.

Le SCAR a fait appel à son vaste réseau de chercheurs travaillant sur l’Antarctique pour rassembler les données existantes sur le suivi des prédateurs de l’océan Austral. Une énorme base de données, en accès libre, a ainsi été créée avec les suivis de plus de 4 000 individus de 17 espèces différentes, recueillis par plus de 70 scientifiques dans le cadre de 12 programmes en Antarctique.

 

 

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Localiser les prédateurs pour protéger les écosystèmes de l’océan Austral

Cette solution repose sur un principe simple : les animaux se déplacent depuis leur site de reproduction jusqu’aux zones où ils trouvent de la nourriture. Ainsi, en identifiant les zones de l’océan Austral où les prédateurs se rendent le plus souvent, on peut en déduire où se trouvent leurs proies. Par exemple, les baleines à bosse se déplacent dans des endroits où elles peuvent avoir accès au krill, tandis que les éléphants de mer et les albatros se déplacent dans des endroits où ils peuvent trouver poissons, calmars ou autres proies. Si tous ces prédateurs et leurs diverses proies se trouvent en un même endroit, alors cette zone présente à la fois une grande biodiversité et une grande abondance d’espèces, ce qui en fait une zone de grande importance écologique.

 

Ce projet a été mené par le Comité scientifique pour les recherches antarctiques (SCAR), avec le soutien de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) dans son centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab) au travers du projet RAATD, et du WWF-UK. Le SCAR a fait appel à son vaste réseau de chercheurs travaillant sur l’Antarctique pour rassembler les données existantes sur le suivi des prédateurs de l’océan Austral. Une énorme base de données, en accès libre, a ainsi été créée avec les suivis de plus de 4 000 individus de 17 espèces différentes, recueillis par plus de 70 scientifiques dans le cadre de 12 programmes en Antarctique.

 

Cependant, il est impossible de suivre toutes les espèces à partir de tous leurs sites de reproduction : une simple carte fournirait donc une représentation biaisée de la distribution des animaux. Pour surmonter ce problème, des modèles statistiques sophistiqués ont été développés afin d’estimer les mouvements en mer des différentes espèces de prédateur, depuis leurs sites de reproduction. Ces estimations, combinées aux données obtenues sur les 17 espèces suivies, ont permis d’élaborer des cartes représentant les zones utilisées par un ensemble de prédateurs ayant des besoins en proies variés (cf. ci-dessous).

 

Ces zones d’importance écologique sont en partie couvertes par les aires marines protégées (AMP) existantes (créées dans un but de conservation), ce qui laisse à penser qu’elles sont actuellement aux bons endroits. Pourtant, si on s’intéresse à la façon dont ces zones d’importance écologique sont susceptibles de se déplacer d’ici 2100, d’après les projections des modèles climatiques du GIEC, ces mêmes zones ne se retrouvent plus couvertes par les aires marines protégées. Il est donc nécessaire de commencer à envisager des aires marines protégées dynamiques qui seraient mises à jour au fil du temps en fonction des changements environnementaux, afin d’assurer une protection continue dans le temps et dans l’espace  de l’océan Austral et de ses ressources.

 

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Fig. 1 : Carte de l’océan Austral montrant les données de suivi des mouvements (points noirs) de 4060 individus de 17 espèces de prédateurs marins qui ont été utilisées pour prévoir les zones d’importance écologique. Les points jaunes indiquent les endroits où chaque piste a commencé, autrement dit les sites de reproduction des individus.

Fig. 2 : Carte de l’océan Austral montrant les habitats d’importance écologique définies à l’aide des données de suivi de 17 espèces de prédateurs marins. Les zones présentant les valeurs les plus élevées en termes d’importance écologique sont entourées en blanc, dont deux zones hauturières : une au niveau de la péninsule Antarctique et se projetant sur l’arc de Scott, et l’autre entourant les îles subantarctiques dans le secteur indien de l’Océan Austral. Elles sont mises en rapport avec les aires marines protégées (AMPs) actuelles (en orange) et proposées (en magenta). Sont également indiquées, en noir, les limites des eaux nationales (ou zones économiques exclusives) et la limite de la zone de la convention CCAMLR (Commission pour la conservation de la faune et la flore marines de l’Antarctique).

 

#ScienceDurable – Pour des aires marines protégées efficaces

Une étude parue dans la revue Frontiers in Ecology and the Environment indique que seule 1,4 % de cette surface est en réalité intégralement protégée, alors que les aires intégralement protégées sont considérées comme les moyens de protection les plus efficaces. Selon Joachim Claudet, directeur de recherche au CNRS, et coauteur de l’article, « on constate à la fois dans la littérature scientifique et sur le terrain que non seulement les aires marines intégralement protégés sont minoritaires, mais qu’en plus, sur toutes celles qui existent, une infime minorité fonctionne. » Pour le chercheur, l’explication est simple : « les aires protégées qu’elles soient marines ou terrestres sont aujourd’hui trop souvent conçues uniquement sur des pré-requis écologiques, alors qu’elles devraient être pensées également en termes socio-écologiques. » Autrement dit pour protéger la biodiversité, il faudrait avant tout comprendre comment les hommes interagissent avec elle pour trouver les meilleures solutions de préservation. Fort de cette intuition, le chercheur et son équipe ont développé une méthode socio-écologique pour identifier les outils de gestion (dont les aires protégées) les plus à même d’être efficaces.

 

#ScienceDurable – La permaculture de la mer

En pratique, l’aquaculture multi-trophique intégrée consiste à inclure dans les écosystèmes aquacoles des organismes de niveaux trophiques inférieurs, comme de petits invertébrés, capables d’ingérer les rejets organiques, sources de pollution environnementale : « Les effluents d’élevage génèrent des nutriments (carbone, azote et phosphore). Ils peuvent, dans certains cas, s’accumuler dans le milieu et engendrer une réduction de la disponibilité en oxygène néfaste pour les espèces benthiques présentes à proximité. » poursuit la chercheuse. À l’heure où la demande mondiale de produits aquatiques est passée de 9,9 kg par habitant et par an à 18,6 kg en moins d’un demi-siècle, parvenir à un modèle durable devient un enjeu majeur pour le secteur aquacole « d’autant que cet accroissement n’est pas assuré par les pêcheries traditionnelles mais par l’aquaculture » poursuit Myriam Callier.

 

Afin de limiter les impacts sur l’environnement, l’Ifremer et dix autres instituts de recherche européens ont mené le projet IMTA-Effect. Leur objectif : évaluer les différents systèmes d’intégration des systèmes d’aquaculture multi-trophique intégrée dans des pays aussi différents que la France, le Portugal, la Roumanie et la Grèce. « Nous avons cherché à comprendre comment optimiser la chaine trophique entre le poisson, les microalgues, les mollusques et les détritivores, poursuit Myriam Callier. Nous avons travaillé sur chaque espèce pour bien comprendre sa biologie et son rôle dans les écosystèmes piscicoles. » Le choix de l’espèce extractive à intégrer est évidemment fonction du service de bioremédiation recherché.

 

Le projet IMTA-Effect s’est notamment concentré sur un ver polychète marin (Hediste diversicolor), détritivore, qui se nourrit des excréments des poissons. « On connait sa biologie, précise la chercheuse. Il vit dans des milieux naturellement riches en matière organique, tolère de faible concentration en oxygène et de fortes variations de température. Il a l’avantage de pouvoir aussi être valorisé comme appât de pêche. Son élevage en aquaculture multi-trophique intégrée pourrait permettre de diminuer son exploitation, car il est lui-même péché dans le milieu naturel. » Par ailleurs, son étude, à la fois réalisée en laboratoire et en milieu contrôlé, a permis de comprendre dans différentes conditions environnementales sa capacité de bioremédiation. « Nous sommes désormais en mesure de dire exactement combien de rejets de poisson le polychète marin peut ingérer au mètre carré. »

 

La difficulté est que chaque système d’élevage est spécifique. Répondre aux besoins de chaque espèce, surveiller les températures, les changements de saisons sont autant de facteurs à prendre en compte pour harmoniser les écosystèmes. Dans sa forme la plus complexe, un système en aquaculture multi-trophique intégrée peut comprendre jusqu’à quatre compartiments extractifs à équilibrer : les espèces autotrophes (macro et microalgues), les filtreurs (ex. bivalves), les détritivores (ex. polychètes, concombre de mer et autres invertébrés benthiques) et les bactéries. « Les résultats de ces études permettent de paramétrer des modèles qui serviront par la suite à prédire la capacité de bioremédiation de chaque maillon trophique et de tester différents scénarios, comme l’effet d’un changement de température » souligne la chercheuse.

 

À une échelle plus fine, le chercheur de l’Ifremer Cyrille Przybyla s’est lui intéressé au compartiment des microalgues qui ont pour particularité de purifier l’eau des bassins, mais aussi d’être potentiellement des aliments pour les poissons. Un enjeu majeur lorsque l’on sait que l’aquaculture impacte les stocks de petits poissons sauvages pêchés. Réduits en farine et en huile, ils sont utilisés pour nourrir principalement les poissons des fermes et plus largement certains animaux d’élevages ou domestiques. Pour alléger les pressions sur cette biodiversité marine, de très nombreux instituts de recherche à travers le monde se sont lancés dans une course pour sélectionner l’algue qui serait en mesure de devenir une source d’alimentation alternative pour le poisson d’élevage. « Notre démarche dans le projet MARINALGAE4Aqua, est tout autre, précise Cyrille Przybyla. Nous avons décidé de laisser faire la nature, en favorisant une polyculture algale naturelle. ». Pour cela, les effluents sont laissés en bassin ouvert permettant à la nature de mettre sa diversité locale au service de l’épuration de l’eau d’élevage et de la nutrition en aquaculture. « Ce n’est pas une seule algue qui vient se développer sur les effluents, mais toute une prairie de microalgues dont la diversité change en fonction des saisons. » Ces microalgues ont néanmoins des valeurs protéiques et lipidiques bien réelles. Cyrille Przybyla et son équipe sont arrivés à récolter 5kg de farine sèche, fertilisée par les effluents sortant des bassins d’aquaculture, qu’ils ont réussi à réinjecter dans l’alimentation du poisson « On a substitué 20% des farines et huiles de poissons dans la composition de l’alimentation des élevages. On est parvenu à améliorer la durabilité de l’aliment en se basant sur le principe de l’aquaculture multi-trophique intégrée, sans qu’il y ait de conséquence sur la croissance et le bien-être des poissons. » L’aquaculture multi-trophique intégrée peut donc se décliner sur le modèle des poupées russes et permettre à la filière aquacole d’opérer sa transition environnementale pour devenir la grande source d’alimentation durable qui participera de façon substantielle à nourrir de 8,5 milliards d’humains en 2030.

 

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Auteur : Julie de Bouville

Relecteurs : Myriam Callier, Cyrille Przybyla, Hélène Soubelet, Jean-François Silvain, Pauline Coulomb

 

[FRB-Cesab] Défis et opportunités de la conservation de la biodiversité à grande échelle

Le groupe de travail Pelagic du Centre de synthèse et d’analyse de la biodiversité (Cesab) vous convie à Montpellier pour un symposium en anglais le vendredi 29 novembre 2019. Au cours de cette journée, un groupe de chercheurs internationaux présentera les nouveaux défis associés à la surveillance de la faune et des activités humaines dans les aires protégées à l’aide des technologies les plus récentes. 

 

Comité d’organisation :

  • David MOUILLOT (Université de Montpellier,FR)
  • Tom LETESSIER (Zoological Society of London, UK)

 

Intervenants :

  • Jessica MEEUWIG (University of Western Australia, AU)
  • Tom LETESSIER (Zoological Society of London, UK)
  • Marc CHAUMONT (LIRMM Montpellier, FR)
  • Ana NUNO (University of Exeter, UK)
  • Rachel JONES (Zoological Society of London, UK)

[Synthèse] Les aires marines partiellement protégées sont-elles des facteurs d’efficacité écologique ?

Le nombre d’aires marines protégées a augmenté de façon exponentielle au cours des dix dernières années afin de répondre aux objectifs internationaux. Cependant, la plupart de ces zones permettent l’extraction de ressources et sont donc désignées comme « aires partiellement protégées » (Partially Protected Area). L’efficacité de ces aires reste encore incertaine en raison des multiples possibilités d’usage qui y sont généralement autorisées.

 

Dans un article paru dans la revue Frontiers in Ecology and the environment, des scientifiques ont évalué l’efficacité écologique des aires partiellement protégées regroupées selon un système de classification basé sur la réglementation. Cette nouvelle classification permet une différenciation non ambiguë entre les aires protégées, en fonction des usages autorisés.

Les résultats montrent que les zones hautement et modérément protégées présentent une biomasse et une abondance plus élevées d’espèces de poissons commerciales, tandis que l’abondance et la biomasse des poissons dans les zones faiblement protégées différent peu des zones non protégées. Les auteurs soulignent notamment que l’efficacité des zones modérément protégées peut être améliorée par la présence d’une zone adjacente intégralement protégée.

Ainsi, des usages limités et bien réglementés dans les aires partiellement protégées et la présence d’une zone intégralement protégée adjacente confèrent des avantages écologiques dont découlent les avantages socio-économiques.

 

Consultez la synthèse complète.

Les aires marines partiellement protégées sont-elles des facteurs d’efficacité écologique ?

Les zones côtières du monde sont de plus en plus soumises à des pressions humaines nécessitant une gestion adaptée et stratégique. L’établissement d’aires marines protégées (AMP) est un outil couramment utilisé pour améliorer la conservation, la sécurité alimentaire et la gestion des pêches. L’étude des conséquences écologiques des aires intégralement protégées (c’est-à-dire des zones sans prélèvement) révèle que l’abondance et la taille des espèces exploitées sont généralement accrues et ce, même au-delà des zones protégées dans certains cas, grâce à un effet de débordement. Par ailleurs, ces aires intégralement protégées permettent le rétablissement des populations et des communautés de poissons et d’autres taxons marins assurant ainsi la préservation de la structure de l’habitat.

 

La mise en place de zones intégralement protégées a souvent entraîné des conflits entre les enjeux de conservation de la biodiversité et les objectifs socio-économiques, en particulier dans les zones exploitées par de nombreux utilisateurs et soumises à différents types d’usages. Ainsi, l’établissement d’aires partiellement protégées, dans lesquelles certaines activités extractives peuvent être autorisées, est devenue une option favorisée par de nombreux décideurs, car plus facile à mettre en place au vu des objectifs à la fois socio-économiques et écologiques affichés. À la suite des accords et engagements internationaux, de plus en plus d’aires marines protégées sont en cours de création, mais la plupart ne sont que partiellement protégées. Il est donc urgent de déterminer quelles formes de protection partielle peuvent apporter des avantages socio-économiques tout en conservant une pertinence en termes de protection de la biodiversité.

 

Les aires partiellement protégées dépendent du contexte et leurs réglementations varient en fonction des objectifs de gestion qui vont, à leur tour, affecter leur efficacité écologique.

 

Un nouveau système de classification des aires protégées en fonction des activités commerciales et récréatives autorisées a été récemment développé (Horta e Costa et al., 2016). Dans ce système, les aires protégées, partielles et intégrales, sont classées en fonction des impacts cumulés des activités autorisées. Il est donc essentiel de comprendre les conséquences écologiques des différents types de protection partielle, celles-ci étant très certainement liées à différents régimes de réglementation. Dans cet article, les chercheurs présentent une nouvelle approche pour étudier et déduire comment une diversité de niveaux de protection partielle peut entraîner différents niveaux d’efficacité écologique. Ils ont également examiné comment les caractéristiques des aires protégées (âge et taille) peuvent influer sur l’efficacité des zones partiellement protégées, ou comment les caractéristiques spécifiques aux aires protégées multi-zones, telles que la présence d’une zone intégralement protégée adjacente, peuvent influer sur l’efficacité de la protection partielle.

 

[Communiqué] Publication dans PLoS Biology des travaux du groupe Cesab Pelagic

À la suite des travaux menés par le groupe de travail Pelagic, co-financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) accompagné par son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), une étude a été menée sur l’impact des activités humaines sur les prédateurs marins. Elle a mis en évidence, dans une publication scientifique publiée le 6 août 2019 dans PLoS Biology, que les prédateurs marins se regroupent principalement sur des récifs isolés et des monts sous-marins situés à plus de 1 250 km des ports de pêche.

 

Cette étude a été menée par une équipe internationale, dirigée par la Société zoologique de Londres (ZSL), de 15 chercheurs de 12 instituts de recherche différents, parmi lesquels l’Université de Montpellier et l’IRD.

 

Consultez le communiqué de presse.

 

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Références de l’article :

Letessier TB, Mouillot D, Bouchet PJ, Vigliola L, Fernandes MC, Thompson C, et al. (2019) Remote reefs and seamounts are the last refuges for marine predators across the Indo-Pacific. PLoS Biol 17(8): e3000366. https://doi.org/10.1371/journal.pbio.3000366

Les monts sous-marins éloignés de l’Homme comme derniers refuges des prédateurs marins

Références de l’article :

Letessier TB, Mouillot D, Bouchet PJ, Vigliola L, Fernandes MC, Thompson C, et al. (2019) Remote reefs and seamounts are the last refuges for marine predators across the Indo-Pacific. PLoS Biol 17(8): e3000366. https://doi.org/10.1371/journal.pbio.3000366

Publié dans PLoS Biology, le 6 août 2019 

 

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La pêche industrielle est en pleine expansion depuis les années 1950, et ce, à l’échelle mondiale. Le volume de la pêche industrielle représente plus de 80 millions de tonnes aujourd’hui, contre 20 millions en 1950. Au total, ce sont 55 % des zones océaniques qui sont exploitées par la pêche industrielle. Afin de remplir leurs filets, les pêcheurs doivent maintenant aller de plus en plus loin. Les derniers refuges de la faune marine, c’est-à-dire les espaces situés au-delà de la zone d’influence humaine détectable, sont ainsi de plus en plus rares. De vastes aires marines protégées (AMP), où la pêche est interdite, ont été établies depuis le début des années 2000 afin de préserver la biodiversité des océans. En 2015, les AMP atteignaient 3,4 % de la surface des océans mais nous manquons de connaissances sur la distribution globale de la biodiversité, de l’abondance et de la taille des prédateurs marins.

 

C’est dans ce contexte que l’équipe de recherche, co-financée par la FRB et accompagnée par son Cesab, s’est attachée à analyser des données recueillies dans les océans Indien et Pacifique entre 2012 et 2015. La richesse (nombre d’espèces), la taille et l’abondance de plusieurs prédateurs marins, dont des requins, ont été estimées à l’aide de systèmes vidéo avec appâts sur plus de 1 000 sites. Aucun animal n’a été manipulé directement.

Publiés le 6 août 2019 dans PLOS Biology, les résultats démontrent que, bien que la richesse des espèces ne soit pas impactée par les activités humaines, la taille du corps et l’abondance des requins sont fortement corrélées avec la distance aux pressions anthropiques et notamment l’éloignement des ports de pêche. Ainsi, l’équipe de chercheurs a constaté que le nombre de requins diminuait de moitié dans les mers les plus proches des villes de plus de 10 000 habitants. Proche de l’Homme, la plupart des caméras n’ont pas enregistré la moindre présence de prédateurs qui, notamment les plus gros individus, se concentrent dans des zones situées à plus de 1 250 km des ports.

 

Malheureusement, comme les chercheurs le font remarquer, ces derniers refuges de prédateurs sont peu couverts par les AMP. Les travaux du projet Pelagic attirent donc l’attention sur la nécessité d’établir de nouvelles stratégies prenant en compte les habitats préférentiels des prédateurs marins, essentiels au maintien de la biodiversité dans nos océans et du fonctionnement des systèmes océaniques. Il s’agit d’établir au plus vite de nouvelles AMP comprenant des régions côtières comme des régions plus éloignées en mer.

 

L’auteur principal de l’étude, Tom Letessier (ZSL), a déclaré : “Seulement 13 % des océans de la planète peuvent maintenant être considérés comme “sauvages”, mais les requins et autres prédateurs sont beaucoup plus abondants et plus grands à des distances supérieures à 1 250 km des activités humaines. Cela suggère que les grands prédateurs marins sont incapables de prospérer à proximité des populations humaines et constitue un autre exemple clair de l’impact de la surexploitation humaine sur nos mers.”

 

[Cesab] Postdoctorat Score-Reef

Localisation: CRIOBE – Perpignan, France et FRB – CESAB – Montpellier, France 

Salaire: 2250€ / mois

Contrat: 2 ans, temps plein

Date limite des candidatures: 31 juillet 2019

Date de prise de poste : 1er octobre 2019

 

Le projet CESAB Score-Reef  est à la recherche d’un écologiste travaillant sur des récifs coralliens, motivé pour contribuer à un projet d’étude sur l’état et les tendances des communautés benthiques et des poissons des récifs coralliens dans l’espace et le temps. L’objectif final du projet est d’évaluer la performance des indicateurs écologiques existants sur les récifs coralliens. Les résultats de ce projet auront un impact sur le réseau de surveillance existant dans les territoires français d’outre-mer. 

 

Le poste est un post-doc de 2 ans et le projet est financé par le CESAB à Montpellier (France). Les coordinateurs du projet – V. Parravicini (EPHE) et M. Adjeroud (IRD) – sont tous deux basés à Perpignan (France) et le post-doc devra être basé au CRIOBE à Perpignan, au moins pendant la première année du contrat.

 

 

Retrouvez la description complète de l’offre ici (en anglais). 

Les milieux marins et littoraux français et leurs services : une évaluation dans le cadre du programme EFESE

La France bénéficie d’un très riche ensemble d’écosystèmes marins et côtiers répartis sur l’ensemble du globe. Ceux-ci recèlent une biodiversité exceptionnelle dont on estime que 80% se situe dans les territoires ultra-marins. Avec un total de 55 000 km2, la France détient la quatrième plus grande surface de récifs coralliens au monde.

Évaluer l’état de santé des milieux aquatiques en Outre-mer : des outils basés sur la biodiversité

Une biodiversité exceptionnelle peuple les cours d’eau et les eaux marines des outre-mer français. Près de 500 espèces de poissons évoluent dans les fleuves et criques de la forêt amazonienne de Guyane ; plus de 150 variétés de coraux composent les récifs de Mayotte et de La Réunion ; un millier de taxons de diatomées, algues microscopiques unicellulaires, habite le fond des cours d’eau des Antilles, de Mayotte et de La Réunion. Cette nature exubérante subit pourtant les pressions des activités humaines et peut en être fortement impactée. Les rivières des territoires insulaires de la Guadeloupe, de la Martinique, de Mayotte et de La Réunion pâtissent notamment d’importants prélèvements d’eau qui réduisent drastiquement sa disponibilité pour la vie et la migration des espèces. Les activités d’orpaillage en Guyane induisent destruction du milieu naturel, asphyxient des rivières par les boues et pollution au mercure. À Mayotte, les détergents et lessives utilisées par les lavandières génèrent une pression chimique importante sur les invertébrés benthiques, organismes qui peuplent le fond des cours d’eau.

 

Pour rendre compte des altérations subies par les écosystèmes aquatiques et les communautés animales et végétales qui les composent, et ainsi pouvoir alerter et agir pour leur protection, la Directive cadre sur l’eau (DCE) a amené à développer des outils pour la surveillance des milieux aquatiques. Cette directive européenne, adoptée en 2000, vise à maintenir ou restaurer leur bon état écologique. En faisant des communautés biologiques les sentinelles de la qualité des eaux, elle a érigé la biodiversité en « juge de paix » de la surveillance et de la reconquête de l’état des rivières, des lacs et des eaux littorales.

[Synthèse] Schémas spatiaux et temporels de blanchissement de masse des coraux pendant l’Anthropocène

Un des résultats majeurs de l’étude « Schémas spatiaux et temporels de blanchissement de masse des coraux pendant l’Anthropocène », publiée dans Science, est la mise en évidence de l’augmentation spectaculaire de la fréquence et de l’intensité des phénomènes de blanchissement corallien qui atteignent des niveaux très élevés et quasiment irréversibles.

 

“L’état futur des récifs et des services écosystémiques qu’ils fournissent aux populations dépendra de manière directe de l’évolution de nos émissions de gaz à effet de serre et de notre capacité à renforcer la résilience des coraux au blanchissement par la gestion des facteurs de stress locaux”.

Schémas spatiaux et temporels de blanchissement de masse des coraux pendant l’Anthropocène

L’une des conséquences liées à l’augmentation des températures est le blanchissement corallien.

Le blanchissement se produit lorsque la densité des symbiotes algales, les zooxanthelles (Symbiodinium spp.), dans les tissus d’un hôte corallien diminue drastiquement à la suite d’un stress environnemental, révélant le squelette blanc du corail sous-jacent. La survie des coraux blanchis est alors compromise physiologiquement et nutritionnellement. Un blanchissement prolongé sur plusieurs mois conduit à des niveaux élevés de mortalité corallienne. La modélisation du climat mondial et les observations satellitaires indiquent également que les conditions thermiques requises pour le blanchissement des coraux prévalent de plus en plus, laissant présager que les zones de refuge, indemnes de blanchissement, pourraient disparaître au milieu du siècle.

 

Ces épisodes de blanchissement corallien, de plus en plus récurrents, et la mortalité des coraux qui en découle sont des phénomènes récents causés par l’impact anthropique. Ce qui, jusque dans les années 1980, n’était qu’un phénomène observable à l’échelle locale (quelques dizaines de kilomètres), causé par des facteurs de stress locaux (inondations d’eau douce, sédimentation ou encore temps inhabituellement froid ou chaud) est devenu un phénomène observable à l’échelle régionale (> 1000 km) et globale lié aux pressions anthropiques. C’est ce que révèle les bandes de croissance des coraux âgés des Caraïbes : les distorsions synchrones des dépôts squelettiques (bandes de stress) le long d’un tronçon de 400 km du récif mésoaméricain n’ont été trouvées que dernièrement suite aux conditions extrêmement chaudes.

 

Un des résultats majeurs de l’étude « Schémas spatiaux et temporels de blanchissement de masse des coraux pendant l’Anthropocène », publiée dans Science, est la mise en évidence de l’augmentation spectaculaire de la fréquence et de l’intensité des phénomènes de blanchissement corallien qui atteignent des niveaux très élevés et quasiment irréversibles.

 

[Vidéos] DCSMM – Bilan de santé des eaux marines métropolitaines – Ouverture de la consultation publique

Les documents stratégiques de façade font l’objet d’une consultation du public, qui s’ouvre aujourd’hui et jusqu’au 4 juin prochain sur : https://www.merlittoral2030.gouv.fr/

Cette consultation donne l’opportunité à toutes les parties prenantes de s’exprimer sur le contenu de ces documents, leur niveau d’ambition. Le niveau de participation est également révélateur de l’intérêt que la société porte aux enjeux marins. Les documents stratégiques de façade devraient ensuite être adoptés en septembre 2019.

Les poissons d’eaux profondes : à pêcher avec grande modération

L’exploitation non-durable des espèces est la deuxième cause du déclin global de la biodiversité, après le changement d’utilisation des terres. Elle est aussi probablement une des plus évidentes à résoudre, via des règlementations pertinentes. En se fondant sur les connaissances scientifiques, elles permettent de mieux gérer le prélèvement des espèces et d’ainsi assurer le renouvellement naturel des ressources. Le secteur des pêches notamment dispose de nombreux outils. Mais comme le révèle le cas des poissons d’eaux profondes, des mesures tardent parfois à être prises, mettant en danger les équilibres des écosystèmes et compromettant donc également la durabilité des activités.

 

Ses poissons vivant à plusieurs centaines de mètres de profondeur se sont retrouvés sur nos étals à la fin des années 1980. Les populations de morues, de lieus noirs et de merlus en mer du Nord et à l’ouest de l’Écosse connaissent un déclin de leur biomasse en raison de leur surexploitation, ce qui provoque une baisse de rentabilité des pêcheries françaises de haute-mer. Les chalutiers se tournent alors vers les espèces vivant plus en profondeur, entre 800 et 1 500 mètres, telles que le grenadier de roche (Coryphaenoides rupestris), le sabre noir (Aphanopus carbo) et l’hoplostèthe orange, ou empereur (Hoplostethus atlanticus) (Charuau et al., 1996). À la même époque, la consommation de poisson évolue vers une demande plus importante de filets de poissons au détriment de l’achat de poissons entiers. Cette évolution des modes de consommation permet la mise sur les marchés de filets de ces poissons d’eaux profondes, alors que présentés entiers, leur aspect aurait probablement été peu engageant pour les consommateurs. Plusieurs espèces de requins profonds sont quant à elles présentées sous forme de saumonette (requins étêtés, vidés et pelés).

 

Dès la fin des années 1990, certaines populations de poissons profonds montrent à leur tour des signes de déclin. Dans certaines zones, les captures d’hoplostèthes oranges, d’abord abondantes, se sont effondrées au bout de 12 à 18 mois d’exploitation seulement, révélant que pour cette espèce la pêche peut extraire une forte proportion de la biomasse1 en seulement quelques mois.

Dans des océans en mutation, la pêche doit devenir durable

À mesure que le climat se réchauffe, les températures des mers augmentent également. Du plancton aux oiseaux, en passant par les poissons, ce phénomène modifie significativement toutes les composantes des écosystèmes marins. Un des effets les plus documentés de ce réchauffement est la migration des espèces vers les pôles, qui se traduit par une diminution de la biodiversité marine dans la zone intertropicale. Mais de nombreux autres facteurs influent sur les communautés d’espèces, notamment leur exploitation non-durable par la pêche. Cette dernière est alors responsable d’impacts très négatifs sur les populations de poissons, dont la diminution a aussi une incidence négative sur les oiseaux marins (Cury et al., 2011 ; Grémillet et al., 2018). Une proportion croissante de ces populations – un tiers des espèces pêchées en 2015 – est surexploitée, tandis que 60 % sont exploitées à leur maximum, et seules 7 % des populations sont sous-exploitées (FAO 2018). Or, l’océan reste une source essentielle d’approvisionnement en protéines pour des millions de personnes dans le monde, notamment dans les pays en développement.

 

Il est donc urgent de mettre en place une gestion soutenable des pêches, au moment même où les impacts négatifs du changement climatique rendent la tâche encore plus complexe : certains modèles prévoient une diminution de la biomasse des poissons allant jusqu’à 25 % d’ici la fin du siècle, si les émissions de gaz à effet de serre devaient s’intensifier (Lotze et al., 2018). Pour estimer les impacts des changements climatiques combinés à ceux des pratiques de pêche, une équipe de scientifiques menée par Caihong Fu (DFO, Canada) et Yunne-Jai Shin (IRD, France) a étudié neuf écosystèmes marins dans le monde entier. L’équipe s’est appuyée sur des modèles mathématiques développés pour chaque écosystème, et les a utilisés comme des laboratoires virtuels. En manipulant ces outils, les chercheurs ont pu explorer la manière dont le système évolue lorsque le changement climatique et la pêche entrent en interaction. L’objectif du projet est d’apporter un éclairage scientifique à la prise de décisions afin d’adapter les politiques de gestion des pêches au changement climatique.

[Synthèse] La compétition mondiale entre les pêcheries et les oiseaux marins persiste malgré leur déclin généralisé

L’intensification de la pêche industrielle contribue à diminuer la quantité de nourriture disponible pour les oiseaux marins. Une étude parue dans la revue Current Biology a cartographié pour la première fois, la compétition entre la pêche industrielle et les oiseaux marins à travers le monde.

 

Entre 1970 et 2010, la consommation alimentaire annuelle mondiale des oiseaux de mer a diminué de 19 %, passant de 70 à 57 millions de tonnes. Les rendements globaux des pêcheries mondiales sont quant à eux passés de 59 à 65 millions de tonnes par an, allant même jusqu’à une augmentation de 91 % pour les calmars. Cette compétition – qui a augmenté dans près de la moitié des océans – menace de nombreuses espèces d’oiseaux dans le monde.

La compétition mondiale entre les pêcheries et les oiseaux marins persiste malgré leur déclin généralisé

En 2011, l’article de Cury et al. Global Seabird Response to Forage Fish Depletion — One-Third for the Birds soulignait combien les oiseaux marins étaient dépendants des ressources marines dans certaines régions du monde. Grémillet et ses collègues démontrent aujourd’hui que la compétition entre les oiseaux marins et les pêcheries est un facteur de stress significatif à l’échelle globale sur la période 1970-2010, pour une communauté mondiale d’oiseaux marins qui a décliné de 70 % depuis 1950 (Paleczny et al., 2015).

Bilan de santé des eaux marines (DCSMM)

Le ministère de la transition écologique et solidaire a mobilisé une large communauté scientifique pour évaluer l’état écologique des eaux marines métropolitaines.

 

Le 9 novembre 2018, le colloque “bilan de santé des eaux marines” a donné la parole aux chercheurs mobilisés pour communiquer leurs principaux résultats. S’en est suivi une table ronde pour mettre en perspective les implications opérationnelles de ce bilan pour la gestion des écosystèmes littoraux et marins.

 

Le colloque a été suivi de la projection d’un film documentaire puis d’un temps d’échange entre le public et les experts présents.

 

Action n°9 : Je préfère le poisson durable

Les Français consomment en moyenne plus de 30 kg par an de « poisson » (au sens commercial ou alimentaire, c’est-à-dire englobant poissons, mollusques et crustacés aquatiques). Dans l’Union Européenne, les ¾ de la consommation sont pêchés tandis qu’¼ est élevé, et à l’échelle mondiale, l’aquaculture assure un peu plus de la moitié de l’approvisionnement, le reste provenant de la pêche en eaux marines et continentales. L’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation (FAO)1 estime qu’1/3 des stocks2 halieutiques sont surexploités, c’est-à-dire soumis à une intensité de capture qui excède leur capacité à se renouveler. Si certaines espèces – telles que le thon rouge – se portent mieux grâce à des mesures de régulation de la pêche, d’autres sont au bord de l’effondrement et se retrouvent pourtant dans nos assiettes. Les travaux de recherche et rapports d’expertise scientifique peuvent cependant guider nos choix.

 

“Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation, 1/3 des stocks halieutiques sont surexploités.”

 

Préférer les poissons d’élevage à leurs équivalents sauvages n’est pas toujours une solution, car les seconds sont nécessaires pour nourrir les premiers. Plus précisément, plusieurs espèces de « petits pélagiques » sauvages (anchois, harengs, sardines, etc., aussi appelés « poissons fourrage ») entrent dans la composition de l’aliment des espèces carnassières d’élevage comme le saumon, ou encore les crevettes tropicales. Il faut un à plusieurs kg de poissons fourrage pour produire un kg d’une espèce d’élevage (dans le cas du saumon norvégien, environ 1 kg pour 1 kg). Les petits pélagiques « pèsent » près de 40 % des captures marines mondiales. Outre leur utilisation partagée, voire concurrente, entre fabrication d’aliments pour animaux d’élevage et consommation humaine (Majluf et al. 2017), ils sont aussi des proies indispensables aux prédateurs dans les écosystèmes marins.

 

Ainsi, la surpêche des petits pélagiques peut entraîner des conséquences dramatiques pour de nombreuses espèces de poissons, de mammifères et d’oiseaux marins comme le thon rouge de l’Atlantique, le manchot de Humboldt, le pétrel géant et la baleine à bosse (Pikitch et al. 2012, 2014). Or, les poissons fourrage, dont la vulnérabilité a été confirmée par des travaux scientifiques dans le cadre du projet Emibios, sont particulièrement affectés par les impacts combinés de la pêche et des changements climatiques (Travers-Trolet et al. 2014, Fu et al. 2018). Il ne faut cependant pas oublier que 30 % de la production aquacole mondiale de poissons d’élevage ne nécessite aucun apport d’aliment incluant du poisson fourrage : il s’agit en majorité de la carpe argentée et de la carpe à grosse tête. Il en est de même pour la culture des mollusques bivalves, principalement les moules, huîtres et palourdes.

 

Le maquereau et le hareng, ayant autrefois connu la surexploitation, auraient à présent des stocks suffisamment reconstitués pour que l’on puisse en recommander l’achat, d’autant plus que les qualités nutritionnelles des petits pélagiques sont avérées. Chez le poissonnier, plutôt que la dorade rose, classée comme quasi-menacée par l’Union internationale pour la conservation de la nature, il semblerait préférable de choisir la dorade grise ou la dorade royale3. Et plutôt que pour le thon rouge, dont l’état s’est certes amélioré mais reste fragile, mieux vaudrait opter pour la bonite à ventre rayé, également appelée « thon listao ». Les situations de ces espèces peuvent néanmoins basculer si les consommateurs ou les industriels se tournent trop massivement vers elles ! Pour acheter durable, le site www.ethic-ocean.org propose des guides pratiques et documentés, des fiches et une application mobile.

 

“Le label MSC est décerné aux pêcheries qui s’engagent à assurer une gestion durable des stocks afin d’éviter la surpêche.”

 

L’aquaculture étant assimilée à une activité agricole — ce qui n’est pas le cas de la pêche, les produits qui en sont issus peuvent être certifiés « Agriculture biologique », ce label ne tenant toutefois pas pleinement compte de leur incidence sur les écosystèmes marins. Concernant les poissons, mollusques et crustacés sauvages, le label MSC4 est décerné aux pêcheries qui s’engagent à assurer une gestion durable des stocks afin d’éviter la surpêche, et à ne pas détériorer les milieux aquatiques, par ailleurs très variés.

 

Car l’impact sur la ressource en elle-même n’est pas le seul qu’il faut considérer. Les fonds marins abritent les poissons dits « benthiques », à l’image des diverses espèces de raies, de soles et de plies (ou carrelets), ou encore de la baudroie commune, dont la queue est appelée « lotte ». D’autres poissons, dits « démersaux », vivent à proximité du fond, à l’instar du merlu commun5 et des différentes espèces de « gadidés », une famille de poissons dont le plus connu est la morue, ou cabillaud, et qui comprend également le merlan, le haddock et le colin d’Alaska (ce dernier atteignant le plus gros volume de capture parmi les poissons destinés à la consommation humaine).

 

La capture des poissons et de coquillages benthiques et démersaux nécessite des techniques qui raclent les sédiments marins (dragues et chaluts). La faune, constituée de coraux, d’éponges, de vers et de crustacés, est d’autant plus affectée que les engins pénètrent profondément dans le fond marin (Hiddink et al. 2017). Le temps mis par les écosystèmes pour se remettre des effets du chalutage varie entre près de deux ans et plus de six ans (Hiddink et al. 2017).

 

“La biodiversité de la petite faune est réduite de moitié dans les sédiments chalutés des grands fonds méditerranéens.”

 

Dans les sédiments régulièrement chalutés des grands fonds (-200 m et au-delà) du nord-ouest de la mer Méditerranée, la petite faune voit son abondance réduite de 80 % et sa biodiversité réduite de moitié (Pusceddu et al. 2014). Le renouvellement de la matière organique, processus crucial dans les écosystèmes benthiques, y est de 37 % plus lent. Or, le chalutage concerne des habitats toujours plus profonds, où l’impact est encore plus sévère et persistant (Clark et al. 2016). En Manche et au sud de la Mer du Nord, cette pratique affecte en particulier les espèces à durée de vie longue, du fait de leur croissance plus lente et de leur maturité plus tardive (Rijnsdorp et al. 2018). Cependant, pour certains poissons, plusieurs modes de pêche sont possibles. Mieux vaut alors choisir, par exemple, un bar de ligne plutôt qu’un bar de chalut.

 

Parmi les poissons dont les stocks sont largement surexploités figurent les espèces d’esturgeons (et leurs œufs, le caviar), l’espadon reconnaissable à son long rostre en forme d’épée, et surtout de nombreuses espèces de requins. D’après l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), un quart des raies et des requins sont fortement menacés d’extinction (Davidson et al. 2016, Dulvy et al. 2017). Il semble alors paradoxal que, selon la FAO, les débarquements (quantités rapportées au port) de requins et de raies aient décliné de près de 20 % en une décennie, après un pic en 20036.

 

“D’après l’UICN, un quart des raies et des requins sont fortement menacés d’extinction.”

 

En fait, si les pêcheurs capturent moins de requins et de raies, c’est bien parce que ces animaux se font plus rares dans les océans, et non parce que des mesures de régulation les y incitent ou obligent. En étudiant la situation dans 126 pays, des chercheurs ont en effet conclu que les débarquements de raies et de requins étaient étroitement liés à la demande des consommateurs, entraînant la pression de pêche sur les ressources, plutôt qu’à une meilleure gestion de leurs stocks. Ainsi, les pays présentant les plus forts déclins, Pakistan, Sri Lanka et Thaïlande, ont des côtes densément peuplées et exportent davantage de viande de raie et de requin (Davidson et al. 2016).

 

À l’heure où le commerce des produits issus de la mer est mondialisé et où 68 % des denrées alimentaires animales d’origine aquatique de l’Union Européenne sont importées (EUMOFA 2017), favoriser les produits locaux permet de diminuer le coût écologique du transport de l’océan à l’assiette. Et, à l’image des fruits et légumes, ils se consomment aussi de saison, selon leur période de reproduction (au cours de laquelle il faut éviter de les pêcher).

 

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1 Voir la récente édition du rapport biennal de la FAO (SOFIA 2018 : « La situation mondiale des pêches et de l’aquaculture), publié dans les 6 langues de l’ONU et téléchargeable à l’adresse :
http://www.fao.org/documents/card/en/c/I9540FR.

2 Le stock correspond à l’ensemble des individus d’une espèce susceptibles d’être pêchés, dans une zone géographique donnée.

3 Espèce carnivore sauvage, la daurade royale est aussi, avec le loup (ou bar), un produit « phare » de l’aquaculture en Méditerranée.

4 Le Marine stewardship council (https://www.msc.org/fr) est une ONG fondée par une entreprise, Unilever, et par le Fonds mondial pour la nature (WWF), mais indépendante de ces derniers depuis 1999. Aujourd’hui, 315 pêcheries sont certifiées MSC dans le monde, dont une dizaine en France.

5 Les merlus sont aussi appelés « colins », même s’ils sont assez différents du « colin d’Alaska » (gadidé).

6 Les captures de requins et de raies sont souvent déclarées par groupes d’espèces et non par espèce. On connaît des exemples où l’effondrement de l’une ou de plusieurs d’entre elles a été masqué par un report d’effort sur d’autres (Iglésias et al. 2010)

Récifs coralliens : des solutions pour aujourd’hui et demain

À eux seuls, ils abritent un tiers de la biodiversité marine connue. Ces zones sont de véritables nurseries pour les poissons récifaux et autres organismes marins. Plus de 500 millions de personnes dépendent de ces écosystèmes à travers la pêche, le tourisme, ou encore leur protection contre la houle. Tous ces services rendus ont un coût global estimé à 30 milliards de dollars par an.

La FRB, l’Institut océanographique de Monaco, le Centre de recherches insulaires et observatoire de l’environnement (CRIOBE-CNRS-EPHE), la Plateforme Océan & Climat et l’Ifrecor ont organisé un colloque restituant les dernières connaissances scientifiques et les solutions de préservation.

 

Action n°2 : J’évite les crèmes solaires néfastes pour la vie marine

Depuis près d’une quinzaine d’années, l’impact des crèmes solaires sur les coraux est dans le viseur des chercheurs. La première étude d’envergure remonte à 2008 (Danovaro et al. 2008). Les scientifiques se sont notamment penchés sur les zooxanthelles, qui vivent en symbiose avec les coraux. Ces petites algues ont pour particularité de tirer leur énergie des rayons du soleil par photosynthèse, et d’apporter aux coraux des nutriments essentiels. Si les algues meurent ou quittent la colonie de corail, cette dernière blanchit et succombe. L’étude, réalisée en laboratoire et in-situ dans différentes mers du monde, conclut que quels que soient le lieu et la concentration testée de crème solaire, cette dernière a systématiquement abouti à un rejet par les coraux de mucus contenant des zooxanthelles, rejet suivi d’un blanchissement complet dans les 96 heures (Danovaro et al. 2008). Un phénomène d’autant plus rapide que la température du milieu était élevée.

 

“Les larves de coraux exposées à l’oxybenzone s’ossifient de façon anormale et s’enferment dans leur propre squelette.”

 

En testant séparément différents composants présents dans les crèmes solaires, les auteurs ont montré que certains d’entre eux, des filtres organiques à UV comme le butylparaben et l’oxybenzone, se révélaient particulièrement néfastes, sans toutefois en expliquer le mécanisme précis. Or, selon une étude de Downs et al. (2016), à la lumière, l’oxybenzone détruit directement les zooxanthelles tandis qu’à l’obscurité, les coraux se mettent à les digérer. En outre, lorsque les larves de coraux sont exposées à cette substance, elles s’ossifient de façon anormale et s’enferment alors dans leur propre squelette. De plus, l’oxybenzone induit des lésions dans leur ADN. Les filtres minéraux (oxydes de zinc ou de titane) sous forme de nanoparticules seraient eux aussi toxiques pour la vie aquatique, car ils produisent des molécules appelées ROS (reactive oxygen species) qui détruisent les cellules (Lewicka et al. 2013 dans Wood 2018). Des études sont en cours pour évaluer leur effet sur les récifs coralliens (Tagliati et al. non publié, dans Wood 2018).

 

Il reste à savoir si les concentrations de crème solaire dans l’eau autour des récifs, probablement plus faibles que celles testées par les chercheurs en 2008, sont suffisantes pour entraîner de tels effets. Des études sont en cours. Cependant, certains blanchissements dans le monde semblent déjà ne pouvoir être expliqués que par la fréquentation des récifs par des touristes (Wood 2018). De prochaines études devraient aussi s’intéresser aux effets de ces produits à l’échelle de récifs coralliens entiers, voire d’écosystèmes, et non seulement aux effets distincts de chaque molécule, mais plutôt à leur « effet cocktail » lorsqu’elles agissent en mélange, comme c’est le cas en milieu naturel. Ces recherches seront cruciales : elles devront permettre de caractériser le risque de diminution de la résilience des coraux spécifiquement dû à ce stress écotoxicologique, sachant que les récifs sont déjà affaiblis par le réchauffement, l’acidification, ou encore par les ravages causés par l’étoile de mer Acanthaster, un redoutable « brouteur » de corail.

 

“Les récifs sont déjà affaiblis par le réchauffement, l’acidification, ou encore par les ravages causés par l’étoile de mer Acanthaster.”

 

Les filtres minéraux, lorsqu’ils ne sont pas formulés en nanoparticules, pourraient constituer une option plus favorable aux récifs – ce qui reste à confirmer par la science. Aujourd’hui, des crèmes solaires sont ainsi déclarées spécifiquement sans composants nuisibles aux coraux. Si aucun label n’existe encore pour certifier ces allégations, celles-ci marquent une volonté de certains industriels de prendre en compte l’impact de leurs produits sur la biodiversité. Cette démarche est à saluer.

 

© Lauric Thiault

Les récifs coralliens n’occupent que 0,1 % de la surface des océans, et représentent pourtant 30 % de la biodiversité marine mondiale. Les filtres contenus dans les crèmes solaires peuvent causer le blanchissement des coraux. Cependant, ce sont bien les changements globaux, avec la hausse des températures des océans, qui menacent le plus les récifs sur notre planète.

Mieux connaître la biodiversité européenne pour mieux la protéger : l’exemple des récifs coralligènes méditerranéens

À l’instar des récifs coralliens des pays tropicaux, les récifs coralligènes, dénommés ainsi pour le corail rouge qu’ils abritent, ont tout pour devenir un emblème pour les pays côtiers Méditerranéens. En effet, la riche et belle biodiversité qu’ils abritent présente un intérêt de conservation en soi, mais aussi des avantages pour la pêche et le tourisme. Les connaissances sur ces écosystèmes sont longtemps restées par­cellaires, mais se développent aujourd’hui, soulignant la beauté et la vulnérabilité de ces habitats.

 

L’article est consultable dans les ressources ci-dessous. 

La régulation de la pêche européenne a-t-elle sauvé le thon rouge ?

De nombreux stocks de poissons des mers et océans du globe ont longtemps été – et sont encore – surexploités, notamment en Méditerranée. Cette surexploita­tion représente un gaspillage des ressources naturelles et aussi une menace pour la biodiversité. Cependant, des travaux de recherche montrent qu’une partie des espèces pêchées vont mieux, grâce aux mesures de régulation de la pêche. C’est le cas pour les thons rouges de Méditerranée et de l’Atlantique Est. Ces bons ré­sultats ont d’ailleurs incité la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l’Atlantique (CICTA) a autoriser l’augmentation des quotas de pêche pour cette espèce . La question posée est alors : « le thon rouge peut-il supporter cette augmentation des quotas » ?

Des aires marines protégées en haute mer : l’Europe pionnière

La mise en place d’aires marines protégées est l’une des mesures phares de conservation de la biodiversité marine. Il s’agit principalement de définir un espace au sein duquel les activités humaines pourront être restreintes et la lutte contre la pollution renforcée, dans l’objectif de protéger un écosystème particulièrement remarquable ou sensible. Adoptée en 1992, la Convention sur la diversité biologique mentionne comme premier outil de conservation in situ l’établissement d’un « système de zones protégées ou de zones où des mesures spéciales doivent être prises pour conserver la diversité biologique ». Les objectifs d’Aïchi (CDB, 2010) pour la biodiversité prévoient ainsi la conservation d’au moins 10% des zones marines et côtières par des réseaux d’aires protégées. Aujourd’hui, il existe quelques aires marines protégées situées en haute mer – ce vaste espace, au delà des zones économiques exclusives des États côtiers – qui représente 64% des mers et océans et qui constitue un enjeu crucial pour la biodiversité. Un nouveau traité est actuellement en cours de discussion pour introduire des mesures juridiquement contraignantes pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité en haute mer. En effet, il est impossible de contraindre juridiquement des États à appliquer un accord s’ils n’en sont pas Partie. Comment, dans ces conditions, traiter ce problème et ainsi préserver la biodiversité des écosystèmes fragiles et méconnus qui s’y trouvent ?

 

Comment accroître durablement les ressources alimentaires marines ?

La Commission européenne, agissant dans le cadre du processus d’avis scientifique (Commission’s Scientific Advice Mechanism, SAM), a saisi son groupe de conseillers scientifiques de haut niveau sur la question “comment accroître l’extraction de nourriture et de biomasse d’origine marine sans compromettre les bénéfices des générations futures ?”.

 

Le groupe a entrepris ses travaux au début de l’année 2017 ; son rapport a été publié le 30 novembre 2017.

 

La note consultable ci-dessous comprend deux parties :

  • la première fournit des informations sur l’état et les tendances de la production d’aliments animaux d’origine aquatique, et rappelle quels sont les principaux impacts de la pêche et de l’aquaculture sur la biodiversité marine ;
  • la seconde commente les recommandations du groupe d’experts, spécialement au plan des incidences potentielles sur la biodiversité.

Les coraux : de performantes machines à remonter le temps

Les coraux peuvent fournir des informations sur les variations de certains paramètres au cours du temps, tels que la température des eaux de surface, la salinité ou encore la présence de pollutions d’origine humaine. Comment de simples échantillons de coraux permettent-ils de recueillir autant d’informations ?

 

Les coraux massifs du genre Porites sp. sont les plus fréquemment utilisés en paléoclimatologie. Ces organismes, vivant à faible profondeur, sont particulièrement sensibles aux variations physico-chimiques de leur milieu. Leur squelette calcaire, qui peut atteindre plusieurs mètres de diamètre, incorpore tout au long de leur croissance des éléments chimiques contenus dans l’eau de mer environnante. La radiographie de ce squelette permet d’établir la chronologie de leur croissance. Celle-ci se matérialise, à la manière des cernes d‘un arbre, sous la forme d’une alternance saisonnière de bandes sombres et de bandes claires de périodicité annuelle. Ainsi, l’analyse des éléments chimiques suivant l’axe de croissance du corail apporte des informations sur les variations des paramètres environnementaux et des pollutions anthropiques au cours du temps.

 

Radiographie d’un squelette calcaire de Porites (© IRD-C.E. Lazareth)

 

L’originalité de l’utilisation des coraux par rapport à d’autres archives (carottes sédimentaires ou de glace, stalagmites, etc.) réside dans leur précision temporelle ; en effet, ils permettent d’obtenir des données à une résolution plus fine, à l’échelle mensuelle. Par ailleurs, les Porites forment des colonies très denses à durée de vie longue. Celles-ci permettent de reconstituer des séries temporelles des variations environnementales qui dépassent parfois les 100ans. Grâce à certains fossiles datant du Trias, il est même possible de retracer les conditions climatiques et chimiques des océans pour des périodes géologiques très anciennes. Cela permet de valider ou de réfuter les résultats des modèles servant à estimer les variations futures du climat.

 

Une raison de plus pour protéger ces témoins du passé !

Nécessité d’un accord international sur la pollution de l‘océan par les plastiques

Accédez à la traduction de l’article scientifique :
Pourquoi un accord international sur la pollution de l‘océan par les plastiques est indispensable

 

Les plastiques s’accumulent partout dans le monde à un rythme croissant. D’après Geyer R. et al., si la tendance actuelle continue, 12 000 millions de tonnes de déchets plastiques seront mis en décharge ou dans l’environnement d’ici 2050.

 

Comme les gaz effet de serre ou les substances détruisant la couche d’ozone, les plastiques ne s’arrêtent pas aux frontières nationales. Entraînés par le vent ou l’eau, ils finissent majoritairement leur course dans les océans affectant les organismes à tous les niveaux d’organisation biologique.

 

Cette pollution impacte les animaux marins (capture, étranglement, étouffement, etc.), avec des conséquences souvent fatales. Son action chimique, sous forme microscopique, agit également sur les organismes au niveau génétique ou fonctionnel (baisse de fertilité), les populations (diminution de la taille des populations) ou les communautés (déstructuration des relations entre les organismes constituant ces communautés).

 

Ces impacts, combinés à l’accélération de la production de plastique, ont amené un collectif de chercheurs à interpeler la communauté internationale pour prendre des mesures avant que les écosystèmes ne soient altérés de façon irréversible.

 

Le collectif demande à ce qu’un accord international définisse des objectifs pertinents et mesurables pour réduire la pollution plastique dans tous les océans du monde, car si des solutions ont été mises en place au niveau local, elles n’ont pas une ampleur suffisante pour faire face au caractère global d’un problème qui s’accroit très rapidement.

 

Ils demandent aussi que cet accord soit accompagné d’un programme visant à étendre la responsabilité des producteurs et l’intégration des coûts environnementaux dans le prix des produits, pour créer un fonds mondial, sur le modèle du fonds Climat de l’UNCCC, afin d’aider les Etats participants à développer les filières appropriées de traitement des déchets plastiques.

Pelagic | Prioriser les aires marines de conservation pour les vertébrés ayant une importance écologique et mondiale

Le déclin des prédateurs marins s’est intensifié à l’échelle mondiale dans les années 1950, les bateaux de pêche industriels ciblant des populations de requins et de thons auparavant inaccessibles. Ces pêcheries extensives continuent de s’étendre, tandis que les prises  continuent de diminuer au niveau mondial. Étant donné la difficulté de gérer ces pêches de façon durable, il a été proposé d’établir de vastes Aires Marines Protégées (AMP) où il serait interdit de pêcher afin d’inverser les tendances. Ces AMP, qui sont relativement à l’abri des effets des perturbations anthropiques, nécessitent la connaissance des habitats essentiels au maintien de ces prédateurs marins. Ces connaissances, pourtant cruciales, sont actuellement très limitées puisqu’elles reposent principalement sur une répartition géographique des espèces obtenue grâce aux prises de pêche, biaisées par la prise d’espèces non ciblées et par une sous-déclaration délibérée.

 

Ici, le projet FRB-Cesab Pelagic surmonte cette limitation en recueillant les informations et les données les plus à jour et les plus complète, sur la biogéographie et l’utilisation de l’habitat des mammifères marins, des requins et des poissons.

 

Ce document synthétise en quelques pages le contexte et les objectifs du groupe, les méthodes et approches utilisées, les principales conclusions ainsi que l’impact pour la science, la société, la décision publique et privée.

Colloque Acidification des océans

Ce programme permet de mobiliser 720 000 euros à destination des chercheurs français. Lancé en septembre 2015, l’appel à propositions de recherche a reçu 18 propositions. Huit projets couvrant les défis de recherche allant de la compréhension des impacts de l’acidification à leur modélisation, en passant par l’observation et la cartographie du phénomène ont été sélectionnés par le conseil scientifique ad hoc présidé par Jean-Pierre Gattuso du Laboratoire d’océanographie de Villefranche-sur-Mer. Ces projets reçoivent chacun 90 000 euros et associent de nombreux laboratoires et instituts de recherche, en France métropolitaine, en Polynésie française et à Monaco.

 

Les 8 projets financés sont les suivants :

  • ACIDREEF : impact de l’acidification sur les récifs ; coordonné par le laboratoire CRIOBE (Polynésie Française), avec l’AIEA Monaco et le centre scientifique de Monaco
  • ECOSYSTEME : Évaluation des impacts sur deux écosystèmes de cyanobactéries (algues bleues) ; coordonné par le laboratoire CORAIL (Polynésie Française)
  • ICO-BIO : Impact du changement océanique sur la biologie de l’ormeau, une espèce d’intérêt économique ; coordonné par le laboratoire BOREA (station de biologie marine de Concarneau)
  • MERCY : Impact du mercure et du gaz carbonique sur la seiche ; coordonné par le laboratoire LIENS (université de La Rochelle)
  • COCCACE : Les coccolithophores (algues unicellulaires) et l’acidification océanique ; coordonné par le CEREGE (Aix-en-Provence)
  • ACIDOSCOPE : Acidification de l’océan : projections, régionalisation et cartographie ; coordonné par l’IPSL (Gif sur Yvette)
  • AiAiAi : Acidification, acclimatation et adaptation des huîtres, coordonné par IFREMER Polynésie
  • PACIO : Réponses physiologiques et adaptatives des poissons à l’acidification des océans ; coordonné par le laboratoire LEMAR (Brest).

 

Les conventions avec les porteurs des projets sont à présent presque toutes signées.

Le lancement du programme a lieu en parallèle du 4e atelier international sur l’impact économique de l’acidification des océans, consacré à l’écosystème corallien et organisé par le CSM et l’AIEA.

 

Découvrez, dans les ressources ci-dessous, les présentations des projets exposés ainsi que le compte-rendu du conseil scientifique qui s’est tenu ce même jour.

Les réserves marines peuvent atténuer les effets du changement climatique

Accédez à la transcription de l’article de C.M. Roberts et al. par Hélène Soubelet, docteur vétérinaire et directrice de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB).

 

Les aires marines protégées ont un rôle majeur à jouer dans l’atténuation et l’adaptation aux changements globaux. En plus de préserver la biodiversité, une bonne gestion des réserves marines peut contribuer à l’adaptation des écosystèmes et des populations humaines aux cinq impacts majeurs du changement climatique sur les océans : l’acidification, la montée des eaux, l’intensification des tempêtes, les changements dans la distribution des espèces, la baisse de productivité et l’appauvrissement en oxygène. Les aires marines protégées peuvent même devenir des outils efficaces et peu coûteux pour réduire l’avancée du changement climatique. En effet, elles favorisent la séquestration et le stockage du carbone et constituent une « police d’assurance » pour les sociétés humaines en limitant les pressions directes sur l’environnement.

 

Parmi les effets positifs des aires marines protégées pour l’adaptation aux effets du changement climatique, on peut retenir que :

1/ la protection des zones littorales humides (mangroves, marais, herbiers) maintient une forte activité photosynthétique qui, en utilisant le CO2, réduit l’acidification des eaux. Ces zones constituent des refuges pour les organismes calcifiants.

2/ la création d’aires marines protégées en haute mer favorise la préservation d’une grande abondance des poissons téléostéens méso-pélagiques qui jouent un rôle majeur dans le cycle du carbone.

3/ les aires marines protégées régulent les menaces telles que la surexploitation des milieux, l’urbanisation côtière ou le dragage non durable et sanctuarisent des zones tampons (zones humides côtières, les vasières et les récifs) qui protègent les infrastructures et les zones anthropisées contre l’élévation du niveau de la mer.

 

Parmi les effets positifs des aires marines protégées pour l’atténuation du changement climatique, on peut retenir que :

1/ les océans constituent un puits de carbone majeur. Les animaux jouent des rôles cruciaux dans les processus biogéochimiques. Les aires marines protégées contribuent ainsi à la préservation du rôle des océans dans la régulation du climat.

2/ les aires marines empêchent le déstockage du carbone en limitant des méthodes de pêche hauturières intensives – comme le chalutage – qui participent à la remise en suspension du carbone sédimentaire.

3/ les écosystèmes complexes favorisent des processus comme la dispersion des pollutions, la protection côtière, ou encore la production alimentaire tout en évitant les changements de régime des écosystèmes aux conséquences graves et inattendues. 

 

C.M. Roberts et al., Marine reserves can mitigate and promote adaptation to climate change, PNA 114, 6167-6175, 2017

Les réserves marines peuvent atténuer les effets du changement climatique et favoriser l’adaptation des écosystèmes et des populations

Un article de synthèse signé par les plus grandes autorités mondiales en matière d’océanographie biologique – comme les scientifiques C.M. Roberts (Université d’York), J. Lubchenco, ancienne sous-secrétaire au commerce de l’administration Obama, D. Pauly (Université de la Colombie-Britannique) ou encore P. Cury (IRD et alors membre du conseil scientifique de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité) – démontrent comment les aires marines protégées contribuent à la fois à la préservation des espèces, à l’atténuation du changement climatique et à son adaptation. Pour que ces zones soient un outil efficace pour préserver les espèces et faire face au changement climatique, les scientifiques estiment qu’il faudrait protéger 30 % du domaine marin, or seuls 3,5 % sont actuellement couverts.

 

Les aires marines protégées ont un rôle majeur à jouer dans l’atténuation et l’adaptation aux changements globaux. En plus de préserver la biodiversité, une bonne gestion des réserves marines peut contribuer à l’adaptation des écosystèmes et des populations humaines aux cinq impacts majeurs du changement climatique sur les océans : l’acidification, la montée des eaux, l’intensification des tempêtes, les changements dans la distribution des espèces, la baisse de productivité et l’appauvrissement en oxygène. Les aires marines protégées peuvent même devenir des outils efficaces et peu coûteux pour réduire l’avancée du changement climatique. En effet, elles favorisent la séquestration et le stockage du carbone et constituent une « police d’assurance » pour les sociétés humaines en limitant les pressions directes sur l’environnement.

 

Parmi les effets positifs des aires marines protégées pour l’adaptation aux effets du changement climatique, on peut retenir que :

  • la protection des zones littorales humides (mangroves, marais, herbiers) maintient une forte activité photosynthétique qui, en utilisant le CO2, réduit l’acidification des eaux. Ces zones constituent des refuges pour les organismes calcifiants ;
  • la création d’aires marines protégées en haute mer favorise la préservation d’une grande abondance des poissons téléostéens méso-pélagiques qui jouent un rôle majeur dans le cycle du carbone ;
  • les aires marines protégées régulent les menaces telles que la surexploitation des milieux, l’urbanisation côtière ou le dragage non durable et sanctuarisent des zones tampons (zones humides côtières, les vasières et les récifs) qui protègent les infrastructures et les zones anthropisées contre l’élévation du niveau de la mer

 

Parmi les effets positifs des aires marines protégées pour l’atténuation du changement climatique, on peut retenir que :

  • les océans constituent un puits de carbone majeur. Les animaux jouent des rôles cruciaux dans les processus biogéochimiques. Les aires marines protégées contribuent ainsi à la préservation du rôle crucial des océans dans la régulation du climat ;
  • les aires marines empêchent le déstockage du carbone en limitant des méthodes de pêche hauturières intensives – comme le chalutage- qui participent à la remise en suspension du carbone sédimentaire ;
  • les écosystèmes complexes favorisent des processus comme la dispersion des pollutions, la protection côtière, ou encore la production alimentaire tout en évitant les changements de régime des écosystèmes aux conséquences graves et inattendues

Islands | Assemblage des communautés écologiques sur les îles lointaines vers un nouveau modèle de biogéographie insulaire

La théorie de la biogéographie insulaire (ETIB) a longtemps servi de référent pour comprendre la formation des communautés sur les îles. Fondée sur le postulat que le nombre d’espèces d’une île dépend d’un équilibre dynamique entre des processus de colonisation et d’extinction, elle prédit notamment que les grandes îles ou celles qui sont proches des continents contiennent davantage d’espèces que les îles petites ou lointaines. Or bien que les prévisions de cette théorie aient souvent été vérifiées, la superficie et le degré d’isolement ne sont pas les seuls facteurs qui influencent la biodiversité des îles. En effet, la divergence évolutive et la formation de nouvelles espèces sur les îles est un paramètre qui n’a jusqu’ici pas été pris en compte.

Des études récentes ont suggéré que la spéciation – c’est à dire le processus évolutif par lequel de nouvelles espèces apparaissent – peut jouer un rôle analogue à la colonisation, en ajoutant des espèces aux communautés des îles éloignées. Deux populations insulaires issues d’un même événement de colonisation (une même population mère) peuvent ainsi se différencier à l’intérieur d’une île ou d’un archipel et devenir reproductivement isolées l’une par rapport à l’autre ; ce phénomène se nomme la cladogénèse. Mais les différences conséquentes entre les processus de spéciation et de colonisation ne permettent pas de déterminer comment et dans quelle mesure l’analogie peut être étendue à l’ETIB ou à d’autres théories pertinentes qui cherchent à expliquer l’assemblage communautaire.

L’objectif initial du groupe FRB-Cesab Islands a donc été de tirer parti des excellentes conditions expérimentales des systèmes insulaires pour examiner et comparer systématiquement l’influence des facteurs géographiques et géologiques sur l’évolution des assemblages écologiques, puis de fournir une nouvelle et meilleure compréhension des communautés d’espèces assemblées au fil du temps sur les îles.

 

Ce document synthétise en quelques pages le contexte et les objectifs du groupe, les méthodes et approches utilisées, les principales conclusions ainsi que l’impact pour la science, la société, la décision publique et privée.

Gaspar | Adaptation des espèces de poissons envahissantes dans un contexte de changement global

L’invasion d’espèces non autochtones est considérée comme l’une des principales menaces pour la biodiversité, entrainant des changements importants dans la structure et le fonctionnement des écosystèmes. Dans le contexte de la globalisation, la recherche sur les espèces envahissantes est devenue de plus en plus importante du fait du nombre croissant d’espèces déplacées par l’activité humaine –transports, commerce, etc. Les espèces envahissantes sont souvent sources de problèmes, car elles entrent en compétition avec la faune ou flore locales. Elles perturbent ainsi souvent la densité et la qualité des espèces natives. Il en résulte une perte de biodiversité qui, à terme, peut engendrer des pertes importantes de services écosystémiques, comme par exemple une diminution des rendements de la pêche. Depuis l’ouverture du Canal de Suez en 1869, la Méditerranée de l’Est connait une transformation sans précédent dans la composition de ses espèces, avec l’arrivée massive d’espèces non autochtones, dites lessepsiennes, provenant de la Mer Rouge. Ces espèces constituent déjà plus du quart des captures dans l’est de la Méditerranée, et parfois bien plus. Certaines de ces espèces arrivent même aujourd’hui jusqu’en Méditerranée de l’Ouest.

 

Le projet Gaspar a particulièrement étudié les mécanismes qui permettent l’adaptation d’une espèce à un nouvel environnement, dans le contexte d’une invasion biologique et de l’adaptation des espèces aux changements climatiques et globaux. En effet, pour la première fois, le projet Gaspar a mené une étude sur l’ensemble des espèces habitant des systèmes limitrophes pour identifier les processus sélectionnant celles qui deviendront envahissantes. Cette information est rarement disponible et jusqu’à présent cette approche n’avait jamais été utilisée.  

 

 

Ce document synthétise en quelques pages le contexte et les objectifs du groupe, les méthodes et approches utilisées, les principales conclusions ainsi que l’impact pour la science, la société, la décision publique et privée.

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