Thématique : Gouvernance
Végétaliser les cours d’école pour favoriser la biodiversité urbaine
[International] Continuer de créer des liens entre biodiversité et climat à l’échelle paneuropéenne

Le Pesc c’est une consultation paneuropéenne des parties prenantes (“Pesc”) du réseau Europe et Asie centrale de l’IPBES. Cette année à Bruxelles se tenait sa 8e édition qui a réuni une centaine de parties prenantes de la biodiversité et du changement climatique, des régions Europe et Asie centrale : points focaux nationaux de l’Ipbes, du Giec, décideurs, représentants de la commission européenne, chercheurs et chercheuses, initiatives à l’interface science-société-politiques (FRB, Biodiversa+, Respin, Coop4CBD, UICN…), etc.
Ses objectifs ?
- Une meilleure compréhension des processus et des opportunités de l’IPBES et du GIEC pour les experts et les politiques (comment contribuer aux rapports, comment utiliser les rapports des deux plateformes, etc.).
- Un partage d’expériences et de stratégies sur la contribution aux processus IPBES et GIEC.
- Des échanges de connaissances sur les liens entre la biodiversité et le changement climatique, discussions sur les possibles collaborations entre les deux plateformes.
Sa 8e édition était organisée conjointement avec Biodiversa+ (le partenariat européen pour la biodiversité, dont la FRB accueille une partie de l’équipe) et le projet européen RESPIN (visant à renforcer le lien IPBES (biodiversité) – GIEC (climat), dont la FRB accueille également une partie de l’équipe). Côté FRB, Marie-Claire Danner, Nathalie Morata, Coline Léandre, Typhaine Quinquis et Constance Laureau y étaient pour représenter le partenariat européen Biodiversa+ et les projets RESPIN et COOP4CBD.
Ce qu’il en ressort ?
- Une opportunité unique de networking et une collaboration inédite entre les chercheurs et les points focaux impliqués auprès de l’Ipbes et du Giec très appréciée ;
- Un format interactif et pas descendant où chacun a pu s’exprimer ;
- Un besoin de moyens pour réitérer ce genre d’initiative (avec participation des pays d’Europe de l’est et Asie centrale, participation des experts, etc.)
Piloter des projets participatifs
Bonjour Nils. Tu as souhaité parler de la “participation transformative “. Pourquoi est-ce important ?
La participation transformative est une approche qui vise à impliquer activement les citoyens et les parties prenantes dans les processus de changement social et écologique, en allant au-delà de la simple consultation, pour permettre une réelle co-construction des solutions, et aller vers leur mise en œuvre.
Aujourd’hui, l’enjeu fondamental est de voir comment la production scientifique peut engendrer des impacts concrets. Cela traverse les discussions menées au sein de l’Ipbes ou à la FRB et à travers le sujet de “changement transformateur” : comment les connaissances peuvent-elles contribuer à améliorer la qualité de vie et à la durabilité des écosystèmes ? Pour cela, en tant que scientifiques, il est crucial de réfléchir à la manière d’adapter nos pratiques et nos relations avec les autres acteurs pour mieux intégrer la science, la société et la politique. Cela signifie préserver la rigueur scientifique tout en augmentant le potentiel transformateur des connaissances, pour qu’elles puissent véritablement influencer et enrichir les décisions collectives ! Et il ne s’agit pas seulement de produire et transmettre “mieux” des connaissances – approche classique antérieure -, mais de s’engager dans un travail collaboratif différent avec les acteurs non scientifiques, et de construire et suivre ainsi ensemble des chemins de changement. Notre hypothèse de base est que la modélisation participative va amorcer des transformations en réponse aux besoins des acteurs.
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Peux-tu nous définir ce qu’est la “participation transformative”, ses grands principes ?
La participation transformative repose sur plusieurs principes fondamentaux visant à engager efficacement les acteurs :
- L’autonomie : l’objectif est de rendre les groupes d’acteurs capables de prendre des décisions en autonomie (se saisir des enjeux collectivement, les analyser, délibérer, planifier, s’engager et réguler), en réduisant les interventions externes ultérieures. Cela est essentiel pour gérer de manière adaptative les écosystèmes et les socio-écosystèmes dans lesquels ils sont impliqués, avec un coût réduit pour les politiques publiques.
- L’inclusion sociale : une participation réussie nécessite l’inclusion de tous les acteurs concernés. Cela signifie s’assurer que chacun a la possibilité de contribuer et de faire entendre sa voix.
- L’organisation collective : pour comprendre et gérer les systèmes complexes, une organisation structurée est indispensable. Cela inclut des processus de modélisation participative qui permettent aux acteurs de partager leurs visions, de définir ensemble leurs priorités et de délibérer sur des cadres normatifs partagés.
- La construction de chemins partagés : les participants doivent pouvoir explorer des scénarios futurs de manière collaborative – par exemple par des jeux sérieux – puis coconstruire des plans d’action réalisables, engageants et efficients. Cette planification participative est rigoureuse et intégrative, pour engager un mouvement transformatif commun et adaptable.
Notre démarche s’appuie sur la création de dispositifs de participation, l’utilisation d’outils et méthodes accessibles, qui légitiment et mobilisent activement les acteurs. Au contraire de “l’acceptologie”, où les citoyens sont simplement invités à approuver des décisions déjà prises, nous défendons une approche où les acteurs s’impliquent, ensemble, dans la co-construction des solutions, la considération de futurs viables. L’élément clé n’est pas de produire un plan final, mais de créer un processus collectif qui aboutisse à une vision partagée et à des actions cohérentes.
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Concrètement, comment se met en place la recherche transformative ? Comment réussissez vous, dans ton équipe, à faire travailler ensemble une grande diversité d’acteurs ?
Tout d’abord nous ne travaillons que dans et sur des projets de recherche intervention portés à la demande d’acteurs “de terrain” : élus, administrations, associations. L’existence d’un besoin, d’une demande est fondamentale, même si elle n’est pas initialement partagée par tous et toutes localement. Cela peut choquer certains collègues par cette dépendance assumée, mais elle est cruciale pour la mobilisation et la pertinence des travaux.
Nous sommes un groupe très interdisciplinaire, incluant des spécialistes de la modélisation — écologues, économistes, sociologues, et autres experts — pour élaborer des protocoles qui facilitent la coopération entre acteurs divers.
La méthode est très cadrée, elle repose sur quatre piliers : c’est pour mieux assurer un processus de collaboration et un espace de co-construction !
- Ingénierie participative de la participation : Pour permettre aux acteurs de construire eux-mêmes leur chemin de participation décisionnelle, et le rendre légitime, nous utilisons la méthode PrePar (“Pré-Participation”). PrePar aide à définir précisément les rôles, les actions, et le pouvoir décisionnel des participants. Tout cela peut être formalisé dans un “contrat de participation” incluant un plan et une charte de participation.
- Modélisation et simulation participative : La modélisation participative permet d’agréger les visions des acteurs, y compris les scientifiques, et de créer un cadre de référence commun sur leur système socio-écologique. Divers outils sont utilisés pour favoriser l’engagement, comme des jeux de rôle, désormais au sein des “jeux sérieux”. Depuis 2008, nous avons mis au point le kit Ini-Wag et sa méthodologie dérivée Créa-Wag qui permettent de créer rapidement des jeux de simulation pour discuter des enjeux territoriaux et des politiques publiques. Ces outils aident les participants à confronter leurs perspectives et à comprendre l’impact des actions et des politiques sur leur territoire.
- Planification participative : l’objectif est de créer des plans d’action cohérents et efficaces qui intègrent les points de vue et intérêts des différents acteurs. Pour ce faire, les participants définissent d’abord un langage commun pour décrire les ressources nécessaires et les impacts. Ensuite, ils construisent un référentiel d’actions et génèrent un ensemble d’options stratégiques. Cela permet d’explorer les meilleures combinaisons d’actions tout en discutant des enjeux de faisabilité et d’efficience à différentes échelles.
- Suivi et évaluation : pour évaluer les impacts multiples des actions et générer des connaissances scientifiques, nous avons conçu un cadre méthodologique nommé ENCORE. Mis en place depuis 2004, ENCORE permet de suivre le contexte, le processus, et ses impacts. Ce cadre incite les acteurs à réfléchir collectivement aux changements produits par le processus !
As-tu des cas pratiques à nous fournir où vous avez mis en place cette méthode ?
Notre méthodologie a été appliquée avec succès dans divers contextes à travers le monde. Voici deux exemples dans lesquels il est possible de retrouver les piliers précédents :
- En Tunisie, dans le cadre d’un projet de gestion des ressources naturelles en milieu rural, nous avons conçu un système de comités de territoire garantissant une représentation équilibrée en termes de genre et d’âge, tout en distribuant le pouvoir pour une gouvernance inclusive. Soutenu par l’Agence Française de Développement, ce projet a mobilisé plus de 4 000 participants et environ 30 intervenants permanents, dans 6 gouvernorats, avec une généralisation en cours.
- En 2019, nous avons travaillé sur la réforme des politiques de l’eau en Nouvelle-Calédonie. Cette initiative, menée en collaboration avec le Sénat coutumier et diverses communautés locales, a permis de redéfinir la répartition des pouvoirs dans la gestion de l’eau et de respecter les droits et besoins des populations autochtones en matière de gestion des ressources.
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En somme, les approches de “participation transformative” ont démontré leur efficacité dans divers contextes ?
Oui, ancrée dans la modélisation participative et l’inclusion active des acteurs, les expérimentations de “participation transformative” ouvrent la voie à des transformations réelles et durables, adaptant la recherche scientifique aux besoins concrets des sociétés et des écosystèmes. En revanche, nous cherchons encore les chemins d’une généralisation et d’un impact à l’aune des défis actuels.
Vous souhaitez approfondir ces concepts et les exemples cités ? Vous pouvez consulter le livre Transformative Participation for Socio-Ecological Sustainability, accessible librement en ligne.
Consulter le livre en ligne (ENG)
Hassenforder E., Ferrand N. (eds). Transformative Participation for Socio – Ecological Sustainability – Around the CoOPLAGE pathways. Editions Quae, 2024. 270 pages
[À vos agendas] Journée FRB 2025|Biodiversité, eau, alimentation, santé, climat : tout est lié !
En parallèle, l’Ipbes a adopté un second rapport qui s’intéresse au changements « transformateurs ». Il présente les initiatives permettant de s’engager vers les scénarios et réponses les plus prometteurs, de parvenir à des compromis satisfaisants tels qu’ils émergent du rapport Nexus. Le rapport souligne l’importance des relations entre les visions, les structures sociales et les pratiques matérielles, susceptibles de modifier en profondeur notre économie et nos rapports au vivant.
Le 26 juin prochain, à travers une journée s’appuyant sur ces deux rapports de l’Ipbes la FRB et l’OFB proposent de décrypter les résultats de ces rapports, d’identifier ce qui y est innovant, les cadres de pensée, les actions concrètes et comment les intégrer ensemble dans tout processus de décision pour sortir des crises.
Cette journée s’adresse aux acteurs de la recherche, aux acteurs privés et publics pour un dialogue transdisciplinaire nécessaire à la circulation des savoirs, leur mise en discussion et surtout en action !
Rendez-vous le 26 juin prochain,
à la Direction Générale Des Finances Publiques (Paris VIe) !
Événement sur inscription
Modéliser pour décider : l’exemple des déplacements des animaux dans les paysages fragmentés
La modélisation : un outil clé pour comprendre et préserver la biodiversité
La modélisation joue un rôle crucial en écologie, notamment pour la compréhension et la protection de la biodiversité. Parmi eux, les modèles de distribution d’espèces sont particulièrement utiles en conservation. Ils permettent de prédire les zones où les espèces sont susceptibles de se trouver, aidant ainsi scientifiques et conservateurs à identifier les habitats critiques et les régions riches en biodiversité. De plus, ces modèles éclairent les stratégies pour atténuer les effets du changement climatique, gérer les espèces envahissantes et améliorer la connectivité des habitats.
Un défi de taille : la complexité des habitats
Cependant, ces modèles sont particulièrement complexes à paramétrer dans des environnements fragmentés. La pression exercée par les activités humaines contribue à l’isolement des populations animales et à la perte de biodiversité. Par exemple, selon le rapport mondial de l’IPBES de 2019, 75 % des surfaces terrestres ont été modifiées par l’humain. En Europe, la moitié des terres se trouvent à moins de 1,5 km d’une route. Ces infrastructures créent des barrières physiques qui compliquent les déplacements des espèces, augmentent les risques d’extinction locale et diminuent la diversité génétique. Face à cette fragmentation, la connectivité des paysages est devenue une priorité dans les stratégies de conservation. Elle est d’ailleurs explicitement mentionnée dans cinq des cibles du cadre mondial Kunming-Montréal pour la biodiversité, qui soulignent l’importance d’améliorer les corridors écologiques.
Une solution innovante : intégrer des distances non-euclidiennes dans les modèles de distribution d’espèces
Traditionnellement, les modèles de déplacement dans les paysages fragmentés utilisent des distances dites “euclidiennes”, c’est-à-dire une ligne droite entre le point de départ et celui d’arrivée. Cependant cette simplification ne reflète pas toujours la réalité comme le résume Maëlis Kervellec, première auteure d’un article récent du groupe FRB-Cesab Discar : « Imaginez que vous deviez acheter des pâtisseries. Iriez-vous à la boulangerie juste en face de chez vous, mais de l’autre côté d’une rivière, ou alors à celle sur votre route vers votre travail ? ». De la même manière, les animaux privilégient souvent des itinéraires accessibles ou sûrs, plutôt que le chemin le plus court.
Pour répondre à cette problématique dans le cadre des modèles, les scientifiques du groupe Discar ont développé une approche novatrice en intégrant des distances dites “non-euclidiennes” dans les modèles de distribution d’espèces. Cette méthode repose sur la distance de “temps d’échange”, issue de la théorie des circuits, qui évalue les multiples chemins possibles entre deux points. Contrairement aux approches traditionnelles, cette méthodologie prend en compte les barrières et les corridors présents dans l’environnement, offrant une vision plus réaliste des déplacements des espèces dans des paysages fragmentés.
Applications concrètes : le cas de la loutre et du lynx
Pour illustrer leur méthode, les chercheurs ont appliqué ce modèle à deux espèces de carnivores en recolonisation en France : le lynx boréal dans le Jura et la loutre d’Europe dans le Massif central. Les résultats montrent que les autoroutes agissent comme des barrières pour le lynx, ralentissant son expansion, tandis que les rivières facilitent le déplacement de la loutre. Cette approche a permis de quantifier les effets des infrastructures humaines sur la recolonisation des espèces, ouvrant la voie à des stratégies de gestion plus adaptées.

Olivier Gimenez, chercheur principal du groupe Discar, a exploré un autre défi important des modèles de distribution d’espèces : l’autocorrélation spatiale. En écologie, ce phénomène se produit lorsque des données sont récoltées proches géographiquement et partagent une probabilité similaire de présence d’une espèce. Cela créé des dépendances qui peuvent biaiser les analyses si elles ne sont pas prises en compte. Dans les modèles de distribution d’espèces appliqués aux habitats aquatiques, comme les réseaux de rivières, l’autocorrélation spatiale est souvent modélisée à l’aide de distances euclidiennes ce qui ne reflète pas la réalité des rivières dont les parcours sont sinueux (coudes, méandres, etc.). En intégrant l’autocorrélation spatiale et en tenant compte des distances non-euclidiennes décrites précédemment, Olivier Gimenez a mis au point une approche plus réaliste. Testée sur la loutre d’Europe, cette méthode a montré que les résultats des modèles correspondaient beaucoup mieux aux observations de terrain.
Un outil au service des décisions de conservation
En publiant ces articles, le groupe Discar illustre comment la recherche académique peut avoir des applications directes dans les politiques de conservation. L’innovation de cette approche réside dans sa capacité à intégrer des incertitudes tout au long du processus d’analyse. Les cartes finales reflètent non seulement les meilleures estimations de connectivité, mais aussi le degré d’incertitude associé à ces estimations. Cela peut aider gestionnaires et décideurs à prendre des décisions plus éclairées en matière de conservation, en tenant compte à la fois des tendances observées et de leur niveau de confiance. À terme, cette méthode pourrait être appliquée à d’autres espèces et régions, renforçant ainsi les décisions de conservation.
[#Ipbes11] Au cœur de la 11e plénière

Pendant cet événement, seront entre autres examinés :
- l’évaluation thématique des liens entre la biodiversité, l’eau, l’alimentation et la santé (évaluation nexus),
- l’évaluation thématique des causes sous-jacentes de la perte de biodiversité, des déterminants du changement transformateur et des options permettant de réaliser la Vision 2050 pour la biodiversité (évaluation changement transformateur),
- ainsi que le rapport de cadrage pour la deuxième évaluation mondiale sur la biodiversité et les services écosystémiques.
Retour sur les échanges jour après jour.
[Biodiversité, une coordination européenne et internationale] (Re)découvrez l’Ipbes
À quelques jours de sa 11e plénière et de la sortie de 2 nouveaux rapports : l’Ipbes !

Regard de la FRB sur la Cop16 : des outils scientifiquement pertinents validés par le consensus politique
Sur ce dernier point, en matière de processus multilatéraux, la patience et la pugnacité sont de mise pour aboutir à des consensus disruptifs, surtout en partant de positions aussi antagonistes que celles exprimées par les pays du nord et les pays du sud. Ces temps de négociation et d’ajustement restent absolument indispensables, car ils permettent d’établir un « socle de base » (accepté par tous les États), constitué notamment : du cadre mondial et ses 23 cibles pour vivre en harmonie avec la nature, des liens entre biodiversité, changement climatique, agriculture et santé. Ce socle de base pour un avenir commun, des visions partagées, des actions concertées, se construit pas à pas.
Malgré ces critiques, la Cop16 a néanmoins permis de notables avancées institutionnelles qui ne devraient pas être éclipsées :
- création d’une instance représentant les communautés locales et peuples autochtones, permettant leur pleine implication dans l’ensemble des travaux instrument créé par la Convention ;
- établissement des critères de désignation des aires marines protégées ;
- adoption du document de cadrage sur les relations entre biodiversité et santé qui avait été rejeté il y a deux ans à Montréal, à noter que le projet de décision constitue l’un des textes les plus complets sur le sujet ;
- décision sur les liens entre biodiversité et climat et la nécessité de traiter les deux enjeux conjointement en évitant ou minimisant les effets négatifs des actions climatiques sur la biodiversité, l’intégrité des écosystèmes, les fonctions et services écosystémiques ;
- création du « fonds de Cali » pour gérer les accords multilatéraux sur les séquences génétiques numériques, les DSI. Ce fonds permettra d’inventorier les séquences disponibles et leurs usages, de rémunérer les États d’où sont issus ces séquences.
Deux points ont particulièrement retenu l’attention de la FRB.
Le premier concerne la comparaison des stratégies nationales pour la biodiversité, les “NBSAP”, des 44 États Parties qui les ont déposés (cf ci-après). Elle permet de ressortir plusieurs points :
- Les priorités nationales sont très diverses, reflétant des conceptions du monde différentes.
- En plus des tensions classiques autour du développement économique, les interactions, compromis et synergies avec d’autres plans environnementaux – concernant le climat, l’eau ou l’agriculture – compliquent la construction de ces plans nationaux et des politiques publiques associées. Ces tensions peuvent être aussi des sources d’opportunité, amenant à rehausser l’importance de la biodiversité. Les co-bénéfices climat-biodiversité sont particulièrement importants à considérer, ils sont associés aux actions de restauration de la nature. Les co-bénéfices agriculture-biodiversité sont aussi majeurs, ils sont liés à la planification territoriale et la baisse significative des pressions sur la biodiversité (en particulier le changement d’usage des sols et la pollution).
- L’inclusivité est une nécessité, mais c’est aussi une source de difficultés un défi et elle demande des moyens humains, matériels, institutionnels considérables. Elle demande une en capacitation, notamment des parties prenantes qui ont été jusqu’à présent peu présentes dans le débat public (les femmes, les jeunes, les peuples indigènes et communautés locales). Tous les ministères publics doivent être impliqués.
- Enfin, il semblerait que des systèmes décentralisés de collecte des données et des indicateurs associés puissent être pertinents.
Ce chiffre est significativement inférieur au nombre total de parties à la Convention sur la diversité biologique, qui compte 196 pays.
Cette situation contraste fortement avec les attentes initiales. Astrid Schomaker, Secrétaire exécutive de la CBD, avait déclaré avant la COP que tous les pays étaient censés soumettre leurs stratégies nationales pour la biodiversité révisés lors de la conférence.
Parmi les pays ayant soumis leurs plans, on peut noter :
- La plupart des pays européens ;
- L’Inde, qui a non seulement soumis sa stratégie nationale pour la biodiversité mais a également proposé son aide aux pays voisins pour développer les leurs ;
- L’Australie, la Chine, l’Indonésie, la Malaisie, le Mexique, qui font partie des 17 pays dits “mégadivers” ;
Sur les 17 pays considérés comme “mégadivers”, qui abritent ensemble 70 % de la biodiversité mondiale, seuls 5 ont produit de nouveaux engagements pour lutter contre la perte de biodiversité.
Plusieurs pays importants n’ont pas respecté la date limite, notamment le Royaume-Uni, le Brésil, la Colombie (pays hôte de la Cop16) et le Pérou.
Les implications de cette faible soumission des plans de gestion de la biodiversité sont :
- des retards dans la mise en œuvre : Le faible taux de soumission des plans de gestion de la biodiversité pourrait retarder la mise en œuvre effective du Cadre mondial de la biodiversité de Kunming-Montréal.
- défi pour l’évaluation globale : Le manque de stratégies nationales complètes compliquera l’évaluation des progrès globaux vers les objectifs de biodiversité mondiaux.
- pression accrue sur les prochaines Cop : en particulier sur les aspects financiers des pays du sud vers les pays du nord.
Le second sujet à avoir retenu l’attention de la FRB est celui de la finance durable. Deux think tank ont été amenés à présenter leurs travaux lors de la Cop16. Il est intéressant de considérer leur différence d’approche, les acteurs menant les projets, les types d’écosystèmes concernés.
- Le TFFF (Tropical Forests Finance Facility), mené par le Brésil, le Congo et l’Indonésie, soutenu par la Colombie, le Ghana et la Malaisie, a l’ambition de constituer en quelque sorte une « OPEP des pays détenteurs de forêts tropicales ». L’ambition de ce TFFF est que les pays les plus riches – notamment ceux qui se sont déjà engagés –, les plus intéressés, financent la protection de ces forêts tropicales. Les entreprises utilisant la biodiversité tropicale dans leur communication devraient aussi être sollicitées.
- L’IAPB, initiative franco-britannique, se propose de réfléchir aux modalités de crédits et de certificats biodiversité de haute intégrité, dans l’ensemble des écosystèmes. Son ambition est d’aligner les flux financiers globaux en conséquence. Ses préoccupations sont d’éviter les effets pervers constatés dans le cas de la compensation écologique (projet proche de celui mené conjointement entre le muséum, carbone 4 et la FRB). Ce think tank propose notamment que tout échange ou compensation se fasse à échelle locale, concernant des écosystèmes comparables. Il insiste sur l’importance d’une gouvernance inclusive, où sont notamment représentées les communautés locales. L’apport du consortium FRB – MNHN-Carbone 4 à ce projet est de travailler sur les risques et opportunités du mécanismes et de proposer une méthode scientifique d’évaluation des gains biodiversité attribués aux pratiques humaines, préalable indispensable à toute certification.
Ces travaux de la Cop16 bénéficieront évidemment aux prochaines Cop :
- La Cop Climat pourrait ainsi s’appuyer sur les travaux de la Cop16 sur la finance pour proposer des certificats et crédits « nature », combinant les enjeux climat-biodiversité.
- La Convention Désertification pourrait créer un corps permanent des « communautés locales et peuples autochtones », ces parties prenantes jouant un rôle central dans la lutte contre cette désertification.
[Carnet de la Cop16] L’équipe FRB est au rendez-vous
Tout au long de l’événement, la FRB vous propose un regard “à chaud” de l’équipe sur place sur les moments forts de cette conférence sur la biodiversité :
[Biodiversité, une coordination européenne et internationale] (Re)découvrez la CDB
Premier arrêt sur image, à quelques semaines de la Cop16 : vous reprendrez bien un peu de CDB ?

[Événement] Retour sur les rencontres Ipbes-Giec
Biodiversité et climat : les deux grands défis environnementaux de notre temps sont inévitablement liés. Cette interdépendance, qui a pu être négligée dans le passé, est désormais établie dans les sphères scientifiques et, de plus en plus, dans les sphères politiques.
C’est dans ce contexte que le Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) puis l’Ipbes (Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques) ont été créés. Leur but ? Renforcer l’interface science-politique sur le climat et la biodiversité et fournir aux décideurs publics et privés une évaluation de l’état des connaissances existantes pour une meilleure prise en compte de ces enjeux.


Les participants ont également pu participer à différentes sessions d’atelier sur les thématiques suivantes :
1. L’amélioration du fonctionnement et de la légitimité des Plateformes/Panels ;
2. La convergence des enjeux biodiversité et climat ;
3. L’implication et l’engagement au sein de l’Ipbes et du Giec ;
4. La prise en compte des recommandations Ipbes et Giec par les décideurs politiques ;
5. Les recommandations de l’Ipbes et du Giec pour les océans.
Méthode d’analyse des stratégies en faveur de la biodiversité
Vous trouverez sur cette page deux documents concernant cette méthode d’analyse des stratégies en faveur de la biodiversité :
1. Le premier met en avant la méthode, ses critères, se la grille d’analyse, son processus d’évaluation et ses utilisations.
2. Le second présente l’application de cette méthode sur une partie des mesures du premier volet, pré-Cop15, de la SNB3. Il dévoile les résultats de cette analyse scientifique et met en évidence les points d’amélioration possibles.
La FRB a développé, en s’appuyant sur un cas concret (le premier volet de la SNB3 pré-COP15), une méthode originale d’évaluation du potentiel effet de levier d’une stratégie, d’une politique publique, d’un plan d’action, d’un programme, permettant d’identifier si ceux-ci peuvent initier des changements transformateurs dans la société. Cette méthode, adaptable et reproductible, s’applique tant aux évaluations ex.ante qu’ex.post. Elle s’appuie sur des expertises à la fois académiques et non-académiques.
Retrouvez la présentation de la méthode dans le document : “Méthode d’évaluation des stratégies en faveur de la biodiversité : Analyse de la capacité à initier un changement transformateur – Une méthode originale pour l’évaluation ex.ante et ex.post”
La méthode d’évaluation développée par la FRB a été éprouvée par l’analyse du potentiel levier des mesures du premier volet de la SNB3, version pré-COP15.
Quatre des cinq axes et leurs mesures ont été analysés. L’axe 4 concernant la mise en œuvre de la stratégie sera complété dans le second volet : il n’a donc pas été évalué.
- Étape 1 | Définition de 15 critères d’analyse par le Conseil scientifique de la FRB
- Étape 2 | Analyse individuelle des mesures. Cette étape a permis de constituer des fiches consensuelles d’évaluation scientifique pour chacune des mesures, disponibles dans le document.
- Étape 3 | Interclassement des mesures entre elles, au sein d’un même axe, afin d’identifier les forces et les faiblesses de chacune d’elles et de mettre en lumière ce qui pourrait, pour chaque mesure, être amélioré. Pour cette étape, deux groupes ont été constitués (l’un avec des représentant du Conseil d’orientation stratégique de la Fondation ; l’autre avec des scientifiques) dans le but de confronter hiérarchisation sociétale et hiérarchisation scientifique.
Retrouvez le détail de cette méthode dans le document annexe “Méthode d’évaluation des stratégies en faveur de la biodiversité : Analyse de la capacité à initier un changement transformateur – Application au premier volet de la troisième Stratégie nationale pour la biodiversité (SNB3)”.
Messages-clés
Il ressort de l’étude que la stratégie publiée en 2022 affiche une pertinence élevée dans ses objectifs (titres et axes). Sa structure est également intéressante puisqu’elle identifie bien les domaines sur lesquels faire levier, à savoir les activités humaines et notamment l’agriculture, l’éducation, les activités économiques, la finance. Toutefois, l’évaluation conclut que le contenu des mesures nécessite d’être affiné, mieux documenté, explicité pour réussir à engager un véritable changement transformateur. La stratégie mériterait d’exprimer un niveau d’ambition plus élevé et d’indiquer concrètement les nouvelles directions à prendre.
Huit constats, transversaux aux axes analysés, sont également détaillés dans le rapport :
1 | Les mesures dessinent un maillage incomplet des pressions, territoires, écosystèmes, cibles et acteurs.
2 | Le texte des mesures, tel que rédigé, ne permet pas de percevoir la dimension systémique des enjeux, des causes, solutions possibles et des interactions entre humains – non-humains, entre activités humaines, entre climat et biodiversité, etc. ; et distingue mal l’essentiel de l’anecdotique.
3 | La nécessité d’éviter les impacts, dans une réflexion précoce et en conjonction avec la planification écologique des territoires, gagnerait à être rappelée, faute de quoi, la stratégie risque de passer à côté d’un réel levier de diminution des pressions.
4 | La stratégie s’appuie sur une démarche descendante et peu transparente, sans capitaliser sur l’expertise scientifique et les connaissances locales.
5 | La stratégie comporte une forte incertitude quant à sa capacité à réformer, transformer, et sa volonté à engager certains dispositifs pour les rendre réellement efficaces.
6 | Si l’adhésion volontaire à certaines mesures permet d’entrevoir l’engagement d’une grande diversité d’acteurs, cela semble aussi restreindre le spectre du pouvoir transformateur de la stratégie ou le retarder.
7 | La stratégie gagnerait à prendre en compte la dépendance systémique des humains vis-à-vis de la nature.
8 | À faire le choix d’une diminution des ambitions, ou d’une rédaction consensuelles plutôt que d’identifier les “gagnants” et les “perdants” nécessitant d’être accompagnés, le succès de la stratégie risque d’achopper sur le statu quo, et de perdre en efficacité.
En 2019, l’Ipbes sort son évaluation mondiale et appelle les États membres à engager un changement transformateur, via des actions, des mesures leviers.
- Ce changement transformateur est entendu comme : « un changement fondamental à l’échelle d’un système, qui prend en considération les facteurs technologiques, économiques et sociaux, y compris en termes de paradigmes, objectifs et valeurs ».
- Les leviers identifiés sont des points d’intervention clés permettant d’amorcer ce changement transformateur, pour passer des tendances actuelles de déclin de la biodiversité et de certains services écosystémiques, à des tendances plus durables.
Établies par de nombreux chercheurs et chercheuses des quatre coins de la planète et sur la base de milliers d’études scientifiques, les recommandations de l’Ipbes ont vocation à trouver un écho au sein de dispositifs pouvant être contraignants comme la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CDB) ou à d’autres échelles de gouvernance, notamment des États. En ratifiant la CDB en 1994, la France s’est engagée à établir des stratégies ou des plans d’action pour la biodiversité, conformément à un cadre international mis à jour par la conférence des Parties. Dans ce contexte, la troisième Stratégie nationale biodiversité à l’horizon 2030 (SNB3) constituera la réponse de la France au cadre mondial adopté en décembre 2022 et à la Stratégie européenne en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030.
Ces travaux ont également fait l’objet d’une publication scientifique :
Dupuis, L., Leandre, C., Langridge, J. et al. Analyzing the capacity to initiate transformative change: a methodology for assessing biodiversity strategies. Biodivers Conserv 32, 3641–3660 (2023). https://doi.org/10.1007/s10531-023-02660-5
Enjeux de gouvernance : pouvoirs, justice bleue, places des parties prenantes… Les nouveaux défis de la transition écologique
Les travaux menés par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), notamment à travers son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), apportent de multiples éclairages pour une meilleure compréhension de la manière dont les espèces s’adaptent aux changements globaux, des zones à haut potentiel de protection, mais aussi des enjeux de gouvernance (pouvoir, justice, impacts et efficacité des mesures, etc.), de la place des parties prenantes, etc.
Retour sur les derniers articles publiés ces dernières semaines dans des revues scientifiques majeures (Nature Ecology and Evolution, Proceedings of the National Academy of Science (Pnas), One Earth, etc.), offrant un regard pluriel afin de mieux comprendre le présent, préparer l’avenir et affiner la définition des efforts nécessaires à la réussite des défis de la transition écologique.
À l’échelle Nationale
Tendances temporelles et spatiales des risques liés à l’imidaclopride en France
L’imidaclopride est l’insecticide de la famille des néonicotinoïdes le plus utilisé au monde. Commercialisé en France depuis 1991, il a progressivement été interdit par l’Union européenne (UE) et pour toutes cultures en 2018. Il a depuis fait l’objet de dérogations, notamment pour les cultures de betteraves sucrières, et son interdiction continue d’être contestée par plusieurs syndicats agricoles. Quand et où a-t-il été utilisé en France ? C’est ce que révèle une étude parue en juin dans la revue Science of the Total Environment, première étape d’un projet qui vise à mieux comprendre l’impact de l’imidaclopride sur la biodiversité.
Lire l’article :
À l’échelle Européenne
Diminuer les émissions de carbone de l’UE en développant la navigation en eau douce : quelles conséquences pour la biodiversité ?
Un des axes d’action de l’Union européenne pour réduire ses émissions de carbone consiste à renforcer le recours au transport fluvial par voies navigables intérieures (fleuves, rivières, canaux). Le transport de marchandises par bateau émet en effet moins de carbone que par la route. Or le développement des infrastructures nécessaires modifie les caractéristiques éco-morphologiques des cours d’eau douce avec de sérieux risques sur leur biodiversité. Dans un contexte de déclin avéré de la biodiversité, une telle mesure ne peut être mise en œuvre sans que ses impacts ne soient compris ni que des solutions pour limiter les pressions exercées ne soient pensées en accord avec les objectifs et cibles du Cadre mondial pour la biodiversité. C’est sur ce sujet que travaille depuis 4 ans un groupe de chercheurs et chercheuses internationaux dont les résultats sont sortis en mai dernier dans la revue Nature Ecology and Evolution.
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À l’échelle internationale
[Biodiversité et changement climatique] Mieux comprendre la redistribution du vivant pour mieux anticiper l’avenir
Du fait du changement climatique et de l’augmentation globale des températures, la distribution des surfaces gelées (glace, neige, pergélisol) régresse à un rythme effréné sur terres et dans les océans. Ceci n’est pas sans conséquence sur la biodiversité et ses réponses adaptatives sont encore mal connues. Or, mieux comprendre ces réponses s’avère indispensable pour mieux anticiper le devenir de la biodiversité et de nos sociétés. Ces dernières semaines, trois papiers majeurs sont parus à ce sujet dans des revues scientifiques (Nature Reviews Earth & Environment, Proceedings of the National Academy of Science, Global Change Biology) : le fruit d’un travail conséquent mené par un consortium de 23 chercheurs et chercheuses de 8 nationalités différentes, réunis au sein du groupe FRB-Cesab Bioshifts.
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Comprendre les mécanismes qui créent des injustices environnementales permet de lever les freins et de rendre les décisions plus justes et plus équitables
Protéger les océans est une nécessite environnementale mais rencontre d’énormes difficultés sociales, politiques, de justice, etc. Réunissant 23 scientifiques de 12 nationalités différentes, le projet de recherche Blue justice, financé par la FRB au sein de son Centre de synthèse et d’analyse de données sur la biodiversité (Cesab), propose un cadre de réflexion pour identifier et lever ces asymétries qui constituent des entraves à la justice environnementale. Dans une étude parue en mai dernier dans la revue Nature Ecology and Evolution, le groupe propose trois pistes d’amélioration : réduire les asymétries de pouvoirs en matière d’accès à la biodiversité et aux services écosystémiques, rapprocher politiques publiques et pratiques, développer les capacités d’anticipation et de scénarisation.
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Justice sociale et gouvernance équitable : des clés pour une conservation réussie
Face au déclin de la biodiversité, les efforts de conservation se multiplient dans le monde entier et des études récentes rassurent quant à leur efficacité pour ralentir le déclin voire améliorer l’état de la biodiversité (Langhammer et al., 2024 dans Science). Cependant, la plupart des évaluations se concentrent uniquement sur les mesures écologiques, sans tenir compte ou très peu de la manière dont les projets sont construits, et des implications politiques et sociales de la conservation. Comment les peuples autochtones et communautés locales sont impliqués dans la conservation ? Comment leur influence, leurs connaissances et leurs actions contribuent au succès des projets ? Face aux manques de connaissances, ce sujet fait aujourd’hui débat dans le monde de la conservation. Un groupe de chercheurs et chercheuses internationaux, dont plusieurs membres de la Commission des Politiques environnementales, économiques et sociales de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), se sont réunis pendant plusieurs années au sein du Centre de synthèse et d’analyse de la biodiversité, le Cesab de la FRB. En mai 2024, ils publient une importante étude dans One Earth, s’appuyant sur près de 650 articles scientifiques. Ils apportent ainsi une meilleure compréhension de ce qui fonctionne le mieux, pour les humains et pour la nature et appellent à un changement profond en faveur d’une justice sociale et d’une gouvernance équitable.
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Les formes de pouvoir à l’œuvre dans les processus participatifs : un levier pour des actions conservation plus efficaces ? Rencontre avec Lou Lecuyer
La complexité des enjeux de conservation de la biodiversité a conduit à un engagement accru des parties prenantes par le biais de processus participatifs, mais souvent sans que l’on comprenne clairement comment ou si ces processus conduisent effectivement à de meilleurs résultats en matière de biodiversité. Depuis 2021, les membres du projet FRB-Cesab PowerBiodiv tentent de mieux comprendre comment les multiples dimensions du pouvoir imprègnent ces processus et peuvent conduire à leur amélioration dans un objectif de conservation de la biodiversité. Une quinzaine de chercheuses et chercheurs internationaux mettent ainsi en commun leurs expertises en science politique, sociologie, biologie de la conservation, géographie, facilitation, gestion de conflits, écologie et anthropologie. À la suite de la publication de certains de leurs résultats dans la revue People and Nature, rencontre avec Lou Lecuyer, post-doctorante au Cesab de la FRB sur ce projet.
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[Dossier] Enjeux de gouvernance : pouvoirs, justice bleue, places des parties prenantes… Les nouveaux défis de la transition écologique
Comprendre les mécanismes qui créent des injustices environnementales permet de lever les freins et de rendre les décisions plus justes et plus équitables
Transformer les organes de gouvernance
La corruption est un des obstacles régulièrement mis en avant mais il est loin d’être le seul. D’autres processus sont également à l’œuvre et bien plus difficiles à combattre, car ils sont légaux et présentés comme légitimes. C’est le cas par exemple de la composition des organes de gouvernance lorsqu’ils incluent majoritairement des acteurs privés au fort pouvoir économique, des acteurs publics et des gouvernements dont la priorité reste le développement économique. Certains groupes, voire certains pays, en sont ainsi régulièrement exclus. La mise en place des zones marines protégées est un bon exemple de ces processus de décision qui manque d’inclusivité : celles avec des niveaux de protection élevés continuent d’être mises en œuvre préférentiellement dans les zones à faible intérêt économique pour les secteurs industriels, mais à fort intérêt économique et patrimoniaux pour les communautés côtières qui dépendent fortement des ressources océaniques.
Pour contrer ces mécanismes, les scientifiques préconisent un recours au concept de justice procédurale, qui permet de diminuer les asymétries de pouvoir en donnant la parole aux parties prenantes silencieuses (les plus pauvres, les femmes, les jeunes, la biodiversité). Autre piste abordée : défragmenter la gouvernance pour moins travailler en silos et veiller à ce que les décisions favorables à un enjeu humain (par exemple la production d’énergie renouvelable) ne nuisent pas de façon grave et irréversible à un autre enjeu humain (par exemple la biodiversité ou la pêche artisanale).
La participation du plus grand nombre aux décisions nécessite un changement profond de culture et de processus qu’il faut accompagner, mais qui est tout à fait possible.
- Par exemple, le Conseil de l’Arctique a pris des mesures pour protéger les identités culturelles et les pratiques coutumières de chasse aux mammifères marins des peuples autochtones.
- La justice peut aussi intégrer des mécanismes de réparation pour rétablir la reconnaissance et les inégalités de répartition. Par exemple, l’État de Californie a restitué sa propriété côtière à une famille noire dépossédée 90 ans auparavant.
Intégrer les divers valeurs, savoirs, indicateurs en amont des décisions
Le savoir, la connaissance et les données qui sont utilisées pour prendre les décisions sont également un point clé des injustices environnementales. Les impacts sociaux et environnementaux des activités sont souvent négligés par rapport aux retombées économiques de ces mêmes activités. De même, les décisions doivent considérer tous les services écosystémiques potentiellement favorisés ou impactés. S’agissant d’océan, la pêche est souvent au cœur des débats. Par ailleurs, il est important de ne pas appliquer des principes de justice simplifiés et généralisés (par exemple des pays du Nord vers les pays du Sud). Les différences et les singularités entre pays ou entre territoires sont importantes et doivent être prises en compte pour que les actions soient adaptées à chaque contexte socio-environmentalo-économique.
- Par exemple, en Papouasie-Nouvelle-Guinée et aux Îles Salomon, le financement des initiatives de développement de la pêche a eu des bénéfices limités car il ne correspondait pas aux valeurs socioculturelles locales, aux contraintes de conservation de la biodiversité ou aux besoins d’adaptation au changement climatique
Au niveau mondial comme au niveau local, des actions sont possibles. Dans le premier cas, un organisme intergouvernemental holistique sur les océans ou un réseau d’organismes existants, intégrant une diversité d’acteurs et leur système de connaissance, pourrait voir le jour afin de garantir une meilleure coordination intersectorielle fondée sur des données probantes et des valeurs. Dans le second, une planification territoriale marine intégrée et inclusive doit inclure tous les acteurs, intégrer les données sociales et environnementales et garantir une répartition juste des bénéfices. En parallèle, fournir des moyens à la recherche et aux chercheurs et chercheuses des différents pays permet de garantir une meilleure évaluation des bénéfices économiques et immatériels adaptés au contexte.
Veiller à ce que la décision profite au plus grand nombre
Enfin, le dernier point de levier consiste en l’identification des bénéficiaires de la ressource : sont-ils nombreux ou limités ? Équitable ou concentrés ? Le mécanisme international de partage juste et équitable des avantages issus de la biodiversité ne concerne que les ressources génétiques : les scientifiques préconisent dans l’étude de l’étendre aux ressources marines (les poissons, les algues, etc.) et aux services écosystémiques que nous retirons de l’océan (la régulation du climat, le tourisme, etc.). D’autre part, les gouvernements nationaux, les agences multilatérales et les organisations internationales peuvent investir dans des pratiques organisationnelles qui déclenchent le dialogue sur le pouvoir, notamment en invitant des entités indépendantes à revoir leurs pratiques.
- Aux Fidji et aux Îles Salomon et Vanuatu, un levier clé pour améliorer l’équité entre les sexes dans la gestion côtière a été la construction de partenariats stratégiques entre praticiens de la conservation et du développement travaillant sur le genre et les droits de l’homme.
Conclusion
Des changements mineurs dans le fonctionnement global du système sont régulièrement mis en œuvre. Ils sont importants, pour initier l’engagement de tous les acteurs, mais restent insuffisants. C’est en effet un véritable changement transformateur profond qui est à présent nécessaire pour augmenter l’équité et la justice bleue.
Les formes de pouvoir à l’œuvre dans les processus participatifs : un levier pour des actions de conservation plus efficaces ? Rencontre avec Lou Lecuyer
Depuis 2021, les membres du projet FRB-Cesab PowerBiodiv tentent de mieux comprendre comment les multiples dimensions du pouvoir imprègnent ces processus et comment cette compréhension peut conduire à leur amélioration dans un objectif de conservation de la biodiversité. Une quinzaine de chercheuses et chercheurs internationaux mettent ainsi en commun leurs expertises en science politique, sociologie, biologie de la conservation, géographie, facilitation, écologie et anthropologie. Fin mai 2024, une partie de leurs résultats a été publiée dans la revue internationale People and Nature. Rencontre avec Lou Lecuyer, post-doctorante sur ce projet.
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Les travaux du groupe PowerBiodiv ont permis d’établir une typologie des formes de pouvoir, c’est notamment ce que vous mettez en avant dans le dernier article publié. Pouvez-vous nous expliquer le cadre conceptuel que vous proposez ?
Nous sommes partis du constat que, bien que l’importance des relations de pouvoir soit de plus en plus reconnue comme un facteur clé pour obtenir de meilleurs résultats dans les processus participatifs pour la biodiversité, peu de publications s’appuient sur la théorie existante ou expliquent comment prendre en compte le pouvoir. Nous avons donc exploré d’autres domaines, comme celui du développement, pour voir ce qui avait été écrit à ce sujet et avons décidé de nous inspirer du cadre théorique proposé par Just Associates en l’appliquant à des cas concrets sur lesquels nous avons travaillé.
Notre cadre reconnaît qu’il existe toujours plusieurs dimensions de pouvoir en jeu, parfois simultanément (cf Figure ci-après). Le “pouvoir sur” est ainsi constamment remis en question par le “pouvoir transformateur” (par exemple, les mouvements de résistance) et cela peut se manifester dans différentes arènes, de diverses manières, et à travers plusieurs échelles.

Figure : Cadre des dimensions multiples du pouvoir adapté du cadre du pouvoir de Just Associated (2023) et de l’Institute of Development Studies (Gaventa, 2006) et du Power Cube. (Adapté de Lecuyer et al. 2024)
Par exemple, dans le cas d’un processus participatif visant à décider des moyens de gestion d’un parc dans le nord de la Thaïlande, il fallait surmonter une forte dimension systémique. Les minorités ethniques y étaient perçues par les décideurs, employés du parc et personnes extérieures, comme inéduquées et utilisant des pratiques polluantes pour le bassin versant. Passer au-dessus de ces aprioris a demandé la mise en place d’une démarche qui prenait en considération les différentes dimensions du pouvoir – les femmes sont ainsi venues en plus grand nombre, permettant d’ouvrir plus largement l’espace de dialogue et mobilisant leur “pouvoir avec”. En parallèle, le directeur du parc a aussi utilisé une forme de “pouvoir de” en décidant de ne pas prendre parti à certaines étapes du processus, limitant l’impact possible (cf Figure). Dans un cas comme celui-ci, l’utilisation du cadre en amont des processus permettrait de mieux anticiper cela, en identifiant que, si les femmes viennent en plus grand nombre, elles sont plus à même de prendre la parole et en mettant donc en place les stratégies nécessaires pour faire venir plus de femmes ; ou bien de mettre des stratégies en place pour s’assurer de la participation des personnes qui ont les pouvoirs de décisions.
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Quelle place tiennent les connaissances scientifiques dans ce cadre conceptuel ? En particulier, quelle est place est donnée à l’incertitude, à la fois comme composante systémique ou comme mécanisme d’influence, dans les dynamiques de pouvoir ?
Les connaissances scientifiques sont le fondement de notre cadre conceptuel, qui repose sur les travaux théoriques et empiriques de nombreux auteurs, notamment les travaux de Lukes sur les dimensions du pouvoir. Nous avons choisi cette représentation, car elle permet de considérer le pouvoir à différents niveaux : à la fois au niveau des acteurs (leur capacité à agir seuls ou en groupe) et au niveau structurel (intégré dans notre manière de percevoir et de penser le monde, ou dans la reconnaissance de certaines connaissances au détriment d’autres).
L’incertitude peut s’exprimer à différents niveaux. Dans les arènes du pouvoir, l’incertitude peut être utilisée pour maintenir le statu quo et repousser l’action, se manifestant ainsi par des stratégies cachées. Dans les dimensions du pouvoir, l’incertitude réelle peut affecter le “pouvoir de”, le manque de connaissance limitant la capacité d’agir.
Le pouvoir est souvent lié aux questions de connaissance et donc d’incertitude. Il est crucial de se demander quelles connaissances sont prises en compte, considérées comme légitimes, et influencent la prise de décision. Ces questions sont essentielles dans les processus participatifs pour la biodiversité.
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Les résultats de vos recherches amènent à l’idée que le changement transformateur (concept fort de l’Ipbes) passe par un changement des dynamiques de pouvoir, pouvez-vous nous en dire davantage ? Quel enjeu y a-t-il notamment à prendre en compte davantage les non-humains dans ces processus ?
L’importance des dynamiques de pouvoir pour induire des changements transformateurs est reconnue depuis longtemps. Ce qui nous semblait important cependant était de savoir, une fois que l’on dit que les relations de pouvoir sont importantes, comment pouvons-nous les analyser ? Il s’agit de ne pas se concentrer uniquement sur le pouvoir coercitif, mais aussi sur le pouvoir d’agir, car pouvoir et contre-pouvoir sont toujours en relation.
Nous avons également cherché à comprendre comment les questions de biodiversité influencent ces dynamiques de pouvoir. Nos études de cas montrent des situations variées : certaines compagnies utilisent leur pouvoir lors de ces processus pour essayer de privatiser des ressources, entraînant une perte de biodiversité, tandis que certains processus participatifs pour la biodiversité, en essayant d’améliorer la conservation des espèces, risquent de renforcer les inégalités existantes entre participants si elles ne prennent pas en compte les dynamiques de pouvoir en place. Dans certains cas, les connaissances scientifiques dominent le processus, tandis que dans d’autres, différentes formes de connaissance sont prises en compte. Je reconnais que en revanche aucun des cas utilisés dans l’étude n’a tenté de représenter explicitement les non-humains. Cependant, grâce à l’expérience des professionnels de la facilitation impliqués dans notre groupe, nous suggérons que des approches plus sensibles, telles que l’utilisation de représentations artistiques comme le théâtre forum ou de nouvelles formes de narrations plus proches de l’histoire contée que du rapport scientifique, pourraient aider à mieux les intégrer.
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Concrètement, comment les enseignements tirés de vos travaux peuvent-ils être opérationnalisés de manière à en voir les effets vertueux, pendant ou en amont d’un processus participatif ?
Ce cadre théorique constitue la première étape de notre projet. À partir de ce cadre, nous avons élaboré une grille d’analyse pour mener une revue systématique de la littérature (ndlr : une méthode robuste de synthèse de connaissances), afin de mieux comprendre le lien entre la prise en compte des multiples dimensions du pouvoir et les impacts sur la biodiversité. Bien que ce travail soit en cours, nous constatons déjà qu’il existe peu de publications détaillant à la fois les relations de pouvoir dans les processus participatifs en lien avec la biodiversité et les impacts de ces processus sur la biodiversité. Cependant, nous pouvons identifier quelles dimensions du pouvoir sont fréquemment analysées (comme le “pouvoir avec”, à travers des questions de confiance, par exemple) et lesquelles le sont moins (comme les questions de pouvoir caché et invisible).
Nous travaillons également à utiliser ce cadre théorique comme grille de lecture pour développer des pratiques réflexives sur les dimensions de pouvoir avant, pendant ou après un processus participatif. En tant que commanditaires, organisateurs, facilitateurs ou participants d’un processus participatif, vous pouvez vous interroger sur les dimensions de pouvoir en jeu : Y a-t-il des différences systémiques entre les participants qui permettent à certains d’être plus influents ? Que se passe-t-il en dehors du processus participatifs pour la biodiversité qui pourrait avoir un impact sur celui-ci ? Quelles alliances existent ou se forment au cours du processus ? Etc.
Enfin, un dernier axe sur lequel nous souhaitons travailler est de déterminer, une fois l’analyse des dimensions de pouvoir réalisée, comment utiliser ces informations. Comment les communiquer ? Quels sont les risques ? Quel est notre rôle en tant que représentant institutionnel, chercheur ou facilitateur face à ces dimensions de pouvoir ? Avons-nous le courage de parler ouvertement des relations de pouvoir ?
Justice sociale et gouvernance équitable : des clés pour une conservation réussie
Pour combler ces lacunes, un groupe de chercheurs et chercheuses internationaux, dont plusieurs membres font partie de la Commission des Politiques environnementales, économiques et sociales de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), ont travaillé ensemble pendant quelques années à travers le Centre de synthèse et d’analyse de la biodiversité, le Cesab de la FRB. En mai 2024, ils ont publié une importante étude dans One Earth, s’appuyant sur près de 650 articles scientifiques. Ils apportent ainsi une meilleure compréhension de ce qui fonctionne le mieux, pour les humains et pour la nature et appellent à un changement profond en faveur d’une justice sociale et d’une gouvernance équitable. En examinant 648 études, l’équipe a d’abord répertorié six manières dont les peuples autochtones et communautés locales sont impliqués dans la conservation et les a classés selon une échelle allant de leur exclusion à leur autonomie en passant par le partenariat. Elle s’est ensuite intéressée, aux 170 études mettant en avant les liens entre leurs rôles et la réussite ou non des projets (voir la figure ci-après). Les résultats sont sans équivoque :

Figure : Rôle des peuples autochtones et communautés locales dans les projets de conservation et résultats écologiques associés.
Lorsque les peuples autochtones et les communautés locales sont exclus ou impliqués uniquement comme participants ou parties prenantes, ils peuvent se retrouver dans l’incapacité d’influencer des décisions d’une grande importance pour leur vie quotidienne, voir leurs droits violés ou encore se voir refuser l’accès à des terres d’importance culturelle. Dans ces cadres, la grande majorité des résultats écologiques ne sont pas optimums voire contre-productifs.
Au contraire, à mesure que l’on gravit les échelons et que des partenariats sont établis à égalité avec les instances de conservation, avec un contrôle et une reconnaissance culturelle accrus pour les communautés, la réussite écologique va de pair avec cette reconnaissance. Les communautés peuvent faire l’expérience du respect de leurs valeurs, de leurs droits, de leur identité et de leur culture, de l’autonomisation, de la coopération et de la confiance, autant d’éléments qui leur permettent d’établir un lien avec la nature et le territoire et d’en être les gardiens, tout en améliorant leur qualité de vie, tant sur le plan individuel que collectif.
Pour les auteurs, donner aux peuples autochtones et communautés locales les moyens d’agir en tant que partenaires et chefs de file est aujourd’hui indispensable pour une conservation juste et efficace dans l’optique d’atteindre les objectifs du cadre mondial de la biodiversité. Bien que la transformation des approches stratégiques, de la conception, des capacités, des processus et des interactions, du financement et de la mise en œuvre des processus de conservation prenne du temps, ils soulignent différentes initiatives existantes et intéressantes, telles que l’inclusion croissante des aires et territoires du patrimoine autochtone et communautaire, aussi appelés territoires de vie.
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Un effort de collaboration basé sur les droits et la justice est nécessaire pour parvenir à un changement radical et cela s’applique à toutes les initiatives de conservation des espèces et des habitats, y compris la nouvelle vague d’initiatives visant à atteindre l’objectif de conservation de 30 % d’ici à 2030 et à restaurer les paysages dégradés de la planète.
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[Appel à experts] Rejoignez Co-op4CBD pour contribuer à la mise en œuvre de la CDB aux niveaux national et régional
Les membres du réseau d’experts ont l’opportunité de recevoir des formations sur les processus internationaux de protection de la biodiversité et de participer à des groupes thématiques chargés de contribuer aux sujets à l’ordre du jour des réunions du SBSTTA (l’organe subsidiaire chargé de fournir des avis scientifiques, techniques et technologiques) de la Convention sur la diversité biologique.
Cet appel est ouvert aux chercheurs, chercheuses et/ou praticiens, praticiennes des domaines suivants :
- biodiversité et santé ;
- utilisation des informations sur les séquences numériques des ressources génétiques ;
- conservation et utilisation durable de la biodiversité marine et côtière ;
- détection et identification des organismes vivants modifiés (OVM) ;
- zones marines d’importance écologique ou biologique (ZMEB) ;
- cadre de surveillance pour le cadre mondial pour la biodiversité Kunming-Montréal ;
- évaluation et gestion des risques liés aux OVM ;
- biologie de synthèse.
En rejoignant le réseau d’experts Co-op4CBD, vous aurez la possibilité de participer à des ateliers de renforcement des capacités en ligne qui auront lieu au cours du premier trimestre 2024. Les experts sélectionnés peuvent être invités à participer à des ateliers spéciaux en présentiel, ainsi qu’à contribuer à l’élaboration de notes techniques qui abordent le thème de la protection de la biodiversité par le biais des mécanismes de la CDB.
>> Candidatez ! <<
Experts et expertes intéressés sont encouragés à poser leur candidature pour rejoindre le réseau en remplissant ce formulaire (en anglais).
Découvrez un aperçu des sessions de formation précédentes, réalisées dans le cadre de Co-op4CBD.
JustConservation | Vers une ‘conservation juste’ : lier théories et pratiques de la justice dans la conservation de la biodiversité
Au cours des trois dernières décennies, la conservation de la biodiversité s’est élargie, passant de la seule préservation de la nature à des approches plus « respectueuses des populations ». Cependant, ces approches intégrant à la fois des objectifs de conservation et de développement n’ont pas nécessairement bénéficié aux populations locales. Le projet FRB-Cesab JustConservation a analysé comment des enjeux de justice se concrétisent dans la conservation. Il pose les questions suivantes :
- Comment différentes conceptualisations de la justice et de l’équité influencent-elles la gouvernance de la conservation ?
- Dans quelle mesure et par quels mécanismes l’intégration des objectifs sociaux dans la gouvernance de la conservation influence-t-elle l’efficacité de la conservation ?
Ce document synthétise en quelques pages le contexte et les objectifs du groupe, les méthodes et approches utilisées, les principales conclusions ainsi que l’impact pour la science, la société, la décision publique et privée.
Synthèse de l’avis des experts scientifiques et sociétaux sur le classement des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts (Esod)
Les prélèvements des Espèces susceptibles d’occasionner des dégâts (Esod) réduisent-ils les dégâts qui leur sont imputés ?
En France, la notion « d’Espèces susceptibles d’occasionner des dégâts » (Esod), anciennement « d’espèces nuisibles », désigne des espèces qui ont potentiellement des impacts négatifs sur la santé humaine ou celle du bétail, sur la faune et la flore, sur les activités agricoles ou forestières ou encore sur les biens matériels. L’un des groupes de cette classification rassemble des espèces dites “indigènes”, c’est-à-dire originaires de la région où elles sont présentes. Parmi elles, on retrouve la belette, la fouine, la martre des pins, le renard roux, le corbeau freux, la corneille noire, la pie bavarde, l’étourneau sansonnet ou encore le geai des chênes.
Une synthèse des connaissances de la littérature scientifique a été réalisée afin de déterminer si les prélèvements, soit la destruction d’individus, de ces Esod ont un effet sur la réduction des dégâts qui leur sont imputés. Pour cela, 47 publications de différents pays européens ont été sélectionnées et analysées.
Cette synthèse a permis de mettre en évidence que :
- Seuls les effets des prélèvements des Esod sur la réduction des dégâts sur la santé humaine et des troupeaux, et sur la prédation sur la faune sauvage et cynégétique font l’objet d’évaluation dans la littérature scientifique. Aucune étude portant sur l’effet de ces prélèvements sur les dégâts relatifs aux activités agricoles ni à la propriété privée n’a été retrouvée, alors qu’ils représentent une part importante des déclarations de dégâts, et entrainent le classement de ces espèces jugées comme responsables.
- En ce qui concerne les dégâts sur la faune, la majorité des études portent sur les effets des prélèvements du renard roux, de la corneille noire ou de la pie bavarde et plus minoritairement de la belette. À l’inverse, la recherche bibliographique n’a pu mettre en évidence aucune publication sur l’effet de l’élimination de la martre des pins et de l’étourneau, pourtant bien qu’inscrits sur la liste Esod actuelle.
- 70 % des études portant sur les dégâts sur la faune montrent que le prélèvement d’Esod n’a pas d’effet significatif sur la réduction de leur prédation sur la faune.
Cette synthèse de la littérature scientifique démontre donc que dans la majorité des études, recourir aux prélèvements d’Esod afin de réduire les dégâts sur la faune qui leur sont imputés, n’est pas une solution efficace.
Par ailleurs, la modalité de gestion consistant à focaliser les prélèvements sur une espèce à laquelle est attribuée un type de dégâts pose question. En effet, cette synthèse montre également qu’il est difficile d’attribuer un dégât à une espèce, notamment en raison de la complexité des réseaux trophiques.
Enfin, dans un contexte d’effondrement de la biodiversité, recourir aux destructions d’espèces devrait être justifié par l’urgence à agir pour empêcher un dégât que des critères objectifs et mesurables évalueraient comme grave. Mais, également justifié par l’absence de mesures alternatives, et après avoir fait la preuve de l’efficacité de la destruction sur la réduction des dégâts.
La publication est disponible dans les ressources téléchargeables ci-dessous.
En France, le Code de l’environnement, prévoit que le Ministère de la Transition écologique fixe par arrêté triennal la liste des espèces susceptibles d’occasionner des dégâts (Esod). Durant l’été 2023, le ministère a présenté sa liste d’Esod, pour le prochain arrêté, composée d’un dizaine d’espèces.
En partenariat avec la LPO et l’Aspas, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité a ainsi interrogé la recherche académique par le biais de cette synthèse de connaissances, afin d’évaluer les effets des prélèvements des espèces sur la réduction des dégâts qui leur sont imputés.
[#Ipbes10] Au cœur de la 10e plénière
La Plateforme prévoit de lancer son rapport d’évaluation sur les espèces exotiques envahissantes et leur contrôle, connu sous le nom de « Rapport sur les espèces exotiques envahissantes » le lundi 4 septembre. Ce rapport doit être examiné et approuvé au cours de la dernière semaine d’août par la plénière de l’Ipbes, réunissant les représentants de près de 140 états.
Retour sur les échanges jour après jour.
[Journée FRB 2023] Des recherches sur la biodiversité à la décision : quel statut pour les recommandations ?
La Journée FRB 2023 sera ainsi l’occasion de débattre ensemble autour de trois axes visant à interroger ces recommandations basées sur la science, de leur établissement à la prise de décision en passant par le processus de leur prise en compte :
- Sciences de la durabilité et recommandations :
Qui peut, doit émettre les recommandations pour répondre à l’urgence écologique et comment ?
- De la dynamique des recommandations :
Qui reçoit les recommandations, que deviennent-elles, quels sont les éléments de blocage, de prise en compte ?
- Et maintenant ?
Comment améliorer l’efficacité des trajectoires des recommandations scientifiques afin qu’elles soient transcrites en décisions ?
Considérations juridiques sur les nouvelles relations entre l’Homme et l’abeille
La raréfaction des pollinisateurs en général et de l’abeille domestique en particulier ont mis en évidence leur importance dans la production agricole et la protection de biodiversité.La mise en œuvre d’instruments juridiques propres à garantir une bonne gestion de la pollinisation n’est pas des plus évidentes, en raison de la difficulté qu’il y a à gouverner les essaims et, surtout, à en fixer les termes d’un point de vue juridique. S’il y a bien service écosystémique, la légitimité d’un paiement à l’apiculteur interroge, comme interrogent les conventions de pollinisations, à la finalité aléatoire. Des conventions à l’objet inédit (fauche tardive, jachère fleurie, etc.) permettent sans doute d’asseoir un service environnemental au profit des pollinisateurs, mais elles peinent à compenser les atteintes (épandage de pesticides par exemple) qui les affectent.
Dix principes pour améliorer l’équité et la justice dans la gouvernance et l’usage des terres
Atteindre la durabilité à travers les systèmes fonciers est un défi pour de multiples raisons. Précisément parce que de multiples significations et valeurs sont associées à la terre. Également parce que les systèmes terrestres sont complexes, que les dommages peuvent être irréversibles et interconnectés avec des trajectoires de développement, qu’il peut exister des impacts importants liés aux petites empreintes foncières, que les retombées négatives des usages des terres peuvent être lointaines. Mais aussi parce que nous vivons sur une planète où les compromis sont fréquents, parce que les revendications se chevauchent et sont contestées, parce que les avantages et les bénéfices de la terre sont inégalement répartis. Enfin, parce que les acteurs ont des visions multiples, parfois contradictoires, de la justice.
Éviter les impacts négatifs irréversibles est toujours préférable, mais au-delà de ça, progresser vers la durabilité par l’utilisation des terres consiste souvent à négocier des compromis et des compensations justes et acceptables, plutôt que d’obtenir des résultats optimaux ou une paix stable entre les acteurs. À travers une approche multidisciplinaire, les auteurs exposent ici 10 principes clé, sous-tendus par un ensemble de preuves scientifiques solides, qui représentent l’état actuel des connaissances des sciences du système Terre et qui mériteraient d’être acceptées et comprises des scientifiques, des décideurs et des praticiens travaillant sur l’usage des sols. Ces principes n’apportent toutefois pas de réponses simples aux débats actuels sur la gestion des compromis et des synergies, sur comment organiser la multifonctionnalité des systèmes fonciers à travers les lieux et les échelles, ni sur comment mettre en place des procédures et une distribution équitable des bénéfices fonciers. Cependant, ils peuvent aider à adapter la gouvernance des systèmes fonciers pour réaliser un développement juste et durable, fournir un terrain commun pour la science et la politique et donner des pistes pour un agenda de recherche. Six propositions (encadrés) sont détaillées au fil du texte pour permettre aux décideurs et aux praticiens de collaborer pour relever les défis urgents liés aux changements d’usage des terres.
Les dix principes
1. La terre est le foyer de significations et de valeurs multiples.
2. La dynamique du système terrestre est complexe, avec des rétroactions et des interactions qui conduisent à la fois à des changements brusques et à la stabilité.
3. Certains changements d’utilisation des terres ont des impacts sociaux et environnementaux irréversibles à l’échelle de décennies ou de siècles.
4. Certaines utilisations du sol ont une faible étendue spatiale, mais des répercussions importantes.
5. Les systèmes terrestres sont interconnectés à l’échelle mondiale.
6. Les humains utilisent ou gèrent plus des trois-quarts de la surface non glacée de la Terre, mais c’est l’ensemble des terres, même celles qui sont apparemment inutilisées qui sont bénéfiques aux sociétés humaines.
7. L’utilisation des terres implique plus souvent des compromis que des gains ; maximiser un usage de la terre, comme l’atténuation du changement climatique, réduit presque toujours d’autres avantages pour d’autres utilisateurs.
8. Une grande partie des terres dans le monde fait l’objet de multiples chevauchements et revendications foncières.
9. Les avantages et les risques liés à l’utilisation des terres sont inégalement répartis et le contrôle des ressources foncières est de plus en plus concentré par un nombre réduit d’acteurs.
10. La justice sociale et environnementale liée à l’utilisation des sols comprend des formes multiples de reconnaissance et de justice procédurale, distributive et intergénérationnelle.
2023 : après la Cop, Cap sur l’action !
Qu’en est-il 30 ans après ? Au-delà des réserves sur quelques résultats de la Cop15 (recul de l’ambition pour certains objectifs comme la suppression des subventions néfastes ou l’obligation de divulgation des impacts du secteur privé), il nous semble essentiel d’en souligner les grandes avancées, par rapport au projet tel qu’il existait en 2021, ou par rapport aux objectifs d’Aïchi, fixés en 2010 par la même Convention.
Le « Cadre mondial pour la biodiversité » adopté par la CDB, s’extirpe du piège de la séparation humain-nature. Elle élargit nos perspectives écologiques et nos conceptions des relations nature-société en mettant en avant, dans plusieurs cibles, l’intégrité de tous les écosystèmes. Il ne s’agit plus de se préoccuper seulement de la grande valeur des écosystèmes dits « naturels », peu anthropisés. Il s’agit de s’intéresser aussi, voire surtout, aux écosystèmes modifiés, agricoles et urbains, dont la présence est parfois considérée comme la manifestation même de l’ingéniosité humaine, mais pour lesquels la place de la nature est aussi très importante et menacée. Tous les écosystèmes doivent donc être intègres, supposant diversité des compositions génétiques et spécifiques, de la structure paysagère, et des fonctions écologiques ! Une planification de l’ensemble des espaces (cible 1 du Cadre mondial) est la conséquence de cette prise en compte de l’ensemble des écosystèmes. La décennie pour la restauration des écosystèmes (2021-2030), décrétée par les Nations unies, devrait aider à dégager des moyens significatifs pour leur restauration.
Pour atteindre cette ambition d’intégrité, le cadre mondial propose d’emblée un contexte systémique, intégratif, de nos relations problématiques avec la nature. Il détaille, en 4 objectifs et 23 cibles, de manière précise et approfondie, des façons de construire de meilleures trajectoires sociales et écologiques, quels que soient les contextes sociaux, écologiques, des pays. Ce qui n’était pas une évidence, car les enjeux, les verrous, les perspectives diffèrent profondément, selon l’état de transformation des écosystèmes, l’intensification de l’agriculture, les densités humaines, le niveau de vie des habitants ou encore les habitudes de consommation, qui varient considérablement par exemple entre la France, le Congo ou l’Indonésie. Le Cadre décrit également la responsabilité actuelle, potentielle, de chaque secteur, agricole, industriel, financier ou de la société civile, et surtout les manières pour chacun·e d’être ambitieux, d’articuler ses efforts avec les autres partenaires. Conséquent, ce cadre suggère une série d’outils, de politiques publiques, autant incitatives, coercitives, préventives, systémiques, etc., qu’à nouveau chaque pays peut prioriser, selon son contexte, politique, économique et social.
Enfin, ce Cadre mondial – et ce n’est pas nouveau pour la Convention pour la diversité biologique ! – offre un cadrage social et anthropologique ambitieux, visionnaire, résolument inclusif, préoccupé par l’accès équitable aux écosystèmes des peuples autochtones, des communautés locales, des différents genres, des générations futures, le posant comme condition nécessaire à la préservation de la biodiversité.
C’est maintenant à chaque pays, chaque région, à l’Europe, de fixer ses priorités, afin de stopper le déclin de la biodiversité, de la restaurer. Chacun devra établir des objectifs, définir ce que serait un état satisfaisant de la biodiversité sur son territoire, et en conséquence, devra en rendre compte, à la Convention, à ses partenaires et sa population.
Souhaitons que 2023 soit l’année où la France se saisisse résolument de ce cadre pour améliorer et renforcer la prise en compte de la biodiversité et se donner les moyens d’engager la transformation vers la soutenabilité. L’intervention publique est en effet indispensable dans les domaines comme le climat ou la biodiversité. C’est d’ailleurs en substance les propos qu’ont tenu les Parties prenantes qui se sont exprimées pendant la séance de clôture du segment de haut niveau, en conclusion de la Cop : que des réglementations nationales ambitieuses déclinent ce Cadre mondial afin de donner un cap, d’harmoniser les actions, de lisser les distorsions de concurrence. Tout en travaillant sur les deux leviers majeurs que sont la planification écologique et la transformation des modèles économiques, sociaux et financiers, notre pays devra aussi revoir ses valeurs et comportements pour diminuer les impacts importés liés au commerce mondial.
Le projet scénario de laFondation pour la recherche sur la biodiversité, combinant récits, cartes cognitives et modèles, aidera les Parties prenantes à se projeter dans un futur que nous souhaitons tous plus désirable. Outils d’exploration de futurs plausibles, les scénarios ne sont pas des prédictions, ni des constructions consensuelles de ce que le futur devrait être. Par des recueils des perceptions des acteurs sur le terrain, des mises en récits et des modélisations des trajectoires de la biodiversité, les scénarios fournissent des langages et concepts communs, afin de penser les événements passés et à venir. Ils sont ainsi des vecteurs de prise de conscience, de connaissances, d’endossement des responsabilités sur des sujets potentiellement difficiles à appréhender du fait de perspectives potentiellement négatives ou sombres. Nous espérons qu’ils aideront à développer des capacités d’anticipation, de décisions et d’organisation collective.
2023 démarre : meilleurs vœux et Cap sur l’action !
L’échec du dissensus est essentiel pour que l’écologie scientifique influence les politiques de développement
La falsification des hypothèses et le changement de paradigmes sont deux des nombreux modèles qui expliquent la manière dont les théories, les expériences et les observations façonnent la compréhension. Cependant, l’écologie a également une histoire de débats verrouillés, dans lesquels les positions se figent et la progression vers un consensus consolidé est entravé, voire empêché, par l’absence de discours efficace et synthétique.
Les conséquences néfastes du verrouillage des débats en écologie et, plus largement, des sciences de l’environnement dépassent le cadre universitaire car les dissensus ont un impact sur la prise en compte de la connaissance scientifique dans l’élaboration des politiques environnementales qui font intervenir de multiples disciplines et parties prenantes. Pourtant, l’essor récent des plateformes scientifiques et politique d’évaluations et de synthèse, telles que le Giec et l’Ipbes, devraient améliorer le transfert des résultats scientifiques vers les décideurs, l’élaboration d’avis et faciliter leur transformation en réglementations, en objectifs et actions de gestion. Lorsque des désaccords scientifiques atteignent l’arène sociétale, ils peuvent nuire à la fois à la crédibilité scientifique et à la diffusion de la connaissance. Lewandowsky et al. (2021) a ainsi démontré que l’acceptation de la science comme moteur de la politique – et l’acceptation des politiques elles-mêmes – augmentent si les déclarations scientifiques sont consensuelles.
L’objet de cette publication est d’examiner les débats non consensuels en écologie, d’identifier pourquoi ils se produisent et de trouver des mécanismes pour en sortir.
[Actualité] Cap sur la Cop ! Le carnet de bord
La conservation plus efficace quand les peuples autochtones et les communautés locales sont inclus dans la gouvernance
Ces questions sont pourtant cruciales pour permettre une conservation efficace de la biodiversité. Cette étude présente une revue systématique de 169 publications examinant comment différentes formes de gouvernance influencent les résultats de la conservation, en accordant une attention particulière au rôle joué par les peuples autochtones et les communautés locales.
L’étude met en avant un contraste frappant entre les résultats d’une conservation contrôlée de l’extérieur et ceux produits par des efforts contrôlés localement. La plupart des cas présentant des résultats positifs à la fois pour le bien-être et la conservation proviennent de cas où les peuples indigènes et les communautés locales jouent un rôle central. C’est le cas, par exemple, lorsque ces communautés ont une influence substantielle sur la prise de décision. En revanche, lorsque les efforts de conservation sont contrôlés par des organisations externes et impliquent des stratégies visant à modifier les pratiques locales, elles tendent à aboutir à une conservation relativement inefficace, tout en produisant des résultats sociaux négatifs.
Une conservation équitable, qui renforce et soutient l’intendance (stewardship) environnementale des peuples autochtones et des communautés locales, représente la principale voie vers une conservation efficace à long terme de la biodiversité, en particulier lorsqu’elle est soutenue par des lois et des politiques plus larges. Cette étude explique en détail comment mettre en œuvre des transitions de gouvernance progressives par le biais de recommandations pour la politique de conservation, avec des implications immédiates pour la réalisation des objectifs de conservation dans le cadre de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique.
[Actualité] Cap sur la Cop ! Les ressources
La FRB et la CDB
La CDB est dotée d’un organe international chargé de fournir des avis scientifiques : le SBSTTA (Subsidiary Body on Scientific, Technical and Technological Advice). Celui-ci s’appuie sur des « points focaux » nationaux pour solliciter les experts. En France, ce rôle de point focal est assuré conjointement par le MNHN (Muséum national d’Histoire naturelle) et la FRB. Ces deux institutions font partie de la délégation française à la CDB, menée par le Ministère chargé de l’environnement et le Ministère chargé des affaires étrangères.
Journée FRB 2022 – Les actes d’une journée consacrée à la Convention sur la diversité biologique (CDB)
Quels niveaux de référence pour la biomasse des grands herbivores dans le cadre de la restauration écologique ?
Proclamée par les Nations unies, la « décennie de restauration des écosystèmes » 2021-2030 appelle à des objectifs fondés sur des preuves pour restaurer la diversité naturelle et la biomasse des grands herbivores. C’est dans ce cadre que des chercheurs ont analysé les relations consommateur-producteur de biomasse naturelle sur un ensemble de données mondiales dans les zones naturelles.
Leurs analyses révèlent que les écosystèmes africains ont généralement une biomasse de grands herbivores beaucoup plus élevée que les écosystèmes du reste de la planète et que les relations consommateur-producteur y sont plus fortes.
Pour l’Europe, l’Asie et l’Amérique du Sud, il n’y a pas de relations significatives entre la productivité primaire nette et la biomasse des grands herbivores, signe de faunes appauvries et considérablement plus faibles que prévu au regard des résultats dans les écosystèmes africains.
La restauration écologique et le ré-ensauvagement impliquent la restauration des processus de pâturage naturel. Les résultats indiquent qu’à l’aune de leur productivité primaire, de nombreuses réserves naturelles sont appauvries en biomasse de grands herbivores.
Néanmoins, sans références scientifiquement établies, les niveaux naturels de biomasse des grands herbivores sont mal compris et rarement ciblés. Alors que la surexploitation par le pâturage saisonnier du bétail domestique s’intensifie, il est urgent, quoique difficile, de parvenir à un consensus scientifique sur ce niveau de référence.
En attendant, les chercheurs de l’étude recommandent de gérer, ou de ré-ensauvager, les pâturages presque naturels sans objectifs de densité prédéfinis en terme de grands herbivores, mais en suivant la disponibilité des ressources naturelles fluctuantes avec une intervention de gestion minimale. La mise en place de sites expérimentaux de ré-ensauvagement avec une gestion réactive des herbivores peut faire progresser notre compréhension des processus, des seuils et niveau de référence relatifs à la densité de pâturage naturel.
Pour compléter cette étude, des niveaux de référence sur la densité des carnivores et la productivité primaire nette pourraient utilement compléter cette analyse.
Une science de la conservation qui franchit la frontière entre la connaissance et l’action
Générer une science qui informe effectivement les décisions de gestion exige ainsi que la production de l’information (ce qui constitue la connaissance) remplisse les trois critères d’être à la fois :
1. Pertinente (notable, intéressante pour la décision et opportune, fournie au moment où elle est nécéssaire) ;
2. Crédible (faisant autorité, digne de confiance) ;
3. Légitime (élaborée par un processus tenant compte des valeurs et des perspectives des parties prenantes) – aussi bien pour les chercheurs que pour les décideurs.
Pour cela, trois difficultés sont à surmonter :
1. Premièrement, les communautés de recherche et de gestion peuvent avoir des perceptions contrastées de l’importance d’une recherche.
2. Deuxièmement, la volonté de crédibilité scientifique peut s’effectuer au détriment de la pertinence et de la légitimité aux yeux des décideurs.
3. Troisièmement, différents acteurs (politiques, scientifiques, etc.) peuvent avoir des points de vue contradictoires sur ce qui constitue une information légitime.
Au travers de cet article, les auteurs mettent en évidence quatre cadres institutionnels qui peuvent faciliter un processus scientifique informant la gestion :
- les organisations environnementales d’interface, situées à la frontière entre la science et la gestion ;
- les agences de moyens au profit de la conservation qui intègrent des chercheurs ;
- les institutions de recherche qui établissent des liens formels entre décideurs et chercheurs ;
- les programmes de formation pour les professionnels de la conservation.
Bien que ces cadres ne soient pas les seuls à permette à la science de dépasser la frontière entre connaissance et action, ni qu’ils soient exclusifs les uns des autres, ils constituent des moyens efficaces de communication, de traduction et de médiation.
En dépit des défis à relever, les sciences de la conservation doivent s’efforcer d’être des « sciences de l’interface » qui font progresser la compréhension scientifique et contribuent à la prise de décision.
[Actualité] Décryptage et implication : la FRB en Europe et à l’international
CONTRIBUER AUX RÉFLEXIONS EUROPÉENNES
SUR LA BIODIVERSITÉ
La FRB contribue aux réflexions conduites au niveau européen pour améliorer la protection de la biodiversité via les outils juridiques et financiers.
PUBLICATION
La Cour européenne des droits de l’Homme et le droit à un environnement sain
Cet article donne matière à réflexion pour que la Convention européenne des droits de l’Homme intègre comme quatorzième liberté fondamentale le droit à un environnement sain, et reconnaisse la perte d’intégrité des écosystèmes, l’érosion de la biodiversité et la perte des services écosystémiques comme des atteintes aux droits de l’Homme.

NOTE
La taxation des terres agricoles en Europe : approche comparative
Les terres agricoles couvrent 36 % du territoire de l’Union européenne (soit 161,8 millions d’hectares). L’importance de ces surfaces leur confère une place incontournable en matière de biodiversité. Bien que l’agriculture européenne soit soumise à de nombreux processus d’harmonisation, la fiscalité des terres agricoles semble assez différente d’un État à l’autre. Pourtant, elle influe sur plusieurs aspects des politiques agricoles et environnementales. Pour ces différentes raisons, une analyse comparative de la taxation des terres agricole en Europe a paru utile à la Fondation pour la recherche sur la biodiversité.

COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Des experts européens proposent des solutions pour intégrer la biodiversité dans les infrastructures de transport
À l’occasion de sa conférence internationale du 19 au 23 septembre, l’IENE, dans le cadre du projet Bison, a alerté les médias européens sur les solutions visant à prendre en compte la biodiversité dans le déploiement des infrastructures de transport.

Consulter le communiqué de presse
IMPLIQUER LES CHERCHEUSES ET CHERCHEURS FRANÇAIS DANS LES TRAVAUX INTERNATIONAUX
La FRB participe à plusieurs réseaux internationaux (Ipbes, IENE, Biodiversa+) et joue un rôle clé dans la mise en œuvre de plusieurs de leurs activités.
APPEL À PROJETS – BIODIVERSA+
« Améliorer la surveillance de la biodiversité et des changements écosystémiques au niveau transnational pour la science et la société »
Cet appel vise à soutenir des projets de recherche transnationaux (d’une durée de 3 ans) portant sur les trois thèmes (non exclusifs) ci-dessous :
Thème 1 : Innovation et harmonisation des méthodes et outils de collecte et de gestion des données de surveillance de la biodiversité;
Thème 2 : Combler les manques de connaissance sur l’état/le statut, la dynamique et la tendance de la biodiversité afin d’inverser sa détérioration ;
Thème 3 : Utilisation des données de surveillance de la biodiversité déjà disponibles.

APPEL À EXPERTS – IPBES
Appel à nomination d’experts pour l’évaluation méthodologique Ipbes « Entreprises et biodiversité »
L’Ipbes lance un appel à nominations d’experts pour participer à l’évaluation “entreprises et biodiversité”. Cette évaluation méthodologique vise à catégoriser les dépendances et les impacts des entreprises vis-à-vis de la biodiversité et des contributions de la nature aux humains, ainsi qu’à identifier des critères et des indicateurs pour mesurer ces dépendances et ces impacts.
Session d’information le 11 octobre 2022 pour optimiser les candidatures – Inscription

La taxation des terres agricoles en Europe : approche comparative
Dans le cadre de l’Union européenne (UE), l’agriculture fait l’objet d’une politique commune ancienne, bien établie, très connue et bénéficiant du budget le plus important (386,6 milliards d‘euros pour la période 2021-2027, soit 32 % du budget européen ). Elle est également concernée par la politique du marché intérieur. En outre, diverses directives de l’UE relatives à l’environnement s’appliquent aux terres agricoles. C’est notamment le cas en matière de biodiversité (Directive Oiseaux, Directive Habitats, Directive sur la responsabilité environnementale), en matière d’évaluation environnementale (Directive Projets, Directive Plans et programmes), en matière d’eau (Directive cadre sur l’eau, Directive nitrates, Directive boues d’épuration, Directive inondations, etc.). L’UE est également partie à plusieurs conventions internationales dans le domaine de la biodiversité qui concernent les terrains agricoles (Convention sur la diversité biologique, Convention de Berne, Convention de Bonn, Convention de Ramsar, etc.).
Bien que l’agriculture européenne soit soumise à ce triple processus d’harmonisation, les règles de taxation des terres agricoles semblent assez différentes d’un État à l’autre. Pourtant, cette taxation influe sur plusieurs aspects des politiques agricoles et environnementales. Elle peut favoriser ou défavoriser la rentabilité de l’agriculture, inciter à pratiquer tel ou tel type d’agriculture plus ou moins favorable à la biodiversité, encourager ou désinciter à un changement de destination des terres agricoles. La taxation des terres agricoles entraine donc des effets multiples, aussi bien sur les terres agricoles elles-mêmes qu’envers les politiques agricoles, d’aménagement du territoire, d’urbanisme, d’environnement . En outre, au sein même des débats sur les stratégies possibles en matière de politique de la biodiversité la taxation des terres agricoles et ses modalités peuvent favoriser telle ou telle option.
Pour ces différentes raisons, une analyse comparative de la taxation des terres agricole en Europe a paru utile à la Fondation pour la recherche sur la biodiversité.
La Cour européenne des droits de l’Homme et le droit à un environnement sain
À travers un décryptage de plusieurs décisions de la Cour européenne des droits de l’Homme, l’article de Lucie-Anne Soubelet démontre que les pollutions, nuisances, catastrophes naturelles ou industrielles constituent l’essentiel des jurisprudences environnementales de la Cour européenne des droits de l’Homme.
Cet article donne matière à réflexion pour que la convention européenne des droits de l’homme intègre comme quatorzième liberté fondamentale le droit à un environnement sain, et reconnaisse la perte d’intégrité des écosystèmes, l’érosion de la biodiversité et la perte des services écosystémiques comme des atteintes aux droits de l’Homme.
L’article complet est disponible dans les ressources téléchargeables.
[Communiqué] Une nouvelle méthode pour évaluer la vulnérabilité des écosystèmes et protéger la biodiversité
Alors que les États se sont engagés à créer des zones protégées sur au moins 30 % de leurs territoires terrestres et maritimes d’ici 2030, une équipe de recherche internationale a mis au point un nouvel outil permettant de quantifier la vulnérabilité des communautés d’espèces. Associé aux futures études d’évaluation des risques pour les écosystèmes, cet outil devrait aider les décideurs à définir les priorités de gestion et à orienter les efforts de protection là où ils sont le plus nécessaires. Définir des stratégies de conservation appropriées est un objectif difficile à atteindre, notamment en raison de la complexité des menaces et des réponses des espèces, ainsi que des limitations budgétaires. Pour surmonter ce défi, l’équipe de scientifiques, dont des chercheurs du CNRS, de l’Ifremer, de l’IRD et d’organisations internationales, a simulé la réponse des communautés d’espèces à un large éventail de perturbations, pour fournir une estimation robuste de leur vulnérabilité dans un monde où les menaces futures sont diverses et difficiles à prévoir.
Quantifier la vulnérabilité de la biodiversité est crucial pour sauvegarder les écosystèmes les plus menacés. Publié dans Nature Communications le 1er septembre 2022, ce nouvel outil se distingue des travaux précédents car il estime le degré de changement de la diversité fonctionnelle, c’est-à-dire la biodiversité et les fonctions associées des écosystèmes, lorsqu’elle est exposée à des pressions multiples. Il a été développé dans le cadre de deux projets financés par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) au sein de son Centre de synthèse et d’analyse de la biodiversité (Cesab) et avec le soutien d’Électricité de France (EDF) et de France Filière Pêche (FFP).
La notion de durabilité dans la réglementation du commerce d’espèces sauvages
Privatiser pour mieux conserver : quelles sont les limites ?
Depuis quand une certaine tendance à la privatisation des espaces naturels s’est-elle développée ?
La privatisation est une idée très présente dans les politiques de conservation depuis les années 1980. Cette idée est liée au tournant néo-libéral dans les campagnes de conservation de l’environnement. Dans les pays du sud, elle était associée à des injonctions faites par les bailleurs de fonds à développer des droits de façon systématique, à la fois sur le foncier et sur les ressources. Dans l’imaginaire associé aux politiques de conservation, l’idée selon laquelle on ne peut conserver ou gérer que ce que l’on possède était très présente. Pour cela, il devait alors exister des droits de propriété sur les ressources sauvages pour qu’elles soient gérées de façon adéquate. De plus, dans ces années-là, s’opposer au marché ne semblait pas efficace. Il était plus judicieux d’envisager une exploitation durable des ressources. L’idée qu’on peut sauver la nature en l’exploitant relevait d’une question de pragmatisme. Quand on constate qu’on ne parvient pas à s’opposer aux pratiques illégales comme le braconnage, il relève du bon sens de se tourner vers des efforts de traçabilité des ressources sauvages exploitées plutôt que de tenter de prohiber ces marchés.
Quelles ont été les premières applications de ce modèle de gestion ?
Les premiers projets, très débattus, concernaient les espèces menacées de la faune et de la flore. Ces débats étaient liés à la Convention de Washington de 1973 (la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction – Cites) ou à des aspirations à déclasser certaines populations, notamment celles d’éléphants d’Afrique australe. Certains pays considéraient qu’après les efforts engagés pour le développement d’aires protégées, des populations d’éléphants étaient trop importantes au regard de la superficie des aires. Ainsi, accorder la gestion des droits de chasse à des communautés en périphérie des parcs nationaux pouvait être une solution. Or, si les populations d’éléphants ont pu augmenter, c’est avant tout grâce aux parcs nationaux.
La mise en place de ce modèle de gestion est-il efficace ?
Du point de vue de l’efficacité, la privatisation est difficilement justifiable. Il est difficile d’isoler ces effets de celles des politiques passées. Et on ne dispose pas d’évaluations de l’efficacité intrinsèque de l’outil consistant à développer des droits de propriété, cependant, il a été mis en avant pour d’autres critères. Par exemple, pour des questions d’équité et pour répondre à des mouvements sociaux. De nombreuses ONG s’élèvent contre des politiques de conservation publiques excluant les populations locales, les privant d’accès à un certain nombre de ressources. Le modèle privé propose d’accéder à des ressources économiques en échange de ressources biologiques. Malgré tout, il existe dans l’imaginaire économique dominant d’inspiration libérale l’idée selon laquelle la propriété est associée à la responsabilité et à la bonne gestion. Mais il n’existe pas de démonstration théorique de la supériorité de la propriété privée sur d’autres formes d’appropriation : cette idée est purement idéologique.
Le modèle privé peut-il remplacer une gestion publique de l’environnement ?
Bien souvent, la privatisation est envisagée en complément d’efforts mis en place à travers des politiques publiques. Le but est de les prolonger sur de nouveaux espaces, car les réserves foncières allouées à la conservation sont limitées et s’appuyer sur des intérêts privés est un moyen de conserver plus de territoires. C’est ce qui est mis en avant pour justifier les projets de banques de conservation.
Cela peut-il favoriser le développement local et les valeurs locales associées à la nature ?
Exclure les populations locales des politiques et des espaces dédiés à la conservation est injustifiable d’un point de vue éthique et politique. Il existe de plus en plus de lectures décoloniales des politiques de conservation qui accusent les parcs nationaux de fonctionner sur des représentations de la conservation occidentales. Ces nouvelles lectures rejettent le principe qu’au nom de la préservation de la biodiversité, qui est un patrimoine commun de l’humanité, on impose des restrictions d’usages à des populations locales dans des États souverains. C’est une forme d’impérialisme vert.
Il y a eu un engouement certain il y a une dizaine d’années pour ce modèle de gestion. Pourquoi cet élan s’est-il essoufflé aujourd’hui ?
Comme tout ce qui touche à l’exploitation des ressources dans la perspective de les sauver ou de les conserver, il existe des limites qui sont celles des marchés. Si on décide de s’appuyer sur l’exploitation économique d’un écosystème pour en tirer des revenus suffisants utiles à une conservation à grande échelle, il faut qu’il y ait de la demande. Lorsque ces modèles ont été mis en place, les marchés n’étaient pas forcément au rendez-vous, aucune étude de marché n’ayant réellement été réalisée en amont. Pour que l’économie puisse être un argument, il faut de vrais revenus.
Que pensez-vous des prises de positions fortes quant à la direction à prendre pour la gestion de l’environnement ?
Le danger de telles propositions, c’est de les préconiser d’un point de vue globale et d’en faire des solutions. Si on associe la conservation de la forêt tropicale à l’exploitation des produits non ligneux ou des molécules naturelles qu’elle contient et qui pourraient être utilisées pour la cosmétique ou l’industrie pharmaceutique, cela signifie que des marchés doivent se développer. Il faut que la demande en ressources issues des milieux naturels soit suffisant pour devenir un levier afin de conserver l’environnement. Or, il existe des écosystèmes ayant un grand intérêt biologique en termes de diversité mais qui ne recèlent pas pour autant de produits d’intérêt pour les marchés. Il n’existe pas de corrélation entre les deux.
Existe-t-il des exemples d’évolution de programmes basés sur un tel modèle de gestion ?
Je pense au programme de gestion Gelose (Gestion localisée et sécurisée), mis en place à Madagascar et qui visait à donner aux communautés locales des droits sur la forêt et sur les ressources naturelles. Les difficultés de mettre sur pied des institutions de gestion locale se sont multipliées. Il y a eu des problèmes de gouvernance et de capture par des élites avantagées. C’est aussi ce qu’il s’est passé avec le programme Campfire qui visait à associer à la gestion de droits de chasse des populations vivant en périphérie de parcs nationaux au Zimbabwe. Le programme a fait beaucoup parler de lui, mais les résultats n’ont pas été probants. Généralement, lorsque les financements cessent, les projets disparaissent. On pourrait dire que c’est un prolongement de ce rapport colonial qu’un certain nombre d’ONG contestaient dans la gestion publique. Donner des droits d’un genre nouveau sur des usages nouveaux encadrés de manière très spécifique par des populations qui n’ont pas forcément les formes d’organisation et les instances pour se saisir efficacement de tout ça, c’est souvent difficile.
Vers quel modèle devrions-nous nous tourner à l’avenir ?
C’est difficile de renoncer à un modèle unique. L’important, c’est de ne pas tout miser sur l’économie, qui a été très présente. Il faut arrêter de penser que les arguments et incitations monétaires sont les seuls arguments perceptibles par les acteurs, qu’il s’agisse du grand public ou des politiques. Les choix d’aménagement du territoire et de conservation de l’environnement sont des questions complexes. Il faut remettre l’économie à sa place en prenant conscience que les représentations qu’on s’en fait dans le monde de la conservation sont plus idéologiques que théoriques et ne correspondent pas toujours à la réalité des pratiques économiques.
La stratégie climatique de l’Union européenne s’apprête à accroître la déforestation à l’échelle mondiale
Pour éviter un changement climatique catastrophique ainsi que la perte de biodiversité, la science du climat nous avertit que l’humanité doit cesser de transformer les forêts en terres agricoles, car ce processus libère du dioxyde de carbone et détruit les habitats.
Pourtant, à mesure que la population mondiale, les revenus et la consommation de viande augmentent, les terres agricoles s’étendent à un rythme toujours plus effréné. L’Europe a contribué à cette déforestation en externalisant son approvisionnement en denrées alimentaires et autres produits agricoles.
Malheureusement, la stratégie climatique « Fit for 55 » [paquet législatif visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 55 %] de l’Union européenne s’apprête à étendre l’empreinte de l’Europe et à accroître la déforestation à l’échelle mondiale. C’est pourquoi un groupe de scientifiques de toute l’Europe appelle le Parlement européen à modifier le plan par des amendements raisonnables (certains sont déjà adoptés par un de ses comités).
Auteurs :
- Denis Couvet, professeur au Muséum national d’histoire naturelle, président de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité et membre de l’Académie d’agriculture de France ;
- Wolfgang Cramer, directeur de recherche CNRS à l’Institut méditerranéen de biodiversité et d’écologie marine et continentale (Aix-Marseille Université) et membre de l’Académie d’agriculture de France ;
- Timothy D. Searchinger, chercheur à l’université de Princeton (New Jersey).
[Ipbes] Au cœur de la 9e plénière
Pour la première fois depuis la crise de la Covid-19, les représentants de près de 140 pays se réunissent à Bonn en Allemagne pour l’approbation de deux nouveaux rapports scientifiques majeurs : le premier sur l’utilisation durable des espèces sauvages et le second sur les différentes valeurs de la biodiversité. Cette plénière sera aussi l’occasion de discuter du lancement d’une nouvelle évaluation sur les liens entre les entreprises et la biodiversité ainsi que des scénarios des futurs de la nature.
Retour sur les échanges jour après jour.
[Journée FRB 2022] Vous reprendrez bien un peu de CDB ? Un regard de la recherche sur le cadre mondial pour la biodiversité
Il y a 30 ans, 1992, la conférence de Rio organisée par les Nations Unies porteuse de grandes ambitions dans le domaine environnemental a permis notamment la création de trois Conventions, dont celle sur la diversité biologique, la CDB. Trois objectifs structurants ont fait consensus :
- Conserver la diversité biologique ;
- Utiliser durablement ses composantes ;
- Partager de manière juste et équitable les avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques.
30 ans plus tard, l’érosion de la biodiversité n’a pas été stoppée. Pourtant les chercheurs n’ont cessé d’alerter sur l’état de la biodiversité, son déclin accéléré, les disparitions d’espèces, les impacts notamment par et sur l’espèce humaine, les enjeux pour les humains et les non-humains, et les réponses qui peuvent être apportées via une gouvernance mondiale plus inclusive.
Comment dépasser les freins aux trajectoires de développement plus soutenables ? Comment mieux intégrer la recherche et la connaissance dans les décisions publiques et privées ? Comment enrayer le déclin de la biodiversité ? Autant de questions que le nouveau cadre mondial pour la biodiversité a pour ambition de traiter.
Cette Journée ambitionnait de valoriser le contexte scientifique de ces négociations politiques internationales et de mettre l’accent sur l’appropriation de ces enjeux par les acteurs en s’appuyant sur des actions concrètes menées par ces derniers.
(Re)découvrez la vidéo
« la Convention sur la diversité biologique décryptée »
Gestion adaptative, le bon sens loin de chez nous
Le verbe gérer, selon le dictionnaire, signifie organiser les choses en s’adaptant à la situation, et donc faire face à une réalité forcément évolutive. Dans ce cadre, l’expression « gestion adaptative » semble s’apparenter à un pléonasme. Un gestionnaire qui ne s’adapterait pas à l’évolution de son environnement n’aurait, en effet, que peu d’avenir, sauf celui de se faire qualifier de « mauvais gestionnaire », de perdre la confiance de ses mandants et, in fine, de se voir retirer la responsabilité qui lui avait été confiée.
Gestion adaptative : une chasse durable est-elle possible ?
Qu’est-ce que la gestion adaptative de la chasse ?
Cette mesure vise à ajuster les prélèvements en fonction de l’état de conservation des espèces chassées, en s’appuyant à la fois sur la concertation des parties prenantes et sur les données scientifiques. Elle a été introduite en France dans la loi du 24 juillet 2019, portant création de l’Office français de la biodiversité (OFB). Réglementairement, il y a, aujourd’hui quatre espèces soumises à la gestion adaptative : la tourterelle des bois, le grand tétras, la barge à queue noire et le courlis cendré. Mais l’idée est de l’étendre à toutes les espèces exploitées, non seulement chassables mais aussi peut-être un jour pêchables.
En quoi cette gestion diffère de ce qui était précédemment mis en place ?
Jusqu’à présent aucune réglementation, sauf quelques rares exceptions concernant surtout les espèces sédentaires, ne s’appliquait au nombre à prélever. La régulation des prélèvements, pour la chasse des oiseaux, se faisait essentiellement par la durée de la saison de chasse. Or avant l’arrivée de cette modalité de gestion, les chasseurs pouvaient avoir tendance à considérer certains gibiers, et notamment les oiseaux migrateurs, comme une manne infinie qu’ils pouvaient prélever à satiété. La chasse, entre le milieu du 19e et le début du 20e siècle, a pu ainsi prendre des allures industrielles pour les besoins de certaines industries comme la chapellerie : les plumes étant très prisées pour décorer les chapeaux, ou l’agroalimentaires avec les usines de conserves de canards sauvages dans le nord de l’Europe. Des millions d’oiseaux ont été prélevés à cet effet. Mais ces prélèvements illimités n’ont pas pu durer très longtemps, car les populations ont fortement diminué, atteignant a priori leurs niveaux les plus bas à la sortie de la Seconde Guerre mondiale. Des réglementations ont alors vu le jour. Les saisons de la chasse se sont raccourcies, certaines espèces en danger critique ont été placées sous statut de protection. La chasse d’autres espèces, comme les petits oiseaux, tel le rouge gorge, pour des raisons éthiques a été interdite. Si toutes ces régulations combinées ont permis d’atténuer le déclin de certaines espèces, il n’était pas encore question du volume des prélèvements. Un chasseur pouvait, sur une période donnée, prélever autant d’individus d’une espèce qu’il le souhaitait, pourvu que la chasse soit ouverte, et que certaines limites ne soient pas imposées localement par les sociétés de chasse.
Comment la gestion adaptative a-t-elle vu le jour ?
Elle a été introduite en Amérique du nord dans les années 1990 pour la chasse des oiseaux d’eau, les anatidés. À cette époque, des épisodes de sécheresse ont provoqué le déclin de certaines populations de canards et les questions qui se posaient alors étaient les suivantes : la chasse avait-elle un effet additionnel ou, comme le suggérait une étude, la chasse n’avait qu’un rôle compensatoire à la mortalité naturelle, autrement dit les oiseaux seraient morts à cette période d’une façon ou d’une autre ? Ce défaut de connaissances conduisait à l’impossibilité de proposer des quotas sur lesquels tout le monde pouvait s’accorder. Si la chasse prélève des oiseaux qui mourront par ailleurs, pourquoi alors en limiter les prélèvements ?
Comment les parties prenantes se sont accordées ?
Un groupe de scientifiques a proposé de mettre en place une gestion adaptative des prélèvements d’oiseaux d’eau, dans le but d’encadrer la pratique de la chasse, mais aussi d’améliorer simultanément les connaissances et l’état de conservation des espèces. Ils ont réuni différentes parties prenantes comme les instances fédérales, les chasseurs et les naturalistes pour s’accorder à la fois sur des tailles de population cibles et sur une réglementation avant le début de la saison de chasse. Les populations d’anatidés ont alors été suivies durant l’année pour être ensuite confrontées aux prédictions de différents modèles, de manière à faire évoluer la connaissance du fonctionnement du système. Si les connaissances collectées depuis 1995 ont conclu que la chasse jouait bien un rôle additif à la mortalité naturelle des anatidés, les mesures mises en place, ont permis à ces populations d’oiseaux d’aller nettement mieux. Les objectifs de taille de populations initialement visés ont été pour la plupart des espèces très largement dépassés depuis.
À partir de quand la France a-t-elle choisi d’adopter ce modèle ?
Au début des années 2000, en France, une grande tension agitait les défenseurs de la nature et les chasseurs. Les débats portaient sur les volumes de prélèvements ou les périodes de chasse, pour l’oie cendrée ou la tourterelle des bois par exemple. Les bons résultats de la gestion adaptative conduite en Amérique du Nord sont parvenus jusqu’en France. Ce modèle est apparu aux yeux de tous comme un modèle de gestion durable, car fondé sur les connaissances et permettant aux parties prenantes de se mettre autour d’une table et de s’accorder. La gestion adaptative a été graduellement introduite en Europe pour les différentes espèces d’oies, puis en France pour certaines espèces d’oiseaux sédentaires ou migrateurs.
Comment cette gestion a-t-elle été accueillie par les parties prenantes ?
Les dissensions résident dans la manière dont cette gestion adaptative doit être appliquée : faut-il utiliser tel ou tel modèle de dynamique de population ? Lorsqu’une incertitude apparaît, faut-il faire valoir le principe de précaution ? etc. De façon générale les chasseurs acceptent le principe des quotas et le suivi scientifique pour déterminer les causes premières du déclin des espèces chassées, mais ils estiment qu’ils n’en sont pas forcément directement responsables et qu’ils paient le prix pour les autres. Selon eux, il est plus facile de réglementer la chasse qui est un loisir que de modifier les pratiques agricoles qui dans bien des cas sont les causes directes du déclin des oiseaux. C’est le cas par exemple de la tourterelle des bois qui a vu ses populations chuter à cause de la perte d’habitat liées à l’agriculture. Sa taille de population est devenue si faible qu’elles ne peuvent aujourd’hui plus soutenir le prélèvement et sa chasse est actuellement suspendue.
Quels impacts concrets la gestion adaptative va avoir sur les pratiques de chasse ?
Elle va impliquer certaines contraintes, en particulier l’existence de quotas de prélèvements et l’obligation pour les chasseurs de renvoyer chaque année leur tableau de chasse rapidement après la fin de la saison. Mais cette gestion adaptative leur promet aussi un gibier globalement abondant grâce à la réglementation sur les prélèvements ou la période de chasse qui fluctuera en fonction de l’état et des connaissances des populations cibles.
Quand sera-t-elle appliquée aux autres espèces ?
Cette gestion est encouragée par l’Europe. Il est probable que dans les cinq prochaines années, elle soit mise en place pour une grande partie des 90 autres espèces qui aujourd’hui sont chassables en France.
Les leviers étatiques recommandés par l’évaluation mondiale de l’Ipbes et réflexions préliminaires pour leur déclinaison en droit français
Ce travail a consisté en l’identification, l’analyse et la catégorisation des différents leviers étatiques et de leurs exemples d’application pratique apparaissant dans le rapport Ipbes. Des propositions de leviers juridiques, économiques et de politiques publiques potentiellement intéressants à mettre en oeuvre en France ont été formulés sur la base de certaines recommandations de l’Ipbes, afin de pouvoir initier une réflexion concernant la concordance, ou les lacunes, du droit de l’environnement français vis-à-vis de ces préconisations, ainsi que sur une mise en oeuvre adaptée de ces instruments à l’échelle nationale.
Ces propositions ont été formulées dans un objectif exploratoire puis soumises à l’examen d’experts en droit de l’environnement à travers une enquête, afin d’évaluer leur pertinence et leur maturité pour une intégration en droit français.
Présidentielle 2022
En 2019, une évaluation mondiale de la biodiversité et des services dont dépend l’humanité – comme la pollinisation des cultures, l’épuration de l’air et de l’eau, la fertilité des sols, la récréation, la lutte contre le changement climatique – a mis en évidence la responsabilité de nos activités et de nos modes de vie.
Pour limiter les pression directes et indirectes qui s’exercent sur la biodiversité, les chercheurs démontrent qu’il est indispensable de protéger le vivant, de restaurer les milieux dégradés, d’utiliser durablement les ressources naturelles et de tendre vers un partage juste et équitable des avantages tirés de la nature. Dans une tribune publiée sur son site internet, la FRB et ses partenaires ont appelé à mettre en œuvre le changement transformateur préconisé par la plateforme intergouvernementale pour la biodiversité et les services écosystémiques (Ipbes) et nécessaire pour vivre en harmonie avec le reste du vivant.
C’est à présent au tour des candidats de se saisir de cet enjeu majeur. Or, dans les programmes, il est question du climat, de chasse, de justice sociale, d’économie, de santé… Tous ces enjeux sont importants, mais alors qu’ils sont intimement liés à la biodiversité, ils ne la mentionnent que marginalement.
Dans le contexte de discussions nationales autour de la troisième stratégie pour la biodiversité et international autour du cadre post-2020 pour vivre en harmonie avec la nature, il est temps de s’intéresser au vivant, car les chercheurs démontrent aussi que sans une biodiversité intègre et fonctionnelle, l’humanité ne pourra pas survivre plus de quelques centaines d’années. Considérant qu’en moyenne une espèce vivante vit plus de 4 millions d’années, notre espèce, Homo sapiens ayant quelques 300 000 ans, il nous reste du chemin à parcourir…
À quelques jours des élections présidentielles 2022, découvrez comment les programmes ont transcrit les alertes des scientifiques et quelles mesures en lien avec la biodiversité sont mises en avant (cf par thématique en bas de page).
L’Assemblée des Parties prenantes de la FRB a participé à l’identification de différentes thématiques considérées comme prioritaires pour la réalisation du changement transformateur nécessaire afin de vivre en harmonie avec le reste du vivant. Les différentes mesures extraites des programmes sont présentées dans ce dossier (cf bas de page ou encart sur la droite) et les candidats sont invités à s’exprimer sur ces enjeux environnementaux.
“Mesdames et Messieurs les candidats à l’élection présidentielle, êtes-vous prêts à changer le cours de notre histoire commune avec la biodiversité ?” Consultez la tribune.
- Nathalie Arthaud – Lutte ouvrière (LO)
- Nicolas Dupont-Aignan – Debout la France (DLF)
- Anne Hidalgo – Parti socialiste (PS)
- Yannick Jadot – Europe Écologie les Verts (EELV)
- Jean Lassalle – Résistons
- Marine Le Pen – Rassemblement national (RN)
- Emmanuel Macron – La République en marche (LRM)
- Jean-Luc Mélenchon – La France insoumise (LFI)
- Valérie Pécresse – Les Républicains (LR)
- Philippe Poutou – Nouveau parti anticapitaliste (NPA)
- Fabien Roussel – Parti communiste français (PCF)
- Éric Zemmour – Reconquête!
#Presidentielle2022 – Économie et fiscalité
Économie et fiscalité, des enjeux biodiversité
Les pressions exercées sur la biodiversité augmentent fortement depuis la deuxième moitié du XXe siècle. Elles sont causées par des déterminants qui dépendent beaucoup de la façon dont s’est développé notre modèle économique et les activités qui en découlent.
Ces modes de développement, qui ont entrainé une croissance ininterrompue de la consommation des ressources naturelles au niveau global, voire de surconsommation, mettent ainsi en péril la capacité des écosystèmes à fournir les services dont ils dépendent. En outre, la fiscalité telle qu’elle est imaginée aujourd’hui sur le territoire français est défavorable à la préservation de la biodiversité. Comme le souligne Guillaume Sainteny : “Il n’existe pas véritablement de fiscalité de la biodiversité, mais plutôt une fiscalité qui s’est historiquement construite sans tenir compte de ses effets sur la biodiversité”.
Sont ici compilées toutes les mesures proposées par les candidat·es qui soient de nature à peser sur les activités économiques en ayant un impact sur la biodiversité, ou mesures fiscales incitatives ou punitives liées à la biodiversité.
Les mesures des candidat·e·s :
#Presidentielle2022 – Changement climatique et transition énergétique
Changement climatique et transition énergétique, un enjeu biodiversité
Convaincue que la biodiversité et le climat sont deux enjeux environnementaux complémentaires qui, s’ils s’ignoraient entraineraient des difficultés supplémentaires, la Fondation alerte sur les liens complexes entre changement climatique et déclin de la biodiversité. L’atténuation du changement climatique repose pour une large part sur la transition énergétique, c’est-à-dire l’abandon des sources d’énergie fondées sur le carbone fossile au profit des énergies renouvelables. Cet objectif national et européen majeur suscite des développements technologiques et d’importants investissements. Or les infrastructures développées peuvent avoir des impacts multiples, et surtout non anticipés, sur la biodiversité et en particulier sur le fonctionnement des écosystèmes. Il est donc aujourd’hui indispensable de concilier défi énergétique et préservation de la biodiversité.
Pour ces élections, les débats énergétiques sont particulièrement centrés sur les questions nucléaires, l’acceptabilité des énergies renouvelables et notamment la question des éoliennes ou encore la rénovation thermique des bâtiments. Les impacts de ces différents développements sont peu ou pas mentionnés, ce qui peut à court terme être préjudiciable à la biodiversité et par contre coup préjudiciable à la lutte contre le changement climatique.
Les mesures des candidat·e·s :
#Presidentielle2022 – Santé
La santé, un enjeu biodiversité
L’érosion massive de la biodiversité et de ses services écosystémiques menacent la santé humaine de multiples façons. En premier lieu par le biais de notre alimentation : sa diversité, sa qualité nutritionnelle dépendent de la diversité biologique et d’écosystèmes fonctionnels. Ensuite, la perte de biodiversité aggrave les évènements climatiques extrêmes, perturbe la capacité des écosystèmes à stocker du carbone, à épurer l’eau, l’air et les sols, à réguler les pathogènes, entrainant des décès et des pertes de qualité de vie. L’effondrement du vivant, enfin, impacte le bien-être humain par la perte des possibilités d’apprentissages, d’inspiration, la perte de l’identité liés aux paysages et des expériences physiques et psychologiques en lien avec le nature.
La pandémie récente a mis en lumière les liens entre notre santé et la déforestation, le braconnage et le commerce d’animaux et de végétaux sauvages, le changement climatique, la faible diversité génétique et spécifique dans les champs et les élevages, ou encore la croyance que c’est en décimant des populations, en perturbant des écosystèmes, que l’on va réduire les maladies.
Les maladies émergentes, comme Zika, Chikungunya, les résurgences croissantes de maladies anciennes, comme la grippe aviaire, la brucellose et autres zoonoses, sur le territoire national, menaçant la viabilité de certaines filières agricoles montre l’importance de la question. Ces pandémies proviennent de divers pathogènes transportés par des réservoirs animaux mais leur émergence est en très grande partie due à un manque de compréhension des milieux sauvages, une mauvaise gestion de ces derniers, une trop faible diversité chez les espèces cultivées, élevages.
Les mesures des candidat·e·s :
#Presidentielle2022 – Droit et gouvernance
Droit et gouvernance, des enjeux biodiversité
La prise en compte de la biodiversité et l’établissement de mesures visant à améliorer sa conservation suppose divers cadres légaux, administratifs et de gouvernance.
Les compétences associées à cette mission peuvent être imaginées à différentes échelles de territoire : locale, régionale, nationale, ou même transférée aux niveaux européen et international. En outre, la coopération entre États, les partenariats à renforcer ou à tisser, ou encore le dosage d’interventionnisme peuvent faire l’objet d’une redéfinition stratégique.
Sont listées ci-dessous les mesures envisagées par les candidat·es ayant trait à ce maillage politique, juridique et administratif, de nature à redessiner ou réaffirmer les contours de cette gouvernance de la biodiversité.
Les mesures des candidat·e·s :
#Presidentielle2022 – Agriculture et pêche
Agriculture et pêche, des enjeux biodiversité
Mal gérée, trop intensive, l’agriculture peut entrainer pollution, érosion des sols et de la biodiversité sauvage, transformation des habitats et déforestation, réduisant d’autant plus, à terme, le potentiel productif. Et ce, alors que les besoins alimentaires vont croissant. L’évolution de la demande des consommateurs et les incertitudes face au changement climatique nécessitent de remettre les fonctionnements écologiques au cœur de l’agrosystème, afin de rendre notre agriculture plus durable, tout en préservant et valorisant l’ensemble de ses diversités.
Par ailleurs, on observe une chute drastique des populations de poissons, notamment due à une surexploitation de certaines espèces, déclins des points chauds de diversité marine tels que les récifs coralliaires en raison du changement climatique, des pollutions, voire du tourisme, d’où la nécessité de proposer des mesures de protection à l’égard de la biodiversité marine et aquatique.
Nous avons ici regroupé l’ensemble des mesures qui ont pour objectifs d’enrayer de manière directe l’érosion de la biodiversité en lien avec l’agriculture et la pêche. Les mesures favorisant une transition écologique s’intégrant à la thématique identifiée et ayant un impact indirect sur l’érosion de la biodiversité ont également été recensées ci-dessous.
Les mesures des candidat·e·s :
#Presidentielle2022 – Recherche
Des enjeux liés à la recherche sur la biodiversité
Comprendre le comportement des différentes espèces, les interactions entre elles et avec les êtres humains, l’évolution des écosystèmes, des espèces, des individus, des gênes, l’histoire du vivant sur notre planète, établir des modèles et scénarios pour mieux anticiper l’impact de notre empreinte sur le vivant pour les années à venir sont autant de pré-requis pour une cohabitation soutenable et une préservation efficace de la biodiversité.
Pour protéger la biodiversité, il est primordial de la connaitre. Dans cette optique, le développement et le financement de la recherche ainsi que son accessibilité au plus grand nombre sont des éléments primordiaux pour protéger la biodiversité. Ceci entre en résonance directe avec les missions principales de la Fondation, à savoir soutenir la recherche, agir avec et diffuser les connaissances.
Les mesures compilées ici et proposées par les candidat·es sont relatives à la recherche, au développement et à l’innovation autour des questions environnementales et de biodiversité. Il est ainsi question de l’organisation de la recherche, des moyens qui y seront alloués, des priorités de recherche (tant en termes de milieux que de finalités).
Les mesures des candidat·e·s :
Cadre mondial post-2020 pour la biodiversité – Analyse du projet de cadre par la FRB
Ce rapport apporte un éclairage scientifique sur les éléments discutés au sein de la Convention sur la diversité biologique (CDB), en particulier les points anticipés pour les sessions de négociation.
La pertinence des quatre objectifs globaux, des 21 cibles d’action et des indicateurs associés qui constituent le projet de cadre révisé dans sa dernière version officielle en date de juillet 2021 y est examinée au regard des travaux scientifiques les plus récents. Ce travail a été mené dans la perspective d’un appui aux ministères français, la FRB étant point de contact national scientifique et technique pour la CDB.
Un cadre mondial, pour quoi faire ?
En 2019, l’évaluation mondiale de l’Ipbes a suggéré qu’une reconquête de la biodiversité peut être envisagée moyennant des efforts importants, des changements transformateurs, c’est-à-dire des changements profonds de nos modes de vie et de consommation qui passent par la réorganisation fondamentale des facteurs économiques, sociaux et technologiques qui les régissent.
Un cadre mondial doit ainsi faciliter la mise en place de ces changements pour qu’ils se fassent de manière coordonnée aux échelles locales, nationales et globale.
Les messages-clés de la publication
- 21 cibles sont considérées. Les cibles 1 à 8 visent à réduire les menaces qui pèsent sur la biodiversité, afin de respecter ses valeurs intrinsèque et instrumentale. Les cibles 9 à 12 portent sur la mise en valeur des contributions de la nature aux populations humaines, par des approches basées sur les écosystèmes ou solutions fondées sur la nature. Les cibles 14 à 21 portent, elles, sur les moyens nécessaires à la mise en œuvre du cadre stratégique et traitent des facteurs indirects de perte de biodiversité (modes de production et de consommation notamment). Les trois piliers de la CDB, à savoir protection de la diversité biologique, utilisation durable de ses éléments et partage des avantages, font systèmes et sont tous les trois nécessaires, ce qui implique que le partage des avantages doit être mis en œuvre. Une réflexion sur son élargissement au-delà du seul aspect des ressources génétiques serait pertinent, en introduisant notamment le partage des avantages issus de la biodiversité et des services écosystémiques.
- Le premier objectif stratégique est de maintenir et restaurer l’intégrité des écosystèmes, concernant aussi bien écosystèmes dits naturels que ceux modifiés par les humains, différant dans leurs enjeux et états de référence, tout en se préoccupant de leurs interconnexions.
- Tableau récapitulatif de l’évaluation des objectifs, cibles et indicateurs :

#Presidentielle2022 – Utilisation des espèces sauvages
Utilisation des espèces sauvages, un enjeu biodiversité
Les espèces sauvages sont soumises à l’utilisation par l’humain à différentes fins : de subsistance, commerciales, récréatives ou culturelles. Les activités de prélèvement telles que la pêche, la chasse, la cueillette et l’exploitation des forêts naturelles par opposition aux plantations sont les principales formes d’utilisation des espèces sauvages.
Au niveau mondial, l’Ipbes estime qu’il s’agit d’une des cinq causes majeures perte de biodiversité. Il est donc nécessaire de garantir une exploitation durable des organismes afin d’enrayer l’érosion du vivant.
Les mesures listées ci-après sont celles qui nous ont paru concerner directement les espèces sauvages (terrestres ou maritimes, animales ou végétales), en adressant les conditions de leur utilisation.
Les mesures des candidat·e·s :
Modifions le cours de notre histoire commune avec la biodiversité
Dans le cadre de la campagne présidentielle, l’équipe de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et ses instances de gouvernance (Conseils d’administration, scientifique et d’orientation stratégique) interpellent les candidats à l’élection présidentielles. En dépit des alertes nombreuses des scientifiques et de l’intégration croissante des enjeux par les acteurs de la société, la prise en compte de la biodiversité et la mise en place de changements transformateurs ne sont que trop peu abordés.
Les signataires :
- Denis Couvet et Hélène Soubelet, président et directrice de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), signataires au nom de l’équipe de la FRB ;
- Allain Bougrain Dubourg et Claude Fromageot, président et vice-président du Conseil d’orientation stratégique de la FRB, signataires au nom de ce Conseil ;
- Ophélie Ronce et Philippe Billet, présidente et vice-président du Conseil scientifique de la FRB, signataires au nom de ce Conseil.
Modifions le cours de notre histoire commune avec la biodiversité
En 2017, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité et son Conseil d’orientation stratégique composé de près de deux cents parties prenantes ont interrogé les candidats à l’élection présidentielle sur leur action en faveur de la biodiversité. En dépit des engagements forts de chacune et chacun, peu d’avancées ont été observées. Les rapports des scientifiques restent toujours aussi accablants.
En 2019 encore, l’Ipbes, le Giec de la biodiversité, alertait sur le déclin des espèces communes à savoir, les oiseaux, les insectes, les pollinisateurs, les amphibiens, qui sont au cœur du fonctionnement de nos écosystèmes. La plateforme internationale pointait du doigt l’accélération des extinctions d’espèces, la dégradation des écosystèmes et l’altération de leurs fonctions vitales associées, comme la régulation du climat, l’épuration des eaux et de l’air, la pollinisation, le contrôle des ravageurs et des épidémies, etc.
Ce déclin de la biodiversité qui se poursuit inlassablement menace d’”éroder les fondements mêmes de nos économies, de nos moyens de subsistance, de notre sécurité alimentaire, de la santé et de la qualité de vie” comme le rappelait alors le président de l’Ipbes, Robert Watson. La mise en garde de la recherche contre cette érosion n’est d’ailleurs pas sans rappeler l’alerte sur l’actuelle pandémie qui avait pourtant été annoncée par les scientifiques depuis longtemps, mais qui avait été reçue dans une réelle indifférence sociale et politique, car non “pensable” en tant que réalité.
Les origines de la perte de biodiversité sont aujourd’hui bien connues. L’Ipbes en a rappelé les cinq causes directes : les transformations des écosystèmes, l’exploitation des ressources naturelles, le changement climatique, les pollutions et les invasions biologiques. Mais peut-être plus important encore, l’Ipbes a aussi rappelé les causes indirectes liées aux facteurs économiques, sociaux, technologiques et de gouvernance des sociétés.
Pour lutter contre le déclin de la biodiversité, l’expertise scientifique internationale a souligné la pertinence de “changements transformateurs”, c’est-à-dire des changements qui repenseraient non seulement notre organisation économique, sociale et technique, mais aussi des paradigmes et des valeurs, telle que la croissance soutenue.
De si profonds changements sont-ils réellement possibles ? Notre société occidentale en a déjà vécu un : la révolution industrielle qui a bouleversé de fond en comble nos modes de production, de consommation et de vie. Celle-ci a été matériellement rendue possible grâce aux énergies fossiles, à l’accompagnement de la recherche et au développement de technologies qui ont facilité sa mise en œuvre.
Sans renier toutes les avancées exceptionnelles de cette révolution, et face aux limites environnementales et planétaires, il s’agit maintenant de faire en sorte que cet épisode de croissance économique soutenue, qui a été aussi accompagnée par une forte croissance démographique, se transforme. Cette transformation concerne les secteurs de l’énergie, de l’agriculture, de l’industrie… mais aussi de la consommation, de la vie en société en général. Des initiatives sont déjà en œuvre, telles que l’agroécologie, l’économie circulaire, la préservation des écosystèmes. De façon générale, il s’agit de donner plus de poids à la biodiversité dans toutes les décisions socio-économiques afin de promouvoir des socio-écosystèmes résilients assurant à la fois le bien-être des populations humaines et un bon état à la biodiversité.
De manière pragmatique, nous, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité, composée d’acteurs publics, du monde économique et de la société civile, de chercheurs et chercheuses, de représentantes et représentants d’institutions académiques, vous invitons à vous saisir de cette notion de changements transformateurs et à venir en discuter avec nos experts académiques et non académiques.
En cette veille d’élection présidentielle, il nous parait plus que jamais nécessaire que nos concitoyennes et concitoyens connaissent vos ambitions dans le domaine de la biodiversité. Nous avons compilé vos mesures et vous invitons à nous contacter afin de préciser vos engagements en faveur du vivant et de la recherche sur la biodiversité.
Recommandations des rencontres Sciences pour l’action sur les territoires ultramarins
Ces Rencontres visent à rassembler en ateliers différents acteurs (chercheurs, responsables de politiques publiques, acteurs de terrain, etc.) afin d’élaborer une série de recommandations grâce à une méthodologie basée sur la démarche prospective.
Pour cette édition, trois thèmes ont été identifiés :
- le développement économique endogène respectueux de la biodiversité ;
- les fonctionnalités du continuum terre-mer et l’aménagement du territoire ;
- les liens Humain-Nature et la protection de la biodiversité.
Les recommandations issues de ces échanges devraient être publiées dans les mois à venir, à l’instar de celles issues des Rencontres de 2018 et 2017. Nous vous invitons à découvrir la vidéo d’ouverture de l’édition 2020.
COP 15 Biodiversité : la nécessaire intégration des enjeux climatiques et financiers au cœur des dernières annonces
“Biodiversité et climat, même combat”
et au-delà, penser ensemble les enjeux environnementaux et sociétaux
En France et au Royaume-Uni, le lien fait entre le financement des enjeux climat et biodiversité est une avancée fondamentale : il répond aux alertes des scientifiques et au message porté par la FRB depuis plusieurs années. Dans un rapport publié conjointement par le Giec et l’Ipbes en juin dernier, les experts internationaux ont en effet alerté sur la nécessité de penser de manière globale les solutions envisagées pour lutter contre le réchauffement climatique et le déclin de la biodiversité. Cette synergie a d’ailleurs été évoquée par Christine Lagarde, présidente de la Banque centrale européenne, lors du Congrès mondial de la Nature début septembre, illustrant un début de prise de conscience du monde économique sur ces enjeux. Elle y a déclaré qu’il n’y avait pas de stabilité économique et financière sans le respect de la nature et sans la contribution de la nature car nos économies en sont dépendantes, et que les décisions économiques devaient désormais internaliser les dommages que nos sociétés font subir à la biodiversité.
Au-delà, les enjeux liés à l’eau, à l’alimentation et à la santé, doivent aussi être pensés de manière conjointe pour atteindre la vision 2050 de la CDB : “Vivre en harmonie avec la nature”. Ainsi si dédier 30 % des fonds alloués au climat en faveur de la biodiversité est donc un petit pas pour atteindre cet objectif, il est à présent primordial que l’ensemble des solutions et des secteurs prennent en compte la biodiversité.
“Il faut changer d’échelle pour protéger et restaurer la biodiversité. Des mesures leviers sont nécessaires, afin de tendre vers des changements transformateurs, concernant aussi bien les écosystèmes “naturels” (forêts, zones humides, récifs coralliens, etc.) que les écosystèmes “anthropisés” (agroécosystèmes, zones de pêche et de chalutage, villes, etc.). Tous les écosystèmes sont concernés.”
Denis Couvet, président de la FRB
Des promesses à mettre en perspective avec les montants des subventions néfastes à la biodiversité
La création par la Chine d’un Fonds pour la biodiversité destiné à être alimenté par d’autres pays et l’augmentation des moyens alloués au Fonds japonais pour la biodiversité vont dans le bon sens, mais les montants annoncés allant jusqu’à 1,5 milliard de yuans (soit un peu plus de 200 millions d’euros) pour la Chine sont dramatiquement insuffisants par rapport aux moyens alloués à des activités qui impactent durablement la biodiversité. À titre d’exemples :
- Selon l’OCDE, la moitié du PIB mondial est moyennement à fortement dépendant d’une biodiversité fonctionnelle, or plus de la moitié de l’investissement économique mondial finance toujours des activités dommageables à la biodiversité.
- L’OCDE notait également qu’en 2017, les pays avaient alloué 340 milliards aux combustibles fossiles, 116 milliards à l’agriculture intensive et 280 millions pour diminuer le coût de la pêche (rapport d’avril 2020) et qu’en 2020, loin d’inverser la tendance, le G20 avait alloué 345 milliards USD aux combustibles fossiles.
- Selon l’UICN, seuls 10 % des plans de relance peuvent être considérés comme « verts ».
Rappelons également qu’au niveau mondial, selon l’AFD, les subventions nuisibles à la biodiversité représentaient environ 1 000 milliards de dollars en 2019 et que les fonds dédiés à la protection ou la restauration de la biodiversité s’élève à moins de 150 milliards de dollars.
« L’augmentation des fonds dédiés à la biodiversité est bien évidemment salutaire et nous ne pouvons que nous en réjouir. Cependant, il est aussi nécessaire de réduire, voire de supprimer les subventions néfastes rapidement : en effet, on ne pourra enrayer l’érosion de la biodiversité en consacrant encore autant d’argent et d’énergie à sa destruction. »
Hélène Soubelet, directrice de la FRB
Qu’est-ce qu’une mesure levier ? Éléments de réflexion
Tenant compte des expériences passées, d’une analyse systémique des relations nature-société, dans toute leur complexité, les voies de succès devraient impliquer des mesures et instruments dits « leviers », car ayant des effets systémiques, aux diverses échelles, locale, régionale et mondiale. Qu’elles soient prises par l’état, le monde économique ou la société civile, ces mesures exigeront des compromis en termes de développement pour certains secteurs, économiques ou non, mais pourront aussi présenter des synergies, lorsque certaines actions présentent des avantages pour de multiples objectifs ou secteurs – synergies qu’il conviendra d’identifier et de favoriser.
Afin que les mesures dites « levier » permettent de réaliser un changement dit transformateur (ou profond) identifié par l’Ipbes comme unique voie pour atteindre les objectifs de conservation et d’utilisation durable de la nature et parvenir à la durabilité, il faut garantir une dimension systémique à ce type de mesures.
Retrouver la note complète dans les ressources téléchargeables.
[CDB] La première partie de la Cop15 de la Convention sur la diversité biologique, c’est maintenant
- Du 11 au 15 octobre 2021
La première partie de la Cop se tient en ligne depuis Kunming, en Chine. Au programme : cérémonie d’ouverture, segment de haut niveau les 12 et 13 octobre, forum sur la civilisation écologique et conférences de presse. Sur place, seuls les personnels des ambassades déjà présents sont conviés à l’événement.
La majorité des réunions de cette première rencontre traitera de questions administratives et techniques liées au programme de la CDB. Toutefois, le segment de haut niveau sera ouvert par un sommet des leaders les plus engagés et devrait porter sur l’élaboration du cadre mondial de la biodiversité pour l’après-2020.
Il est possible de suivre la cérémonie, le segment de haut niveau et le forum depuis la page Youtube de la CDB.
En parallèle de cette première session :
- Samedi 16 octobre à 11 heures (heure de Paris), la FRB est invitée à participer à une rencontre-débat “Préserver la biodiversité : mobilisons-nous !”, organisée par le consulat de Chengdu et à destination d’un large public. L’événement se déroulera en chinois et sera traduit en français. Agnès Hallosserie, Robin Goffaux et Julie de Bouville y interviendront. Ils présenteront respectivement les liens entre biodiversité et changement climatique, l’importance des aires protégées pour la préservation de la biodiversité et les services écosystémiques ainsi que le rôle d’une fondation telle que la FRB.
- Du 18 au 22 octobre 2021, le secrétariat de la CDB organise une semaine des entreprises et de la biodiversité. Cet événement virtuel à destination du secteur privé a pour ambition de promouvoir une large discussion sur le cadre mondial de la biodiversité post-2020 et le rôle des entreprises, y compris des sessions consacrées à l’intégration de la biodiversité dans tous les secteurs, l’avenir des systèmes alimentaires, la manière dont le secteur de l’énergie aborde la biodiversité et le climat, et l’utilisation durable des ressources naturelles. Ces discussions ouvriront la voie au Forum des entreprises et de la biodiversité qui aura lieu pendant la Cop 15, phase II, l’année prochaine.
Les inscriptions sont ouvertes à ce lien jusqu’au 14 octobre prochain.
Début 2022, se tiendront en présentiel les segments des réunions de :
- l’OEWG 3 (Open Ended Working Group) chargé de préparer les négociations de la COP 15 ;
- du SBSTTA 24 (Subsidiary Body on Scientific, Technical and Technological Advice), chargé de fournir des avis scientifiques et dont la FRB est avec le MNHN co-point focal pour la France ;
- ainsi que du SBI 3 (Subsidiary Body for Implementation), chargé de réfléchir à la mise en œuvre du futur cadre global.
Ces réunions n’avaient pu se dérouler qu’en virtuel à cause de la situation sanitaire, ce qui avait perturbé les discussions et l’accord sur des textes communs.
[MàJ 01/2022] Les équipes de la Convention sur la diversité biologique ont mis en place une série de webinaires en amont de ces segments pour maintenir la mobilisation autour de la Cop15 et informer pays et parties prenantes sur les nouveaux documents, l’organisation du travail, etc.
- Pour + d’informations :
Consultez le communiqué de presse (ENG) et la liste des webinaires (ENG)
- Mi-2022 (date à confirmer)
La seconde partie de la Cop devrait se tenir en présentiel, dans un lieu choisi en fonction de la situation sanitaire à ces dates. C’est à l’occasion de cette 2e session de la Cop 15 que sera finalisé et, espérons-le, adopté le cadre mondial de la biodiversité post-2020.
Pour ce nouveau cadre et se basant sur l’échec des objectifs d’Aïchi qui n’ont bénéficié que tardivement d’indicateur de suivi, une attention particulière a été portée à la mise en œuvre des objectifs à atteindre pour vivre en harmonie avec la nature en 2050. Ainsi, 4 objectifs principaux, avec des jalons intermédiaires à horizon 2030 et leurs cibles d’actions sont en cours de définition.
- Consultez le projet en cours de travail (Official, CBD/WG2020/3/3) :
https://www.cbd.int/conferences/post2020/wg2020-03/documents - Consultez la 5e édition des Perspectives mondial de la diversité biologique pour un bilan sur la stratégie précédente (« objectifs d’Aïchi ») et des recommandations pour la prochaine stratégie
[#IUCNcongress] La FRB au Congrès mondial de la Nature
Sessions, exposition et ateliers, la FRB sera présente sur différents espaces du Congrès mondial de la Nature. Du Forum aux Pavillons France et Post-2020, en passant par les espaces Génération nature : tour d’horizon pour nous retrouvez sur le Congrès.
*Les différentes sessions étant en cours de calage, cette page sera régulièrement actualisée.
- Pre-IUCN AllEnvi Conference – Biodiversity conservation
Du mardi 1er au vendredi 3 septembre 2021, City center
En amont du Congrès mondial de la Nature, les membres de l’alliance AllEnvi (Alliance nationale de recherche pour l’environnement), avec le soutien du CNRS et de la FRB, organisent le colloque “Biodiversity conservation”. Avec ces journées, AllEnvi souhaite mobiliser l’ensemble des communautés scientifiques travaillant sur les grandes questions environnementales afin d’aborder collectivement le thème de la ” conservation de la biodiversité ” à travers de grandes questions transversales et pluridisciplinaires mobilisant les différentes institutions membres et groupes de travail de l’Alliance.
Retrouvez toutes les informations sur le site de l’événement.
Le Forum
Le Forum est un espace de débat public, réunissant des personnes du monde entier pour discuter et développer des solutions aux problèmes mondiaux les plus pressants en matière de protection de la nature et de développement durable.
- Session Corridors et Crossings:
Mainstreaming ecological connectivity into existing and planned infrastructure
Samedi 4 septembre, 16h – 17h30, sur place (H8-7 Cevennes) et en ligne
Organisée par le MTE, le Center for Large Landscape Conservation, et d’autres organisations dont l’IENE, cette session a pour objectif principal de sensibiliser et de répondre à la demande croissante d’outils permettant d’éviter la fragmentation et de maximiser la connectivité écologique pendant la planification, la construction, l’exploitation et l’entretien des infrastructures. Au cours des 30 dernières années, de nombreux acteurs dans le monde ont en effet appris à éviter ou à minimiser les impacts sur la connectivité écologique causés par les infrastructures – notamment les routes, les chemins de fer, les canaux, les clôtures et les réseaux énergétiques. Représentants de gouvernements, d’ONG, du secteur privé et de centres de recherche seront réunis pour discuter de l’importance d’intégrer les exigences de conservation de la biodiversité dans le développement d’infrastructures qui maintiennent, améliorent et restaurent la connectivité écologique.
Retrouvez toutes les informations sur le site du Congrès.
+ d’informations à venir
L’espace Expositions, sur les Pavillons France et Post-2020
Dans la zone d’exposition, les Membres et Commissions de l’UICN, les entreprises, les partenaires et les universités organisent des stands et des événements. L’exposition est ouverte aux participants inscrits au Congrès ainsi qu’au grand public (accès gratuit), permettant aux exposants de présenter leurs recherches, innovations et autres travaux à une large audience.
- Préserver la biodiversité tout en luttant contre le changement climatique, c’est possible !
Mercredi 8 septembre 11h15 – 11h45, Pavillon France
Bien que traitées de front lors du Sommet de Rio en 1992, les enjeux environnementaux de la préservation de la biodiversité, du climat et des terres, faisant chacun l’objet d’une convention internationale spécifique, travaillent aujourd’hui de manière séparée. On constate aujourd’hui la mise en œuvre de “solutions” qui peuvent a priori améliorer une situation d’un côté tout en en dégradant une autre en raison des rétroactions écologiques, sociales et économiques entre climat, terres et biodiversité. Des plateformes d’expertise internationales comme l’Ipbes ou le Giec contribuent à développer des solutions mutuellement bénéfiques. Yildiz Thomas, anthropologue et Valérie Masson-Delmotte, climatologue, nous expliquent comment. Un temps est prévu avec le public pour échanger sur la manière d’appréhender ces deux enjeux simultanément. Traité ici d’un point de vue des relations entre les sphères scientifiques et politiques, ce thème se décline dans d’autres événements du congrès, comme par exemple le 4 septembre sur le passage à l’action pour le climat et pour la biodiversité.
Elle sera retransmise via le live stream proposé par le ministère de la Transition écologique, en direct depuis l’auditorium du Pavillon France du 4 au 9 septembre : https://biodiversite.gouv.fr/.
- Rewilding ou revitalisation écologique des territoires : de la fonctionnalité des écosystèmes aux enjeux de coexistence
Mercredi 8 septembre 12h00 – 12h30, Auditorium du Pavillon France
Des actions de restauration d’écosystèmes basées sur le concept du rewilding ont été mises en œuvre en Europe depuis plusieurs dizaines d’années : renaturation, réintroductions, renforcement de populations, libre évolution, suppression d’ouvrages, etc. Le rewilding est une solution fondée sur la nature favorisant l’adaptation des écosystèmes au changement climatique par le retour de fonctionnalités écologiques liées à des espèces clés, permettant une meilleure résilience sur le long terme. Parallèlement, ces écosystèmes sont devenus le support d’une activité économique dans des territoires, basée sur l’éco-tourisme. Lors de cette session, François Sarrazin (Cesco-MNHN, Paris) et Nathalie Pettorelli (Institut de Zoologie, Londres) présenteront des “preuves par l’exemple” de différentes actions de rewilding dans plusieurs pays européens, leur bilan écologique et les impacts positifs pour les territoires concernés (cf. projet Efese “Fonctions et services liés aux réintroductions” – avril 2021).
Co-portée par la FRB, le MNHN et le MTE, elle sera retransmise via le live stream proposé par le ministère de la Transition écologique, en direct depuis l’auditorium du Pavillon France du 4 au 9 septembre : https://biodiversite.gouv.fr/.
- Lancement de Transport4Nature
Agir en faveur de la biodiversité – Les engagements des PDG pour une nouvelle ère dans les infrastructures de transport et d’énergie
Mercredi 8 septembre 18h – 20h, Pavillon Post-2020
Devant un public de journalistes et de parties prenantes, l’IENE, dont la FRB accueille le secrétariat exécutif, présentera l’initiative Transport4nature par l’intermédiaire de son président : Anders Sjölund. Claire Tutenuit, présidente d’EpE, reviendra ensuite sur l’origine de Transport4nature via act4nature et la dynamique qu’elle a créée. Suivront les interventions de deux entreprises européennes, Eiffage pour la France, et REN pour le Portugal au sujet de leur engagement en faveur de la biodiversité. Enfin, un membre du conseil de gouvernance de l’IENE, clôturera la session en présentant les étapes importantes jusqu’à la conférence internationale de l’IENE en 2022.
+ d’informations à venir
Les Espaces Générations Nature (EGN)
Accessibles à tous gratuitement et sans inscription, ces espaces proposent aux visiteurs de vivre des expériences innovantes, créatives et ludiques qui les sensibiliseront à la biodiversité tout en leur donnant accès aux bons gestes pour la préserver.
- Atelier “Avec quelle nature souhaitez-vous vivre ?”
Samedi 4 septembre, toute la journée – Hall 2, espace C15
Tout au long de la journée, la FRB propose un atelier collaboratif, autour de la « cartographie mentale ». Sous ce format ludique, par groupes de 4 personnes pendant une heure, les objectifs sont multiples : comprendre quelle est la place laissée par les citoyens à la nature, favoriser le débat et les échanges de connaissances, identifier des leviers d’action pour une meilleure préservation de la nature, etc.
Un atelier développé par le Club “Perception et représentation de la biodiversité : leviers d’action“.
Contactez Marilda Dhaskali – marilda.dhaskali@fondationbiodiversite.fr
Vous ne pourrez pas être présent mais souhaitez répondre à l’enquête ?
- Vidéo Biodiversity loss: the true 2030 Human health challenge
Jeudi 9 septembre, 10h – 11h, Hall 2 – Mini agora
La pandémie mondiale Covid-19 a montré les limites d’une économie mondialisée qui fonde sa croissance sur l’utilisation non durable de la biodiversité et des écosystèmes naturels. Alors que les responsables du monde entier parlent de prévention des maladies et du fardeau sanitaire mondial, quelles sont les preuves scientifiques des liens entre biodiversité et santé ? Comment prévenir ou prédire les prochaines pandémies ? Quels sont les défis sociétaux et économiques pour le bien-être humain de demain ?
5 discutants présenteront les recherches les plus récentes sur la question et décrypteront les liens complexes entre notre santé et la biodiversité.
– Aletta Bonn : La biodiversité rend heureux !
– Benjamin Roche : Biodiversité et maladies humaines, du fantasme à la réalité
– Gwenaël Vourch : La biodiversité en danger permet aux épidémies de voler !
– Eloi Laurent : Libérez la biodiversité de l’économie !
– Anna-Liisa Laine : Plus de pathogènes, moins de maladies : la magie de la biodiversité !
Retrouvez toutes les informations sur la page de l’événement.
- Exposition “Des oasis au sommet des Andes”
Du samedi 4 au samedi 11 septembre / Esplanade G13
L’exposition est proposée par l’Institut de recherche pour le développement (IRD), le Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM) et la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB).
Dans les Andes tropicales, à plus de 4 000 mètres d’altitude, se trouvent des oasis où les humains vivent en harmonie dans la nature. Ces socio-écosystèmes exceptionnels voient aujourd’hui leur biodiversité menacée. Leur gestion durable et leur conservation posent un immense défi que les chercheurs de toutes disciplines tentent de relever. Cette exposition est née du talent photographique d’Olivier Dangles (IRD) et de recherches menées par une équipe de l’IRD et financée par la FRB et le FFEM.
[Communiqué] Biodiversité : au-delà des surfaces à protéger, comment et par qui doit se faire sa conservation ?
En amont de la 15e conférence des Nations Unies sur la biodiversité, plusieurs États se sont engagés à créer des aires protégées sur au moins 30 % de leurs territoires terrestres et marins d’ici à 2030. Cette tendance à se concentrer sur la proportion des terres et mers à protéger pour préserver la biodiversité occulte des questions plus fondamentales : comment et par qui doit se faire cette conservation ? Ces questions sont pourtant cruciales pour permettre une conservation efficace de la biodiversité. Ainsi, pour que nos efforts ne soient pas vains, il ne suffit pas de se concentrer sur ce qu’il faut conserver ou sur la surface à conserver, mais se questionner sur la manière dont la conservation est effectuée et par qui peut s’avérer encore plus important.
Ces travaux sont en partie issus du projet de recherche JustConservation financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) au sein de son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab) et on été initiés la Commission des politiques environnementales, économiques et sociales de l’Union internationale pour la conservation de la nature (CPEES de l’UICN). Ils sont le fruit de la collaboration entre 17 scientifiques, dont des chercheurs de l’École européenne de sciences politiques et sociales (ESPOL) de l’Université Catholique de Lille et de l’Université de East Anglia (UK). Ils font l’objet d’une publication, parue le 02/09/2021 dans la revue Ecology and Society.
Biodiversité : au-delà des surfaces à protéger, comment et par qui doit se faire sa conservation ?
Les facteurs à l’origine du succès de projets de conservation sont encore difficiles à identifier. Ces dernières années plusieurs études ont ainsi cherché à comprendre le fonctionnement de la conservation. Mais, c’est la première fois qu’une équipe de recherche internationale a étudié la manière dont la gouvernance – la gestion et la prise de décision en matière de conservation – affecte à la fois la nature et le bien-être des peuples autochtones et les communautés locales.
Ces travaux sont en partie issus du projet de recherche JustConservation financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) au sein de son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab) et ont été initiés par la Commission des politiques environnementales, économiques et sociales de l’Union internationale pour la conservation de la nature (CPEES de l’UICN). Ils sont le fruit de la collaboration entre 17 scientifiques, dont des chercheurs de l’École européenne de sciences politiques et sociales (ESPOL) de l’Université Catholique de Lille et de l’Université de East Anglia (UK). Ils font l’objet d’une publication, parue le 02/09/2021 dans la revue Ecology and Society.
Après avoir passé en revue plus de 3 000 publications, les chercheurs en ont identifié 169 traitant de l’influence de différentes formes de gouvernance sur les résultats de la conservation. Ils révèlent un contraste frappant entre les résultats issus de la conservation sous le contrôle « local » des peuples autochtones et communautés locales, et les résultats de la conservation menée sous le contrôle « extérieur » des États, des ONGs et des entreprises privées. 56 % des études sur la conservation sous contrôle « local » montrent des résultats positifs, tant pour le bien-être humain que pour la conservation. Pour la conservation sous contrôle « extérieur », seul 16 % des études rapportent des résultats positifs et plus d’un tiers ont abouti à une conservation inefficace et des résultats sociaux négatifs. La principale explication de cette différence réside dans le fait que la conservation contrôlée localement peut produire une gestion active et collective de l’environnement. Lorsque les valeurs et les pratiques locales sont respectées et que les communautés locales jouent un rôle central dans la conservation, une vision commune du paysage peut être établie. Cela génère alors une mobilisation pour préserver, restaurer et défendre l’environnement.
Les résultats de cette étude véhiculent donc un message optimiste : une conservation équitable, qui renforce et soutient l’intendance environnementale des peuples autochtones et des communautés locales, est la principale voie vers une conservation efficace à long terme de la biodiversité, en particulier lorsqu’elle est soutenue par des lois et des politiques plus larges.
La reconnaissance et le soutien des institutions locales nécessitent une réorientation des activités des organisations et des gouvernements qui dominent actuellement les efforts de conservation au niveau mondial. Dr Neil Dawson, premier auteur de l’étude, conclut ainsi : “qu’il s’agisse de réserves de tigres en Inde, de communautés côtières au Brésil ou de prairies de fleurs sauvages au Royaume-Uni, les preuves sont bien là : il est essentiel que les négociations politiques actuelles, en particulier celles de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CDB), reconnaissent le rôle central des peuples autochtones et des communautés locales dans la lutte contre le changement climatique et pour la conservation de la biodiversité”

Figure : Le rôle central et indissociable des peuples autochtones et des communautés locales dans la conservation équitable et efficace de la biodiversité. Dans le sens des aiguilles d’une montre : Bien-être des peuples autochtones et des communautés locales – des communautés autonomes avec des valeurs partagées, des institutions et une autorité respectée soutiennent l’action collective de conservation ; Conservation efficace – intendance locale : autorégulation de l’utilisation des ressources, résistance aux menaces extérieures, adaptation au changement ; Gouvernance équitable de la conservation – reconnaissance des institutions et des droits locaux, contrôle des décisions locales, établissement de la confiance et résolution des conflits, responsabilité. L’illustration a été créée par Andy Wright www.madebyawdesign.com. Les images proviennent du réseau MIHARI http://mihari-network.org (discours d’une pêcheuse et reboisement de la mangrove à Belo-sur-Mer, dans le sud-ouest de Madagascar), et Holladay Photo (communauté Kahana, Koolauloa, Oahu, pratiquant une pêche traditionnelle hawaïenne appelée Hukilau).
La taxation des forêts européennes : approche comparative
Par ailleurs, la Commission européenne a adopté le 16 juillet 2021 une nouvelle stratégie forestière pour l’Europe qui s’appuie sur la stratégie de l’Union européenne en faveur de la biodiversité à l’horizon 2030.
Dans ce cadre, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité a conduit un travail d’analyse comparée des statuts fiscaux de la forêt en fonction des États membres de l’Union européenne. La note présentée ici met en évidence que les forêts françaises sont d’avantage taxées que le reste des forêts européennes et que certaines règles fiscales portent préjudice à la biodiversité forestière.
La note est disponible dans les ressources téléchargeables.
[Ipbes] Au cœur de la 8e plénière
Malgré des échanges parfois fastidieux et dénotant de profondes différences d’appréciation sur le rôle de la plate-forme intergouvernementale, cette 8e plénière a tout de même réussi à remplir ses objectifs principaux qui étaient l’adoption de son budget (sans lequel elle ne pouvait pas continuer ses activités) et des documents de cadrage des deux évaluations “nexus” et “changements transformateurs” (sans lesquelles le début des travaux sur les évaluations aurait dû être repoussé). Même si la préservation de la dynamique de l’Ipbes a conduit la délégation française, ou l’Union européenne, à faire des compromis sur leurs positions, c’est une grande satisfaction que de voir ce processus poursuivre son chemin sans dégradation de la qualité des futurs travaux scientifiques.
Retour sur les échanges jour après jour :
Quels choix en contexte de crise environnementale ?
Le fossé ne vient pas seulement d’un problème de conflits de valeurs ou de croyances contradictoires, il émane aussi d’un problème d’absence de solutions opérationnelles (ou d’absence de connaissance de ces solutions par les décideurs).
Appréhender la complexité des problèmes et la façon dont les décisions sont prises est essentiel pour avoir une chance de résoudre la crise environnementale. Pour ce faire, les auteurs de l’étude présentent une nouvelle approche qui permet de comprendre les positions irrationnelles dans le débat sur l’environnement, et d’analyser s’il s’agit d’un problème d’informations, de croyances, de valeurs ou de moyens pour ouvrir la porte à un dialogue plus constructif.
La synthèse est disponible dans les ressources téléchargeables.
[Plénière Ipbes] En route vers la huitième session
L’Ipbes (la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques) avait beaucoup fait parler d’elle lors de la 7e session plénière de ses États membres, qui s’était tenue à Paris en avril-mai 2019. Elle y avait notamment adopté sa première évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques, qui a largement contribué à l’attention croissante accordée aux enjeux de biodiversité ces deux dernières années. Après une “année blanche” en 2020, l’Ipbes organise sa 8e session en juin 2021, qui se déroule exclusivement en ligne, situation sanitaire oblige.
Plénière de l’Ipbes, huitième session :
Les deux principaux sujets à l’ordre du jour de cette plénière sont l’approbation de deux documents :
- Le rapport de cadrage de l’évaluation dite “nexus“, qui concerne les liens d’interdépendance entre la biodiversité, l’eau, l’alimentation, la santé, l’énergie et le changement climatique en vue d’orienter l’élaboration des politiques et des mesures permettant de répondre de manière intégrée aux objectifs de développement durable.
- Le rapport de cadrage de l’évaluation dite sur “les changements transformateurs”, dont l’objectif est de comprendre et d’identifier les facteurs des sociétés humaines (dimensions comportementales, sociales, culturelles, économiques, institutionnelles, techniques et technologiques) qui peuvent être mis à profit pour provoquer un changement transformateur1 en vue de la conservation, de la restauration et de l’utilisation rationnelle de la biodiversité.
Ces rapports de cadrage constituent la commande passée par les États membres de l’Ipbes auprès des groupes d’experts pour les deux prochaines évaluations inscrites au programme de travail de l’Ipbes. Celles-ci se dérouleront respectivement sur 5 et 3 ans. L’adoption de ces documents en plénière participe à la priorisation des attendus et des sujets majeurs qui devront être abordés par l’Ipbes dans ses travaux.
La plénière examine également un rapport concernant la collaboration entre l’Ipbes et le Giec, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, et un document sur le travail des “équipes spéciales” de l’Ipbes, des groupes transversaux permettant de renforcer les capacités et l’efficacité de la plateforme, de consolider les bases de connaissances et de soutenir les décisions politiques.
Du 3 au 9 juin : les Stakeholder Days
Cet évènement (en anglais) a rassemblé les parties prenantes de toutes les régions du monde, afin de favoriser les échanges et la coopération avec l’Ipbes.
Un récapitulatif des faits marquants et du programme de travail de l’Ipbes a été présenté. Les Stakeholder Days permettent aux parties prenantes de connaître davantage la manière dont elles peuvent s’impliquer dans le processus Ipbes et l’organisation du travail qui leur est demandé en préparation de la plénière.
Le travail effectué par le réseau ouvert des parties prenantes (ONet) et le forum international des autochtones sur la biodiversité et les services écosystémiques (IIFBES) ont été présentés. Les parties prenantes connectées ont également pu contribuer à l’élaboration des déclarations des parties prenantes, faites au cours de la plénière, en réaction au programme de travail de l’Ipbes. + d’infos
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Comment développer les Obligations réelles environnementales (ORE) en France ?
Via ce mécanisme, le propriétaire d’un espace naturel peut conclure un contrat avec une personne morale de droit public ou de droit privé agissant pour la protection de l’environnement, faisant naitre à sa propre charge « des obligations qui ont pour finalité le maintien, la conservation, la gestion ou la restauration d’éléments de la biodiversité ou de fonctions écologiques ». Il conserve la propriété de son bien, mais en restreint volontairement l’usage.
Les expériences étrangères de servitudes de conservation montrent que leur succès est en grande partie du au régime fiscal qui les accompagne. En contractant une obligation réelle au profit de l’intérêt général, le propriétaire consent une double perte : il diminue, à la fois, la valeur de son terrain et les revenus qu’il peut en tirer. Les états ayant institué ce type de servitude de conservation ont donc mis en place un régime fiscal qui compense une partie de cette perte et qui permet d’inciter les propriétaires à souscrire ces servitudes de conservation.
La loi de 2016 a bien envisagé cet aspect des choses. D’une part, son article 72 prévoit que les communes peuvent exonérer de taxe sur le foncier non bâti (TFNB) les terrains sur lesquels a été conclue une ORE. Mais il ne s’agit que d’une faculté : les communes qui choisiront de le faire subiront une perte de rentrées fiscales (faible sans doute, mais réelle) et ne seront pas compensées de cette perte par l’état. D’autre part et surtout, l’article 73 indique que « dans un délai de deux ans (soit avant le 8 aout 2018) le gouvernement dépose, sur les bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur les moyens de renforcer l’attractivité, notamment au moyen de dispositifs fiscaux incitatifs, du mécanisme d’ORE ». Or, près de trois ans après la date butoir et près de cinq ans après la création des ORE, ce rapport n’a pas été déposé. L’article 73 de la loi sur la biodiversité, elle-même dûment votée et promulguée, n’est donc pas appliqué. Plusieurs questions parlementaires ont été posées au gouvernement à ce sujet, témoignant de l’intérêt suscité par ce nouveau mécanisme auprès de la représentation nationale et dans les territoires.
La mise en place du régime fiscal incitatif aux ORE ne devant plus tarder, la FRB a souhaité apporter des éléments de connaissance en ce domaine. Elle a étudié les principaux mécanismes fiscaux mis en œuvre à l’étranger de nature à inciter à la souscription des servitudes de conservation. Les éléments qui en ressortent permettent de dégager les traits majeurs des dispositions fiscales réellement incitatives à la conclusion de servitudes de conservation.
La note est disponible dans les ressources téléchargeables.
[Sciences pour l’action] Les rencontres prospectives sont dédiées cette année aux territoires ultramarins
Organisées en visioconférence par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), en partenariat avec l’Office français de la biodiversité (OFB) et le ministère de la Transition écologique, ces Rencontres visent à rassembler en ateliers différents acteurs (chercheurs, responsables de politiques publiques, acteurs de terrain, etc.) afin d’élaborer une série de recommandations grâce à une méthodologie basée sur la démarche prospective.
Pour cette édition, trois thèmes ont été identifiés :
- le développement économique endogène respectueux de la biodiversité ;
- les fonctionnalités du continuum terre-mer et l’aménagement du territoire ;
- les liens Humain-Nature et la protection de la biodiversité.
Les recommandations issues de ces échanges devraient être publiées dans les mois à venir, à l’instar de celles issues des Rencontres de 2018 et 2017. Nous vous invitons à découvrir la vidéo d’ouverture de l’édition 2020.
Consulter les recommandations des rencontres précédentes :
- Rencontres 2018 : santé et biodiversité ; culture et biodiversité ; sols et questions foncières ;
- Rencontres 2017 : biodiversité et solidarité écologique ; littoral et adaptation : solutions fondées sur la nature ; valorisation et restauration de la biodiversité et biodiversité et politiques énergétiques : cas de la biomasse forestière.
Les politiques de conservation de la biodiversité en quête de légitimité : cas des parcs nationaux français
Cette publication documente et analyse la manière dont les gestionnaires des parcs nationaux ont cherché à légitimer ces espaces en France et ont identifié deux types principaux de légitimité : la légitimité substantielle, avec la science et le droit comme piliers majeurs, et la légitimité procédurale. La première est profondément ancrée dans la tradition française et a façonné le fonctionnement des parcs nationaux au cours de leurs premières décennies d’existence ; la seconde est arrivée tardivement dans les parcs nationaux français et a été fortement influencée par la publication des lignes directrices européennes relative à l’essor des processus participatifs.
Cette publication ne démontre qu’aucune de ces deux légitimités n’est suffisante seule Les parcs nationaux n’ont donc pas d’autre choix que de les combiner sous des formes diverses et avec différents niveaux de succès. L’étude a aussi permis d’éclairer le rôle des scientifiques dans l’évolution de cette légitimité des parcs ainsi que dans la circulation, au niveau européen, de l’information, de l’expertise et de certaines innovations comme l’adoption de la notion de solidarité écologique proposée par des scientifiques français. Les auteurs montrent que, même si la légitimité reste fragile, les tentatives pour surmonter ces tensions et pour combiner les sources de légitimité ont varié d’un parc à l’autre ont généré des innovations intéressantes, comme les bioblitzs, des inventaires naturalistes participatifs.
Cette étude contribue également à expliquer la non-linéarité des politiques de conservation qui sont loin d’être simplement mises en œuvre dans les États membres en remplacement ou en complément des systèmes nationaux existants.
La synthèse est disponible dans les ressources téléchargeables.
Bouquetins, brucellose et action publique : les apports de la science pour repenser les frontières entre biodiversité sauvage et activités humaines
Note FRB en réponse à la consultation du Comité national de la biodiversité sur la Stratégie nationale des aires protégées
Cette vision et cette ambition pourraient être clarifiées et renforcées en insistant sur les objectifs écologiques associés aux aires protégées, le développement soutenable des activités humaines devant être considéré comme un moyen plutôt qu’une finalité. La Stratégie gagnerait à compléter le bilan réalisé en 2019 par un bilan scientifique plus intégratif, afin de poser les bases robustes des objectifs et des actions, en lien avec une approche synthétique des avancées et des pratiques internationales.
Un dialogue étroit avec le conseil scientifique de l’OFB et la consultation de chercheurs devraient permettre de catalyser la pluralité disciplinaire des organismes publics de recherche nationaux et des universités. De nombreuses sources et instances de réflexion pourraient aussi fournir un éclairage sur les modèles économiques associés aux aires protégées, en particulier la conceptualisation des jeux d’acteurs issue des sciences humaines et sociales.
La notion de territoire, très présente dans la Stratégie, mérite d’être explicitée, tant cette échelle – à mettre au cœur d’une cohérence écologique et pas seulement administrative – définit un référentiel essentiel pour la mise en œuvre effective de la Stratégie. Les outils et « innovations » associés aux aires protégées et à la mise en œuvre de la Stratégie doivent être précisés, tant en ce qui concerne les outils juridiques et fiscaux – très insuffisamment développés – que le renforcement des interactions entre gestionnaires et chercheurs. Enfin, de nombreuses imprécisions, incohérences, manques voire erreurs émaillent le texte et en obscurcissent la logique.
La note est disponible dans les ressources téléchargeables.
[BiodivERsA] Découvrez le manuel de BiodivScen sur l’utilisation des scénarios pour soutenir la prise de décision
En lisant ce manuel, vous en apprendrez davantage sur :
- les différents types de scénarios liés à la prise de décision ;
- les principales caractéristiques, les pièges et les meilleures pratiques en matière de développement et d’utilisation de scénarios de biodiversité et de services écosystémiques ;
- des exemples, des études de cas et des leçons apprises sur les scénarios participatifs de biodiversité participative et leur utilisation, tirés de projets de recherche financés par BiodivERsA, le Forum Belmont et d’autres ;
- d’autres lectures, outils et ressources sur le thème des scénarios (de biodiversité).
#ScienceDurable – Combiner les politiques agricoles de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour concilier biodiversité et sécurité alimentaire
Répartir les efforts entre la production de biocarburants, une transition vers des régimes alimentaires moins carnés et la reforestation de pâture serait une bien meilleure option pour l’agriculture de demain que de miser uniquement sur une seule de ces stratégies. Cette combinaison permettrait d’allier à la fois des objectifs de sécurité alimentaire, de préservation de la biodiversité et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, selon une étude publiée par le Cirad et ses partenaires dans Environmental Research Letters.
Biodiversité les acteurs français passent à l’action
La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) a pour mission de favoriser les activités de recherche sur la biodiversité en lien avec les acteurs de la société. Susciter l’innovation, développer et soutenir des projets, diffuser les connaissances et mobiliser l’expertise sont au coeur de ses actions. Elle accueille par ailleurs le secrétariat scientifique du comité français pour l’Ipbes, la Plateforme intergouvernementale pour la biodiversité et les services écosystémiques. À ce titre, elle est chargée de relayer les travaux de la Plateforme au niveau national. La FRB travaille ainsi avec son Conseil d’orientation stratégique (Cos), regroupant plus de 240 structures (entreprises, syndicats, ONG, collectivités territoriales, etc.), afin que les acteurs nationaux s’approprient les messages de l’Ipbes et pour rapprocher les conclusions scientifiques de leurs préoccupations opérationnelles. La Fondation s’est ici associée à ORÉE, association multi-acteurs pour l’environnement membre de son Cos et comptant plus de 180 membres.
Ainsi est née la présente publication, fruit d’un long travail auprès d’acteurs français. Elle fournit un panorama des mesures pour la biodiversité mises en oeuvre au niveau non-étatique, alors que les acteurs sont de plus en plus sollicités pour rendre des comptes sur leurs engagements, notamment en 2020 dans le cadre de la préparation de la Cop 15 de la Convention sur la diversité biologique.
La publication est consultable dans les ressources téléchargeables.
Publication de la note sur la biodiversité du Conseil d’analyse économique (CAE) – Interview d’Harold Levrel, économiste de la biodiversité
Vous avez publié il y a un mois une opinion intitulée D’une économie de la biodiversité à une économie de la conservation de la biodiversité sur le site de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB). Que vous inspire la publication du Conseil d’analyse économique1 (CAE) qui pour la première fois publie une note sur la biodiversité ?
Pour la communauté des économistes, c’est une réelle avancée car c’est le premier rapport du Conseil d’analyse économique (CAE) sur la thématique biodiversité. Par ailleurs, le diagnostic proposé est concret et les solutions proposées adaptées à la crise que subit le monde vivant. Notre pays qui héberge une biodiversité exceptionnelle à la fois en métropole et dans ses territoires et ses départements d’outre-mer a une responsabilité de premier plan.
Êtes-vous en accord avec les conclusions du Conseil d’analyse économique ?
Oui tout à fait. Le rapport fait le constat que la biodiversité s’effondre et s’interroge sur la raison pour laquelle on ne parvient pas à stopper cette érosion. Il pointe notamment du doigt les subventions dommageables à la biodiversité, qui sont aujourd’hui nombreuses. Le Conseil cite par exemple la fiscalité sur les terrains non bâtis qui encouragent les propriétaires à construire pour gagner de l’argent. Le Conseil souligne aussi le besoin majeur de renforcer la séquence “Éviter Réduire Compenser” (ERC). Il y a aujourd’hui trop de dérogations, trop de manquements à la loi sur ce sujet. Tant qu’il n’y a pas de sanction, les aménageurs ne chercheront pas à mettre en place des stratégies visant à réduire leur empreinte sur les écosystèmes naturels, à investir dans de l’ingénierie écologique pour réduire leurs impacts. Ils pointent aussi comme autre dysfonctionnement les mille feuilles réglementaires autour de la protection de la biodiversité qui posent des problèmes de gouvernance. Tout cela fait partie d’un constat partagé avec celui que nous faisons dans l’Opinion publiée sur le site de la FRB.
Quels sont vos points de divergence ?
La note du Conseil d’analyse économique souligne, à plusieurs reprises, que c’est le manque de prise en compte de la valeur économique de la biodiversité qui est une des origines du problème. Certes, il est évident que les bénéfices fournis par la biodiversité sont considérables, mais ils restent de nature collective et tous les travaux qui ont détaillé la nature et les montants de ces bénéfices depuis plus de 20 ans n’ont pas réussi à convaincre les entreprises d’investir dans la biodiversité. Prenons l’exemple des produits pharmaceutiques. Dans les années 1990, le discours était le suivant : c’est en investissant dans la préservation de la biodiversité sauvage – notamment dans les pays du Sud – que l’on réussira à trouver de nouveaux médicaments dont le secteur pharmaceutique pourra tirer des bénéfices. 30 ans plus tard, on constate que le coût de la recherche sur ces dîtes molécules naturelles est trop élevé. La R&D pharmaceutique a totalement réinvesti ses recherches dans la chimie. Un autre secteur où l’on constate un net recul de l’utilisation des ressources naturelles, c’est le textile. On est passé de 41 % de la production mondiale en 2008 à moins de 30 % en 2018. La note du Conseil souligne ce manque d’investissement des entreprises, mais elle ne propose pas pour autant un changement d’approche – dans le champ de l’économie de la biodiversité – sur le sujet. C’est notre constat de départ dans la note d’opinion de la FRB : la biodiversité s’avère moins utile ou moins rentable que prévue pour le monde de l’entreprise, tout du moins à court-terme, c’est-à-dire l’échelle de temps à laquelle raisonnent les entreprises.
Que faudrait-il faire alors, selon vous, pour que le secteur économique prenne en compte efficacement la biodiversité ?
Nous pensons qu’il faut mettre la biodiversité au cœur du projet économique. En reconnaissant la nature comme composée d’entités que l’on veut maintenir pour elles-mêmes et non pas pour ce qu’elles valent économiquement. La nature n’a pas besoin d’être pensée comme un capital ou un actif, mais comme une entité qui bénéficie de droits à être préservée. Cela ne veut pas dire qu’on personnifie la nature mais plutôt qu’on lui reconnait des droits à être réparée lorsqu’elle subit des dommages, des préjudices écologiques issus d’activités humaines. Ce droit existe cependant déjà. Cette année, dans les calanques par exemple, des braconniers ont été sanctionnés au titre du préjudice écologique et ont dû payer le coût nécessaire pour réparer ce qu’ils avaient pris à la nature. Mais il faut admettre que ce type de décision est encore très rares et, malheureusement, les délits environnementaux sont ceux pour lesquels on constate le plus faible taux de sanction, sous prétexte que l’on aurait recours à une “écologie punitive”. Il nous semble, de notre côté, qu’il s’agit surtout de respecter un principe de responsabilité et de réciprocité vis-à-vis d’une nature qui nous donne tout mais à qui on ne restitue jamais rien.
Comment ce droit pourrait-il se traduire d’un point de vue économique ?
La nature ne doit plus être évaluée sur la base d’équivalence en valeurs économiques, mais sur celle d’équivalence en valeurs écologiques. D’un point de vue comptable, la nature n’est plus un actif que l’on fait entrer dans les comptes des entreprises, des administrations ou des ménages, mais une entité à part avec laquelle on effectue des transactions et pour laquelle on crée des comptes spécifiques de créances et de dettes. Si une entreprise utilise – ou détruit – des populations animales sauvages pour sa production, elle va générer une dette vis-à-vis de la nature. Il faut que dans ses comptes, cette dette apparaisse et que dans les comptes de la nature, on puisse rendre visible la créance dont elle bénéficie. Le remboursement peut se faire alors par la restauration écologique ou par tout investissement de l’entreprise qui permette à la biodiversité de se régénérer (si on est dans une situation où la nature peut se régénérer). Tout cela peut aussi être créateur de nouveaux emplois et de croissance, comme cela a été observé à chaque fois que l’État a décidé d’investir dans la protection de biens publics – comme les monuments historiques ou encore l’approvisionnement en eau – ou de réguler des marchés qui détruisait ces biens publics.
Vous donnez en somme à la nature des droits pour se défendre…
Oui, car ce qu’omet le Conseil dans sa note, c’est la puissance des lobbies dans les négociations où la conservation de la biodiversité est en jeu. Or il est important de rappeler que les transitions écologiques des secteurs économiques sont le fruit de négociations où les défenseurs de la nature ne pèsent pas, ou très peu. Les arguments autour de la création d’emplois, de la croissance, de la crise que connaît un secteur, etc. sont toujours ceux qui vont peser le plus. À l’échelle des territoires, ils sont portés par les secteurs économiques et défendus par les préfets et les élus locaux. Au sein des multinationales par les directions financières ou des ressources humaines. De l’autre côté, qui défend la nature ? Le ministre de l’environnement, les associations, certaines administrations déconcentrées pour les territoires, les directions de l’environnement ou du développement durable pour les multinationales. Mais au fond, soyons clair, ces acteurs pèsent peu dans ces négociations. C’est pourquoi une approche par le droit de la biodiversité à être véritablement représentée et défendue lors des négociations qui s’opèrent à différentes échelles territoriales et organisationnelles pourraient faire évoluer les choses en matière de transition écologique de notre système économique.
La recherche économique sur la biodiversité peut-elle contribuer à cette transition écologique ?
Au niveau des instituts de recherche et des universités, nous avons besoin d’économistes qui connaissent mieux l’écologie scientifique et les modèles qui y sont associées, comme le propose en partie l’économie écologique. Par ailleurs, de nombreuses innovations, facilitant l’analyse des conditions d’une transition écologique de l’économie, peuvent être attendues en matière de comptabilité, d’ingénierie technico-économique, de planification territoriale et sectorielle, d’économie du droit, etc. Du point de vue de la R&D, il y a aussi la nécessité de renforcer les compétences au sein de nombreux secteurs économiques. Il est par exemple aujourd’hui compliqué d’accompagner un agriculteur dans une transition écologique qui nécessite de changer la structure de son exploitation, à utiliser des solutions fondées sur la nature et à utiliser de l’ingénierie écologique pour maintenir des rendements importants tout en renonçant aux pesticides ou à certains outils mécaniques. Il y a aussi un besoin d’économistes en mesure de travailler à la fois sur des modèles standards de business model, mais aussi capable d’évaluer les coûts et des méthodes associées à certaines réglementations environnementales pour réduire les risques de contentieux et proposer des solutions opérationnelles.
Le plan de relance proposé par le gouvernement vous parait-il prendre suffisamment en compte la biodiversité ?
100 milliards d’euros sont annoncés pour relancer l’économie française dont 30 milliards pour la transition écologique. C’est bien, mais le problème est que cette transition écologique est avant tout énergétique. 11 milliards sont investis dans les transports, 9 milliards dans l’industrie énergétique, 7,5 pour le bâtiment et le logement, et quasi rien pour la biodiversité. Par ailleurs, ce que l’on constate depuis 20 ans, c’est une baisse des investissements privés en matière de protection de la biodiversité, comme le souligne la note du Conseil d’analyses économique d’ailleurs. L’État a donc un rôle majeur à jouer. Un vrai plan de relance écologique pourrait être un plan de relance fondé sur des espaces de restauration naturelle comme pour les forêts ou les prairies. L’avantage lorsque qu’on a des logiques d’investissement dans la biodiversité, c’est d’en voir très vite les effets. Il suffit de restaurer une zone humide ou de mettre en réserve intégrale un écosystème marin pour tout de suite voir des résultats. C’est très concret. Et pour conclure sur une note économique : les emplois qui accompagneraient ces investissements sont non délocalisables et les personnes qui vivent à proximité de ces espaces peuvent bénéficier de plein d’opportunités associées à cette nouvelle biodiversité…
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D’une économie de la biodiversité à une économie de la conservation de la biodiversité
Or comme le souligne une opinion coordonnée par l’économiste Harold Levrel D’une économie de la biodiversité à une économie de la conservation de la biodiversité, pour être réellement efficace, cette démarche nécessite une véritable révolution copernicienne des stratégies qui sont associées à cet objectif. L’Opinion invite nos dirigeants à passer d’une « économie de la biodiversité » à un « projet économique de conservation de la biodiversité ». Pour cela, les objectifs de conservation de la biodiversité, tels qu’ils sont mentionnés dans les textes légaux, doivent être envisagés comme le point de départ des réflexions en matière de transition écologique des secteurs économiques, ce qui nécessite une certaine refonte des outils de régulation et d’évaluation économique. Comme l’avait déjà affirmé l’Ipbes dans son évaluation mondiale de la biodiversité, revisiter l’économie et ses fondements est la condition nécessaire pour entrer dans « le monde d’après ».
L’opinion est disponible dans les ressources téléchargeables ci-dessous.
Les sites Natura 2000 ont-ils aussi un impact sur les espèces d’oiseaux et de papillons non ciblées ?
Cette équipe internationale, coordonnée par le European Topic Center on Biological Diversity (ETC/BD), a réalisé un travail de synthèse conséquent, en parti financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) dans son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), et par le groupe Electricité de France (EDF).
L’équipe de recherche a analysé des données recueillies dans plusieurs pays européens au cours d’enquêtes de sciences participatives – des programmes de surveillance à long terme basés sur le volontariat. Au total, 14 programmes de suivi d’oiseaux et 6 programmes de suivi de papillons ont été comparés au réseau de sites protégés.
L’étude montre qu’au-delà des espèces ciblées, la moitié des 155 espèces d’oiseaux suivis bénéficient de la protection des sites Natura 2000, et particulièrement dans les forêts. Les chercheurs soulignent ici l’importance d’un suivi standardisé de la biodiversité et l’intérêt de rendre ces données disponibles afin d’évaluer l’état de la biodiversité à grande échelle et d’informer au mieux les acteurs des besoins de conservation.
Si la protection s’avère efficace pour les oiseaux, elle l’est en revanche moins pour les papillons. En effet, les sites Natura 2000 prennent avant tout en compte les exigences des oiseaux et peu celles des insectes. « 38 % des aires protégées sont des zones agricoles et des prairies fréquentées par les papillons » souligne Guy Pe’er, porteur du projet Cesab Lola BMS. « Or ceux-ci n’y bénéficient pas d’une bonne protection. La PAC (Politique agricole commune) n’a mis en place ni moyens ni plan de gestion pour soutenir les zones agricoles abritant pourtant une grande biodiversité». Guy Pe’er met aussi en avant le besoin « de cibler les efforts pour limiter les facteurs de pressions sur la biodiversité, et notamment l’agriculture », particulièrement cette année où sera discuté la réforme de la PAC et les objectifs post-2020 pour la CDB (Convention sur la diversité biologique).
[Communiqué] Les sites Natura 2000 ont-ils aussi un impact sur les espèces d’oiseaux et de papillons non ciblées ?
Cette équipe internationale, coordonnée par le European Topic Center on Biological Diversity (ETC/BD), a réalisé un travail de synthèse conséquent, en parti financé par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) dans son Centre de synthèse et d’analyse sur la biodiversité (Cesab), et par le groupe Electricité de France (EDF).
L’équipe de recherche a analysé des données recueillies dans plusieurs pays européens au cours d’enquêtes de sciences participatives – des programmes de surveillance à long terme basés sur le volontariat. Au total, 14 programmes de suivi d’oiseaux et 6 programmes de suivi de papillons ont été comparés au réseau de sites protégés.
Mobilisation de la FRB par les pouvoirs publics français sur les liens entre Covid-19 et biodiversité
Les ministères concernés et les instituts de recherche fondateurs de la FRB ont confié à celle-ci et à son Conseil scientifique élargi à des experts extérieurs, la charge de rédiger une synthèse des connaissances sur les liens entre COVID-19, et plus généralement entre les phénomènes de zoonose – le passage d’un agent pathogène d’un élément de la faune sauvage à l’humain à l’origine d’une épidémie, et dans le cas présent d’une pandémie – et la biodiversité.
Au travers des réponses apportées à 22 questions, les experts rassemblés par la FRB font le point sur les connaissances actuelles, sans cacher les sujets sur lesquels la communauté scientifique peut ne pas être unanime dans son positionnement. Ils soulignent également les lacunes de connaissance qui devraient faire l’objet d’un effort de recherche tout en résumant ce que l’on sait aujourd’hui à propos des relations entre COVID-19 et état de la biodiversité. Parallèlement, ils font plusieurs recommandations à l’adresse des pouvoirs publics destinées tant à mieux détecter les risques d’apparition de zoonoses, qu’à en limiter la répétition et la propagation.
Cette synthèse aura vocation à évoluer à l’avenir à mesure que l’on connaîtra mieux les facteurs à l’origine de la pandémie actuelle, mais elle permet dès aujourd’hui de mieux comprendre des phénomènes qui se multiplient et qui peuvent gravement mettre en péril l’avenir de l’humanité. Cette synthèse appelle aussi les pouvoirs publics à intégrer les enjeux environnementaux et plus particulièrement ceux associés à l’érosion accélérée de la biodiversité dans leur stratégie de sortie de crise.
[Biodiversité et pandémies] La FRB auditionnée par l’Assemblée nationale
Des messages forts ont été passés devant un auditoire très attentif et en attente d’éclairages scientifiques. Jean-François Silvain, président de la FRB, souligne que « cela renforce le sentiment que les responsables politiques sont très à l’écoute de la science. Les travaux de synthèses tels que ceux en cours à la FRB sur les liens entre biodiversité et zoonoses trouveront un large auditoire et pourront influer sur des décisions politiques. C’est un encouragement pour la FRB. »
[Covid-19 et biodiversité] La FRB et son Conseil scientifique s’expriment
Quels liens entre érosion de la biodiversité et émergence de zoonoses et risques de pandémies ? Comment refonder les interactions entre les populations humaines et la biodiversité ? Quels leviers d’action pour les décideurs ? Vers une nouvelle cohabitation entre les humains et l’ensemble des non-humains ?
Autant de questions sur lesquelles la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et son Conseil scientifique ont souhaité apporter leurs regards. Ils souhaitent ainsi rappeler que la recherche sur la biodiversité est plus que jamais nécessaire et appeler les décideurs à mieux intégrer la biodiversité dans les stratégies sanitaires, économiques et d’aménagement du territoires attendus dans la période post-crise.
[Tribune] Plaidoyer pour une COP 15 Biodiversité ambitieuse et pour un rapprochement des conventions issues de Rio
Les signataires de la Tribune lancent un appel pour que cette 15e COP se traduise par des résultats concrets et surtout aussi ambitieux que possible en matière d’engagements des pays en faveur de la biodiversité.
L’appel propose aussi qu’une réflexion sur le rapprochement des trois conventions issues du sommet de la Terre de Rio soit engagée rapidement afin que les enjeux relatifs au changement climatique, à l’érosion de la biodiversité et à la désertification soient traités simultanément et de manière coordonnée. L’avenir de la planète en dépend !
Consultez la tribune complète ci-dessous :
Plaidoyer pour une COP 15 Biodiversité ambitieuse et pour un rapprochement des conventions issues de Rio
Fin 2020 se tiendra la quinzième Conférence des parties (COP) de la Convention des Nations unies sur la diversité biologique (CDB), en Chine. Les pays adhérents à cette convention sont invités à annoncer des engagements précis en faveur de la préservation de la biodiversité.
Il serait dramatique que les États réunis à cette occasion ne s’accordent que sur un plus petit dénominateur commun en matière d’engagements et d’actions et que les décisions de la COP ne soient pas à la hauteur des enjeux relatifs à l’effondrement de la biodiversité.
Il faut que les États s’engagent en faveur d’actions claires, précises, multiples et quantifiables, en privilégiant la réduction rapide et effective des grands facteurs de pressions, tout en développant des actions de protection de grande ampleur afin de sauvegarder rapidement ce qui reste de la biodiversité et lui redonner un large potentiel d’évolution.
Il faut également que les acteurs privés accompagnent cette démarche en travaillant à la réduction de leurs pressions sectorielles sur la biodiversité.
Il faut enfin que les citoyens soient le moteur d’un changement majeur de nos modes de consommations, de perception et d’usage de la biodiversité.
Les deux plateformes d’expertise scientifique planétaires, qui réfléchissent d’un côté au devenir de la biodiversité (IPBES) et de l’autre à celui du climat (GIEC), s’accordent globalement sur le constat d’urgence et la nécessité de revoir rapidement des processus productifs non durables qui aggravent à la fois l’érosion de la biodiversité et le changement climatique.
L’IPBES souligne ainsi dans son évaluation mondiale de l’état de la biodiversité présentée en mai 2019, que la biodiversité s’érode à un rythme croissant, ce qui conduit à la dégradation du fonctionnement des sols et des écosystèmes. En conséquence, les services que les humains retirent de la biodiversité diminuent eux aussi rapidement, mettant en péril le devenir de nos sociétés. Les facteurs directs à l’origine de cette dégradation de la biodiversité sont parfaitement connus et leur importance respective a été évaluée : changement d’usage des terres au détriment des écosystèmes et des biotopes peu anthropisés, exploitation, et souvent surexploitation, des ressources marines ou terrestres, pollutions chimiques et physiques croissantes, changement climatique, multiplications des espèces exotiques envahissantes. Tous ces facteurs s’aggravent mutuellement et sont également renforcés par des facteurs indirects : la croissance démographique humaine et l’ensemble des processus socio-économiques et politiques à l’origine d’une consommation non durable des ressources de la planète.
L’IPBES insiste sur les incidences négatives multiples sur la biodiversité des systèmes de production agricoles intensifs dont deux excès sont à présent bien documentés, d’une part l’usage immodéré des pesticides et engrais chimiques et d’autre part l’accroissement de la production de protéines végétales destinées à l’alimentation animale qui induit des échanges à longue distance et délocalise les impacts dans des régions à forte biodiversité, comme les forêts tropicales. Les projections d’ici 2050 montrent que sans changements majeurs de modes de vie, l’érosion de la biodiversité et la diminution des services que les humains retirent du monde vivant vont se poursuivre.
Depuis la publication de l’évaluation mondiale de l’IPBES, le GIEC a produit un rapport sur les liens entre changement climatique et usage des terres, notamment au travers des activités agricoles et forestières. Les messages clés de ce rapport rejoignent ceux de l’évaluation IPBES sur la dégradation et la restauration des terres publiée en 2018. Le rapport du GIEC souligne l’importance de la contribution de l’ensemble du système alimentaire mondial à la production de gaz à effet de serre et rappelle que les modifications de couverture, d’usage et d’état des sols influencent les climats régionaux et globaux. Il rappelle aussi que le changement climatique est une source de risques accrus pour le système alimentaire mondial et la biodiversité, risques qui seront d’autant plus forts à mesure que la consommation alimentaire, les besoins en eau et la consommation de ressources multiples continueront à s’accroître. Le GIEC appelle à des actions en faveur de l’adaptation au changement climatique et à la réduction de celui-ci en soulignant les co-bénéfices que pourra en attendre la biodiversité. Le GIEC appelle donc à une gestion durable des sols et des écosystèmes, seule manière d’en stopper la dégradation, d’en maintenir la productivité et de contribuer à l’adaptation au changement climatique et à sa réduction. Le GIEC insiste sur la nécessaire réduction du gaspillage alimentaire et des déchets tout en jouant aussi sur l’évolution des choix alimentaires. Enfin, le GIEC insiste sur le besoin d’agir vite, de privilégier le court terme et met en avant dans ses projections le besoin d’accroître les surfaces forestières.
Par ailleurs, en septembre s’est tenue en Inde la Conférence des parties de la convention sur la lutte contre la désertification (UNCCD), la troisième des conventions de Rio, qui appelle à un arrêt de la dégradation des sols et à leur restauration pour préserver le fonctionnement et les services des écosystèmes et renforcer la sécurité alimentaire. Dans la déclaration de New Delhi appelant à investir dans la sauvegarde de terres et à débloquer toutes les opportunités d’action, la COP Désertification souligne l’importance de la prise en compte des solutions basées sur la gestion des terres pour la lutte contre le réchauffement climatique et pour la conservation de la biodiversité.
Enfin, l’initiative New York Declaration on Forests, initiée en 2014 par d’importantes structures de recherche et de réflexion et des ONG, constatant la poursuite de la déforestation, en particulier des forêts humides tropicales, a solennellement appelé à la protection et à la restauration de forêts de la planète, pour préserver leur biodiversité et leur capacité à séquestrer du carbone, rejoignant ainsi les COP dans leur invitation à ce que les gouvernements s’engagent dans des changements systémiques.
Dans tous les cas, les constats de ces instances relayent les alertes faites par les scientifiques depuis longtemps, et leurs recommandations, ont été reconnues ou approuvées par une majorité des pays dans le monde. Les gouvernants ne peuvent donc dire que l’alerte n’a pas été donnée et que l’urgence des actions nécessaires en faveur de la biodiversité n’a pas été mise en avant. Certains pays ont rapidement pris des engagements, comme la France qui a annoncé un accroissement significatif des surfaces d’aires protégées nationales, une initiative majeure, mais qui ne couvre qu’en partie les besoins d’actions indispensables, notamment à court terme.
Cependant, des divergences significatives persistent dès que sont abordées les stratégies et les options à privilégier pour résoudre les problèmes de restauration de la biodiversité ou de réduction du changement climatique.
C’est le cas, par exemple, de la prise en compte d’un fort développement des surfaces dévolues aux cultures énergétiques dans les scénarios du GIEC, cultures qui, à grande échelle, auraient un impact négatif majeur sur la biodiversité et sur lequel l’IPBES a attiré l’attention des dirigeants. Il en va de même du développement des technologies énergétiques de type BECCS (Bioenergy with Carbon Capture and Storage) ou du déploiement de stratégies d’afforestation intensive. C’est sur ces sujets que les échanges entre les experts du climat et de la biodiversité d’une part et entre les différents mécanismes de coordination stratégique et politique internationaux (Conventions et agences onusiennes) d’autre part devraient prendre toute leur importance. Il est central de rappeler que la lutte contre le changement climatique n’est pas une fin en soi, mais un moyen, urgent et indispensable, pour permettre aux vivants, humains et non-humains de poursuivre leurs trajectoires de vie et d’évolution. La lutte contre le changement climatique ne peut donc se faire en aggravant la situation de la biodiversité. Plus que jamais, le slogan de la FRB, « biodiversité et climat, même combat », reste d’une évidente actualité.
Au-delà de la COP 15 Biodiversité, de la COP Désertification ou des prochaines COP Climat, les Conférences des parties des trois conventions de Rio qui doivent avancer de concert, se pose la question de la nécessaire coordination mondiale des actions qui sont de nature à mettre la planète sur une trajectoire d’avenir assurant à la fois le devenir des populations humaines et celui de l’ensemble du vivant sur les continents, les îles et les mers et cela sans manichéisme et en respectant libertés et différences culturelles.
Face aux défis planétaires qui se posent à nous, il n’est plus possible de continuer à raisonner en silos, climat d’un côté, biodiversité ou désertification de l’autre, et de laisser émerger des solutions qui seront de mauvais compromis ne permettant pas de répondre simultanément, et au même niveau de priorité, à l’ensemble des grands défis planétaires.
Plusieurs alternatives sont envisageables pour que les solutions préconisées par les instances internationales soient pertinentes pour l’ensemble des enjeux majeurs auxquels nous devons faire face :
- Fusionner les trois conventions de Rio en une seule Convention Environnement qui traiterait de l’ensemble des enjeux environnementaux sous l’égide du Programme des Nations unies pour l’Environnement, le PNUE. Cela permettrait de considérer conjointement et en pleine synergie les enjeux du climat, de la désertification des terres et de la biodiversité, et de faire remonter en direction des décideurs des suggestions d’engagements et d’actions qui ne favoriseraient pas la solution d’un problème au détriment d’un ou plusieurs autres. Cela permettrait aussi d’établir un lien plus direct avec une version actualisée des Objectifs du Développement Durable de l’ONU qui pourraient alors s’appeler les Objectifs pour une Planète Durable. Une telle fusion s’accompagnerait de celle des organes subsidiaires scientifique et technologiques (SBSTA et SBSTTA) des conventions. Il faudrait parallèlement statuer sur la nécessité d’institutionnaliser ou non les relations entre les plateformes d’expertise scientifiques, GIEC et IPBES, et veiller à ce que la fusion des trois conventions, en donnant naissance à une structure de très grande ampleur, difficile à gérer dans la pratique, ne brise pas leurs dynamiques internes actuelles.
- Conserver les trois COP actuelles et mettre en place, sous l’égide du PNUE, une structure chapeau de coordination destinée à harmoniser et fiabiliser les décisions des COP. Il s’agirait là d’une structure légère associant secrétariat des conventions et responsables des structures d’expertise scientifique associées. Comme dans l’option précédente, les plateformes internationales d’expertise scientifique seraient invitées à collaborer de manière beaucoup plus effective qu’actuellement. Une telle structure chapeau devra fonctionner avec un impératif fort de réactivité.
- Établir un nouveau mode de fonctionnement entre les Conventions pour qu’elles s’appuient sur l’ensemble des organes d’appui scientifiques et technologiques dédiés (SBSTA et SBSTTA) et des plateformes d’expertise scientifique internationales, en particulier le GIEC et l’IPBES. Cette option nécessitera d’institutionnaliser une plateforme d’expertise scientifique indépendante en matière de désertification, par exemple le partenariat mondial sur les sols, actuellement sous égide de la FAO.
- Instituer formellement et rapidement une collaboration opérationnelle entre tous les organes d’appui scientifiques et techniques et les plateformes d’expertise scientifique comme le GIEC et l’IPBES de manière à ce qu’aucun rapport de l’une des plateformes scientifiques ne soit publié sans avoir bénéficié de la validation des autres groupes d’experts. Cela peut passer par la publication de rapports communs ou par une évaluation a posteriori des recommandations à destination des États avec une exclusion systématique des solutions qui porteraient atteinte aux enjeux de lutte contre le changement climatique, de lutte contre l’érosion de la biodiversité ou de lutte contre la désertification. Cette dernière option serait la plus facile à mettre en œuvre et les conventions pourraient alors pouvoir travailler à partir d’un socle d’expertise non pas nécessairement commun, mais ayant fait l’objet, en matière de recommandations, d’une mise en cohérence aussi poussée que possible.
Dans tous les cas, il devient urgent de favoriser des consensus scientifiques forts, qui puissent constituer les fondements de décisions internationales ambitieuses dépassant les visions sectorielles et les clivages politiques touchant notre avenir et celui de toutes les formes de vie qui nous entourent.
Des fiches pays relatives à la réglementation APA
À la date du 9 juillet 2019, 117 pays sont Parties au Protocole de Nagoya, 62 États ont mis en place des mesures d’APA et 16 ont établi un « certificat de conformité internationalement reconnu » .
En effet, le fait qu’un État soit Partie au Protocole ou pas, ne présage pas de l’existence ou de l’absence de réglementations internes en matière d’APA.
- Liste de pays qui ne sont pas parties au Protocole de Nagoya :
(Europe) Chypre, Estonie, Grèce, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie, Slovénie, Serbie.
(Hors Europe) Algérie, Australie, Brésil, États-Unis, Canada, Chili, Colombie, Costa Rica, Ghana, Grèce, Nigeria, Russie, Turquie, Venezuela, etc.
- Liste des pays non parties au Protocole de Nagoya mais signataires au Protocole de Nagoya :
(Europe) Chypre, Grèce, Irlande, Italie, Lituanie, Roumanie , Serbie, Slovénie.
(Hors Europe) Algérie, Australie, Bangladesh, Brésil, Cape Vert, Colombie, Costa-Rica, Le Salvador, Ghana, Grenade, Maroc, Nigéria, Pologne, Somalie, Thaïlande, Tunisie, Ukraine, Yémen.
- Liste de pays de l’Union européenne n’ayant pas réglementé l’accès aux ressources génétiques relevant de leur souveraineté et le partage des avantages découlant de leur utilisation mais disposant de réglementation déclinant le volet Conformité du Protocole de Nagoya en application du Règlement UE 511/2014 :
Allemagne, Autriche, Belgique, Chypre, Croatie, Danemark, Estonie, Grèce, Hongrie, Irlande, Italie, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République Tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Serbie, Slovaquie, Slovénie, Suède.
Dans le cadre du projet d’accompagnement de la mise en œuvre du Protocole de Nagoya, la FRB a établi, avec un comité de coordination et de rédaction, un ensemble de fiches-pays qui a vocation à être complété petit à petit.
Ces fiches-pays reprennent les éléments du site officiel ABS Clearing-House, plateforme d’échange d’informations sur le dispositif d’accès aux ressources génétiques et le partage des avantages découlant de leur utilisation, ainsi que les informations échangées entre les membres du groupe de travail sur l’APA et par les points focaux nationaux pour certains pays.
Les informations peuvent être inégales, cela est dû au niveau d’information disponible sur le site ABS Clearing-House et si les informations ont été traduites en anglais. Les retours d’expérience des utilisateurs permettront d’alimenter les informations concernant la procédure APA.
Le document est téléchargeable dans les ressources ci-dessous.
« Éviter, Réduire, Compenser » : trois clés pour limiter l’artificialisation des terres
La perte de biodiversité sur les territoires français et européens est maintenant actée. Que ce soit la perte de 30 % des espèces d’oiseaux communs en 15 ans dans les campagnes françaises (communiqué du MNHN, 2018), où la chute de plus de 75 % de la biomasse d’insectes en seulement 27 ans en Allemagne (Hallmann et al. 2017), les signaux d’alarmes sont tirés. Malgré ces alertes, l’artificialisation des terres – un des grands facteurs du déclin de la biodiversité – continu inlassablement, et ce dans toutes les régions. D’après une étude du Commissariat général au développement durable, 40 % de l’artificialisation en France se fait dans des zones où le taux de vacance de logements augmente fortement et 20 % dans des communes dont la population décroit. En l’absence de besoin apparent, comment expliquer la poursuite de ce phénomène ? Charlotte Bigard, chercheuse au centre d’écologie fonctionnelle et évolutive (UMR CEFE), conduit des travaux à l’interface entre la recherche et l’aménagement. Elle nous explique les limites et les perspectives de la séquence Éviter-Réduire-Compenser, outil réglementaire majeur pour maintenir le lien entre aménagement et biodiversité.
Les régimes d’APA en vigueur en Outre-mer
Trois espaces et territoires étaient déjà dotés de règles d’APA avant l’adoption de la loi : le Parc amazonien de Guyane, la province sud de Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française.
Réglementation française sur l’accès et le partage des avantages (APA)
La loi française vise les accès et les activités initiés après l’entrée en vigueur de la loi du 9 août 2016, qu’ils soient réalisés par des utilisateurs français ou étrangers.
Elle prévoit que l’État français est le fournisseur des ressources génétiques se trouvant sous sa souveraineté, sous réserve des compétences des collectivités d’outre-mer. Il est le bénéficiaire des avantages, qui sont dans la pratique versés à l’Office français de la biodiversité (OFB).
Elle met en place différentes procédures d’APA en fonction de la ressource et de l’utilisation envisagée (formulaire de déclaration ou d’autorisation), voire de leur provenance (métropole, outre-mer).
Elle établit une procédure spécifique pour l’accès et l’utilisation des CTA détenues par les seules communautés d’habitants présentes en Guyane et à Wallis et Futuna.
Elle prévoit des dispositions sur le partage des avantages – monétaire et non monétaire –, le transfert des ressources, des sanctions pénales et financières.
Des formulaires de déclaration et de demande d’autorisation sont disponibles auprès du ministère en charge de l’environnement, à l’adresse suivante : https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/acces-et-partage-des-avantages-decoulant-lutilisation-des-ressources-genetiques-et-des-connaissances
Réglementation européenne sur l’accès et le partage des avantages (APA)
Le Réglement (UE) n°511/20141 du 16 avril 2014 établit les règles concernant le respect des obligations portant sur l’accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées et le partage juste et équitable des avantages découlant de leur utilisation. Ce règlement s’applique aux ressources génétiques provenant des pays qui ont ratifié le Protocole de Nagoya.
Il a été complété par le règlement d’exécution (UE) 2015/18662 qui est entré en vigueur le 9 novembre 2015.
Il existe un document d’orientation (2016)3 sur le champ d’application et les obligations essentielles du règlement (UE) n° 511/2014 du Parlement et du Conseil relatif aux mesures concernant le respect par les utilisateurs dans l’Union.
Le règlement européen n°511/2014 s’applique aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles associées lorsque :
- le pays fournisseur est partie au Protocole de Nagoya ;
- le pays fournisseur a mis en place une réglementation APA sur ses ressources génétiques et ses connaissances traditionnelles associées ;
- l’accès aux ressources génétiques et aux connaissances traditionnelles est postérieur au 12 octobre 2014. Néanmoins, il faut vérifier dans la réglementation du pays que la période antérieure n’est pas couverte ;
- l’activité de recherche et de développement a lieu dans l’Union européenne.
Les exclusions concernent :
- les ressources génétiques et connaissances traditionnelles associées acquises avant octobre 2014 ;
- les ressources génétiques humaines. Les pathogènes humains, les parasites et autres organismes associés porteurs de matériel génétique sont couverts par le règlement n°511/2014 ;
- les zones situées au-delà des juridictions nationales ;
- les échanges de matières premières ;
- les ressources génétiques couvertes par d’autres instruments : Traité international sur les ressources phytogénétiques pour l’alimentation et l’agriculture (TIRPAA), Cadre de préparation en cas de grippe pandémique (PIP Framework).
Afin de respecter l’obligation de diligence nécessaire, les utilisateurs doivent prendre des mesures pour tracer, documenter, conserver et transférer les informations liées à l’utilisation des ressources génétiques et des connaissances traditionnelles associées. La documentation doit être conservée 20 ans après la fin de l’utilisation.
Pour démontrer la diligence nécessaire, il est possible de faire référence à un certificat de conformité reconnu à l’échelle international (CCRI) ou d’obtenir les informations suivantes :
- la date et le lieu d’accès ;
- la description ;
- la source ;
- les droits et obligations liés à l’accès et au partage des avantages, y compris pour les applications et la commercialisation ultérieures ;
- le permis d’accès ;
- les conditions convenues d‘un commun accord.
Les utilisateurs de ressources génétiques ont pour obligation de déclarer qu’ils ont fait preuve de diligence nécessaire à différents moments :
- À la réception de financements externes pour les travaux de recherche, qu’ils soient de source privée ou publique. Les activités menées par une structure sur ses fonds propres ne sont pas visées ;
- Lors de la mise sur le marché d’un produit mis au point à partir d’une ressource génétique ou d’une connaissance traditionnelle associée.
L’autorité compétente vis-à-vis de la réglementation européenne est le ministère en charge de la recherche :
- C’est auprès d’elle que les déclarations s’effectuent, au stade de financement de travaux de recherche ;
- Elle contrôle le respect des règles par les utilisateurs et met à disposition le registre des contrôles effectués ;
- Elle demande et contrôle l’inscription des collections au registre européen ;
- Au stade de la mise sur le marché d’un produit, c’est le ministère chargé de l’environnement qui est l’autorité compétente.
Les sanctions prévues dans la loi française sont financières et peuvent aller jusqu’à l’emprisonnement.
—
[Tribune] Une priorité nationale
En quelques jours, début mai 2019, quelque chose a changé dans le paysage médiatique et politique.
La biodiversité, sujet de préoccupation des seuls scientifiques, des naturalistes et de quelques directeurs environnement de trop rares entreprises, est devenue une priorité nationale. Merci à l’Ipbes, le Giec de la biodiversité, d’avoir su, par son alerte massive et dûment étayée par les messages que la science, notamment française, portait depuis des années, casser ce plafond de verre que nous, les professionnels de la question, ne parvenions pas même à atteindre, et faire rentrer la biodiversité jusqu’aux salons de l’Élysée.
L’Ipbes l’a expliqué, la biodiversité et les écosystèmes vont très mal, les populations de multiples espèces diminuent, et pas seulement dans les pays lointains, mais aussi devant notre porte. Les espèces disparaissent à un rythme croissant sous les effets des multiples pressions que les humains, qui sont eux de plus en plus nombreux et qui consomment de plus en plus, exercent sur la vie terrestre. L’empreinte écologique de l’Europe et de la France dépasse très largement les capacités de nos pays, et nous vivons à crédit au détriment de la biodiversité du reste de la planète.
(…)
- Pour lire l’intégralité de la Tribune, rendez-vous sur le site de l’Humanité.
Signataires : Jean-François Silvain, Hélène Soubelet, président et directrice de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), et les membres du Conseil scientifique de la FRB : François Sarrazin, Sébastien Barot, Cécile Albert, Isabelle Arpin, Anne Charmantier, Nicolas Gaidet-Drapier, Philippe Grandcolas, Jean-François Guégan, Philippe Gros, Hervé Jactel, Line Le Gall, Harold Levrel, Jean-Louis Morel, Jean-Louis Pham, Éric Thybaud…
[Ipbes 7] Suivez jour après jour le déroulé de la plénière
- 3-4 mai
Après six jours de travail intense, les négociations de l’Ipbes se sont achevées ce samedi en début d’après-midi avec notamment l’adoption du résumé pour décideurs de l’évaluation mondiale de la biodiversité, l’adoption du budget de la plate-forme pour les années 2019 à 2021, l’adoption du second programme de travail 2020-2030, l’adoption des conclusions de l’évaluation externe de la plate-forme.

L’Ipbes a conclu sa 7e plénière le 4 mai 2019 avec en point d’orgue l’adoption du premier rapport d’évaluation mondiale sur la biodiversité et les services écosystémiques et de son résumé pour décideurs.
Le rapport complet a été analysé, soit : plus de 1 800 pages, fondées sur près de 15 000 références, ayant fait l’objet de plus de 13 700 commentaires. Il a été adopté en bloc et reste la référence scientifique. Le résumé pour décideurs, qui en une quarantaine de pages concentre les messages clés, le contexte, les graphiques, des options de trajectoire et de gouvernance ainsi que les sujets de recherche à renforcer, a fait l’objet de négociations entre gouvernements pendant plus de 70 heures – plus de 2 000 commentaires avaient été formulés avant la session. Relativement consensuelles et constructives, elles ont abouti à des compromis serrés, écartelés entre des approches plus ou moins productivistes ou plus ou moins prescriptives notamment sur les points de sensibilités habituels : l’agriculture, domaine sur lequel la France a pu négocier l’intégration de quelques références à l’agro-écologie ; les instruments de mise en œuvre des politiques économiques ; l’usage des terres, les forêts ou les droits des peuples indigènes.
Au-delà de l’accumulation de données chiffrées inquiétantes, le rapport de l’Ipbes souligne que l’érosion de la diversité est généralisée à l’ensemble de la planète et que les actions locales de protection ou de restauration ne suffisent plus. Le changement d’usage des sols, premier facteur, tiré par l’agriculture, interroge sur la durabilité des modèles de production et de consommation de nourriture. La croissance démographique et celle des classes moyennes mondiales exercent une pression matérielle sur notre environnement incompatible avec le maintien des services de régulation qu’il nous rend. En dépit d’une attention formelle plus affirmée portée à la biodiversité dans les enceintes internationales, la mise en œuvre des mesures n’est pas à la hauteur des enjeux. Les trajectoires de rupture avec ces tendances existent, elles sont encore possibles, mais nécessitent des changements systémiques à l’aune de ceux préconisés l’an passé par le rapport spécial du Giec sur les 1,5°C (pour lesquels les politiques agricoles sont, là aussi, au cœur des trajectoires).

Avec ses messages clés, le rapport de l’IPBES fournit à la fois une base scientifique irréfutable et un cadre conceptuel aux résultats auxquels doit parvenir la COP15 qui se tiendra à Kunming en 2020. Ces conclusions correspondent aux options privilégiées par la France et l’Union européenne dans la perspective de cette négociation.
Le résumé, adopté à 11h50 samedi 4 mai, sera rendu public le 6 mai à 13 heures.
Au-delà des mises en garde alarmantes issues de l’évaluation complète, ce résumé présente des éléments de solution vers des trajectoires plus durables, c’est un moment notable pour les sciences de la vie, la coopération scientifique internationale et aussi le multilatéralisme. La prochaine et 8e session plénière se tiendra au Maroc début 2021.
Saluons enfin l’élection du nouveau bureau, composé d’un président, quatre vice-présidents et cinq membres élu à l’occasion de cette plénière. La candidature de Julia Marton-Lefèvre (France), ancienne directrice de l’UICN, proposée par la délégation française a bien été retenue parmi les membres du bureau. La colombienne Ana María Hernández, de l’institut Humboldt, a quant à elle été désignée nouvelle présidente de l’Ipbes, succédant à Sir Bob Watson qui aura remarquablement géré sa dernière session plénière.
- 2 mai
Au terme de la 4e journée de la 7e session plénière de la Plateforme intergouvernementale pour la biodiversité et les services écosystémiques (Ipbes), les travaux se sont accélérés afin de pouvoir finir dans les temps vendredi soir.
L’intégralité de la journée s’est déroulée en quatre groupes de contacts, avec trois d’entre-deux en parallèle, une situation qui devient habituelle à l’IPBES depuis sa 5e session tellement les discussions sont riches et parfois animées.
Le groupe de travail sur l’évaluation mondiale avance bien, avec un consensus sur la majorité des messages clés. Le bilan de cette douzaine d’heures de négociation est positif et le travail sur ce qui est appelé « background document », c’est-à-dire les informations complémentaires qui appuient les messages clés, a commencé ce vendredi. L’ensemble des pays montre une bonne volonté de finir les travaux dans le temps imparti et fait preuve de flexibilité en ce sens, tout comme les auteurs principaux dont la présence et les interventions permettent d’éclaircir et de débloquer bon nombre de discussions.
Un groupe de travail dédié à la négociation sur les graphiques du résumé pour décideurs a été créé en parallèle au groupe de travail sur le résumé pour décideurs. De nombreux commentaires ont été soulevés sur chaque élément, même si les débats se sont avérés plutôt constructifs, et les auteurs très à l’écoute.
Les discussions du groupe de contact budget se sont poursuivies dans le calme, avec notamment trois points débattus, les dépenses pour le fonctionnement de la plate-forme et le financement du second programme de travail à l’horizon 2030. La recherche de fenêtres de réduction des dépenses a notamment conduit à aborder à nouveau la question de la temporalité des sessions plénières. Le dernier point débattu a été le mécénat privé et les conditions de sa mobilisation.
Le groupe de travail sur le prochain programme de travail de l’Ipbes présente beaucoup d’enjeux, car de ce consensus dépend par exemple le budget. La validation consiste à approuver le contexte, le contenu et les modalités de mise en œuvre du prochain programme de travail de l’Ipbes.
Malgré de longues nuits à négocier, l’approbation des documents de la plate-forme a pris un nouveau rythme, laissant augurer une finalisation vendredi 3 mai pour une adoption formelle le 4.

- 30 avril – 1er mai

La réception au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) a été un véritable succès, accentué sans doute par le beau temps qui a permis aux délégués de se promener dans le jardin des plantes et d’en découvrir les beautés. Plus de trois cents délégués ont assisté à cette réception et aux discours de Bruno David, président du MNHN, s’exprimant au nom de la communauté scientifique, d’Anne Larigauderie, secrétaire générale de l’Ipbes, d’Emmanuelle Wargon et de Brune Poirson qui ont toutes deux rappelé l’engagement de la France en faveur de la biodiversité et l’urgence à agir.

Photo à gauche : Bruno David et Anne- Larigauderie, © Photo by IISD/ENB | Diego Noguera ; Photo au centre : Emmanuelle Wargon en présence de Brune Poirson, © Jean-François Silvain ; Photo à droite : Brune Poirson, © Jean-François Silvai
Le lendemain, le président de l’Ipbes Robert Watson a salué la belle réception au MNHN de lundi soir, la qualifiant de spectaculaire ! Nous pouvons donc nous féliciter que la France ait réussi son pari d’accueillir les délégations dans les meilleures conditions possibles.
Le travail a sérieusement commencé mardi matin avec, en premier lieu, l’étude du résumé pour décideurs sur l’évaluation mondiale de la biodiversité.
Comme pour les autres produits de la plate-forme, cette évaluation est composée d’un document de près de 1 800 pages qui sera « accepté » en l’état par la plénière et d’un résumé qui présentera les messages principaux à destination des décideurs. Ce dernier document doit être approuvé ligne à ligne par l’ensemble des délégations. Le travail est long, mais riche, car il permettra de poser les bases communes des messages principaux, extraits du rapport scientifique complet, dont l’ambition est de générer une prise de conscience à tous les niveaux de la société civile et d’engager nos sociétés vers une transition écologique vraie.
Les précédentes évaluations de la plate-forme ont permis des avancées importantes :
- le rapport sur les pollinisateurs a permis une nette modification dans les discours qui intègrent beaucoup plus les enjeux et menaces pesant sur les pollinisateurs, et notamment les abeilles ;
- ce même rapport a permis le lancement de programmes de recherche ;
- le rapport sur la dégradation et la restauration des terres a généré également des accords pour encourager l’utilisation pérenne des sols ;
- au sein de la convention sur la diversité biologique, les évaluations régionales ont fait l’objet de sessions parallèles avec les délégations pour les sensibiliser et les engager à prendre des mesures permettant de laisser une planète saine aux générations futures.
Ainsi, cette évaluation pose une pierre majeure à un agenda sur la biodiversité chargé. Les données scientifiques solides qui ont été compilées dans le rapport serviront de socle incontestable vers les négociations des conventions internationales telles que le climat, la diversité biologique et notamment les négociations en cours pour un nouveau cadre stratégique mondiale, post-2020, pour la biodiversité.
Les discussions sur l’examen de la plate-forme se sont bien passées, le travail présenté a été salué et le secrétariat a été chargé d’en mettre en œuvre les recommandations dans le cadre du second programme de travail.
Enfin, le groupe de contact pour valider un budget pour la plate-forme s’est réuni sur le temps du repas pour prendre connaissance du rapport du secrétariat sur le budget 2018 et les budgets prévisionnels 2019 à 2030. Ce groupe, qui se réunit traditionnellement sur le temps du repas de midi, une heure peu propice s’il en faut, a connu ce mardi une affluence record par rapport aux années précédentes avec une participation de 30 états membres. Peut-être en raison des enjeux qui portent notamment sur les modalités de financement du deuxième programme de travail qui sera discuté à partir du 1er mai.
- La nuit a été longue
Les discussions sur le résumé pour décideurs de l’évaluation mondiale ont duré jusqu’après minuit mardi soir. Les délégations sont très motivées et prolixes pour améliorer cette évaluation majeure pour notre avenir commun.
Le travail s’est poursuivi activement le 1er mai. La construction du consensus est un processus long et parfois sportif. Car l’essence même de l’Ipbes est justement d’aboutir à ce consensus message par message, ligne par ligne, mais souvent aussi mot à mot. À 132, c’est une gageure que le président Robert Watson essaye de transformer en course de vitesse, car il faut que l’ensemble des 36 pages du texte ait été revu avant vendredi soir, 18h. Un des outils du président pour débloquer des positions parfois antagonistes est la constitution d’un groupe « d’amis de la présidence ».

Au moins 5 groupes ont ainsi été créés mercredi pour avancer sur plusieurs messages clés du résumé pour décideurs afin de lever les incompréhensions. Ces discussions informelles sont assez efficaces et le texte qui résulte de l’agrégation explicite de plusieurs positions est souvent meilleur que le texte initial, et surtout, il est accepté à la plénière suivante.
Ce mercredi a aussi permis d’adopter la décision de mettre en œuvre les recommandations de la revue externe de la plate-forme en vue d’améliorer les fonctions administratives et scientifiques et donc l’efficacité de l’Ipbes.
Enfin, le premier groupe sur le second programme de travail a eu lieu, avec pour ambition de trouver un consensus sur sa temporalité, son contenu et son efficacité à mettre en œuvre les 4 objectifs de l’Ipbes, à savoir :
- mener des évaluations sur la biodiversité,
- appuyer l’élaboration et l’exécution des politiques en identifiant des outils et des méthodes appropriés,
- accompagner les besoins de renforcement de capacités pour améliorer l’interface science-politique, notamment dans les pays du Sud,
- et faciliter une approche coordonnée de la production de nouvelles connaissances.
- 29 avril : De Panama à Paris : une plénière historique ?
Nous sommes au milieu du gué d’un processus historique qui a commencé en 2005 avec une conférence internationale Biodiversité, science et gouvernance, au même endroit, à l’Unesco, au cours de laquelle le président français a appelé à la création d’un groupe d’experts sur la biodiversité et les services écosystémiques. C’est à Panama, il y a 9 ans, que les gouvernements ont pris la décision de créer une plate-forme pour la biodiversité qui est devenue Ipbes en 2012.
Nous sommes aujourd’hui à la septième plénière de cette plate-forme intergouvernementale.
Cette plénière est un important pas pour l’Ipbes, après que le premier programme a été mis en œuvre avec succès. C’est en effet la première évaluation globale intergouvernementale de l’état de la biodiversité, des pressions qui s’exercent sur elle, des actions pour enrayer son déclin et des futurs probables de la biodiversité.
L’agenda international est aligné pour une prise en compte de la biodiversité, avec concomitamment la réunion du G7 environnement à Metz, le sommet du G7 cet été à Biarritz, le congrès de l’IUCN à Marseille en 2020, la COP 15 de la convention pour la diversité biologique.
800 participants sont présents à l’Unesco pour cette semaine de travail chargée.
Après avoir chaleureusement remercié la France, les interventions des délégations ont rappelé en introduction la rapide et historique extinction de la biodiversité, la dégradation de nos écosystèmes et la disparition des paysages culturels dans le monde. Ce n’est plus seulement un problème environnemental, mais c’est également un problème économique, sanitaire, social, de nutrition et de sécurité. La préservation de la biodiversité est à la base de notre capacité à réduire la pauvreté à continuer d’améliorer la qualité de l’eau, de l’air, de la santé humaine et même à conserver ou créer des emplois. Les conditions de vie pacifique en commun sont menacées, préserver la biodiversité, c’est préserver notre vie. Il est urgent d’agir.
La dynamique est incontestablement présente au sein de l’Ipbes, avec deux pays, la Jordanie et le Venezuela ayant rejoint la plate-forme en 2019, portant le nombre de membres de l’Ipbes à 132. Il faut à présent d’urgence « sortir des murs » et engager une démarche historique pour ne pas spolier les générations futures avec une intensité sans précédent.
Le temps du diagnostic est passé, des pistes d’action sont disponibles dans les évaluations et doivent être mises en œuvre en bousculant notre vision sur la manière d’habiter la terre et en participant à diffuser cette vision dans la société civile.
La première session plénière a été ouverte par le ballet « Steps for a change » réalisé par 10 enfants de 7 à 14 ans de l’école de danse « Art en scène de Montpellier ». Le projet a été coordonné par le Dr Yunne Shin, (IRD) auteur principale de l’évaluation mondiale et la chorégraphe, Emily Lartillot. Un documentaire a été réalisé et sera disponible dans quelques semaines.
La danse d’une dizaine de minutes, accompagnée d’une vidéo projection et de jeux de lumière, a été unanimement applaudie par les 800 personnes présentes. Elle porte un message fort sur la perte de biodiversité et nous rappelle que les futures générations nous regardent. Cette prestation rappelle aussi que notre patrimoine matériel et immatériel dépend de la biodiversité même si nous ne savons pas le mesurer.

Le challenge collectif est à présent de faire de la biodiversité une grande cause universelle comme le climat. Et de passer à l’action. Car, ce qui est gagné pour l’instant, c’est la communication. La croissance de la page Ipbes sur Facebook a été de 649 %, un chiffre à faire pâlir de jalousie les grands financiers et, depuis la dernière plénière, le secrétariat est en contact avec 7 200 journalistes dans le monde entier.
Le président Robert Watson a rappelé l’appel du président Macron « We need to make the planet great again » et a enjoint l’ensemble des participants à apporter leurs voix et efforts à la campagne « New deal for Nature and people in 2020 ».
En fin de journée, avant la réception au MNHN, François de Rugy est intervenu devant les délégués du monde entier pour rappeler que les questions liées à l’agenda climatique avait pris une importance considérable et que les priorités de protection de l’environnement pouvaient être traduites en actions à toutes les échelles. La biodiversité est une autre crise, toute aussi grave mais silencieuse avec l’extinction des espèces et la perte des services qui leur sont liés. Il a confirmé que ces évaluations de l’Ipbes constituaient une vue complète et transversale de la biodiversité et que le rendez-vous crucial de 2020 devait être basé sur les meilleures connaissances scientifiques disponibles.
La France souhaite créer une prise de conscience et une dynamique autour de la biodiversité et appelle à un passage à l’action de la communauté internationale pour protéger les habitats et les espèces sensibles. Dans ce cadre, la France vient d’ailleurs d’adopter une stratégie nationale de lutte contre la déforestation importée. Mais la tâche est complexe y compris sur notre propre territoire, car les transformations à accomplir sont importantes. Les enjeux de connaissance sont à ce sujet un véritable enjeu.
Enfin, le ministre a encouragé l’Ipbes à aller au-delà de la sensibilisation dans son second programme de travail et à produire des indicateurs adaptés pour engager la transition nécessaire.
Une des premières actions majeures est que la France, grâce à son action a permis que le rapport de l’Ipbes soit présenté au G7 environnement la semaine prochaine par la secrétaire générale de l’Ipbes et de son président Robert Watson.
Contribution de la FRB au Grand débat national
À l’initiative du Président de la République, le gouvernement a engagé un Grand débat national pour permettre à toutes et tous de débattre de questions essentielles pour les français. La Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), avec l’appui de son conseil scientifique, a répondu à cet appel en contribuant au thème de la transition écologique. La FRB propose 7 axes d’actions publiques prioritaires pour diminuer notre empreinte écologique aux interfaces entre :
- Alimentation,
- Climat,
- Transition énergétique,
- Modes de consommation,
- Logement et urbanisation,
- Transport,
- Libre évolution de biodiversité et bénéfices pour la santé humaine.
Consultez la contribution ci-dessous
[Grand débat national] La contribution de la FRB sur le thème de la transition écologique
Pourquoi axer la transition écologique sur une diminution de l’empreinte écologique ?
Actuellement, la France consomme trois fois sa propre capacité de production. Pour l’année 2018, l’ensemble des ressources que notre pays a pu produire a été consommé le 5 mai 2018. Après cette date, la France a donc dépassé sa “biocapacité”, et est passé en situation de déficit écologique.
Cet état de fait éminemment non durable peut encore être inversé
Pour cela, il est nécessaire de soutenir la recherche pour mieux évaluer l’état de la biodiversité, comprendre le fonctionnement et le rôle des écosystèmes, et assurer le transfert des connaissances pour étayer les décisions publiques et privées et sensibiliser les différents publics aux sciences du vivant, notamment les plus jeunes.
La FRB propose de rassembler les citoyens autour d’un objectif de diminution de notre empreinte écologique et d’offrir une vision fédératrice de l’avenir, source d’économies et d’innovations. Cette ambition peut aussi être portée à l’échelle européenne puis mondiale à l’occasion notamment de la 7e plénière de l’Ipbes en 2019 et de la COP Diversité biologique qui se tiendra en Chine en 2020. C’est une opportunité pour la France d’apparaître ainsi comme pionnière, exemplaire et porteuse d’une ambition forte en matière de préservation et d’usage durable de la biodiversité.
7 axes d’actions publiques prioritaires pour diminuer notre empreinte écologique
La diminution de l’empreinte écologique doit être conçue pour trouver les synergies positives entre la poursuite des trajectoires évolutives des non humains et celle du développement du bien être humain. Ceci embrasse une grande diversité d’enjeux sociaux, sanitaires, culturels, politiques, économiques, au sein de nos sociétés. Parmi eux, la FRB a identifié, sur la base de nombreux travaux de recherches publiés ou en cours, sept axes d’actions publiques prioritaires aux interfaces entre :
- Alimentation,
- Climat,
- Transition énergétique,
- Modes de consommation,
- Logement et urbanisation,
- Transport,
- Libre évolution de biodiversité et bénéfices pour la santé humaine.
[Grand débat national] “Et si on parlait biodiversité ?” – Rendez-vous le 11 mars !
Dans le cadre du “Grand débat national”, venez échanger autour de la biodiversité à l’occasion d’un débat organisé par 14 structures travaillant sur la question environnementale.
- Rendez-vous lundi 11 mars
- De 19h à 21h
- À la Mairie du 15e arrondissement de Paris (31, rue Péclet – 75015 PARIS)
Ce débat sera animé par Patricia Martin de France Inter et Jean-Jacques Fresko de l’Agence nature.
Entrée libre
Remise de la bourse Barbault et Weber
Objectifs :
- renforcer la démarche de recherche participative en renforçant les liens entre l’UMR, le CPIE et les bénévoles
- effectuer une campagne de terrain complémentaire associant l’ensemble des collaborateurs pour avoir des inventaires plus complets et étendus sur l’ensemble de la région et de compenser certains biais méthodologiques affectant les données existantes.
- tester des hypothèses plus fines quant à l’influence de la structure du paysage sur la répartition des communautés d’amphibiens en milieu bocager en prenant en compte des paramètres liés à la perméabilité paysagère et plus particulièrement l’importance des structures boisés et de l’hétérogénéité spatiale en milieu agricole.
- mieux identifier les variables environnementales pertinentes pour modéliser la distribution des espèces d’amphibiens à différentes échelles afin de définir les continuités écologiques favorables à ce groupe biologique.
Cette bourse a été soutenue financièrement par la Société française d’écologie et d’évolution (SFE²), Humanité et biodiversité (H&B), l’Agence française pour la biodiversité (AFB) et la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB).
[Ipbes 6] Suivez jour après jour le déroulé de la plénière
Sortie des rapports régionaux de l’Ipbes
La biodiversité et les services écosystémiques continuent de décliner dangereusement, alertent les scientifiques
Fruit de trois années de travail, les quatre évaluations régionales de la biodiversité et des services écosystémiques couvrent les Amériques, l’Asie et le Pacifique, l’Afrique ainsi que l’Europe et l’Asie centrale – la planète entière à l’exception des pôles et des océans. Les rapports d’évaluation ont été approuvés par la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (Ipbes), à Medellín, en Colombie, lors de sa 6ème plénière.
- Pourquoi la biodiversité est-elle importante,
- Dans quels domaines faisons-nous des progrès pour la protéger,
- Quelles sont les principales menaces et opportunités pour la biodiversité
- Et comment pouvons-nous ajuster nos politiques et nos institutions pour un avenir plus durable ?
Dans chaque région, à l’exception d’un certain nombre d’exemples positifs où des leçons peuvent être tirées, la biodiversité et la capacité de la nature à contribuer au bien-être des populations sont dégradées, diminuées ou perdues en raison d’un certain nombre de pressions communes : la surexploitation et l’utilisation non durable des ressources naturelles ; la pollution de l’air, des terres et des eaux ; le nombre croissant et les impacts des espèces exotiques envahissantes et des changements climatiques, entre autres.
[Ipbes 6] Messages-clés des résumés pour décideurs
Plus de 120 experts internationaux issus de 36 pays ont évalué l’état des connaissances sur la biodiversité en Europe et en Asie centrale, tirant des informations de près de 4 000 sources : travaux scientifiques, rapports techniques et savoirs traditionnels et locaux. Les conclusions-clés rassemblées dans le « Résumé pour décideurs » visent à orienter les décisions relatives aux politiques publiques et aux actions du secteur privé et des citoyens en faveur de la préservation de la biodiversité. Elles ont été approuvées le 24 mars 2018 par la 6e plénière de l’Ipbes et ses 129 États membres.
La FRB propose deux dépliants pour mettre en avant des messages synthétiques issus des rapports Europe et Asie centrale et Dégradation et restauration des terres.
[Ipbes 7] La venue de l’Ipbes à Paris en 2019
L’Ipbes* s’apprête à publier le premier rapport d’évaluation mondial sur la biodiversité et les services écosystémiques depuis 2005.
En mai 2019, une nouvelle synthèse mondiale décisive sur l’état de la nature, des écosystèmes et des contributions apportées par la nature aux populations sera présentée aux représentants de 130 États, qui en discuteront en vue d’une approbation. C’est le premier rapport de ce type depuis que l’emblématique évaluation des écosystèmes pour le millénaire (Millenium Ecosystem Assessment) a été publiée en 2005, et le tout premier qui soit intergouvernemental.
Élaborée par 150 éminents experts internationaux issus de 50 pays, conciliant la représentation des sciences naturelles et sociales, avec des contributions additionnelles de 250 experts supplémentaires, travaillant avec la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (Ipbes), l’évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques contribuera à améliorer les politiques et les actions au cours de la décennie à venir.
Le rapport sera achevé et examiné lors de la septième session plénière de l’Ipbes du 29 avril au 4 mai 2019. Ayant exigé trois années de travail et un coût total de plus de 2,4 millions de dollars, l’évaluation mondiale de l’Ipbes s’appuie sur près de 15 000 références, y compris des documents scientifiques et des informations gouvernementales. Il s’agit également de la toute première évaluation qui examine systématiquement et intègre les savoirs, problématiques et priorités autochtones et locaux.
Un « résumé à l’intention des décideurs » détaillé qui souligne les principaux messages, résultats et options, doit être présenté au public au siège mondial de l’Unesco, à Paris, le lundi 6 mai 2019.
Accédez au communiqué de l’Ipbes
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* Souvent décrite comme le « GIEC de la biodiversité », l’IPBES est l’instance scientifique et politique mondiale chargée de fournir à tous les décideurs les meilleurs éléments probants disponibles concernant les populations et la nature.
Séminaire de restitution de l’étude sur les données de séquençage de ressources génétiques pour l’agriculture et l’alimentation
Cette étude avait pour objectif de donner un éclairage sur ce qu’est l’ « information numérique de données de séquençage » de ressources génétiques pour l’agriculture et l’alimentation, quelles sont les utilisateurs et les pratiques. Il s’agissait donc de réaliser un état des lieux sur ce concept et les réalités qui l’entourent. Ces informations serviront à éclairer les décideurs et appuyer la position de la France dans les échanges internationaux sur la question de la régulation des échanges de données de séquençages sur les ressources génétiques.
Le séminaire de restitution des résultats de cette étude s’est tenu le lundi 8 octobre 2018, à la Maison des Océans, 75005 Paris.
Retrouvez ci-dessous : les ressources téléchargeables (les présentations de la journée ainsi qu’un compte-rendu du séminaire), le programme et le contexte de l’étude.
Rencontres sciences pour l’action 2018 : prospectives pour la biodiversité
Ces rencontres, à l’interface entre savoir et action, avaient pour objectif de produire des recommandations pour soutenir la production et la diffusion de connaissances et améliorer la mise en oeuvre de l’action publique en faveur de la biodiversité, que ce soit au sein de politiques directement en lien avec cette dernière ou au sein de politiques publiques en apparence plus éloignées.
Elles ont notamment ciblé :
- les nécessaires soutiens à la recherche en appui aux politiques publiques ;
- les nécessaires évolutions des politiques sectorielles pour qu’elles prennent mieux en compte les enjeux liés à la biodiversité ;
- les actions pour favoriser une mise en oeuvre efficace des politiques publiques en faveur de la biodiversité ;
- les expérimentations ou évaluations à mener avec la recherche et les initiatives locales à soutenir et à mieux faire connaître.
Entre 2017 à 2019, trois séries de rencontres sont ainsi programmées avec pour objet l’appropriation des résultats de la recherche et de prospectives par les politiques publiques et les acteurs concernés, ainsi que la remontée de leurs enjeux de connaissance scientifique. La première rencontre a eu lieu en octobre 2017.
Biodiversité et fiscalité
Les lois de finance (LFI – art. 31) et de financement de la sécurité sociale (LFSS – art. 8) pour 2018 contiennent plusieurs reculs pour la biodiversité. Consultez, dans les ressources téléchargeables ci-dessous, la note complète réalisée par Guillaume Sainteny et revue par le Conseil scientifique (CS) de la FRB.
Chercheurs et gestionnaires d’espaces naturels protégés : des liens à construire
La FRB a mis en place en 2015 un groupe de travail “Espaces naturels protégés et recherche” associant ses deux conseils de gouvernance : le Conseil d’orientation stratégique (Cos) et le Conseil scientifique (CS). Dans le cadre de ce groupe de travail, une enquête a été menée afin de mieux connaître et faire connaître les collaborations gestionnaires/chercheurs et leur implication dans le développement des connaissances.
Un dépliant a également été conçu, sur la base de la publication, et met en avant des recommandations visant à conforter les espaces naturels protégés en tant que sites potentiels d’observation et d’analyse des rapports des sociétés à la nature. Elles ont également comme objectif d’en faire des sites références “sentinelles” où réaliser des suivis sur le long terme.
La publication et le dépliant sont consultables dans les ressources ci-dessous.
Au croisement de la recherche et des territoires : des projets au service de la biodiversité
Ce document présente les résultats de trois appels à projets de recherche “Biodiversité” lancés par la Région Nord-Pas de Calais, en partenariat avec la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB).
L’exploitation des ressources halieutiques : pressions sur les écosystèmes marins, état des pêcheries, impacts sur la biodiversité et aménagement de ses usages
Des aires marines protégées en haute mer : l’Europe pionnière
La mise en place d’aires marines protégées est l’une des mesures phares de conservation de la biodiversité marine. Il s’agit principalement de définir un espace au sein duquel les activités humaines pourront être restreintes et la lutte contre la pollution renforcée, dans l’objectif de protéger un écosystème particulièrement remarquable ou sensible. Adoptée en 1992, la Convention sur la diversité biologique mentionne comme premier outil de conservation in situ l’établissement d’un « système de zones protégées ou de zones où des mesures spéciales doivent être prises pour conserver la diversité biologique ». Les objectifs d’Aïchi (CDB, 2010) pour la biodiversité prévoient ainsi la conservation d’au moins 10% des zones marines et côtières par des réseaux d’aires protégées. Aujourd’hui, il existe quelques aires marines protégées situées en haute mer – ce vaste espace, au delà des zones économiques exclusives des États côtiers – qui représente 64% des mers et océans et qui constitue un enjeu crucial pour la biodiversité. Un nouveau traité est actuellement en cours de discussion pour introduire des mesures juridiquement contraignantes pour la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité en haute mer. En effet, il est impossible de contraindre juridiquement des États à appliquer un accord s’ils n’en sont pas Partie. Comment, dans ces conditions, traiter ce problème et ainsi préserver la biodiversité des écosystèmes fragiles et méconnus qui s’y trouvent ?
La plénière de l’IPBES se tient du 17 au 24 mars en Colombie
Les rapports de l’IPBES, ce sont :
▪ 4 rapports régionaux pour évaluer la biodiversité et les contributions apportées par la nature aux populations dans les quatre régions du monde : les Amériques, l’Asie et le Pacifique, l’Afrique, ainsi que l’Europe et l’Asie centrale, c’est-à-dire le monde entier à l’exception de l’Antarctique et des zones de haute mer.
▪ Un cinquième rapport d’évaluation qui se concentre sur la dégradation et la restauration des terres aux niveaux régional et mondial
▪ 550 éminents experts internationaux issus de plus de 100 pays mobilisés
▪ L’analyse quasi exhaustive par les meilleurs experts de toutes les données disponibles sur la biodiversité, son état, son devenir, les pressions qu’elle subit et les solutions pour la préserver et en faire un usage durable
▪ Une étape majeure de la communauté scientifique pour préparer l’après Aïchi, c’est-à-dire les objectifs mondiaux pour la biodiversité post 2020
Le contenu des rapports sera révélé en Colombie à Medellin à partir du 23 mars.
Séminaire FRB : L’APA, pas à pas
Après la sortie en 2017 du guide L’APA pas à pas sur l’accès aux ressources génétiques et le partage des avantages découlant de leur utilisation (APA), la FRB a organisé avec le soutien de l’Agence française pour la biodiversité (AFB) une matinée de séminaire pour informer et accompagner les chercheurs publics et privés dans la compréhension de l’APA et de sa mise en œuvre.
Cette nouvelle réglementation encadre les activités de recherche et de développement réalisées sur des ressources génétiques ou des connaissances traditionnelles associées qui sont sous souveraineté française. Ces activités sont menées par des opérateurs publics ou privés.
Quelles sont ces nouvelles réglementations ? Que disent-elles ? Suis-je concerné(e) ?
Telles sont les questions auxquelles le séminaire s’est proposé de répondre.
Retrouver, dans les ressources ci-dessous, le programme ainsi que les présentations des intervenants.
[Tribune] La lutte contre l’érosion de la biodiversité doit être une priorité internationale
Les chercheurs et les acteurs qui, comme nous, travaillent sur la biodiversité saluent l’initiative prise par le président de la République de relancer, à travers la réunion One Planet Summit, la dynamique portée par l’accord de Paris. Au moment où il apparaît clairement que l’objectif de la limite des 1,5 °C ne pourra probablement pas être atteint, mobiliser les acteurs économiques pour réduire les pressions humaines responsables du changement climatique et contribuer aux processus d’adaptation constituait un impératif. Les engagements pris par les donateurs, les Etats ou des organismes comme la Banque mondiale vont dans un sens positif, et il est important que la France ait joué ici un rôle majeur.
A l’heure où de grands acteurs économiques commencent à se soucier fortement de l’impact de leurs activités sur la biodiversité et alors que le récent appel des 15 000 scientifiques du monde entier a rappelé que l’impact croissant des activités humaines compromet notre avenir, on aurait pu souhaiter que ce sommet traite à la fois de la lutte contre le réchauffement climatique et de la lutte contre l’érosion de la biodiversité.
A l’image d’une étude qui montre que plus de 75 % de la biomasse des insectes volants a disparu au sein d’espaces pourtant protégés en Allemagne, en vingt-sept ans, les travaux scientifiques récents soulignent tous la gravité des atteintes à la biodiversité. Ils montrent également qu’avec une population humaine en croissance la situation va empirer fortement sous les effets cumulés du changement d’usage des terres – au bénéfice notamment de la production agricole –, de la surexploitation des sols, des eaux douces et des poissons marins, du braconnage de certaines espèces remarquables, de l’accroissement des pollutions tant chimiques que physiques (plastiques et microplastiques notamment), lumineuses ou sonores, ou encore de la dissémination d’espèces exotiques envahissantes (…)
Les paiements pour services environnementaux : des instruments clés à améliorer
Les Paiements pour Services Environnementaux (PSE) sont des rémunérations versées à des acteurs du monde rural, généralement des agriculteurs, des éleveurs ou des forestiers pour adopter, sur les terres qu’ils possèdent ou contrôlent, des méthodes de production respectueuses de l’environnement ou arrêter certaines pratiques, parfois légales, mais indésirables, comme l’épandage de pesticides ou la déforestation.
Ces instruments se déploient dans de nombreux pays en développement – l’exemple du Costa Rica est le plus connu – mais le principe est identique à celui des mesures agro-environnementales de la Politique Agricole Commune de l’Union Européenne. La nature de ces paiements fait toutefois débat.
S’agit-il de compenser les coûts associés à l’adoption d’une pratiques plus écologique (ou pour le manque à gagner de l’abandon de certaines activités), ou s’agit-il de récompenser des acteurs aux comportements déjà écologiquement vertueux ? Par ailleurs, les PSE, dans de nombreux pays, rémunèrent les acteurs pour s’abstenir de faire des choses qui sont déjà prohibées par la réglementation, par exemple déboiser, avec le risque d’affaiblir la force intrinsèque des normes légales actuelles et futures. En effet, les acteurs n’appliqueraient les règles légales qu’à la condition d’être rémunérés.
À ces questions, l’article d’Alain Karsenty et al. propose de répondre à travers un double ciblage, géographique et social, des PSE. Dans les aires protégées, notamment, il peut être acceptable de rémunérer les producteurs pauvres pour le respect des règlements, à condition d’investir aussi pour leur donner les moyens, à terme, de tirer des revenus suffisants de leurs activités économiques tout en respectant la contrainte légale.
Les aspects économiques et légaux de l’additionnalité des Paiements pour Services Environnementaux
Les Paiements pour Services Environnementaux (PSE) se sont imposés comme un des instruments-clé dans les politiques de protection de la nature. Derrière ces trois lettres maintenant bien connues, les PSE abritent néanmoins des concepts différents. L’article propose de distinguer entre la logique de “compensation” qui revient à payer les personnes pour qu’elles changent leur comportement et celle de “récompense” d’un comportement écologique vertueux. La première se rattache à l’efficience économique, autrement dit obtenir le plus de résultats à moindre coût, tandis que la seconde renvoie à des considérations de justice. Ces deux logiques sont intrinsèquement contradictoires. Nombre de PSE rémunèrent notamment les producteurs pour ne pas mener des activités prohibées, ce qui introduit une autre tension, entre la logique d’incitation et le principe d’égalité devant la loi. Les auteurs proposent une approche pour tenter de surmonter ces tensions.
Nécessité d’un accord international sur la pollution de l‘océan par les plastiques
Accédez à la traduction de l’article scientifique :
Pourquoi un accord international sur la pollution de l‘océan par les plastiques est indispensable
Les plastiques s’accumulent partout dans le monde à un rythme croissant. D’après Geyer R. et al., si la tendance actuelle continue, 12 000 millions de tonnes de déchets plastiques seront mis en décharge ou dans l’environnement d’ici 2050.
Comme les gaz effet de serre ou les substances détruisant la couche d’ozone, les plastiques ne s’arrêtent pas aux frontières nationales. Entraînés par le vent ou l’eau, ils finissent majoritairement leur course dans les océans affectant les organismes à tous les niveaux d’organisation biologique.
Cette pollution impacte les animaux marins (capture, étranglement, étouffement, etc.), avec des conséquences souvent fatales. Son action chimique, sous forme microscopique, agit également sur les organismes au niveau génétique ou fonctionnel (baisse de fertilité), les populations (diminution de la taille des populations) ou les communautés (déstructuration des relations entre les organismes constituant ces communautés).
Ces impacts, combinés à l’accélération de la production de plastique, ont amené un collectif de chercheurs à interpeler la communauté internationale pour prendre des mesures avant que les écosystèmes ne soient altérés de façon irréversible.
Le collectif demande à ce qu’un accord international définisse des objectifs pertinents et mesurables pour réduire la pollution plastique dans tous les océans du monde, car si des solutions ont été mises en place au niveau local, elles n’ont pas une ampleur suffisante pour faire face au caractère global d’un problème qui s’accroit très rapidement.
Ils demandent aussi que cet accord soit accompagné d’un programme visant à étendre la responsabilité des producteurs et l’intégration des coûts environnementaux dans le prix des produits, pour créer un fonds mondial, sur le modèle du fonds Climat de l’UNCCC, afin d’aider les Etats participants à développer les filières appropriées de traitement des déchets plastiques.
Pelagic | Prioriser les aires marines de conservation pour les vertébrés ayant une importance écologique et mondiale
Le déclin des prédateurs marins s’est intensifié à l’échelle mondiale dans les années 1950, les bateaux de pêche industriels ciblant des populations de requins et de thons auparavant inaccessibles. Ces pêcheries extensives continuent de s’étendre, tandis que les prises continuent de diminuer au niveau mondial. Étant donné la difficulté de gérer ces pêches de façon durable, il a été proposé d’établir de vastes Aires Marines Protégées (AMP) où il serait interdit de pêcher afin d’inverser les tendances. Ces AMP, qui sont relativement à l’abri des effets des perturbations anthropiques, nécessitent la connaissance des habitats essentiels au maintien de ces prédateurs marins. Ces connaissances, pourtant cruciales, sont actuellement très limitées puisqu’elles reposent principalement sur une répartition géographique des espèces obtenue grâce aux prises de pêche, biaisées par la prise d’espèces non ciblées et par une sous-déclaration délibérée.
Ici, le projet FRB-Cesab Pelagic surmonte cette limitation en recueillant les informations et les données les plus à jour et les plus complète, sur la biogéographie et l’utilisation de l’habitat des mammifères marins, des requins et des poissons.
Ce document synthétise en quelques pages le contexte et les objectifs du groupe, les méthodes et approches utilisées, les principales conclusions ainsi que l’impact pour la science, la société, la décision publique et privée.
Articulation CDB- IPBES – Giec
Souvent négligée dans les débats sur les leviers d’action pour le climat, la biodiversité doit pourtant être prise en compte selon trois axes essentiels pour que les actions pour le climat soient efficaces et ne s’accompagnent pas de conséquences négatives pour la biodiversité :
- Les impacts du changement climatique sur la biodiversité et les écosystèmes doivent être mieux compris, justifiant d’autant plus le besoin d’agir rapidement pour minimiser le changement et de repenser les actions de conservation in situ ;
- Les solutions apportées par la biodiversité pour l’atténuation et l’adaptation au changement climatique doivent être mieux connues et reconnues par les négociateurs comme les réponses les plus économiques, apportant de multiples bénéfices en termes de développement durable ;
- Les politiques et mesures pour le climat ne reposant pas sur la préservation de la biodiversité doivent faire l’objet d’une évaluation d’impact ex ante, pour s’assurer qu’elles ne sont pas contradictoires avec l’impératif de protection de la biodiversité.
Les travaux du Giec et de l’Ipbes contribuent ensemble à répondre à ces questions et fournissent aux décideurs des informations reposant sur les connaissances scientifiques existantes les plus solides à ce jour. Ils rendent évident que les changements climatiques et l’érosion de la biodiversité ne pourront être stoppés l’un sans l’autre.
Biodiversité et climat : un même combat international
Souvent négligée dans les débats sur les leviers d’action pour le climat, la biodiversité doit pourtant être prise en compte selon trois axes essentiels pour que les actions pour le climat soient efficaces et ne s’accompagnent pas de conséquences négatives pour la biodiversité :
- Les impacts du changement climatique sur la biodiversité et les écosystèmes doivent être mieux compris, justifiant d’autant plus le besoin d’agir rapidement pour minimiser le changement et de repenser les actions de conservation in situ ;
- Les solutions apportées par la biodiversité pour l’atténuation et l’adaptation au changement climatique doivent être mieux connues et reconnues par les négociateurs comme les réponses les plus économiques, apportant de multiples bénéfices en termes de développement durable ;
- Les politiques et mesures pour le climat ne reposant pas sur la préservation de la biodiversité doivent faire l’objet d’une évaluation d’impact ex ante, pour s’assurer qu’elles ne sont pas contradictoires avec l’impératif de protection de la biodiversité.
Les travaux du Giec et de l’Ipbes contribuent ensemble à répondre à ces questions et fournissent aux décideurs des informations reposant sur les connaissances scientifiques existantes les plus solides à ce jour. Ils rendent évident que les changements climatiques et l’érosion de la biodiversité ne pourront être stoppés l’un sans l’autre.
Rencontres sciences pour l’action 2017 : prospectives pour la biodiversité
Ces rencontres ont été organisées autour de quatre thèmes :
- Biodiversité et solidarité écologique
- Littoral et adaptation : solutions fondées sur la nature
- Valorisation et restauration de la biodiversité
- Biodiversité et politiques énergétiques : cas de la biomasse forestière
Chaque atelier, limités à une vingtaine de personnes par thème, a réuni des chercheurs, des responsables de politiques publiques et des acteurs locaux. Ils avaient pour objet de produire des recommandations pour soutenir la production et la diffusion de connaissances et améliorer la mise en œuvre de l’action publique en faveur de la biodiversité.
Téléchargez dans les ressources ci-dessous le programme, les recommandations et infographies issues des ateliers.
Rencontre avec les représentants des candidats à l’élection
Le bureau du Conseil d’orientation stratégique de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) a convié les représentants des candidats à l’élection présidentielle 2017 à présenter leur projet pour la biodiversité et à répondre aux questions de ses membres.
13h00 – Accueil
13h15 – Jean-François Silvain, président de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité et Daniel Baumgarten, président du Conseil d’orientation stratégique de la FRB
13h30 – Bertrand Pancher, député de la Meuse – François Fillon
14h00 – Yannick Jadot, député européen – Benoit Hamon
14h30- Arnaud Leroy, député des français établis hors de France – Emmanuel Macron
15h – Eric Coquerel, conseiller régional Ile de France – Jean-Luc Mélenchon
15h30 – Philippe Murer – président du Collectif nouvelle écologie – Marine Le Pen
16h00 – Conclusion Sandrine Bélier, directrice Humanité et Biodiversité
Consultez le compte-rendu de ces rencontres dans les ressources ci-dessous et visionner les interventions des représentants des candidats dans les vidéos ci-dessous.
[Ipbes 5] Jour après jour
Prolongations pour la cinquième session plénière de l’Ipbes
10 mars 2017
Un consensus ayant été trouvé sur le cadrage de l’évaluation de l’usage durable dans la nuit de jeudi à vendredi, les derniers sujets à traiter en groupes de contact avant la plénière du vendredi après-midi étaient la participation de l’Union européenne à l’IPBES, le travail avec les savoirs autochtones et locaux et les décisions concernant l’examen de la Plateforme (seuls les termes de référence avaient été examinés jusqu’alors). Ces points ont pu être finalisés rapidement dans la matinée, les discussions ayant presque abouti au cours de la semaine. Deux points qui n’avaient pas encore fait l’objet d’un examen en groupe de contact, à savoir les travaux de l’équipe spéciale sur connaissances et données, qui traite notamment des indicateurs et de la génération de nouvelles connaissances à partir des lacunes identifiées dans les évaluations IPBES, et une proposition de décision pour prendre note de l’évolution de certains termes du cadre conceptuel de l’IPBES, ont pu être abordées malgré le temps limité. L’expression « bénéfices de la nature pour l’Homme » (se référant aux services écosystémiques) sera remplacée par « contributions apportées par la nature aux populations » dans les futurs documents de la Plateforme. Ce changement de terminologie a été approuvé par le Groupe d’experts multidisciplinaire et reflète l’évolution de la pensée scientifique à l’IPBES, suite notamment aux travaux du groupe d’expert sur les différentes conceptualisations et valeurs de la nature.
Suite à des démissions au sein du Groupe d’experts multidisciplinaire (GEM), des membres remplaçants pour les régions Afrique, Europe orientale et Amérique latine et Caraïbes ont été élus pour un mandat d’un an avant le renouvellement de l’ensemble du GEM en 2018.

© Plusieurs membres de la délégation française en discussion à l’IPBES-5. Crédits : IISD/ENB | Sean Wu
En revanche, les discussions se sont prolongées sur la question du lancement des évaluations en suspens, liée à celle du budget et à celle du développement du deuxième programme de travail. L’opposition entre les pays de la région Europe occidentale et autres Etats (Etats-Unis, Nouvelle-Zélande…), contributeurs principaux au budget de l’IPBES, et les autres pays, au sujet du calendrier pour le lancement de l’évaluation de l’usage durable des espèces sauvages d’une part et des espèces exotiques envahissantes d’autre part aura pesé sur l’ensemble de la plénière jusqu’à la fin des négociations. Ces évaluations étant jugées prioritaires pour les pays du Sud, ils demandaient fortement qu’elles soient réalisées dès que possible, en leur allouant un budget en 2017 et en refusant qu’il y soit fait référence dans la décision relative au développement du 2ème programme de travail, ce qui indiquerait leur report de facto. Les pays du Nord quant à eux refusaient d’accéder à cette demande dans un souci d’équilibre budgétaire et des capacités humaines du Secrétariat de l’IPBES et de la communauté de recherche mondiale à se lancer dans de nouveaux travaux.
C’est un certain réalisme qui a prévalu in fine, lorsque la Plénière s’est clôturée, aux alentours de 23h. Un budget en équilibre a été adopté pour 2017, permettant seulement la continuation des travaux en cours. Un budget prévisionnel de 5 millions de dollars a été adopté pour 2018, ce qui est au-dessus du montant des contributions annoncées, mais en dessous de ce qui serait nécessaire pour lancer ne serait-ce que l’une des évaluations en suspens. Il permettra néanmoins au Secrétariat de fonctionner jusqu’à la prochaine plénière, au premier trimestre 2018. La question du lancement des évaluations en suspens y sera à nouveau abordée, au regard des ressources qui seront alors disponibles.
L’IPBES, ça claque !
9 mars 2017
La journée commence par le « bip » inévitable du portail de sécurité à l’entrée du centre de conférence, puis les talons des délégués sonnent dans les couloirs entre la salle de la plénière et celles des groupes de contact, le marteau du président retentit plus ou moins régulièrement en fonction de la complexité des débats, les kits pour l’interprétation glissent des chaises, les secrétaires de la réunion pianotent frénétiquement sur leurs claviers… ça claque à l’IPBES, et les nombreux bruits que l’on ne remarque pas témoignent de l’activité frénétique qui s’est emparée du Centre de conférence mondial de Bonn.
La troisième journée de la Plénière s’est entièrement déroulée en groupes de contact, avec une situation très exceptionnelle dans la soirée où trois groupes se sont réunis simultanément. Ce dispositif est très rarement utilisé étant donné que certains pays ne sont représentés que par un seul délégué, ce qui les empêche donc d’intervenir sur tous les sujets. Cependant, l’assemblée plénière seule peut entériner définitivement les décisions préparées en groupe de contact et elles seront donc toutes réexaminées vendredi après-midi avant adoption finale.
Le groupe présidé par Robert Watson s’est mis d’accord sur le processus et les modalités pour l’examen de l’efficacité des fonctions de la Plateforme, et a quasiment abouti à un consensus au sujet du développement du deuxième programme de travail (pour l’après 2018). Le groupe présidé par Ivar Baste, représentant de la région Europe occidentale et autres Etats au Bureau de l’IPBES, a poursuivi son examen du cadrage de l’évaluation de l’usage durable avant de lever la session en milieu de matinée. Il a été relayé par Fundisili Mketeni, représentant du Bureau pour la région Afrique, qui a présidé les discussions sur le renforcement des capacités.
© Les membres de l’IPBES réunis en plénière. Crédits : Photo by IISD/ENB | Sean Wu
Le groupe consacré au budget a rencontré celui étudiant la question des évaluations en suspens à l’heure du déjeuner pour essayer de trouver un accord sur le calendrier de la réalisation des évaluations.
L’après-midi, le groupe de contact sur le renforcement des capacités a pu finir ses travaux rapidement, et celui sur le catalogue d’outils et méthodes d’appui à l’élaboration des politiques lui a succédé, présidé de nouveau par Ivar Baste. Le deuxième groupe a fini la discussion sur le prochain programme de travail et repris celle sur les savoirs autochtones et locaux, présidé par Diego Balanza, membre du Bureau pour la région Amérique latine et Caraïbes.
A 17h30, la Plénière s’est rassemblée et le président de chaque groupe de contact a rendu compte des progrès accomplis. La plupart des points à l’ordre du jour ont été couverts et les groupes de contact correspondants ont atteint un accord. Cependant, les questions les plus épineuses du budget, du cadrage de l’évaluation de l’usage durable et des savoirs autochtones et locaux sont encore ouvertes, et à l’heure où nous écrivons ces lignes (près de minuit), deux d’entre eux sont encore en réunion…
La Plénière de l’IPBES se poursuit sous les auspices de la Journée de la Femme
8 mars 2017
La présidence européenne malto-slovaque a accueilli les délégués ce matin en réunion de coordination en célébrant la Journée internationale des femmes. Un petit clin d’œil également par Robert Watson en ouverture de la Plénière, et au cours de la réunion informelle organisée par la FRB et l’Université de Bonn pour la mobilisation des experts, des décideurs et des praticiens africains dans le cadre de l’IPBES avec un panel d’intervenant parfaitement équilibré.

Réunion informelle de la FRB et de l’Université de Bonn avec les délégations africaines – © Jean-François Silvain
La Plénière a fini de passer en revue les différents points à l’ordre du jour peu avant 18h00, accusant déjà un retard relativement important dans ses travaux. Le président a donc déjà convoqué des sessions tardives pour rattraper l’ordre du jour tel que prévu jeudi matin.
La Plénière a abordé la question des modalités et du calendrier de l’examen de l’efficacité de la Plateforme, et le point sur le catalogue d’outils et méthodes d’appui à l’élaboration des politiques qui doivent faire l’objet de discussions plus approfondies en groupe de contact, probablement jeudi matin. La Plénière a également examiné le document concernant la communication, l’engagement des parties prenantes et les partenariats stratégiques de l’IPBES.
La Plénière est invitée à adopter une approche pour travailler avec les savoirs traditionnels et locaux dans le cadre de l’IPBES, et un groupe de contact a commencé à se pencher sur la question dans la soirée. Les parties ont également commenté l’évolution de la terminologie employée dans le cadre conceptuel de l’IPBES, les « bénéfices de la nature pour l’Homme » ayant été renommés « contributions de la nature pour l’Homme ».
En parallèle, un autre groupe de contact a commencé à examiner le cadrage de l’évaluation de l’usage durable des espèces sauvages (titre révisé de l’évaluation anciennement dénommée « utilisation durable de la biodiversité »). La question du lancement de cette évaluation et des deux autres en suspens (sur les valeurs et sur les espèces exotiques envahissantes) est étroitement liée à celle du budget, et les groupes de contact sur ces deux points devront travailler en étroite consultation. Le groupe sur le budget s’est d’ailleurs réuni pour la première fois aujourd’hui, avec pour mission de trouver un seuil budgétaire viable pour mener à bien les travaux du premier programme de travail. Outre la question du budget, le président Robert Watson a mis en avant les contraintes en termes de ressources humaines nécessaires pour conduire efficacement les évaluations en suspens dès 2017, le Secrétariat tournant à plein régime avec six évaluations en cours, la communauté de chercheurs déjà fortement mobilisée pour la réalisation de ces mêmes évaluations et les décideurs n’ayant pas encore la capacité à relire et commenter les évaluations et résumés pour décideurs de manière satisfaisante. Il a appelé de ses vœux à ne pas sacrifier la qualité des produits de l’IPBES, ceux-ci étant le gage essentiel de sa crédibilité.
En ce qui concerne la gestion des connaissances et des données, la Plénière a demandé à examiner les travaux proposés pour 2017-2018 de plus près, dans le cadre d’un groupe de contact. A ce sujet, Future Earth a annoncé différentes actions menées en appui aux travaux de l’équipe spéciale, soutien qui a été formalisé par un Memorandum de coopération signé tout récemment entre l’IPBES et Future Earth.
Enfin, Robert Watson et Anne Larigauderie ont présenté les premières pistes pour l’organisation des deux prochaines plénières et le développement du deuxième programme de travail. Quelques observations ont été faites à ce sujet par les membres de la Plateforme, mais un groupe de contact prévu jeudi matin devra décider si ce point doit faire l’objet d’une décision à l’IPBES-5 ou non. La Colombie a offert d’accueillir la sixième session plénière de l’IPBES à Medellín sous les applaudissements.
Avant que les groupes de contact ne reprennent leurs travaux, la FRB a convié les pays d’Afrique francophone à une réunion pour faire le point sur les mesures prises pour la mise en place de structures nationales de coordination pour l’IPBES, suite à l’atelier organisé par la FRB en septembre 2016. Le Cameroun et le Maroc ont présenté leurs progrès en ce sens. L’Université de Bonn et ses partenaires en Ouganda et en Côte d’Ivoire ont quant à eux présenté un projet s’alignant sur des objectifs similaires et bénéficiant aux pays d’Afrique de l’ouest, avec un volet spécifique dédié à la formation.
Ouverture de la cinquième session plénière de l’IPBES
7 mars 2017
Plus de 600 représentants des Etats membres de l’IPBES et des organisations observatrices se trouvent à Bonn cette semaine pour la cinquième session plénière de l’IPBES.
Le Président de la Plateforme, Sir Robert Watson, a officiellement ouvert la session ce matin à 10h00. Les représentants officiels de l’Allemagne et de la ville de Bonn se sont exprimés en tant qu’hôtes de l’événement. Richard Kinley, vice-secrétaire exécutif de la Convention climat, et Guy Midgley, chercheur à l’Université de Stellenbosch, en Afrique du Sud, ont présenté les liens entre biodiversité et climat, soulignant notamment le rôle clé que peuvent jouer les écosystèmes aussi bien pour l’atténuation que pour l’adaptation au changement climatique. Le vice-secrétaire de la Convention climat a précisé que les premières révisions des contributions nationales attendues d’ici 2020 pourront s’appuyer aussi bien sur les travaux du Giec que sur ceux de l’IPBES, notamment l’évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques.

Vue du Rhin depuis le complexe des Nations unies à Bonn – © Agnès Hallosserie
Robert Watson s’est félicité de l’arrivée de deux nouveaux membres à l’IPBES, la Roumanie et l’Estonie, qui portent le nombre total d’Etats membres à 126.
Cette première journée, conduite entièrement en plénière, a d’ores et déjà abordé certains points clés à l’ordre du jour de l’IPBES-5, notamment la question de la participation de l’Union européenne qui pourrait bénéficier d’un statut amélioré d’observateur comme au Giec. Les discussions autour de cette proposition doivent continuer demain en petit groupe avec les représentants des régions des Nations unies et de l’Union européenne.
Le budget pour le programme de travail de l’IPBES a été présenté en détail par Anne Larigauderie, Secrétaire exécutive de l’IPBES. Selon des estimations optimistes mais réalistes, la Plateforme devrait encore lever 3,4 millions de dollars d’ici début 2019 pour finir les travaux lancés à ce jour. Les pays suivants ont annoncé leur intention de contribuer au budget pour 2017: Allemagne, Belgique, Canada, Chili, France, Japon, Pays-Bas, Norvège, Suisse et Royaume-Uni. Cela aura une incidence certaine sur la capacité de la Plateforme à lancer les trois évaluations restantes pour ce programme de travail, à savoir celles portant sur les valeurs et conceptualisations de la nature, les espèces exotiques envahissantes et l’usage durable des espèces sauvages. De plus, le Secrétariat de l’IPBES a soulevé le problème des ressources humaine nécessaires pour conduire ces évaluations restantes au cours des deux prochaines années, étant donné la charge de travail que les six évaluations en cours représentent déjà pour les communautés d’experts, les décideurs et le Secrétariat de l’IPBES. Le Secrétariat tend à recommander le report des évaluations restantes afin d’assurer des travaux de qualité.
Les autres enjeux majeurs de cette plénière sont :
- Les premières réflexions sur le développement du 2e programme de travail de l’IPBES
- L’approbation des termes de référence et de la marche à suivre pour conduire l’examen de l’efficacité de la Plateforme
- L’approbation de l’approche pour travailler avec les savoirs autochtones et locaux
- L’approbation du plan de travail de l’équipe connaissances et données pour 2017-2018
Ces points seront abordés en plénière mercredi matin, avant que les délégués ne se répartissent en groupes de contact pour examiner en détail le contenu des travaux proposés et préparer les décisions qui seront adoptées en fin de semaine.
Lundi, l’UICN organisait la Journée des parties prenantes de l’IPBES. Le Secrétariat de l’IPBES est intervenu auprès des parties prenantes pour envisager avec eux les différentes contributions qu’ils peuvent faire à l’IPBES, et comment en retour ils peuvent se saisir des résultats de la Plateforme. Le NeFo, partenaire de la FRB et du Centre hongrois pour la recherche en écologie, a annoncé l’ouverture des inscriptions à la 4ème consultation pan-européenne des parties prenantes de l’IPBES. Les parties prenantes ont ensuite réfléchi en groupe sur la manière dont les décideurs, publics et privés, peuvent utiliser les scénarios et modèles de biodiversité et sur les termes à utiliser pour refléter les différentes valeurs de la nature. Ils ont examiné les termes de référence pour l’examen de l’efficacité de la Plateforme et l’approche pour travailler avec les savoirs autochtones et locaux, qui seront également examinés par les Etats membres au cours de la Plénière.
Appel aux candidats à l’élection présidentielle de 2017 du Conseil d’orientation stratégique (Cos)
La biodiversité est au cœur du fonctionnement des sociétés humaines, mais son rôle dans la vie quotidienne des citoyens est trop souvent méconnu et nous percevons encore mal les conséquences des pertes de biodiversité mises en évidence par les chercheurs. Cette situation, qui a été celle de l’impact du changement climatique, il y a quelques dizaines d’années, conduit dans de nombreux cas à des décisions mal étayées scientifiquement qui auront, à court, moyen ou long termes des effets importants, souvent irréversibles sur la biodiversité et notre qualité de vie, du fait de l’altération des services écosystémiques utilisés par l’Homme.
- La biodiversité est à la base de notre alimentation. En quantité tout d’abord, notamment via la faune, la flore, les champignons et les micro-organismes des sols qui soutiennent les productions agricoles et permettent aux agrosystèmes d’être plus résilients face aux stress hydriques ou thermiques de plus en plus fréquents. En qualité ensuite, par le biais de la diversité génétique des plantes ou des animaux domestiques.
- La biodiversité a également un rôle important sur la santé humaine. Il est aujourd’hui démontré qu’il existe un lien entre le bien-être des individus et leur accès à un environnement « biodivers ».
- La biodiversité joue aussi un rôle majeur dans la régulation du climat. Les arbres, par exemple, captent le CO2 produit par les êtres vivants et les activités humaines, c’est aussi le cas du sol lorsque des pratiques durables sont mises en œuvre pour en préserver et enrichir la biodiversité. A l’inverse, la déforestation est un facteur aggravant du changement climatique.
- La biodiversité fait également partie des solutions aux grands défis environnementaux. Lutter contre la pollution aux particules fines en ville, renforcer la résilience des cultures face au changement climatique par la renaturation des agrosystèmes, découvrir de nouveaux antibiotiques ou de nouvelles molécules anticancéreuses, utiliser l’ingénierie écologique pour résoudre des problèmes de pollution sont autant de solutions issues de la biodiversité.
Par ailleurs, le respect de la biodiversité dans son fonctionnement, ses dynamiques, son évolution, au-delà des intérêts immédiats ou futurs des sociétés humaines, constitue un impératif pour l’Humanité et une préoccupation pour de nombreux citoyens.
Les entreprises, les ONG, les gestionnaires, les collectivités rassemblés au sein du Conseil d’orientation stratégique (COS) de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) appellent donc les candidats à l’élection présidentielle de 2017 à prendre en compte les enjeux associés à l’état et au devenir de la biodiversité dans leur programme. Ils les invitent à soutenir la recherche sur la biodiversité et à favoriser la diffusion des connaissances afin de trouver des solutions pour préserver et utiliser durablement la biodiversité.
Consultez l’appel dans les ressources ci-dessous.
Les solutions fondées sur la nature
Mise en avant par l’UICN depuis 2009, l’idée de « solutions fondées sur la nature » (SFN) invite à mieux s’appuyer sur des processus naturels, et pas seulement sur des moyens technologiques, pour répondre à des enjeux de société (changement climatique, santé et bien-être humains ou encore sécurité alimentaire). L’idée a été reprise par des instances de la politique de recherche à l’échelle européenne. La direction générale Recherche et Innovation de la Commission européenne a déjà lancé des appels à projets sur les Solutions fondées sur la nature. L’agenda stratégique de l’ERA-Net BiodivERsA comporte notamment un axe « biodiversité et Solutions fondées sur la sature ». Le conseil scientifique a mené des réflexions sur le potentiel de cette notion à inspirer de nouvelles recherches, ainsi que sur ses limites.
Réflexions et recommandations sur le projet de loi relatif à la biodiversité
Le Conseil scientifique (CS) de la FRB a été amené à plusieurs reprises à évoquer le projet de loi relatif à la biodiversité au cours du processus d’élaboration du texte. Il présente dans le présent avis des réflexions consolidées concernant spécifiquement les champs de compétences de la FRB.
Le CS identifie, à travers des recommandations ou des demandes de précisions, différents points (généraux ou particuliers) qui l’interrogent plus particulièrement. Ces points sont listés dans l’avis, disponible dans les ressources ci-dessous, et classés par titre du projet de loi.
La biodiversité dans le thème “Environnement” du 7e programme-cadre (2007-2010)
Au niveau européen, les projets de recherche sur la biodiversité peuvent être financés par une série d’outils, dont le septième programme-cadre pour la recherche et le développement technologique (7e PC) au sein duquel le thème « Environnement » est reconnu comme une source majeure de financement. En effet, la Commission européenne fournit un soutien financier important à une série de projets de recherche englobant plusieurs sous-activités, dont la biodiversité, dans le cadre de ce thème.
La biodiversité, un thème transversal, non identifié comme tel dans le thème « Environnement » du septième programme-cadre
Au sein du 7e PC, la biodiversité apparaît dans différentes sous-activités : « Pressions sur l’environnement et le climat », « Milieux marins », « Gestion durable des ressources », etc. mais il n’y a pas d’entrée unique et délimitée pour financer la recherche sur la biodiversité. Par conséquent, l’évaluation des résultats du financement du 7e PC pour la communauté de recherche sur la biodiversité et les problèmes associés sont complexes.
Pour surmonter cette difficulté, la FRB a réalisé l’étude – téléchargeable en anglais dans les ressources ci-dessous – sur la base des résultats des projets soumis au 7e PC. L’objectif principal de cette étude est d’évaluer l’importance de la biodiversité parmi le thème « Environnement » par rapport aux sous-activités identifiées. Les tendances temporelles des financements sont également évaluées pour la période 2007-2010, et les performances relatives des pays participants sont comparées.
Pertinence et faisabilité de dispositifs d’APA en Outre-mer
L’étude avait pour objectifs de :
- définir les modalités d’un ou de plusieurs régimes d’APA en outre-mer, en particulier en Guyane, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, territoires ayant fait l’objet d’études de cas.
- servir de base à une réflexion plus générale sur une législation sur l’APA au niveau national et alimenter les positions françaises dans le cadre des négociations internationales de la CDB.
- L’étude sur la pertinence et la faisabilité d’un dispositif d’APA répond au plan d’action outre-mer de la Stratégie Nationale pour la Biodiversité (SNB) de la France, qui prévoit d’une part une réflexion sur le sujet et une action sur la valorisation des savoirs locaux et pratiques traditionnelles liés aux ressources génétiques.
Retrouvez dans les ressources ci-dessous le rapport complet, le résumé (10 p.) ainsi qu’un document synthétique (4 p.).
Paroles d’acteurs
Biodiversité : paroles d’acteurs, rencontres avec le Conseil d’orientation stratégique (Cos) de la FRB.
Qui sont les membres du Conseil d’orientation stratégique de la FRB ? Quels sont leurs valeurs, leurs représentations, leurs ambitions ou encore leur mode d’action en matière de biodiversité ?
Téléchargeable dans les ressources ci-dessous, ce recueil de 45 rencontres pour permettre aux acteurs de la société civile de se découvrir et de créer du lien est aussi un éclairage unique sur la diversité des visions autour de la biodiversité. Un point de départ pour élaborer collectivement un vocabulaire commun, préalable indispensable à la structuration de réflexions et d’actions partagées.


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