[Programme Scénario #2] Scénarios territoriaux et trajectoires de transitions : préparer le terrain !

Pour contribuer à répondre à ces questions, la FRB a initié en 2022 le programme Scénario #2, intitulé « Comment vivre “bien“ en 2050 dans son territoire et quelles places pour la biodiversité, quels types de socio-écosystèmes, dans ce devenir ? ». 

 

Dans le cadre de ce programme et avec le concours du programme ÉRABLE (GIP EPAU) et du métaprogramme BIOSEFAIR (Inrae), la FRB organise un événement scientifique national sur le thème ” Scénarios territoriaux et trajectoires de transition : préparer le terrain ! “.

 

Cet événement s’appuiera sur des projets et sera constitué d’ateliers, de temps d’échange et de rencontres entre communautés intéressées. Il abordera les questions de transdisciplinarité, de prospective (en lien avec la prospective transition 2070 de l’Ademe), de potentiel transformateur des projets de recherche et permettra de travailler les trois piliers du programme : modélisation, mise en arts et carte cognitive. 

 

Les présentations des intervenants et intervenantes sont disponibles dans la partie ressources.

 

 

🎯 Cet événement a pour objectifs de :

 

  • faire circuler les savoirs, questionnements et expériences sur les scénarios de biodiversité ;
  • promouvoir la transdisciplinarité (ente disciplines et avec les acteurs) dans la recherche axée sur le développement de scénarios et de trajectoires de transition dans les territoires : partage d’expériences réussies et moins réussies, spécificités des travaux avec les acteurs, finalités des projets, etc. ;
  • faciliter les connexions, les rencontres, les collaborations entre chercheurs, chercheuses et actrices, acteurs s’appuyant sur les récits, les cartes cognitives, les modèles quantitatifs et/ou qualitatifs ;
  • informer sur le programme Scénario #2 ;
  • préciser les questions de recherche d’intérêt, bien positionner les futurs au centre des travaux et engager une recherche transformative via les interactions avec les acteurs.

 

Il s’adresse aux chercheuses, chercheurs, actrices et acteurs qui développent ou souhaitent développer, de manière transdisciplinaire, des scénarios de transition des socio-écosystèmes.

 

Outils d’exploration de futurs plausibles, les scénarios sont des vecteurs de prise de conscience, de connaissances, d’endossement des responsabilités sur des sujets complexes et difficiles à appréhender. Ils sont précieux pour développer des capacités d’anticipation, de décisions et d’organisation collective. Alors même que la notion de « consensus » peut être questionnée du fait de la diversité des parties prenantes, des valeurs et conceptions de monde, les scénarios peuvent aider à identifier une variété d’options (difficultés, risques, opportunités et forces), à construire des solutions et aussi à négocier des compromis.

Les oiseaux face à la pollution sonore en milieu urbain

Bonjour Michela. Tu as souhaité nous parler de la pollution sonore et de ses effets sur la biodiversité. Mais qu’entends-tu par “pollution sonore” et pourquoi est-il important de l’étudier ?

 

La pollution sonore désigne les bruits indésirables ou nuisibles générés par les activités humaines, telles que la circulation routière, aérienne, les chantiers ou encore les activités industrielles. Elle se caractérise généralement par des niveaux sonores dépassant 55 décibels. L’intensité du bruit est souvent liée à l’imperméabilisation des sols, et les effets de cette pollution peuvent s’étendre jusqu’à 2 km autour des axes routiers. Pour mieux comprendre l’ampleur de ce phénomène, il est possible de représenter spatialement la distribution de ces sources de bruit à travers des cartes détaillant les niveaux sonores à l’échelle nationale. En France, cette cartographie révèle qu’il ne reste que quelques zones véritablement silencieuses, principalement situées dans les massifs montagneux des Alpes et des Pyrénées. Selon l’Agence Européenne pour l’Environnement (AEE), en Europe, ces nuisances sonores toucheraient environ 125 millions de personnes, soit un Européen sur quatre, et constituerait un problème majeur de santé publique !

 

Le bruit n’a pas seulement des conséquences sur les humains ; il perturbe également la faune. Chez de nombreuses espèces animales, le son est crucial pour la détection des prédateurs, la communication ou la localisation des proies. Cependant, le bruit anthropique – généré par les activités humaines – tend à masquer les sons naturels, perturbant ainsi les comportements des animaux. De plus, ces bruits indiquent souvent la présence d’une source perturbante, ce qui pousse les animaux à fuir ces zones bruyantes. Bien que les impacts du bruit sur la faune sauvage soient activement étudiés par la communauté scientifique, ils restent souvent négligés lors de l’élaboration des politiques environnementales.

 

 

 

Dans le projet Acoucène, vous travaillez sur les effets de la pollution sonore sur les oiseaux, mais pourquoi s’intéresser aux oiseaux ?

 

Dans le cadre du projet FRB-Cesab Acoucène, nous nous intéressons au chant des oiseaux, car il joue un rôle central dans leur vie : il sert à rechercher des partenaires, à défendre leur territoire et à assurer la garde parentale. Les oiseaux dépendants donc fortement des sons, ils sont particulièrement sensibles à la pollution sonore. Cette dernière provoque chez eux un stress accru, perturbe leur communication, réduit leur taux de reproduction et leur survie. Sur le cours de plusieurs générations, la sélection naturelle dans des habitats bruyants peut même induire des modifications génétiques et des réponses adaptatives.

 

C’est pourquoi, étant des indicateurs clés de la biodiversité et très vulnérables au bruit, l’étude des oiseaux est cruciale, notamment pour la création d’une carte des réseaux de communication animale. Cartographier la présence de “barrières sonores” dans les habitats permettrait d’identifier et de localiser les zones riches en biodiversité, où la diversité sonore naturelle est préservée et peu affectée par les bruits anthropiques. Cette carte servirait à repérer la fragmentation acoustique dans le paysage ainsi que des zones jugées comme problématiques, c’est-à-dire des lieux où des mesures locales pourraient être mises en place pour limiter les nuisances de la pollution sonore.

 

 

 

 

D’accord, je comprends déjà mieux l’intérêt d’étudier l’impact de la pollution sonore sur les oiseaux ! Pourrais-tu nous en dire un peu plus sur les études que vous avez menées depuis le début du projet ?

 

Tout d’abord, nous avons analysé des enregistrements des chants en France de 117 espèces d’oiseaux sous différents aspects : la fréquence, la complexité, le rythme et la durée des chants. Ces caractéristiques acoustiques permettent de comprendre la diversité ainsi que la spécificité du chant de chaque espèce. Nous avons également intégré des données provenant de plusieurs sources d’observation citoyennes et scientifiques. Par exemple, le Suivi Temporel des Oiseaux Communs (STOC) nous offre des données sur l’abondance des espèces tandis que des atlas ornithologiques fournissent des informations sur leur présence ou absence en France. Enfin, nous avons utilisé la plateforme Xeno-Canto, un site collaboratif de partage d’enregistrements sonores d’animaux sauvages. Cela nous a permis de travailler sur une base impressionnante de 24 936 enregistrements : de quoi extraire où et quand les oiseaux chantent le plus souvent !

 

 

Ces données nous ont aidés à répondre à deux grands objectifs :

 

  • Le premier était de comprendre comment les communautés acoustiques varient en fonction de l’occupation des sols et du climat. Les résultats sont fascinants : les communautés d’oiseaux montrent des différences significatives dans leurs caractéristiques acoustiques selon leur environnement. Par exemple, en milieu urbain, nous avons trouvé que les chants tendent à être plus complexes, mais aussi plus courts et avec des fréquences moins élevées. Cela pourrait s’expliquer par une propagation sonore limitée, rendant ces chants moins adaptés à ces milieux.

 

  • Le second objectif visait à explorer la tolérance des espèces au bruit anthropique. Il existe des variations temporelles intéressantes entre espèces : certaines espèces, comme le moucherolle pie, chantent principalement au crépuscule, tandis que d’autres, comme la mésange charbonnière, vocalisent tout au long de la journée. Nous avons montré que de nombreuses espèces chantent jusqu’à 60 % du temps durant les heures de pointe humaines, ce qui reflète un risque plus élevé d’être masqué par la pollution sonore. Pour mesurer ce risque de masquage acoustique, nous avons simulé des mélanges de chants naturels avec du bruit ambiant, et il est vite devenu évident que certaines espèces deviennent difficilement reconnaissables dans ces conditions.

 

 

Ces résultats nous donnent non seulement une meilleure compréhension des impacts du bruit sur les oiseaux, mais aussi des pistes pour mieux protéger ces espèces face à un environnement de plus en plus bruyant en raison de l’expansion future des zones urbaines et de l’augmentation de la population humaine.

 

 

 

Comment ces résultats peuvent-ils être utilisés sur le terrain, par les acteurs dans les territoires ?

 

Nous avons réalisé une carte préliminaire montrant la vulnérabilité des oiseaux à la pollution sonore en France, en se basant sur le risque de masquage et le niveau de pollution sonore actuels. Cette carte permet d’identifier les zones présentant des vulnérabilités élevées au bruit, ainsi que les zones qui pourraient bénéficier de mesures de réduction.

Carte des risques posés par la pollution sonore sur le chant des oiseaux (cellules de 10 km2).

Les pixels en violet indiquent des zones avec un bruit élevé et un risque élevé pour les oiseaux, les pixels en bleu indiquent des zones avec un niveau de bruit faible à moyen mais une vulnérabilité élevée pour les oiseaux, les pixels en vert indiquent des zones avec un bruit élevé mais un risque faible pour les oiseaux, et les pixels en jaune indiquent des zones avec un niveau de bruit faible à moyen et un risque faible pour les oiseaux.

 

 

 

Tu parles de mesures de réduction du bruit, comment aller plus loin ?

 

Pour aller plus loin, il faudrait mener des enquêtes à plus petite échelle dans les zones identifiées comme particulièrement vulnérables. Ces études ciblées permettraient d’identifier et de localiser précisément les points noirs de bruits afin d’adopter des mesures efficaces pour en atténuer les effets.

 

 

Deux approches principales s’offriraient alors :

 

  • La première consisterait à réduire directement les sources de bruit dans ces environnements sensibles comme abaisser les limites de vitesse, installer des barrières acoustiques ou encore planter des arbres qui joueraient le rôle d’écrans naturels contre les nuisances sonores.

 

  • La seconde approche viserait à protéger et améliorer la continuité des habitats exempts de bruit pour permettre aux populations animales de mieux se déplacer et de s’adapter. En facilitant les connexions entre différents espaces naturels, on pourrait non seulement atténuer les effets négatifs du bruit sur certaines espèces, mais aussi renforcer leur résilience face à d’autres pressions environnementales.

 

 

Ces actions, qu’il s’agisse de réduire le bruit à la source ou de rendre les habitats plus accessibles, constitueraient des solutions concrètes et applicables pour mieux protéger les communautés sauvages dans des environnements de plus en plus bruyants.

 

 

 

Plus d’informations sur le groupe : 

 

 

En apprendre plus sur les impacts évolutifs des activités anthropiques :

[À vos agendas] Scénarios territoriaux et trajectoires de transition : rendez-vous le 4 février 2025

 

Pour contribuer à répondre à ces questions, la FRB a initié en 2022 le programme Scénario #2. Intitulé « Comment vivre “bien“ en 2050 dans son territoire et quelles places pour la biodiversité, quels types de socio-écosystèmes, dans ce devenir ? ».

 

Dans le cadre de ce programme et avec le concours du programme ÉRABLE (GIP EPAU) et du métaprogramme BIOSEFAIR (Inrae), la FRB organise un événement scientifique national sur le thème ” Scénarios territoriaux et trajectoires de transition : préparer le terrain ! “.

 

Cet événement est destiné à faire circuler les savoirs, questionnements et expériences sur les scénarios de biodiversité ; à faciliter le développement de réseaux collaboratifs.

Il s’adresse aux chercheuses, chercheurs, actrices et acteur qui développent ou souhaitent développer, de manière transdisciplinaire, des scénarios de transition des socio-écosystèmes.

Appuyé sur des projets, constitué d’ateliers, de temps d’échange et de rencontres entre communautés intéressées, cet événement abordera les questions de transdisciplinarité, de potentiel transformateur des projets de recherche et permettra de travailler les trois piliers du programme : modélisation, mise en arts et carte cognitive. 

 

Rendez-vous le 4 février 2025, à la fiap (Paris 14e) . 

Plus d’infos sur le programme scénario #2 

Plus d’informations sur l’événement et inscriptions à venir

Pour « vivre en harmonie avec la nature », intégrons au moins 20 % d’habitats natifs dans les paysages gérés

À travers les 23 cibles à atteindre, le cadre propose de s’appuyer sur un indicateur de l’état des écosystèmes : l’intégrité écologique qui a besoin d’élargir sa pertinence et de devenir opérationnel pour une meilleure appropriation par les États et parties prenantes. Un des enjeux autour de cette notion est de dépasser le postulat initial selon lequel cet indicateur ne s’appliquerait qu’aux écosystèmes naturels protégés en l’étendant aux écosystèmes gérés.

 

  • Dans une étude publiée en 2020, Garibaldi et al. préconisent que, pour aller vers de meilleures synergies entre utilisation et conservation de la nature, les habitats natifs doivent constituer au moins 20 % de la superficie des écosystèmes gérés, notamment agricoles. Cet objectif peut s’inscrire dans des objectifs nationaux comme la restauration des connectivités et l’augmentation de l’efficacité des réseaux d’aires protégées, notamment là où elles sont peu nombreuses. À travers le décryptage de cet article, présenté ici avec un focus sur la situation en France, la FRB propose une première approche invitant à questionner la notion d’intégrité pour les écosystèmes gérés. Un préambule à la parution d’un travail plus vaste mené sur la notion d’intégrité par la FRB et son Conseil scientifique, à découvrir à la rentrée !

 

Les messages-clés de la publication

 

  • Outre des avantages pour la sécurité alimentaire, atteindre un objectif minimal de 20 % d’habitats natifs dans les paysages gérés présente des avantages pour les services de régulations, les diverses contributions de la nature aux humains, la connectivité et l’efficacité des réseaux d’aires protégées.

 

  • La conservation et la restauration d’habitats natifs sont techniquement possibles sans perte de production, agricole notamment. Elles sont également complémentaires aux efforts visant à étendre et établir des zones protégées.

 

  • En France, plusieurs éléments peuvent contribuer très concrètement à atteindre l’objectif proposé des 20 % d’habitats natifs, parmi lesquels la plantation de haies.

 

  • La mise en place d’une stratégie de restauration et de conservation d’habitats natifs est tout à fait possible et fortement souhaitable. Elle nécessite néanmoins une coordination entre les gouvernements, les propriétaires, les gestionnaires fonciers, les entreprises et les organisations issues de la société civile. Le rôle des pouvoirs publics, par l’adoption de politiques et de législations pertinentes, est essentiel.

 

[Programme Scénario #2] Les lauréats de l’appel à projets 2023

 

La FRB a lancé le programme Scénario #2 pour ancrer la construction de ces scénarios avec la société et dans les territoires et accompagner la montée en compétence des communautés de recherche. Toutes et tous travaillent au sein de ce programme autour des questions : Comment vivre “bien” en 2050 dans son territoire et quelles places pour la biodiversité, quels types de socio-écosystèmes, dans ce devenir ?

 

 

Quatre projets lauréats pour explorer les devenirs contrastés de différents socio-écosystèmes

Le programme Scénario #2 soutient des projets de recherche qui permettent d’établir des scénarios territorialisés, utiles pour nourrir l’action vers des transitions écologique et sociétale. Quatre projets démarrent au deuxième semestre 2024 !

Estives

Porteurs de projet : Nicolas GAIDET, Cirad et Christophe COGNET, Parc national des Pyrénées

Le projet Estives propose aux acteurs territoriaux d’interroger leurs perceptions, leurs pratiques et les règles d’utilisation de l’espace et des ressources partagées de la montagne pyrénéenne.

 

In fine, il s’agira de co-construire des récits alternatifs sur lesquels fonder, pour les humains et les non-humains, de nouvelles manières d’habiter ensemble en mobilisant les solidarités sociales et écologiques. Le projet contribuera au renouvèlement de l’attention portée au vivant et à la construction sociale des enjeux de la biodiversité sur un territoire. Il abordera à la fois les évolutions possibles face aux changements climatiques et l’intérêt de réactualiser certaines règles, contractuelles ou réglementaires.

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Biodiv’Oc2050

Porteurs de projet : Gladys BARRAGAN-JASON, CNRS et Clélia SIRAMI, Inrae

 

Le projet Biodiv’Oc2050 adopte une approche participative pour travailler des scénarios ciblés permettant de comparer l’efficacité de divers leviers d’action pour atteindre l’objectif de zéro perte nette de biodiversité à horizon 2050 tout en préservant un territoire multifonctionnel. 

 

Via l’implication d’usagers des territoires, de décideurs, de scientifiques et d’artistes ce projet vise une approche intégrative de la protection de la biodiversité en Occitanie. La réflexion abordera les sujets de restauration des éléments semi-naturels (haies, arbres champêtres) et des dynamiques écologiques, climatiques, et socio-économiques dans une région soumise à de fortes contraintes.

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Nest(s)2050

Porteurs de projet : Colin FONTAINE, CNRS et Stanislas RIGAL, Inrae

 

Le projet Nest(s)2050 propose une évaluation qualitative et quantitative des scénarios nationaux de transition écologique “Transition(s) 2050” de l’ADEME au regard des enjeux de conservation de la biodiversité : la centralité accordée aux enjeux d’énergie et de climat y sera complétée d’une intégration quantitative des enjeux de biodiversité à l’horizon 2050. 

 

Ces projections seront réalisées avec une diversité d’acteurs (institutionnels, professionnels et associatifs) impliqués dans la transition écologique et une attention sera portée sur la diversité de leurs représentations, savoirs et valeurs associées aux dynamiques et enjeux liés au déclin de la biodiversité. Ces projections seront également testées à une échelle régionale en Île‐de‐France et en Provence‐Alpes‐Côte‐d’Azur.

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Râlesgenêts

Porteurs de projet : Cédric GAUCHEREL, Inrae et Tiphanie HERCÉ, LPO Anjou

 

Le projet Râlesgenêts s’intéresse aux basses vallées angevines et aux trajectoires possibles de l’évolution de son exceptionnel écosystème prairial inondable qui abrite une grande biodiversité et des espèces rares au niveau national, notamment le Râle des genêts qui y est présent lors de sa période de reproduction et dont la population ne cesse de décliner. 

 

En associant l’ensemble des acteurs locaux, usagers du site et/ou impliqués dans la protection du râle, le projet permettra de modéliser plusieurs trajectoires de l’ensemble de ce socio-écosystème et d’identifier des scénarios de gestion souhaitables pour la préservation, voire la restauration, de l’écosystème prairial, sans compromettre la dynamique socio-économique du territoire.

Consulter la page du projet

 

Un programme et des projets pour aller vers une appropriation partagée des enjeux biodiversité et explorer scientifiquement sa complexité

 

En étroite collaboration avec les acteurs territoriaux, les équipes de recherche, pluridisciplinaires, mobiliseront différents types de modélisation, les cartes cognitives et les mises en arts pour mener à bien les projets. Cette mise en relation de trois piliers constitue également un défi scientifique et méthodologique.

 

Pour appuyer la réflexion nationale sur les scénarios (processus d’élaboration, méthodes, usages, etc.), le partage d’expériences et la montée en compétences des chercheurs, le programme Scénario #2 développe des actions d’animation (ateliers, guide, etc.). Il doit aussi permettre aux acteurs territoriaux de renforcer leurs capacités en matière de prise de décision. 

 

Vous souhaitez être invité aux prochaines rencontres ?

Restez informé·es par ici ! 

 

Trajectoires d’utilisation des terres pour des transformations durables des territoires : Identifier les points de levier dans un hotspot mondial de biodiversité

Pour évaluer l’impact des différents usages des sols sur la biodiversité, les services écosystémiques et l’agriculture, les scientifiques comparent généralement divers types d’utilisation des sols. Cependant, ces comparaisons négligent souvent les conversions réalistes, nécessaires pour les politiques à long terme.

 

Dans cette étude, des chercheurs ont utilisé diverses méthodes pour analyser les trajectoires d’utilisation des terres à Madagascar, visant des équilibres entre biodiversité et activités humaines, comme l’agriculture. L’île de Madagascar a perdu 44 % de ses forêts entre 1953 et 2014, sans répondre aux besoins des populations rurales. L’urgence de transitions vers des systèmes fonciers durables est donc bien réelle.

 

L’agriculture de subsistance, notamment la culture itinérante, c’est à dire un système d’agriculture où de petites parcelles sont défrichées, brûlées et utilisées pendant une seule année, puis laissées en jachère pendant plusieurs années, reste la principale cause de déforestation dans le nord-est de l’île. Madagascar est également la plus importante zone de culture de la vanille au niveau mondial, constituant le moyen de subsistance d’environ 70 000 à 80 000 agriculteurs. L’agriculture du pays se traduit donc par une trajectoire d’utilisation des terres qui prend son origine dans les forêts anciennes et s’étend des fragments de forêt à la riziculture itinérante en colline et aux agroforêts de vanille. 

 

Dans ces paysages, les leviers potentiels pour transformer les systèmes fonciers se situent aux lisières de la déforestation, préservant d’anciennes forêts, et au sein de mosaïques paysagères. Ces dernières offrent une sécurité alimentaire accrue, des revenus plus élevés et une meilleure résistance aux chocs économiques et environnementaux.

 

 

Les messages-clés de la publication

 

Le compromis inévitable identifié dans cette publication est qu’aucune décision d’utilisation des terres ne peut maximiser simultanément tous les indicateurs, notamment les espèces, les services écosystémiques et la productivité.

 

Plusieurs points de levier sont identifiés pour orienter les décisions d’utilisation des terres :

  • Compenser les compromis entre la conservation des forêts anciennes et les rizicultures de subsistance, en reconnaissant l’importance de préserver les forêts anciennes pour la biodiversité ;
  • Conserver les fragments de forêt et privilégier l’agroforesterie dérivée de la forêt par rapport à la culture itinérante, en mettant en avant les avantages pour la biodiversité et les services écosystémiques ;
  • Exploiter les co-bénéfices de la conversion des jachères en agroforêts de vanille, en soulignant les avantages pour la biodiversité, les services écosystémiques et la productivité agricole.
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Recommandations politiques primordiales :

  • Protection des forêts anciennes : Il est essentiel de protéger strictement les forêts anciennes pour préserver la biodiversité et les services écosystémiques, tout en tenant compte des petits exploitants.
  • Favoriser l’agroforesterie de vanille dérivée de jachère : Encourager l’agroforesterie de vanille issue de jachères pour ses avantages en termes de services écosystémiques, de biodiversité et de productivité agricole.
  • Restrictions sur l’agroforesterie dérivée de la forêt : Limiter l’agroforesterie dérivée de la forêt à une alternative à la déforestation complète, sans contribuer à la dégradation des forêts anciennes.
  • Soutenir une agriculture de subsistance durable : Favoriser des pratiques agricoles durables pour les petits exploitants, y compris la culture itinérante avec de longues périodes de jachère, tout en fournissant un soutien aux ménages défavorisés pour établir des agroforêts de vanille et des rizières productives.

Conservation de la biodiversité dans les territoires : appréhender les dynamiques

Alors que les enjeux de biodiversité montent en puissance auprès des citoyens, des acteurs et des décideurs publics et privés, il est important de rappeler deux évidences.
D’abord la biodiversité n’est pas figée, elle est intrinsèquement dynamique : compositions, structures, fonctions évoluent dans le temps et l’espace – mais aussi au sens « darwinien » et elle croise les grands cycles d’énergie et de matière. Ensuite, nous, humains, coexistons avec cette biodiversité sur les territoires, à des échelles également multiples, territoires eux-mêmes changeants, façonnés par les processus démographiques, politiques, sociologiques, économiques, mais aussi écologiques.

 

Ainsi, tenir compte des dynamiques de biodiversité dans la gouvernance des territoires humains est un impératif et un défi de tous les instants pour engager des politiques et des pratiques de conservation ambitieuses. Cela ouvre la voie à un changement transformateur indispensable pour une réelle coexistence entre humains et non-humains.

 

Découvrez au travers de cette publication, les principales conclusions et pistes de recherche issues du Club recherche-action “Conservation de la biodiversité dans les territoires : comment appréhender les dynamiques ?” de la FRB. En croisant leurs visions et pratiques, décideurs, entrepreneurs, gestionnaires et chercheurs de ce groupe de travail se sont notamment intéressés à la naturalité, à la séquence « Éviter, réduire, compenser » et aux métriques de dynamiques de biodiversité ; ils ont échangé autour d’exemples de mise en œuvre dans différents types d’écosystèmes, et pour différents niveaux d’anthropisation.

[Programme Scénario #2] Scénarios territoriaux et trajectoires de transitions : quelles recherches transdisciplinaires ?

Face à cette diversité de territorialisations, aux interrogations associées et à la demande d’éclairages scientifiques, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et Future Earth (FE) organisent un atelier national de facilitation des collaborations sur le thème : « Scénarios et trajectoires de transitions : quelles recherches transdisciplinaires ? ». Cet atelier s’adresse à toutes et tous, chercheurs, chercheuses, acteurs et actrices, souhaitant développer de manière transdisciplinaire et collaborative des scénarios et des trajectoires de transition des socio-écosystèmes.

 

 

Cet atelier s’inscrit dans le programme Scénario porté par la FRB : « Comment vivre “bien“ en 2050 dans son territoire et quelles places pour la biodiversité, quels types de socio-écosystèmes, dans ce devenir ? ». Un appel à projets sera ouvert à la suite de cet atelier. Il soutiendra des recherches engageant les acteurs dans la conception de scénarios territorialisés et s’appuyant sur les récits, les cartes cognitives, les modèles quantitatifs et/ou qualitatifs.

 

 

S'inscrire

 

 

L’atelier a pour objectifs de :

 

  • promouvoir la transdisciplinarité (ente disciplines et avec les acteurs) dans la recherche axée sur le développement de scénarios et de trajectoires de transition dans les territoires : partage d’expériences réussies et moins réussies, spécificités des travaux avec les acteurs, finalités des projets, etc. ;
  • faciliter les connexions, les rencontres, les collaborations entre chercheurs et acteurs s’appuyant sur les récits, les cartes cognitives, les modèles quantitatifs et/ou qualitatifs ;
  • informer sur le programme Scénario et sur l’appel à projets de ce programme ;
  • préciser les questions de recherche d’intérêt, bien positionner les futurs au centre des travaux et engager une recherche transformative via les interactions avec les acteurs.

 

 

Toutes les informations sur l'atelier

 

 

Outils d’exploration de futurs plausibles, les scénarios sont des vecteurs de prise de conscience, de connaissances, d’endossement des responsabilités sur des sujets complexes et difficiles à appréhender. Ils sont précieux pour développer des capacités d’anticipation, de décisions et d’organisation collective. Alors même que la notion de « consensus » peut être questionnée du fait de la diversité des parties prenantes, des valeurs et conceptions de monde, les scénarios peuvent aider à identifier une variété d’options (difficultés, risques, opportunités et forces), à construire des solutions et aussi à négocier des compromis.

 

 

Les personnes intéressées par l’atelier et/ou l’appel à projets ont également la possibilité de déposer une courte note d’intention.

Recommandations des rencontres Sciences pour l’action sur les territoires ultramarins

Ces Rencontres visent à rassembler en ateliers différents acteurs (chercheurs, responsables de politiques publiques, acteurs de terrain, etc.) afin d’élaborer une série de recommandations grâce à une méthodologie basée sur la démarche prospective.

 

 

Pour cette édition, trois thèmes ont été identifiés :

  • le développement économique endogène respectueux de la biodiversité ;
  • les fonctionnalités du continuum terre-mer et l’aménagement du territoire ;
  • les liens Humain-Nature et la protection de la biodiversité.

 

 

Les recommandations issues de ces échanges devraient être publiées dans les mois à venir, à l’instar de celles issues des Rencontres de 2018 et 2017. Nous vous invitons à découvrir la vidéo d’ouverture de l’édition 2020.

Le développement de la cueillette de plantes sauvages sur le territoire français : conditions et enjeux de la durabilité

Bien que la cueillette de plantes sauvages remonte aux origines de l’humanité, il aura fallu attendre les années 2010 pour que le monde académique et de la conservation se penchent sur la question. En cause, une explosion de la demande en produits naturels, des désirs de retour à la nature et un marché du sauvage en pleine expansion. Cette pratique s’est fortement développée aussi bien dans les sociétés occidentales, pourtant davantage tournées vers les médicaments de synthèse, que dans certains pays du Sud où l’offre et l’usage de produits naturels sont importants. Le regard porté sur les plantes s’est transformé avec l’émergence des discours autour de la valeur économique de la biodiversité et plus généralement des valeurs attribuées à la nature. Cette dynamique est-elle compatible, au moins en France, avec le réservoir de plantes sauvages présent dans l’espace rural et le maintien de la biodiversité ?

Conserver la nature en Nouvelle-Calédonie : un enjeu complexe entre science et contexte socio-culturel

Quel est le lien spécifique qui existe entre les populations de Nouvelle-Calédonie et la nature ?

 

Pour répondre à cette question, il faut faire un petit détour par le langage. Il n’y a pas de terme pour dire « nature » dans les langues kanak. La dichotomie entre nature et culture n’existe pas. Il s’agit plutôt de liens qui unissent les éléments, humains et non humains. Il s’agit donc pour les hommes et les femmes d’entretenir tous ces liens, entre le requin et le lézard, l’homme et l’igname, la femme et le cocotier, et tout ce qui nous lie à la « terre-mer ». Quand on est kanak, la « terre » ou la « nature », s’étend de la montagne jusqu’au récif, voire au-delà. Cela inclut les vivants et les morts, le monde visible et invisible.

 

Le lien qui unit les populations de Nouvelle-Calédonie avec la nature est très fort, car tout est lien. Aussi, ce lien est entre autres entretenu par la connaissance commune des toponymes, c’est-à-dire des noms de lieux. Chaque toponyme renferme la mémoire du lien d’un clan à la terre et toute son histoire. Grâce à ces toponymes, le lien au territoire persiste à travers les générations.

 

 

N’y a-t-il qu’une seule perception de la nature ?

 

Sur l’archipel calédonien aujourd’hui très multiculturel et métissé, on ne peut pas dire qu’il n’y a qu’une seule perception de la nature. Ce que je peux observer, c’est que les premiers habitants d’ici, les Kanak qui constituent aujourd’hui un peu plus de 40 % de la population ont réussi à partager leur vision du monde, leurs liens forts à des éléments non-humains notamment. Même si cela n’est pas toujours évident pour tous, il y a une certaine reconnaissance de la diversité des savoirs et des représentations de la nature. Chaque communauté a apporté ces manières de voir et nombreuses sont les personnes qui se sont construites en intégrant un peu de cette diversité.

 

 

La gestion de l’environnement prend-elle en compte ces spécificités socio-culturelles de la Nouvelle-Calédonie ? 

 

Au début, dans de nombreux pays du monde, gérer l’environnement consistait à “mettre la nature sous cloche”. Aujourd’hui, on intègre de plus en plus à la fois les habitants, leurs valeurs et leurs pratiques. En Nouvelle-Calédonie, les trois provinces possèdent chacune leur propre code de l’environnement. Celui de la province des îles Loyauté, habitées par une grande majorité de Kanak, a été rédigé il y a seulement trois ans. En amont, des travaux de recherche en sciences de la nature et en sciences sociales ont été menés afin de prendre en compte les enjeux écologiques ainsi que les spécificités des populations et du territoire. Pour vous donner un exemple, avec des collègues écologues, ethnologues et géographes, j’ai mené un travail sur les roussettes, de grandes chauves-souris, qui sont considérées comme des ancêtres dans certains clans et sont globalement très importantes d’un point de vue culturel. Notre travail a été fait pour que puissent être rédigées des réglementations qui s’appuient sur la vision des habitants, sur les pratiques préexistantes et sur les enjeux écologiques. Les règles sont pensées non pas pour protéger une biodiversité seule mais bien la biodiversité et la société. Par ailleurs, dans les codes de la province Sud et de la province Nord rédigés depuis plus longtemps, il est prévu que des dérogations soient possibles pour le prélèvement d’espèces comme la tortue verte à des fins coutumières (pour des mariages, des deuils, des intronisations de chefferies, etc.).

 

 

Existe-t-il une volonté d’intégrer les décideurs locaux dans la gestion des sites naturels ? 

 

Il y a un certain effort d’intégration des décideurs et des acteurs locaux. Pour donner un exemple, six sites de Nouvelle-Calédonie sont inscrits au Patrimoine mondial de l’Unesco. Les comités de gestion de chaque site sont généralement composés de représentants locaux (associations locales, coutumiers, femmes et hommes de l‘endroit). On considère volontiers que les acteurs locaux ont un rôle à jouer, mais selon les lieux, ils sont plus ou moins impliqués et écoutés. Il reste du travail à mener pour réellement prendre en compte leur parole et leurs visions.

 

 

Comment concilier les enjeux liés au contexte socio-culturel et les enjeux écologiques ?

 

Je vais utiliser un exemple pour vous répondre. Depuis quelques années, nous menons un projet appelé Espam sur le milieu marin, financé par la Fondation de France et la province des Iles Loyauté. L’objectif a été de travailler sur la diversité des valeurs que les habitants accordent aux territoires marins, en particulier aux animaux marins. L’idée est que si on connaît mieux les valeurs que les gens accordent aux espèces, et donc au territoire, et que l’on parvient à les faire reconnaître par le plus grand nombre, il sera possible de créer des politiques environnementales qui intègrent tant les enjeux écologiques que les enjeux culturels et sociaux. Elles seront ainsi plus ajustées et mieux comprises par tous.

 

Dans le cadre de ce programme, en plus de mener des entretiens longs avec les Calédoniens (de plus de 4 heures parfois), nous avons déployé un questionnaire très court contenant deux questions : “Quels sont les animaux marins emblématiques pour vous ?” et “Pourquoi ?”. Plus de 130 espèces différentes ont été citées, ce qui illustre nombre conséquent d’espèces importantes pour les populations locales. Nous avons créé une base de données nourrie de ces réponses sur les espèces et les valeurs que leurs accordent les habitants. 201 raisons différentes ont été données que nous avons classées en 22 grands thèmes. En Nouvelle-Calédonie, la fonction nourricière accordée aux animaux marins a été très largement citée, puis leur importance coutumière et leur statut d’espèce menacée ou à protéger. Ces résultats ont montré que les valeurs socio-culturelles sont prégnantes. Nous devons donc en tirer des leçons, cesser de tout vouloir traduire en valeur monétaire et créer des indicateurs multiples agrégeant des indicateurs sociaux, économiques et culturels. Trouver les outils à ces fins reste encore un défi mais nous pensons que ce projet apporte sa petite pierre à la réflexion.

 

 

Un des prochains enjeux soulevés par l’Ipbes est d’atteindre un changement transformateur. L’évaluation des valeurs associées à la nature, qui devrait sortir cet été, peut-elle être une des voies pour cela ?

 

 

 QU’EST-CE QU’UN CHANGEMENT TRANSFORMATEUR ?

 

Il s’agit d’une proposition de l’Ipbes qui résulte d’une analyse des causes de déclin de la biodiversité et des échecs politiques de sa préservation ces dernières décennies. Un changement transformateur est défini comme une réorganisation fondamentale et systémique des facteurs économiques, sociaux, technologiques, y compris les paradigmes, les objectifs et les valeurs.

 

>> En 2021, la FRB a consacré sa Journée annuelle à débattre de cette notion. + d’infos

 

 

L’idée sous-jacente est qu’il est possible de faire évoluer les valeurs qu’on porte aux choses et notamment à la nature. Il ne s’agit pas de faire converger les différentes valeurs, mais bien de faire valoir leur diversité. Celles-ci ont toujours évolué et on se rend plus compte aujourd’hui de l’existence de différentes manières de penser les choses. Notre mobilité entre les continents, entre les îles, s‘est accélérée et étendue, ce qui conduit aujourd’hui à avoir des territoires habités par une grande diversité de populations ; et chacune établit un lien spécifique avec la terre qu’elle habite. Le système des valeurs caractérisant un territoire devient plus complexe et plus riche. Selon moi, on peut profiter de cette richesse et de cette complexité afin d’analyser la diversité des valeurs, et ce qui conduit chacun à faire évoluer son système de valeurs, notamment pour renforcer ces liens avec les éléments de la nature. J’aime penser que notre objectif n’est pas de protéger l’environnement ou la société, mais bien l’ensemble : les liens humains-natures, les liens entre les humains et les non-humains. Si on arrive à identifier ces changements transformateurs et les manières institutionnelles, collectives et individuelles de les favoriser, on pourra alors renouveler un lien sain entre la biodiversité et la société. Pour préserver cet ensemble, il faut les penser ensemble. La vision kanak du monde, marqués par les liens, peut nous aider. L’attention portée à maintenir ces liens dans le présent doit guider nos actions.

Aménagement urbain et évaluation des services écosystémiques en Île-de-France : le projet Idefese

L’approche par services écosystémiques peut se révéler très intéressante pour la prise en compte de la biodiversité dans les évaluations socio-environnementales et dans les documents d’aménagement, en ce qu’elle peut être plus facilement appropriable par des acteurs peu sensibilisés aux enjeux de préservation de la biodiversité et des écosystèmes. Disposer d’indicateurs de services écosystémiques à l’échelle des territoires permettrait d’améliorer l’évaluation des décisions d’aménagement, en particulier si ces indicateurs sont cartographiés sur le territoire à des échelles fines (ex. échelle communale ou départementale par exemple).

 

C’est l’objet du projet Idefese conduit entre 2018 et 2020 dans la région Île-de-France (cas d’étude pilote), qui vise à proposer aux acteurs de l’aménagement urbain (services déconcentrés de l’État, de collectivités locales ainsi que des aménageurs, associations, bureaux d’étude, etc.) des méthodes d’évaluation pour une meilleur intégration des services écosystémiques dans leurs politiques publiques d’aménagement.

Réintroduction d’espèces sauvages et bénéfices pour les territoires : l’exemple de la réintroduction des vautours fauves dans les parcs naturels régionaux du Vercors et des Baronnies provençales

L’érosion de la biodiversité est dans certains territoires un enjeu majeur en raison de la disparition d’espèces de faune sauvage remplissant des fonctions écologiques clés. Diverses solutions peuvent être envisagées pour enrayer cette érosion et restaurer les fonctions écologiques des écosystèmes. Parmi ces solutions, les réintroductions et les renforcements de populations d’espèces de faune sauvage peuvent s’avérer particulièrement pertinentes. Longtemps perçues comme des actions ayant pour unique objectif l’amélioration de l’état de conservation de certaines espèces, elles peuvent avoir bien d’autres avantages pour les territoires.

 

En France, les premières actions de réintroductions et de renforcements de populations d’espèces de faune sauvage ont été mises en place durant le 20e siècle afin de reconstituer des populations d’espèces disparues ou pour renforcer celles en mauvais état de conservation. Les premières réintroductions de bouquetins dans les Alpes datent par exemple de 1910. Depuis, castors, tortues cistude, ours bruns ou encore différentes espèces de vautours ont été concernés par ces programmes. Les vautours fauves, par exemple, ont subi une période d’intenses pressions qui a conduit à leur disparition du sol français à la fin du 19e siècle. Dans les années 1970, dans le Massif Central, puis dès 1996 dans les Alpes, les premiers succès écologiques de réintroduction de ces oiseaux sont intervenus dans des paysages écologiques marqués par l’exode rural, la déprise agricole1, le retour de la forêt, la multiplication des grands herbivores et le retour des grands prédateurs.

 

Dans le cadre de l’Évaluation française des écosystèmes et services écosystémiques (Efese), qui vise à développer les outils d’évaluation nécessaires pour accompagner la transition écologique de la société française, l’amélioration des relations entre les populations et la faune sauvage au sein des territoires représente en enjeu crucial pour la transition écologique. Ainsi, en avril 2021, une étude2 de l’Efese s’est intéressée aux fonctions écologiques et services écosystémiques liés à la réintroduction des vautours fauves3 dans les parcs naturels régionaux (PNR) du Vercors et des Baronnies provençales. Cette étude propose en particulier une méthode d’évaluation destinée à aider les gestionnaires d’espaces naturels à identifier des pistes et des leviers d’action pour préserver la biodiversité en passant par la mise en valeur écologique, économique, sociale et culturelle des espèces. Pour ce faire, la méthode d’évaluation utilisée dans l’étude s’appuie sur un retour d’expérience de près de 25 ans du projet de réintroduction du vautour fauve dans ces deux parcs naturels régionaux.

 

Cet article présente les principaux résultats de l’étude Efese. Les différentes analyses ont été réalisées à partir de données récoltées dans la zone d’étude “Baronnies-Vercors”, soit une centaine de communes principalement de la Drôme, des Hautes-Alpes et de l’Isère. Cet ensemble forme un territoire de moyenne montagne (entre 234 m et 2 341 m d’altitude) d’environ 2 500 km2, dont la population de vautours fauves est estimée à 1 000 individus en vol en 2018.

 

1/ Bref aperçu de l’écologie du vautour fauve

 

En métropole, quatre espèces de vautours cohabitent : le vautour fauve (Gyps fulvus), le vautour moine (Aegypius monachus), le vautour percnoptère (Neophron percnopterus) et le gypaète barbu (Gypaetus barbatus). Les quatre espèces de vautour sont spécialisées dans la consommation de cadavres d’animaux qu’ils soient sauvages ou issus de bétail d’élevage. Ils constituent à eux quatre une guilde de rapaces nécrophages et se nourrissent uniquement d’animaux morts. Chaque espèce est spécialisée dans la consommation d’une partie bien particulière du cadavre.

Le vautour fauve se nourrit des muscles et viscères, le moine consomme les tendons, cartilages et peaux, le gypaète quasi-exclusivement les os et enfin, le percnoptère grappille les restes. Lors d’une “curée” (terme désignant le moment où les vautours se nourrissent d’un cadavre), des dizaines de vautours fauves éliminent en quelques minutes un cadavre de brebis et en quelques heures celui d’une vache. Un vautour fauve adulte consomme en moyenne 200 kg de cadavres par an.

 

Source : Rapport Efese sur la réintroduction des vautours dans les parcs naturels régionaux du Vercors et des Baronnies provençales, p.38.

 

Changement d’usage des terres et des mers

Les modes de production et de consommation pour répondre à cette demande entraînent des changements d’utilisation des terres et des mers, c’est à dire des changements d’occupation et d’utilisation des sols et des ressources, liés aux activités humaines. Le changement d’usage des terres est reconnu comme la cause première d’érosion de la biodiversité sur la planète.

 

 

[Publication] Denis Couvet propose son Regard sur l’écologie urbaine

Dans le cadre des Regards publiés par la Société Française d’Ecologie et d’Evolution (SFE2), Denis Couvet, président de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), s’est intéressé à l’écologie urbaine et identifie trois approches écologiques de la ville. 

 

Ce Regard est une version légèrement modifiée, adaptée d’un chapitre (postface) de l’auteur concluant l’ouvrage collectif Quand l’écologie s’urbanise, sous la direction de Joëlle Salomon Cavin et Céline Granjou, à paraître prochainement aux Editions UGA.

 

 

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Formes urbaines et biodiversité, un état des connaissances

Face à l’extension de l’urbanisation à l’échelle planétaire, les chercheurs sont de plus en plus nombreux à considérer que les villes doivent contribuer à la conservation de la biodiversité. Les espaces urbains peuvent en effet constituer des habitats favorables à la faune et la flore. Alors qu’en écologie, la ville est souvent considérée suivant un gradient d’urbanisation, allant du rural à l’urbain, d’autres critères peuvent la caractériser : sa complexité, une grande diversité spatiale, architecturale, etc.

 

 

En 2020, à travers la réalisation d’une revue systématique, un état des connaissances scientifiques sur les liens entre formes urbaines et biodiversité a été conduit par la FRB pour le Puca, avec l’appui scientifique du MNHN. Il apparaît aujourd’hui essentiel que les chercheurs s’intéressent à un niveau plus fin d’analyse, impliquant les différentes formes de l’urbain, et évaluent comment ces morphologies urbaines permettent l’installation spontanée et le maintien d’espèces animales et végétales.

 

 

La publication Formes urbaines et biodiversité, un état des connaissances est disponible dans les ressources téléchargeables.

[Sciences pour l’action] Les rencontres prospectives sont dédiées cette année aux territoires ultramarins

Organisées en visioconférence par la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), en partenariat avec l’Office français de la biodiversité (OFB) et le ministère de la Transition écologique, ces Rencontres visent à rassembler en ateliers différents acteurs (chercheurs, responsables de politiques publiques, acteurs de terrain, etc.) afin d’élaborer une série de recommandations grâce à une méthodologie basée sur la démarche prospective.

 

 

Pour cette édition, trois thèmes ont été identifiés :

  • le développement économique endogène respectueux de la biodiversité ;
  • les fonctionnalités du continuum terre-mer et l’aménagement du territoire ;
  • les liens Humain-Nature et la protection de la biodiversité.

 

 

Les recommandations issues de ces échanges devraient être publiées dans les mois à venir, à l’instar de celles issues des Rencontres de 2018 et 2017. Nous vous invitons à découvrir la vidéo d’ouverture de l’édition 2020.

 

 

Consulter les recommandations des rencontres précédentes :

  • Rencontres 2018 : santé et biodiversité ; culture et biodiversité ; sols et questions foncières ;
  • Rencontres 2017 : biodiversité et solidarité écologique ; littoral et adaptation : solutions fondées sur la nature ; valorisation et restauration de la biodiversité et biodiversité et politiques énergétiques : cas de la biomasse forestière.

Rencontres sciences pour l’action 2020 : les territoires ultramarins

Ces Rencontres visent à rassembler en ateliers différents acteurs (chercheurs, responsables de politiques publiques, acteurs de terrain, etc.) afin d’élaborer une série de recommandations grâce à une méthodologie basée sur la démarche prospective.

 

 

Pour cette édition, trois thèmes ont été identifiés :

  • le développement économique endogène respectueux de la biodiversité ;
  • les fonctionnalités du continuum terre-mer et l’aménagement du territoire ;
  • les liens Humain-Nature et la protection de la biodiversité.

 

 

Les recommandations issues de ces échanges devraient être publiées dans les mois à venir, à l’instar de celles issues des Rencontres de 2018 et 2017. Nous vous invitons à découvrir la vidéo d’ouverture de l’édition 2020.

#ScienceDurable – Réchauffement climatique : une situation d’urgence pour les céréales africaines

Le réchauffement climatique impacte les productions agricoles en Afrique de l’Ouest… depuis déjà une vingtaine d’années ! Si de nombreux travaux prévoyaient une baisse des rendements agricoles de 10 à 15 % en 2050 dans ces régions du fait de l’élévation des températures, aucune ne s’intéressait jusqu’alors à la situation actuelle. Deux climatologues de l’UMR Espace-Dev, Benjamin Sultan et Dimitri Defrance, viennent de publier une étude sur ce sujet en collaboration avec un laboratoire japonais, spécialisé dans les simulations environnementales.

 

 

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[Synthèse] Un meilleur réseau routier amazonien pour les habitants et l’environnement

Dans une étude publiée dans la revue PNAS en mars 2020, une équipe de chercheurs a analysé les impacts environnementaux, sociaux et économiques de 75 projets routiers en Amazonie totalisant 12 000 kilomètres de routes. Le premier constat est que tous les projets, bien que dans des proportions différentes, auront un impact négatif sur l’environnement. De plus, 45 % d’entre eux entraîneront également des pertes économiques, sans même compter les externalités sociales et environnementales. Cette étude montre néanmoins qu’un ensemble plus restreint de projets pourraient apporter 77 % des avantages économiques attendus pour seulement 10 % des dommages environnementaux et sociaux.

 

En savoir plus

Un meilleur réseau routier amazonien pour les habitants et l’environnement

Cette étude analyse les impacts environnementaux, sociaux et économiques de 75 projets routiers totalisant 12 000 kilomètres de routes. Le premier constat est que tous les projets, bien que dans des proportions différentes, auront un impact négatif sur l’environnement. 45 % d’entre eux entraîneront également des pertes économiques, sans même compter les externalités sociales et environnementales.

 

Annuler les projets économiquement injustifiés permettrait d’éviter 1,1 million d’hectares de déforestation et d’économiser 7,6 milliards de dollars US de fonds gaspillés pour le développement des projets. Pour le reste des projets qui dépassent le seuil de viabilité économique, les auteurs identifient ceux qui sont comparativement meilleurs non seulement en termes de rendement économique, mais également en termes d’impacts environnementaux. Ils mettent en évidence qu’un ensemble plus restreint de projets pourraient apporter 77 % des avantages économiques attendus pour seulement 10 % des dommages environnementaux et sociaux. Ils démontrent ainsi qu’il est possible de prendre des décisions d’arbitrage efficaces, éclairées par des priorités nationales légitimes.

 

 

La synthèse est disponible dans les ressources téléchargeables.

 

La Fondation pour la recherche sur la biodiversité gère l’animation et la communication du réseau IENE, un think-tank européen spécialiste des questions « Infrastructures et biodiversité ». Dans ce cadre, la FRB communiquera régulièrement sur des travaux scientifiques liés à ces enjeux.

[#ScienceDurable] En octobre, la campagne s’intéresse à la thématique “urbanisme, infrastructures et biodiversité”

Au travers de la campagne « La science pour un monde durable », découvrez ces pistes, nombreuses, sérieuses et passionnantes, sur lesquelles travaillent les chercheurs français en lien avec les recommandations proposées par l’Ipbes afin d’atteindre les objectifs du développement durable (ODD) des Nations Unies et de nourrir les réflexions en vue de la définition du cadre d’action post 2020 de la Convention sur la diversité biologique (CDB).

 

Chaque mois, la FRB, ses instituts membres fondateurs et l’alliance AllEnvi mettent en avant les solutions de la recherche pour enrayer le déclin de la biodiversité. Suivez-nous sur nos réseaux sociaux et notre page dédiée. Ce mois-ci, la thématique abordée est “urbanisme, infrastructures et biodiversité”.

 

Découvrez les articles de la semaine :

#ScienceDurable – Urbanisme : pourquoi nous devons passer du concept de ville à celui d’écosystème urbain

L’approche biodiversitaire

 

Philippe Clergeau, chercheur au Muséum national d’histoires naturelles de Paris et spécialiste de la nature en ville constate « Les politiques de verdissement des villes sont évidemment une bonne chose, à la fois pour la qualité du cadre de vie et pour la reconnexion des citadins avec la nature. Néanmoins, on remarque que ce sont trop souvent les mêmes espèces qu’on emploie en milieu urbain au risque de les voir un jour disparaître. » Ainsi les platanes alignés dans de nombreuses villes françaises pour leur résistance à la pollution ou la sécheresse se retrouvent aujourd’hui menacés par la maladie du Chancre et risquent de connaître le même destin que l’Orme dans les années 60, décimé par un champignon pathogène. « Le problème n’est pas l’espèce en tant que telle, souligne Philippe Clergeau, mais le fait que ce soit une monoculture. » À l’approche monospécifique, le scientifique répond par l’approche « biodiversitaire ». « Si les grandes pelouses, les alignements de platanes ou les toitures de sedum constituent autant de monocultures qui pourront se révéler fragiles face aux aléas climatiques ou sanitaires, à l’inverse, la diversité d’espèces ayant des relations entre elles s’avère bien plus résistante ; elle apporte une certaine stabilité aux chaînes alimentaires, aux paysages urbains. Une ou des espèces peuvent disparaître sans que toute la plantation soit détruite. » S’inspirer du fonctionnement de la nature et de sa complexité fait donc partie des pistes pour rendre les villes plus durables.

 

 

Le biomimétisme source d’inspiration pour les architectes

 

D’ores et déjà dans le monde de l’architecture, les praticiens dissèquent le fonctionnement des habitats ou des plantes pour bâtir leurs immeubles. À Harare, capitale du Zimbabwe, l’architecte Mike Pearce s’est inspiré des termitières pour construire un centre d’affaire sans air conditionné : en y laissant l’air circuler par une multitude de petits trous, il a permis à la température du bâtiment de se réguler d’elle-même sans jamais dépasser les 27°. D’autres bâtisseurs, tels que les frères Vernoux, respectivement architecte et biologiste, créent des bâtiments vertueux inspirés de la phyllotaxie, comprenez la façon dont les végétaux disposent et arrangent leurs feuilles pour favoriser au mieux la récupération de la lumière. Aujourd’hui, leurs bâtiments construits en forme de spirale gagnent en énergie.

 

Mais le scientifique Philippe Clergeau invite à aller plus loin. « Ce biomimétisme appliqué aux objets ou aux bâtiments, doit pouvoir s’appliquer à l’urbanisme. » L’idée centrale est, à l’image des écosystèmes, de privilégier un fonctionnement circulaire qui permet à la fois l’auto-entretient et le maintien des espèces. « Si on a une platebande de fleurs par exemple, il va falloir l’entretenir, biner, sarcler, arroser régulièrement pour la maintenir en bon état. L’approche « biodiversitaire » va en revanche nous permettre d’éviter cela. L’idée est de reconstituer un petit écosystème : en utilisant des couvres sols, on va conserver plus d’humidité dans le sol, limiter les espèces envahissantes et la faune qui va s’y développer permettra de reconstituer une litière. La gestion en sera d’autant plus réduite ». Le scientifique appelle à ouvrir les lentilles de nos jumelles et à penser cette bio inspiration à l’échelle de la ville.

 

 

Penser la ville comme un écosystème

 

Dès à présent des projets urbains tendent à s’approcher de ce principe d’ « urbanisme écosystémique ». Ainsi aux États-Unis, à Portland, un plan d’urbanisme prenant en compte l’écosystème a-t-il été pensé pour le quartier de Lloyd. L’idée de départ était de se rapprocher du fonctionnement de l’écosystème préexistant: une forêt de conifères. Des mesures ont été prises pour établir une base théorique représentant le profil écologique du site avant la présence humaine. L’objectif était de réaménager le quartier, inverser les impacts environnementaux négatifs et redonner certaines fonctionnalités écologiques au lieu.

Avant la présence humaine, 90 % de la forêt était composée d’un couvert arboré abritant de très nombreuses espèces. Le plan d’urbanisme a prévu d’augmenter le couvert forestier indigène de 30 %, de planter des végétaux diversifiés à la fois dans les sols et sur les murs des façades, de créer 8000 mètres carré de « parcelles » de forêt de conifères et de fournir un habitat aquatique grâce à la collecte des eaux pluviales. La collecte des eaux de pluie a aussi été étudiée pour répondre à 100 % de la demande en eau potable. Le plan envisageait d’utiliser les bâtiments, paysages et systèmes techniques pour imiter la récupération d’eau de la forêt tout en permettant une multiplication par cinq de la densité urbaine. Enfin, l’énergie solaire et les cycles du carbone ont été pris en compte pour s’approcher des conditions d’utilisation de l’énergie solaire par la forêt et réduire les émissions de carbone aux niveaux d’avant le développement. Le quartier ainsi conçu n’était alors plus pensé comme une ville, mais plutôt comme un écosystème urbain dans lequel devait se déployer un système social et économique. 

 

En dépit de leur théorisation, ces types d’approches demeurent encore à l’état de projet et trop souvent la biodiversité n’est pas un des axes majeurs de la réflexion : « On reste beaucoup sur les flux et le métabolisme. Le vivant est encore peu pris en compte, déplore Philippe Clergeau. » Bien que les scientifiques soient au début des recherches d’opérationnalité, les connaissances pour s’engager dans ce type de projets sont bien réelles. « La plupart des municipalités l’ont bien compris, les trames vertes et bleues ne sont pas toujours une science exacte permettant aux musaraignes ou hérissons d’arriver en centre-ville, mais elles font partie d’un ensemble de projets qui tendent doucement mais sûrement à créer une nouvelle forme de milieu urbain résilient et évolutif. »

 

 

POUR EN SAVOIR PLUS

 

Clergeau P. (coord.) (2020) Urbanisme et biodiversité, vers un paysage vivant structurant le projet urbain. Apogée ed.

Blanco E. et al. (soumis) Urban ecosystem-level biomimicry and regenerative design: Linking ecosystem functioning and urban built environments. Sustainability

#ScienceDurable – Du déclin au rétablissement de la biodiversité : l’urbanisation et l’avenir de la conservation de la biodiversité

Pour inverser les tendances dramatiques actuelles, l’Ipbes, dans son évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques, pose la question du rôle de la démographie humaine et de la perpétuation de systèmes de production non durables et appelle à des changements systémiques majeurs.

Peu de personnes informées doutent encore aujourd’hui de la nécessité d’une réflexion de fond sur l’évolution de nos stratégies socio-économiques comme cadre conceptuel pouvant guider l’action en faveur de la biodiversité et parallèlement du climat. Les scénarios démographiques et socio-économiques prennent alors toute leur importance pour évaluer le futur de la biodiversité et la pertinence des orientations politiques qui permettront de la sauvegarder. Qui dit orientations politiques, dit choix de société et donc nécessité d’une libre expression et d’un libre choix des citoyens. Même si la science ne porte pas une vérité, mais des théories et des hypothèses fondées sur l’analyse des données, elle doit être un élément majeur pour éclairer tant l’opinion que les décideurs.

 

Dans ses efforts de « porté à connaissance », la FRB se doit d’apporter sa contribution aux riches et intenses débats en cours. la Fondation a proposé la transcription d’un article issu des réflexions de trois « conservationnistes » américains, Sanderson, Walston et Robinson.

Pour résumer de manière très simplifiée, les auteurs disent que l’évolution de la démographie humaine et des consommations va conduire à un déclin majeur de la biodiversité d’ici 2050, rejoignant ainsi beaucoup de scénarios actuels dont ceux figurés dans le rapport de l’Ipbes, mais que la tendance croissante à l’urbanisation de la planète va conduire, par des processus multiples, à une stabilisation et même une décroissance de la démographie humaine et que ce qu’ils considèrent comme l’efficacité environnementale plus grande des villes aura un impact positif sur l’environnement et permettra à termes le rétablissement de la biodiversité.

 

En effet, d’ici 100 ans, les tendances de développement montrent également que l’essentiel de l’humanité vivra dans les villes et les agglomérations dans une économie de marché interconnectée et fondée sur la technologie. Un des scénarios crédibles est que la population humaine stagne ou diminue aux environs de 6 à 8 milliards de personnes et que leur concentration dans les villes entrainera des changements socio-environnementaux important et notamment, la diminution de l’extrême pauvreté, une meilleure maîtrise de la fécondité et une évolution des modes de vie et de pensée. Le modèle quantitatif développé dans l’étude de Sanderson et al., montre tout d’abord des impacts négatifs sur la biodiversité, entrainés par ces changements, puis une inversion de la tendance avec des impacts positifs sur l’environnement. Ainsi, bien qu’il soit parfaitement clair que les impacts environnementaux augmentent au fur et à mesure que les sociétés traversent la transition démographique et s’urbanisentla transition en cours de la fécondité et la réduction de la pauvreté résultant de l’urbanisation suggèrent la perspective d’une stabilisation éventuelle et d’une réduction à long terme des impacts globaux sur l’environnement.

 

 

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#ScienceDurable – Faut-il totalement repenser la ville ?

La densité humaine facilite la propagation des virus. Retraçant l’histoire des liens entre urbanisme et préoccupations sanitaires, le philosophe Thierry Paquot nous invite dans ce podcast à repenser la configuration des villes, jouer la complémentarité avec la nature et réfléchir à ce que signifie à notre époque une ville à « échelle humaine ».

 

 

Écouter le podcast

 

 

 

#ScienceDurable – Les « forêts urbaines », essentielles aux villes de demain

Les zones urbanisées occupent environ 10 % des surfaces terrestres, une proportion qui ne cesse de croître. Ces espaces constituent les milieux de vie de plus de 50 % de la population mondiale et contribuent de manière importante au changement climatique.

 

Face à ces réalités, des efforts de plus en plus importants sont engagés dans de nombreuses villes pour améliorer la qualité de vie et limiter les contributions de ces espaces aux changements globaux, grâce notamment à des plans d’adaptation au changement climatique et en faveur de la biodiversité.

 

Parmi ces actions, l’accroissement de la place accordée aux arbres, avec l’objectif d’évoluer vers de véritables « forêts urbaines », représente une contribution majeure.

 

 

 

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#ScienceDurable – Comment faire de votre jardin un havre de biodiversité

Pour celles et ceux qui ont la chance de posséder un coin de verdure, la période de confinement a offert l’occasion de jardiner, s’adonner à l’exercice physique ou simplement – aujourd’hui plus que jamais – de contempler. Contempler la végétation généreuse en ce printemps avancé, son cortège de pollinisateurs virevoltant autour des premières fleurs ; contempler les oiseaux chanteurs donnant fièrement de la voix.

 

Pourtant, tous les jardins ne connaissent pas la même vitalité. Ils sont d’abord le reflet des paysages alentour : un jardin bordé de monoculture hypertraitée abritera une biodiversité certainement plus pauvre, malgré l’effet refuge dont pourront bénéficier quelques espèces. Mais le degré d’attractivité tient beaucoup à nos comportements. Ce sont nos pratiques qui garantissent la bonne santé du jardin et des écosystèmes qu’il renferme.

 

 

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#ScienceDurable – Projet Life Adsorb : optimiser le traitement des eaux du périphérique parisien

Centré sur un prototype innovant situé dans le bois de Boulogne à l’ouest de Paris, le projet Life Adsorb va tester de nouveaux modes de dépollution des eaux issues principalement du ruissellement pluvial du périphérique avec de rares contributions d’eaux usées. L’objectif du projet est de réduire de 95 % la pollution minérale et organique, c’est à dire de macro et micro polluants. La solution proposée sera transférable à des sites densément urbanisés tel que le site parisien mais aussi également à des sites plus ruraux.

 

 

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#ScienceDurable – De l’eau durable pour Quito

À l’image des grandes métropoles sud-américaines, les besoins en eau de la capitale de l’Équateur ne cessent d’augmenter. L’entreprise publique qui gère cette ressource précieuse à Quito s’est associée à l’IRD afin d’approvisionner la population de cette ville en eau de bonne qualité sans compromettre l’environnement.

 

 

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#ScienceDurable – Déforestation à Madagascar : concilier développement et conservation de la biodiversité

L’île a perdu 44 % de ses forêts naturelles depuis les années 50 et le rythme de la déforestation s’accélère. Avec 90 % d’espèces endémiques, c’est une biodiversité unique qui est menacée de disparition. L’enjeu de la Grande île est de concilier la sauvegarde de son patrimoine naturel et la lutte contre la pauvreté. Un défi de taille qui nécessite des actions menées sur plusieurs fronts. Les recherches du Cirad et de ses partenaires accompagnent le pays dans ce sens au travers de plusieurs projets. Revue de détails à l’occasion de la journée internationale des forêts, le 21 mars.

 

 

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[Publication] Sortie de l’ouvrage “Urbanisme et biodiversité: vers un paysage vivant structurant le projet urbain”

L’ouvrage, écrit sous la direction de Philippe Clergeau, est maintenant disponible aux Editions Apogée. Le chapitre “Morphologie des quartiers et biodiversité” a été rédigé par Morgane Flégeau, post-doctorante à la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité et chargée de la réalisation d’une revue systématique consacrée aux liens entre biodiversité et formes urbaines, dans le cadre du programme Baum (Biodiversité, aménagement urbain et morphologie) – porté conjointement par le Plan urbanisme construction architecture (Puca), le Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) et la FRB.

 

Ce chapitre interroge le lien entre formes urbaines et biodiversité à l’échelle du quartier – dans la ville occidentale – au travers d’une revue systématique. La question est observée sous deux angles.

 

  • D’une part, Morgane Flégeau a cherché à identifier, au sein de la littérature scientifique portant sur la biodiversité urbaine, les publications ciblant les liens entre morphologie urbaine et biodiversité. Les études consacrées à ce sujet, sont principalement issues de travaux d’écologie. L’analyse de ces travaux montre qu’ils peinent à intégrer les descripteurs de l’urbain à l’échelle intermédiaire du quartier pour analyser les possibilités d’un maintien voire d’un épanouissement des espèces animales et végétales en ville.

 

  • D’autre part, la recherche conduite a été complétée par une recension de la littérature professionnelle et opérationnelle (littérature non-scientifique produite par des institutions publiques, notamment des collectivités territoriales ou des professionnels de l’urbanisme et de l’aménagement). Elle fait le constat de la difficulté à prendre en considération enjeux de biodiversité dans les projets d’aménagement urbains à l’échelle du quartier.

 

Découvrir l’ouvrage :  Urbanisme et biodiversité: vers un paysage vivant structurant le projet urbain

Comment concilier densification du bâti et biodiversité ?

Tel est le thème du programme de recherche Biodiversité, aménagement urbain et morphologie (Baum), initié par le Plan urbanisme construction architecture (Puca)1, associant le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) et la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), rejoints depuis par l’Agence française pour la biodiversité (AFB). Lancé en 2019, il s’agit au travers de ce programme d’explorer les liens entre biodiversité, densité et formes urbaines, à l’échelle du quartier.

 

La première étape de ce programme a été consacrée à la réalisation d’un état de l’art des connaissances sur cet enjeu, à la croisée des thématiques d’écologie, de biologie de la conservation, d’urbanisme et d’architecture. Les résultats de ce travail, réalisé par Morgane Flégeau sous la forme d’une revue systématique, seront dévoilés à l’occasion d’une rencontre réunissant acteurs et chercheurs le 29 janvier 2020 à Paris. Des chercheurs et des acteurs de l’aménagement urbain travaillant sur le thème des liens entre biodiversité et formes urbaines seront également invités à présenter leurs travaux lors de cette journée. Enfin, cette rencontre sera l’occasion d’informer et d’échanger sur l’ appel à projets du programme de recherche BAUM, prévu début 2020.

 

 

Informations et programme Inscriptions

 

 

1. Le Puca est une agence interministérielle à l’initiative de programmes de recherche et d’expérimentation, dans les domaines de l’urbanisme, de la construction et de l’architecture. 

[Synthèse] La densification urbaine est-elle favorable au maintien de la biodiversité ?

A l’occasion de la rencontre « Acteurs-Chercheurs Biodiversité Aménagement urbain et morphologie » organisé par le Plan urbanisme construction architecture (Puca) dans le cadre du programme de recherche Biodiversité, aménagement urbain et morphologie (Baum), la FRB met en avant la question de la densification urbaine et du maintien de la biodiversité en proposant la synthèse d’une étude publiée dans la revue Urban Ecosystem en 2014 intitulée : « La densification urbaine peut-elle limiter l’érosion de la biodiversité ? Réponses des assemblages de coléoptères carabidés et d’araignées dans l’Ouest de la France. ».

 

Consultez la synthèse complète.

La densification urbaine est-elle favorable au maintien de la biodiversité ?

A l’occasion de la rencontre « Acteurs-Chercheurs Biodiversité Aménagement urbain et morphologie » organisé par le Plan urbanisme construction architecture (Puca) dans le cadre du programme de recherche Biodiversité, aménagement urbain et morphologie (Baum), la FRB met en avant la question de la densification urbaine et du maintien de la biodiversité en proposant la synthèse d’une étude publiée dans la revue Urban Ecosystem en 2014 intitulée : « La densification urbaine peut-elle limiter l’érosion de la biodiversité ? Réponses des assemblages de coléoptères carabidés et d’araignées dans l’Ouest de la France. ».

 

Contrairement à une idée répandue, les résultats de cette étude montrent que la densification urbaine est un élément qui peut contribuer au maintien d’une certaine biodiversité en ville. L’objectif est d’évaluer l’impact de deux types de formes urbaines, les quartiers de conception conventionnelle (aux maisons individuelles avec jardins) et ceux de conception nouvelle (aux maisons mitoyennes plus denses avec une attention portée aux connectivités écologiques), sur deux groupes d’arthropodes dans un seul type d’habitat, les haies.

 

Retrouvez la synthèse complète dans les ressources téléchargeables ci-dessous.

Stockage du carbone dans les prairies similaires à celles qui sont gérées par les aéroports

Fin 2018, l’association HOP ! Biodiversité (désormais Aérobiodiversité) confiait à la FRB la réalisation d’une synthèse de connaissances sur la question du stockage du carbone dans les prairies gérées sur leurs sites par les aéroports français membres de l’Acnusa en posant la question : « Quel est le stock global de carbone des prairies (similaires à celles qui sont gérées par les aéroports) et quel est leur potentiel de stockage annuel ? ».

 

La finalité pour le commanditaire état d’une part de pouvoir intégrer le bilan carbone annuel des prairies dans le bilan carbone des aéroports et d’autre part de sensibiliser sur les intérêts environnementaux de ces prairies pour adapter les mesures de gestion.

 

Le rapport complet est téléchargeable dans les ressources ci-dessous.

 

[Communiqué] La synthèse de données au service de la flore tropicale africaine menacée

Il y a deux ans, une trentaine de chercheurs nationaux et internationaux rendaient public Rainbio une base de données unique en libre accès, offrant le premier état des lieux jamais réalisé sur la flore d’Afrique tropicale. Cette synthèse d’envergure a été réalisée au Cesab de la FRB, un centre de synthèse unique en France permettant de rassembler de très nombreuses informations dépassant les simples jeux de données collectés lors de travaux individuels.

 

Grâce au Cesab, mis en place il y a 10 ans par la FRB, l’équipe de recherche menée par Thomas Couvreur – chercheur à l’IRD – a pu enregistrer plus de 600 000 occurrences végétales en Afrique tropicale, provenant de plus de 25 000 espèces de plantes vasculaires.

 

Ce mois-ci, trois études s’appuyant de façon directe ou indirecte sur la base de données Rainbio ont dévoilé des résultats sans précédent sur l’état et le devenir de la flore africaine ainsi que sur les espèces rares à l’échelle mondiale.

 

 

Consultez le communiqué complet

[Synthèse] Du déclin au rétablissement de la biodiversité : l’urbanisation et l’avenir de la conservation de la biodiversité

L’urbanisation de la planète et l’amélioration de l’efficacité environnementale des villes pourraient-elles conduire au rétablissement de la biodiversité ?
Tel est le sujet d’une étude menée par Eric Sanderson et ses collaborateurs, publiée dans la revue scientifique BioScience. Leurs travaux proposent de se projeter non pas jusqu’en 2050, comme c’est souvent le cas dans les scénarios prospectifs (Ipbes, 2019), mais jusqu’en 2100. L’évolution des modes de consommation, la diminution de la pauvreté et la prise de conscience de l’impact des activités humaines sur l’environnement ouvriraient des portes vers des scénarios favorables à une meilleure qualité de vie et une biodiversité restaurée.

Du déclin au rétablissement de la biodiversité : l’urbanisation et l’avenir de la conservation de la biodiversité

Pour inverser les tendances dramatiques actuelles, l’Ipbes, dans son évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques, pose la question du rôle de la démographie humaine et de la perpétuation de systèmes de production non durables et appelle à des changements systémiques majeurs.

Peu de personnes informées doutent encore aujourd’hui de la nécessité d’une réflexion de fond sur l’évolution de nos stratégies socio-économiques comme cadre conceptuel pouvant guider l’action en faveur de la biodiversité et parallèlement du climat. Les scénarios démographiques et socio-économiques prennent alors toute leur importance pour évaluer le futur de la biodiversité et la pertinence des orientations politiques qui permettront de la sauvegarder. Qui dit orientations politiques, dit choix de société et donc nécessité d’une libre expression et d’un libre choix des citoyens. Même si la science ne porte pas une vérité, mais des théories et des hypothèses fondées sur l’analyse des données, elle doit être un élément majeur pour éclairer tant l’opinion que les décideurs.

Dans ses efforts de « porté à connaissance », la FRB se doit d’apporter sa contribution aux riches et intenses débats en cours. L’an dernier, la transcription de l’article de Cazalis, Loreau et Henderson « Devons-nous choisir entre nourrir l’humanité et protéger la nature ? Modélisation des liens entre l’environnement et la démographie humaine » avait apporté un éclairage original. Ses conclusions montraient qu’un avenir souhaitable pour l’Humanité passait par la recherche d’un équilibre entre la production alimentaire et les services de régulation et, idéalement, le maintien de la population humaine à 10 milliards de personnes. Lors de la première « Nuit de la biodiversité », nous nous sommes en particulier interrogés sur la question de savoir si les solutions préconisées par les scientifiques pour enrayer le déclin de la biodiversité seront applicables tout en préservant nos systèmes et libertés politiques. Pour poursuivre la contribution à ces réflexions majeures dans une optique aussi ouverte que possible, la FRB propose la transcription d’un article issu des réflexions de trois « conservationnistes » américains, Sanderson, Walston et Robinson.

 

Pour résumer de manière très simplifiée, les auteurs disent que l’évolution de la démographie humaine et des consommations va conduire à un déclin majeur de la biodiversité d’ici 2050, rejoignant ainsi beaucoup de scénarios actuels dont ceux figurés dans le rapport de l’Ipbes, mais que la tendance croissante à l’urbanisation de la planète va conduire, par des processus multiples, à une stabilisation et même une décroissance de la démographie humaine et que ce qu’ils considèrent comme l’efficacité environnementale plus grande des villes aura un impact positif sur l’environnement et permettra à termes le rétablissement de la biodiversité.

En effet, d’ici 100 ans, les tendances de développement montrent également que l’essentiel de l’humanité vivra dans les villes et les agglomérations dans une économie de marché interconnectée et fondée sur la technologie. Un des scénarios crédibles est que la population humaine stagne ou diminue aux environs de 6 à 8 milliards de personnes et que leur concentration dans les villes entrainera des changements socio-environnementaux important et notamment, la diminution de l’extrême pauvreté, une meilleure maîtrise de la fécondité et une évolution des modes de vie et de pensée. Le modèle quantitatif développé dans l’étude de Sanderson et al., montre tout d’abord des impacts négatifs sur la biodiversité, entrainés par ces changements, puis une inversion de la tendance avec des impacts positifs sur l’environnement. Ainsi, bien qu’il soit parfaitement clair que les impacts environnementaux augmentent au fur et à mesure que les sociétés traversent la transition démographique et s’urbanisent, la transition en cours de la fécondité et la réduction de la pauvreté résultant de l’urbanisation suggèrent la perspective d’une stabilisation éventuelle et d’une réduction à long terme des impacts globaux sur l’environnement.

 

La synthèse complète est à découvrir dans les ressources téléchargeables ci-dessous. 

[Publication] Sortie du rapport “Biodiversity, a pressing need for action in Oceania”

La FRB a le plaisir d’annoncer la sortie du rapport Biodiversity, a pressing need for action in Oceania, élaboré sous la direction de Claude E. Payri et Eric Vidal, deux chercheurs de l’IRD, et auquel Jean-François Silvain, le président de la FRB, a contribué.

Ce rapport est issu des conclusions des experts et des rapporteurs de l’atelier « Biodiversité en Océanie » qui s’est tenu à Nouméa les 24 et 25 juin derniers. Il a été présenté le 5 septembre à Apia (Samoa) aux ministres de l’Environnement des 26 États et territoires du Pacifique, lors de la réunion du PROE.

 

 

 

« Éviter, Réduire, Compenser » : trois clés pour limiter l’artificialisation des terres

La perte de biodiversité sur les territoires français et européens est maintenant actée. Que ce soit la perte de 30 % des espèces d’oiseaux communs en 15 ans dans les campagnes françaises (communiqué du MNHN, 2018), où la chute de plus de 75 % de la biomasse d’insectes en seulement 27 ans en Allemagne (Hallmann et al. 2017), les signaux d’alarmes sont tirés. Malgré ces alertes, l’artificialisation des terres – un des grands facteurs du déclin de la biodiversité – continu inlassablement, et ce dans toutes les régions. D’après une étude du Commissariat général au développement durable, 40 % de l’artificialisation en France se fait dans des zones où le taux de vacance de logements augmente fortement et 20 % dans des communes dont la population décroit. En l’absence de besoin apparent, comment expliquer la poursuite de ce phénomène ? Charlotte Bigard, chercheuse au centre d’écologie fonctionnelle et évolutive (UMR CEFE), conduit des travaux à l’interface entre la recherche et l’aménagement. Elle nous explique les limites et les perspectives de la séquence Éviter-Réduire-Compenser, outil réglementaire majeur pour maintenir le lien entre aménagement et biodiversité.

Évaluer l’état de santé des milieux aquatiques en Outre-mer : des outils basés sur la biodiversité

Une biodiversité exceptionnelle peuple les cours d’eau et les eaux marines des outre-mer français. Près de 500 espèces de poissons évoluent dans les fleuves et criques de la forêt amazonienne de Guyane ; plus de 150 variétés de coraux composent les récifs de Mayotte et de La Réunion ; un millier de taxons de diatomées, algues microscopiques unicellulaires, habite le fond des cours d’eau des Antilles, de Mayotte et de La Réunion. Cette nature exubérante subit pourtant les pressions des activités humaines et peut en être fortement impactée. Les rivières des territoires insulaires de la Guadeloupe, de la Martinique, de Mayotte et de La Réunion pâtissent notamment d’importants prélèvements d’eau qui réduisent drastiquement sa disponibilité pour la vie et la migration des espèces. Les activités d’orpaillage en Guyane induisent destruction du milieu naturel, asphyxient des rivières par les boues et pollution au mercure. À Mayotte, les détergents et lessives utilisées par les lavandières génèrent une pression chimique importante sur les invertébrés benthiques, organismes qui peuplent le fond des cours d’eau.

 

Pour rendre compte des altérations subies par les écosystèmes aquatiques et les communautés animales et végétales qui les composent, et ainsi pouvoir alerter et agir pour leur protection, la Directive cadre sur l’eau (DCE) a amené à développer des outils pour la surveillance des milieux aquatiques. Cette directive européenne, adoptée en 2000, vise à maintenir ou restaurer leur bon état écologique. En faisant des communautés biologiques les sentinelles de la qualité des eaux, elle a érigé la biodiversité en « juge de paix » de la surveillance et de la reconquête de l’état des rivières, des lacs et des eaux littorales.

Au Brésil : grandes incertitudes sur la protection de la forêt amazonienne

Le Brésil reste marqué culturellement par son passé colonial de conquête du territoire. L’expansion du front pionnier vers le nord et l’ouest s’est faite au détriment de la forêt. L’appropriation est, elle, passée par la conversion des écosystèmes forestiers en terres agricoles ou en pâturages. La forêt n’est pas tant défrichée pour ses ressources – la productivité y est faible – mais plutôt comme réservoir de terres libres. Avec les préoccupations environnementales grandissantes, la forêt représente un gisement mondial de biodiversité et de carbone, et le Brésil doit à présent répondre de la déforestation de l’Amazonie aux yeux de l’opinion internationale.

 

Aussi, lors de chaque conférence internationale, sur la diversité biologique comme sur le changement climatique, le Brésil ne perd pas une occasion de revenir sur sa grande réussite : l’important recul de la déforestation de sa forêt amazonienne entre 2004 et 2014, passée de 27 772 km2 à 5 012 km2 par an, soit une réduction de 82 % de la surface annuelle défrichée (cf. graphique ci-dessous). Dans le même temps, la contribution des émissions de CO2 liées à la déforestation est ainsi passée de 71 % du total des émissions du Brésil à 33 %. Si l’on peut relativiser ces chiffres en pointant le choix opportun des dates de référence, le report de la déforestation sur le Cerrado1 et sa reprise récente en Amazonie, il importe de comprendre les clés de cette réussite, particulièrement dans le contexte actuel où la protection des forêts est remise en cause et fait à nouveau peser la menace d’un point de non-retour pour les écosystèmes.

GRAPHIQUE – Déforestation annuelle dans l’Amazonie légale brésilienne (AMZ)
http://www.obt.inpe.br/prodes/dashboard/prodes-rates.html

 

Jusqu’à la veille du Sommet de la Terre tenu à Rio en 1992, la déforestation de l’Amazonie est la conséquence des politiques d’intégration régionale : développement des infrastructures et fronts pionniers agricoles sont impulsés par le gouvernement fédéral et forment un “arc de déforestation” qui s’avance dans le massif amazonien à partir du sud et de l’est. Cependant, le Brésil peut déjà témoigner de son souci de protéger sa forêt tropicale à l’ouverture du Sommet, à travers plusieurs initiatives. L’une d’entre elles, le Programme de contrôle par satellite de la déforestation en Amazonie légale2 (Prodes) de l’Institut brésilien de recherches spatiales (INPE) a été créé en 1988. Ce programme a permis de connaître l’état des forêts et de suivre son évolution sur le temps long, apportant une vraie crédibilité à la démarche. Et dès 1991, les scientifiques brésiliens alertent sur le processus de déforestation et prédisent une savanisation de l’Amazonie, alors déboisée à 8 %. En 1989, l’Institut brésilien de l’environnement et des ressources naturelles (IBAMA), chargé de la protection de l’environnement, est créé avec des pouvoirs législatifs et de police. Un ministère de l’Environnement sera mis en place à l’occasion du Sommet de la Terre en 1992.

 

Quelques années plus tard, le programme pilote pour la préservation des forêts tropicales, le PPG7, est engagé à l’initiative des pays du G7 et de l’Union européenne, lorsque l’image de “l’Amazonie en flammes” émeut l’opinion internationale, à la suite de la publication du chiffre record de 29 059 km2 de forêts disparues en 1995. En 1996, le président Cardoso édite une mesure provisoire qui modifie le code forestier, portant de 50 % à 80 % la surface des propriétés privées en forêt amazonienne devant rester en réserve de végétation originelle. Il interdit aussi provisoirement la conversion des forêts en terres agricoles. En 2000, le Système national des unités de conservation de la nature (SDUC) est promulgué. Malgré ces différentes initiatives, la déforestation se poursuit sous l’effet des dynamiques régionales et du manque de coordination politique.

Biodiversité et services écosystémiques en Europe et Asie centrale, les principaux messages de l’évaluation IPBES

Pour réaliser cette évaluation, plus de 120 experts internationaux issus de 36 pays ce sont réunis pour évaluer l’état des connaissances sur la biodiversité en Europe et en Asie centrale. Ils ont tiré leurs informations de plusieurs milliers de sources : travaux scientifiques, rapports techniques et savoirs traditionnels et locaux. Rassemblées dans les “Résumés pour décideurs”, les conclusions-clés visent à orienter les décisions relatives aux politiques publiques et aux actions du secteur privé et des citoyens en faveur de la préservation de la biodiversité.

Pour mettre en avant des messages synthétiques, la FRB propose un dépliant issu du rapport Europe et Asie centrale.

BiodiverCité

Souvent bâtie sur les milieux les plus riches et favorables à la vie, le long de fleuves, sur des espaces naturels diversifiés ou agricoles, la ville est un milieu entièrement construit et entretenu par l’Homme qui subit des modifications rapides et brutales engendrant une mosaïque de milieux différents. Les sols, y sont maintes fois remaniés, déstructurés, pollués, reconstruits. Les paysages y sont modifiés, fragmentés. L’air y
est pollué. L’eau extrêmement canalisée… Malgré toutes ces contraintes, la ville abrite une biodiversité non négligeable, qui devrait se renforcer avec l’augmentation des espaces végétalisés dans les espaces urbains.

 

Ce document, consultable dans les ressources ci-dessous avec sa bibliographie, est le fruit du travail d’un groupe de recherche CosCS FRB sur Écologie et sociétés urbaines.

Ce travail est également à l’origine du publication scientifique parue dans Science of The Total Environment, à découvrir ici :
Urban ecology, stakeholders and the future of ecology

Action n°7 : Je jardine sans pesticides

Près des ¾ des Français possédant un terrain jardinent régulièrement (Ifop / MEEDDM, 2010). Or, depuis janvier 20171, les collectivités locales et les établissements publics n’ont plus le droit d’utiliser de pesticides de synthèse pour entretenir les espaces verts dont ils ont la responsabilité2. Ainsi, en attendant l’interdiction de l’usage de ces substances par les jardiniers amateurs en 2019, ces derniers constituent la principale source de pesticides en milieu urbain. Une étude basée sur des données de sciences participatives s’est intéressée aux insectes qui visitent les fleurs des jardins privés. Selon celle-ci, les insecticides et les herbicides ont un impact négatif sur l’abondance des papillons et bourdons : les premiers atteignent directement les pollinisateurs, tandis que les seconds agiraient de façon indirecte en diminuant la disponibilité en ressources – nectar et pollen (Muratet & Fontaine, 2015).

 

« Les pesticides bio nuisent moins à la biodiversité, mais tout dépend des doses utilisées »

 

Pour préserver la biodiversité, serait-il alors préférable d’utiliser des pesticides autorisés en agriculture biologique ? Si ces produits nuisent moins à la biodiversité par rapport à leurs équivalents conventionnels, cela dépend toutefois étroitement des doses utilisées. Le cuivre de la bouillie bordelaise, par exemple, s’accumule dans les sols. Si l’on manque encore d’études sur son utilisation dans les jardins des particuliers, des travaux existent dans le cas des territoires agricoles. D’après l’expertise scientifique collective (ESCo) menée par l’Inra et par l’Institut technique de l’agriculture biologique (Inra / Itab, 2018), les sols viticoles européens contiennent jusqu’à 500 mg/kg de cuivre, contre 3 à 100 mg/kg dans les sols naturels. Les plantes cultivées peuvent alors en pâtir, de même que la biodiversité des sols : le cuivre fortement concentré nuit aux communautés de microbes et aux collemboles, des hexapodes proches des insectes.

 

Alors comment vaincre les ravageurs des cultures sans pesticides ? Le contrôle biologique peut faire partie des solutions, en utilisant des substances naturelles, comme le pyrèthre, insecticide extrait des chrysanthèmes, ou en favorisant des espèces « auxiliaires » qui parasitent ou consomment les ravageurs. Coccinelles, chrysopes, syrphes (mouches à bandes jaunes et noires), micro-guêpes, hérissons, vers nématodes sont d’utiles auxiliaires de culture. Il est possible d’en élever certains, comme les coccinelles, puis de les relâcher, mais sans certitude qu’ils resteront dans un lieu donné. En revanche, adapter le jardin et sa gestion pour qu’il leur soit favorable permet d’inciter les auxiliaires à venir chez soi et à y rester. Reste alors à diversifier les plantes de nos espaces extérieurs, et à former des réseaux de balcons et de jardins entre lesquels les organismes circulent librement.

 

« Des espèces « auxiliaires », coccinelles, chrysopes, syrphes ou hérissons, parasitent ou consomment les ravageurs »

 

D’autres solutions fondées sur l’observation des milieux s’avèrent aussi prometteuses. Des chercheurs suédois (Ninkovic et al., 2013) ont illustré la façon dont le comportement des ravageurs varie en présence de leurs prédateurs. Ainsi, les pucerons se laissent tomber au sol pour échapper aux coccinelles. En effet, ces dernières laissent derrière elles une trace chimique, telle une odeur, que détectent leurs proies. Les scientifiques ont donc placé des pucerons du merisier à grappes (Rhopalosiphum padi, un ravageur de céréales) au centre de boîtes de pétri dont seul un côté avait été mis en contact avec une ou plusieurs coccinelles à sept points (Coccinella septempunctata, l’espèce la plus commune en Europe). Il y avait alors significativement moins de pucerons du côté fréquenté par les coccinelles, un comportement d’évitement plus ou moins fort selon le nombre et le sexe des coccinelles ayant laissé leur odeur dans la boîte. La perspective de ce résultat permettrait d’envisager un jour de traiter les jardins et les cultures avec des odeurs de prédateurs.

 

Des techniques agricoles innovantes comme la permaculture visent également à cultiver autrement, sans produits de synthèse et sans utilisation de carburants fossiles (Guégan & Leger, 2015). Le concept de permaculture, développé dans les années 1970 par les australiens Mollisson et Holmgren, est issu de l’écologie scientifique et s’applique de façon concrète sur le terrain. Ses méthodes consistent à aménager et à piloter les écosystèmes dans une vision globale du site, de son fonctionnement et de sa dynamique, et ce en accord avec des aspirations sociales, écologiques et économiques. Des outils tels que ceux de la permaculture pourraient être adaptés aux jardins ou espaces verts urbains, afin d’élargir encore le champ des possibles pour jardiner sans pesticides.

 

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1 Plan français Ecophyto II, loi Labbé du 06 février 2014 et article 68 de la loi de transition énergétique.

2 Avec une exception pour certains espaces à contraintes particulières comme les installations électriques.

Action n°6 : Je reste sur les « sentiers battus »

Que se passe-t-il pour une plante lorsqu’elle se fait marcher dessus ? La question peut sembler triviale, et pourtant elle fait l’objet de recherches scientifiques. Car dans les milieux les plus fragiles, notamment en montagne, toute activité humaine influence les écosystèmes. D’après une analyse qualitative de la littérature scientifique consacrée à l’impact du piétinement sur la végétation montagnarde (Martin & Butler 2017), les plantes les moins résistantes sont les arbustes qui, par leur taille, se retrouvent facilement sous les semelles des promeneurs mais dont la croissance est moins rapide que celle des herbes graminées (Yorks et al. 1997; Hill & Pickering 2009 dans Martin & Butler 2017). En marchant sur les plantes, les randonneurs les cassent, les écrasent et parfois les déracinent. Si certaines repoussent, d’autres meurent. Les plantes piétinées sont, en moyenne, moins hautes, et possèdent des feuilles moins grandes. Leur activité de photosynthèse est fragilisée et, par voie de conséquence, leur production de réserves nutritives également (Pickering & Growcock 2009 dans Martin & Butler 2017). En outre, elles produisent moins de graines, ce qui nuit à leur reproduction et donc, potentiellement, à la survie de leur espèce (Rossi et al. 2006, 2009 dans Martin & Butler 2017).

 

“La compaction du sol conduit au ruissellement des eaux à la surface, participant à l’érosion”

 

Si un piétinement modéré peut favoriser certaines plantes en éliminant celles avec lesquelles elles étaient en compétition, en revanche, le nombre total d’espèces observées – appelé richesse spécifique – diminue (Cole 2004). Le piétinement compacte également le sol dont la porosité se trouve réduite. En effet, le sol est à la fois composé de matière, mais aussi de vides appelés « pores », par lesquels l’eau de pluie s’infiltre. La compaction du sol conduit donc au ruissellement des eaux à la surface du sol qui emportent avec elles des particules de sol, participant ainsi à l’érosion. Ce phénomène est accéléré, en milieu montagnard, par la pente (Martin & Butler 2017). Des sols plus compacts sont aussi moins favorables à la germination et à la croissance de certaines plantes, puisque leurs racines peinent à circuler pour trouver des nutriments (Alessa & Earnhart 2000 dans Cole 2004). Par contre, ils en favorisent d’autres comme le rumex, la renoncule rampante, le pissenlit ou le chardon des champs (Ducerf 2013).

 

“La prévalence des maladies atteignant les coraux de Koh Tao est trois fois plus élevée dans les récifs régulièrement explorés par les touristes”

 

Dans l’eau aussi, les voyageurs causent des dégâts en s’éloignant des sentiers sous-marins ou en fréquentant des écosystèmes fragiles sans contrôle. La plongée sous-marine ainsi que le snorkeling ou randonnée palmée peuvent nuire aux récifs coralliens. Si les effets directement destructeurs de ces activités sont largement documentés par les scientifiques au moins depuis les années 1980, des travaux plus récents s’intéressent à des impacts indirects et moins évidents. Ainsi, des chercheurs australiens (Lamb et al. 2014) ont montré que la prévalence des maladies atteignant les coraux de l’île thaïlandaise de Koh Tao était trois fois plus élevée dans les récifs régulièrement explorés par les touristes que dans les récifs moins exposés. Et ce, en particulier pour une affection appelée SEB (skeletal eroding band), à laquelle les coraux abîmés sont plus vulnérables lorsqu’ils se trouvent dans des zones où la fréquentation est forte. Pour les auteurs, cela indique l’existence de facteurs de stress additionnels, causés par la randonnée palmée et la plongée, qui facilitent la progression de cette maladie. Limiter le nombre de visiteurs autorisés dans les espaces les plus sensibles s’avère donc parfois nécessaire. Pour préserver la biodiversité, tout particulièrement dans les aires protégées, mieux vaut rester sur les « sentiers battus », qu’ils soient terrestres ou marins.

Action n°3 : Je cultive des plantes favorables à la biodiversité

En près de trois décennies, les populations d’insectes volants ont chuté d’environ 80 % en Allemagne. Cette situation probablement très similaire à celle de notre pays a été dévoilée par une étude internationale en 2017 (Hallmann et al. 2017). Si l’agriculture est principalement mise en cause à travers l’usage de pesticides et d’engrais de synthèse, la destruction et la dégradation des habitats de façon plus large figurent en bonne place parmi les facteurs impliqués dans les pertes de biodiversité tant au niveau mondial qu’européen (IPBES 2018). Selon une étude fondée sur des données de sciences participatives (observatoire des papillons des jardins du Muséum national d’Histoire naturelle), l’urbanisation diminue fortement le nombre d’espèces et l’abondance des papillons (Fontaine et al. 2016). Mais à l’échelle locale, nos jardins et balcons pourraient changer la donne.

 

En effet, les plantes nectarifères et pollinifères produisent respectivement du nectar et du pollen. Aussi dites “mellifères” – car les abeilles domestiques peuvent transformer leur nectar en miel – elles favorisent également d’autres pollinisateurs comme les papillons. Les auteurs de cette étude (Fontaine et al. 2016) ont montré que les espèces de papillons les plus affectées par l’urbanisation étaient aussi les plus sensibles aux pratiques de jardinage. Planter des végétaux riches en nectar peut donc aider ces espèces vulnérables en contrebalançant en partie les effets délétères de l’urbanisation. Centaurées, lavande, ronces, framboisier, valériane, trèfles, lierre et plantes aromatiques forment alors des oasis pour les papillons dans un paysage globalement défavorable. D’autres plantes peuvent même être absolument indispensables lorsque l’espèce de papillons leur est inféodée, comme l’ortie, essentielle à des papillons tels que la petite tortue (Aglais urticae), le vulcain (Vanessa atalanta) ou, dans une moindre mesure, le Robert-le-Diable (Polygonia c-album). En revanche, le buddleia, une espèce exotique envahissante, attire les papillons mais ne leur offre pas autant de ressources alimentaires que les plantes citées précédemment.

 

“Les fleurs discrètes du lierre regorgent de nectar et de pollen avant l’hiver.”

 

Si de nombreuses plantes nectarifères et pollinifères exhibent des fleurs colorées ou parfumées telles que les chèvrefeuilles, la lavande, les bleuets et les digitales, d’autres essences parfois décriées recèlent de surprenants bienfaits. Ainsi, le lierre, une plante à la mauvaise réputation, fleurit en automne. Ses fleurs discrètes regorgent de nectar et de pollen avant l’hiver. Deux chercheurs britanniques se sont penchés sur le sujet en 2013 (Garbuzov & Ratnieks 2013). Outre les abeilles domestiques, dont près de 90 % du pollen collecté provenait du lierre, cette plante nourrit aussi une grande diversité de pollinisateurs sauvages. Parmi eux figurent des bourdons, des guêpes, des papillons et surtout des syrphes, ces mouches parfois confondues avec les guêpes dont elles imitent la forme et les bandes noires et brunes. En outre, les oiseaux affectionnent particulièrement les baies du lierre.

 

D’autres chercheurs britanniques ont mis en évidence la préférence des bourdons pour des espèces végétales méconnues du public, à l’instar de la ballote, ou peu appréciées par les jardiniers, à l’image du lamier blanc – souvent pris à tort pour une ortie et pourtant non urticant (Carvell et al. 2006). D’après leur inventaire, trois quarts des plantes fréquentées par ces insectes sont en déclin au niveau local, notamment les espèces les plus importantes comme le trèfle des prés (Carvell et al. 2006). Si les prairies non semées – qui se régénèrent naturellement – offrent parfois aux bourdons des ressources plus abondantes, celles qui sont entretenues selon un standard environnemental contiennent des plantes qui fleurissent plus tôt dans l’année, essentielles aux reines qui partent fonder leur nid (Lye et al. 2009). Chacun pourrait donc, dans son jardin, agir pour les pollinisateurs en favorisant deux types d’espaces complémentaires : des zones où l’on sème des plantes qui leur sont utiles, et d’autres laissées libres d’évoluer (friches).

 

“Jardins et balcons forment un corridor écologique pour les graines, oiseaux, arthropodes et petits mammifères.”

 

En plus des ressources alimentaires qu’elles offrent aux pollinisateurs, les plantes peuvent entrer dans un fonctionnement écologique à l’échelle des paysages. Les parcs urbains constituent par exemple des ensembles d’habitats dans lesquels des espèces animales et végétales vivent. Les jardins et balcons, adjacents ou proches les uns des autres, peuvent aussi former un «  corridor » permettant aux graines, oiseaux, arthropodes et petits mammifères de passer d’un ensemble d’habitats à un autre. Le tout forme un réseau connecté, parfois indispensable au bon équilibre écologique de ces milieux fragmentés par les activités humaines. En étudiant les araignées et les coléoptères dans quatre villes franciliennes (Vergnes et al. 2012), des chercheurs du Muséum national d’Histoire naturelle ont montré, en particulier pour l’une des familles de coléoptères étudiées, que le nombre d’espèces et l’abondance étaient moins élevés dans les jardins isolés que dans ceux connectés à un corridor. Ils ont ainsi mis en évidence le rôle des corridors écologiques pour maintenir la biodiversité « ordinaire » dans des paysages très fragmentés.

 

À l’heure où plus de la moitié de la population mondiale vit dans les villes, où les campagnes s’uniformisent du fait de l’intensification agricole et où la biodiversité s’effondre, nos espaces verts, jardins, balcons ou terrains privés pourraient devenir des « oasis » de biodiversité (dont l’association Humanité et Biodiversité s’est fait le porte-parole avec les Oasis Nature, rejoignant ainsi l’initiative des Refuges LPO initiée en 1921) qui permettraient à celle-ci de s’adapter, au moins pour partie, aux pressions anthropiques croissantes.

 

Valérianes (en haut à gauche), centaurées comme le bleuet (en haut au centre), lavandes (en bas à gauche), fleurs de lierre (en bas au centre) et ballote (à droite) attirent les papillons, les abeilles, les bourdons, les syrphes, etc. Avec une diversité de plantes sur les balcons et dans les jardins, chaque pollinisateur y trouve son compte.

#ScienceDurable – De l’importance de la nature en ville pour notre santé mentale

« Je n’irai jamais vivre dans cette ville. Même si je reste un indito [pauvre indien], chaque matin, quand je vais à ma milpa [champ de maïs et haricots mélangés], j’y suis heureux. Je vois tant d’arbres, de plantes, d’oiseaux et de ruisseaux avec des poissons, et le bleu du ciel… Je me sens bien. Dans la ville de Mexico, les murs sont gris, les routes sont grises, le ciel est gris, même les bruits sont gris. Là-bas, il n’y a pas de plantes, et je me sens triste. ». Voilà la réaction de Gonzalo, chef de famille Amérindien Totonaque de la région subtropicale du Golfe du Mexique, à son retour de Mexico où il a rendu visite à sa fille.

L’éclairage nocturne, une nouvelle menace pour la pollinisation

Les pollinisateurs sont en déclin dans le monde entier, ce qui génère des inquiétudes quant à la diminution, en parallèle, du service de pollinisation qu’ils fournissent à la fois aux cultures et aux plantes sauvages et qui est essentiel. Les facteurs anthropiques liés à ce déclin incluent les changements d’habitats, l’agriculture intensive, les pesticides, les espèces exotiques envahissantes, la propagation des agents pathogènes et le changement climatique.

 

Les conséquences de cette augmentation de l’éclairage nocturne sur le fonctionnement des écosystèmes sont généralement inconnues, or il a été suggéré récemment que l’augmentation mondiale et rapide des éclairages artificiels nocturnes pourrait constituer une nouvelle menace pour les écosystèmes terrestres.

 

L’article l’éclairage artificiel nocturne, une nouvelle menace pour la pollinisateurs d’Eva Knop et al montre que l’éclairage artificiel perturbe les réseaux nocturnes de pollinisation et a des conséquences négatives sur le succès reproducteur des plantes.

 

Si on éclaire artificiellement des communautés plantes-pollinisateurs, les visites nocturnes des pollinisateurs sur les plantes sont réduites de 62 % par rapport aux zones non éclairées. Il en résulte une réduction globale de 13 % du nombre de fruits d’une plante particulière, alors même que cette plante a également reçu de nombreuses visites de pollinisateurs diurnes.

 

Ces résultats démontrent également que l’éclairage artificiel de nuit affecte les pollinisateurs nocturnes au point d’entrainer une production de fruits plus faible des plantes qu’ils pollinisent, pouvant affecter en retour les pollinisateurs diurnes, étant donné que ces plantes représentent une source alimentaire importante pour eux.

 

L’article fournit des perspectives sur le fonctionnement des communautés de pollinisateurs et démontre que les pollinisateurs nocturnes ne sont pas redondants par rapport aux communautés diurnes.

 

Ces résultats contribuent à améliorer notre compréhension du déclin des pollinisateurs et de leurs services écosystémiques.

 

La pollinisation par les animaux est essentielle au fonctionnement des écosystèmes naturels, notamment aux communautés de plantes sauvages et apporte un service écosystémique crucial pour l’approvisionnement alimentaire mondial. 88 % de toutes les angiospermes en dépendent à des degrés divers et la valeur économique estimée de la pollinisation était de 361 milliards de dollars américains en 2009.

 

L’inquiétude porte sur le devenir de la pollinisation assurée par les insectes qui pourrait être menacée en raison d’une baisse mondiale des pollinisateurs sauvages et domestiques consécutivement aux activités humaines. Les principaux facteurs à l’origine de ce déclin sont la perte et la dégradation des habitats, l’agriculture conventionnelle intensive, incluant l’utilisation de pesticides, les espèces exotiques envahissantes, les organismes nuisibles et les agents pathogènes et les changements climatiques.

 

 

Le résumé de Philippe Gros et la synthèse de Jean-François Silvain sont téléchargeables dans les ressources ci-dessous. 

Spécificité nationale des effets des néonicotinoides sur les abeilles domestiques et sauvages

Les néonicotinoïdes sont des insecticides, c’est-à-dire des produits chimiques dont l’objectif est de tuer des insectes dit « cibles », ravageurs des monocultures commerciales modernes. Les molécules comme le thiamethoxam, l’imidaclopride ou le clothianidine sont des insecticides systémiques, c’est-à-dire qu’elles percolent dans les tissus des plantes traitées, soit directement par enrobage des semences, soit par épandage sur les sols.

 

Les connaissances sur la responsabilité des néonicotinoïdes au déclin des pollinisateurs sont de plus en plus nombreuses. Néanmoins, même si de nombreuses études ont démontré les effets toxiques des néonicotinoïdes sur les pollinisateurs et autres espèces animales, ou encore leurs effets négatifs sur la santé des abeilles y compris à des doses sub-létales, il est toujours délicat de discriminer leurs effets spécifiques de ceux d’autres pressions comme la perte des habitats, le changement climatique ou les pathogènes. Par ailleurs, si certaines études ont démontré que ces molécules augmentaient la mortalité des colonies d’abeilles domestiques en réduisant leur capacité à entretenir la ruche et le succès reproductif des bourdons sauvages et des abeilles solitaires, d’autres n’ont décelé aucun effet. Peu d’informations sont disponibles sur la survie des colonies sur le long terme dans un contexte d’exposition à ces pesticides. Il est en effet difficile de déterminer à quel point ces molécules affectent les abeilles et plus largement leurs colonies sur le long terme.

 

Les principales critiques portées aux études antérieurs sur les néonicotinoïdes étaient que les expérimentations n’avaient pas été conduites dans des conditions d’exposition réalistes, similaires à celles retrouvées au champ. De plus, les études toxicologiques n’utilisaient ni des doses d’insecticides ni des durées d’exposition réalistes, ces doses et durées n’ayant jamais été réellement quantifiées alors qu’elles constituent deux paramètres clés pour établir des liens de cause à effet. Ces différents éléments d’incertitude ont été repris dans l’évaluation relative à la pollinisation, les pollinisateurs et la sécurité alimentaire, publiée en 2016 par la plate-forme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques.

 

Dans ce contexte de présomption d’effets négatifs avérés des insecticides néonicotinoïdes sur les abeilles, qui a conduit à l’interdiction de ces produits en France (loi du16 aout 2016 pour la reconquête de la biodiversité), deux articles scientifiques ont été publiés le 30 juin dernier dans le journal Science.

 

Tsvetkov et al. ont ainsi démontré qu’au Canada, en zone de production de maïs, les abeilles domestiques étaient exposées aux néonicotinoïdes pendant quatre mois, correspondant à la majorité de leur période d’activité et ce, à des niveaux significatifs malgré l’obligation faite aux agriculteurs d’utiliser des lubrifiants pour réduire les émissions de poussières contaminées en pesticides. Ils ont mis également en évidence que ces molécules, aux doses de terrain, avaient de nombreux effets négatifs préoccupants pour les colonies d’abeilles domestiques expliquant leur affaiblissement, et à terme leur dépérissement : une mortalité précoce des butineuses de 23% supérieure à celle des colonies non contaminées, une propension à l’essaimage combinée à une difficulté à élever une nouvelle reine réduisant le temps efficace de ponte et une perte au fil du temps de la capacité hygiénique de la colonie. Enfin, les scientifiques ont établi qu’en présence du boscalide, (un fongicide commun utilisé notamment en association avec certains insecticides), la toxicité de deux néonicotinoïdes, la clorthianidine et le thiamothoxam étaient presque doublée.

 

En conduisant plusieurs études de terrain en Hongrie, Allemagne et Royaume Unis pour évaluer les effets des insecticides néonicotinoïdes sur trois espèces de pollinisateurs, Woodcock et al. ont, quant à eux, démontré que l’exposition aux néonicotinoïdes a des effets majoritairement négatifs sur le potentiel reproductif interannuel des insectes étudiés et que même si les taux d’exposition aux néonicotinoïdes sont faibles, ils provoquent des impacts sublétaux susceptibles de diminuer la survie à long terme des populations. Des effets négatifs associés au traitement par la clothianidine ont été observés chez les ouvrières d’Apis mellifera, en Hongrie, conduisant à des colonies plus petites au printemps suivant avec un taux de déclin de 24%. Quant aux espèces sauvages Bombus terrestris et Osmia bicornis les auteurs ont démontré que l’exposition aux résidus de néonicotinoïdes, principalement ceux stockés dans les nids et découlant de la contamination environnementale généralisée, diminuait pour les premiers la production de reines et pour les seconds la production d’œufs. Ces différents impacts altérant le succès reproducteur des populations de pollinisateurs domestiques ou sauvages réduisent la capacité de ces espèces à établir de nouvelles populations d’année en année et pourraient expliquer leurs déclins, actuellement largement documentés. Par ailleurs, les résultats obtenus dans trois pays différents démontrent l’importance des facteurs spécifiques et locaux qui expliquent probablement les résultats discordants des études antérieures conduites dans un seul pays ou sur un nombre de sites réduit.

Scénarios de la biodiversité africaine – Anticipation du devenir de la biodiversité et des services écosystémiques et adaptation aux changement globaux

L’atelier régional dédié aux « scénarios de la biodiversité africains » est issu d’une proposition de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) et du Fonds français pour l’environnement mondial (FFEM), qui ont souhaité partager l’expérience du programme « Modélisation et scénarios de la biodiversité » de la FRB (voir, p.16). Cette proposition a suscité un vif intérêt de la part de nombreux acteurs issus du domaine de la recherche ou de la conservation de la biodiversité, qui se sont associés à la conception et à l’organisation de l’atelier. Cet événement est également parrainé par le gouvernement gabonnais et le gouvernement français. Durant trois jours, des conférences et des ateliers vont réunir des chercheurs, des décideurs, des gestionnaires de terrain et des acteurs socio-économiques intéressés par le devenir de la biodiversité en Afrique subsaharienne.

 

Télécharger le programme dans les ressources ci-dessous.

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